1827. pentier et au forgeron de la Mission de conduire sur-
Avni. le-champ ce canot et les objets qu’il contient à Hifo,
sous la sauve-garde des missionnaires; car ils allèguent
la longueur de la route, ses dangers durant la
nuit, et surtout la crainte d’être surpris et pillés par
les naturels. Quelques présens, et la promesse d’autres
plus considérables, les déterminent enfin, et ils
partent vers quatre heures. Le matelot Martineng
s’embarque avec eux, et sera chargé de la garde du
bot jusqu’au moment où il pourra le ramener à bord.
Cette embarcation était si petite et si frêle qu’elle nous
eût été à peu près inutile en cas de naufrage, et je ne
risquais rien à la sacrifier pour cet objet.
Par celte précaution, les travaux géographiques ,
les observations d’histoire naturelle sont désormais à
labri. Si UAstrolabe doit périr, il restera du moins
des traces honorables de son expédition et de nos
efforts. Déjà cette assurance adoucit quelque peu
l’amertume de mes regrets.
Pour user de notre dernière ressource, l’ancre qui
n’a plus qu’une patte est arrachée du fond de la cale ;
elle reçoit la petite chaîne; puis elle est portée et
mouillée avec les plus grandes précautions, et non
sans de grandes difficultés, dans le S. E ., à trente
toises du navire. On raidit la petite chaîne qui travaille
avec le petit cable, et notre arrière, jusqu’alors tant
exposé, est un peu mieux soutenu.
Toutefois la mer a beaucoup grossi ; une longue
houle, arrivant de FE. S. E . , entre dans le chenal,
et nous fait rouler bord sur bord, en menaçant à
chaque minute de nous fracasser contre les récifs. 1S27.
Sans un bonheur inespéré, nous ne pouvons pas nous Avril,
attendre à ce que la corvette puisse résister toute la
nuit, ainsi battue en travers par le vent et le courant.
Frappé de cette idée cruelle, et poursuivi par la
désolante perspective d’être pillé par les naturels à
notre arrivée à terre, je prends la résolution de sauver
encore parmi les objets du bord ceux qui nous seront
les plus utiles pour notre retour en France, lorsque
l’occasion se présentera de quitter File sur un navire
étranger, ou lorsque nous pourrons tenter sur la
chaloupe pontée une traversée à Port-Jackson, à la
baie des Iles ou à Timor.
Je fais préparer la yo le , et j ’y fais embarquer le
cylindre en fer-blanc qui contient les cartes déjà dressées,
les quatre montres marines, un cercle à réflexion,
les trois allas d’Horsburgh, de Krusenstern
et de d’Enlrecasteaux, les cahiers de dessins de
M. Samson; enfin, une petite caisse en fer-blanc renfermant
mon uniforme, mes instructions, les lettres
de recommandation des gouvernemens étrangers, mes
journaux et autres notes scientifiques; quelques petits
paquets composés de deux chemises pour chacun des
officiers. Huit hommes arment le canot, et M. Lot-
lin , à qui j ’en confie le commandement, est chargé
de remettre ces divers objets sous la sauve-garde des
missionnaires. Le jeune Read consent à lui servir à
la fois de guide et d’interprète. Il était déjà cinq heures
un quart du soir quand M. Lottin quitta l’Astrolabe.
Ce navire présentait alors un coup-d’oeil sinistre :