
 
        
         
		iS27*  
 A  out. 
 576 
 gère  brise  du  S.  E. ;  mais  le  courant  doublait  heureusement  
 notre  vitesse,  de sorte  qu’à  quatre heures  
 du  soir  nous  pûmes  donner  dans  le  canal  formé par  
 la côte de Mana-Souari et la  côte de Guinée. 
 Là nous  fômes  surpris par un  calme plat.  Je  tremblais  
 d’être  exposé  à  manoeuvrer  de  nuit  de  grosses  
 ancres  le  long  de  ces  côtes  acores.  Je  fis  armer  les  
 avirons  de  galère,  e t ,  favorisés  par  le  flot,  nous  
 atteignîmes  à  six heures  et  demie  le même mouillage  
 que  nous  occupions  trois  ans  auparavant,  au  fond  
 du  hâvre  de  Doreï.  On  doit  juger  de  la  satisfaction  
 que  nous  éprouvâmes  en  nous  voyant  solidement  
 affourchés  au  fond  de  ce  tranquille  bassin.  Nous  
 venions  de  terminer  un  travail  de  la  plus  haute  importance  
 ,  et nous  voguions  désormais  si  près  d’une  
 colonie  européenne,  de l’hospitalière Amboine,  que  
 nous  regardions déjà nos  épreuves  comme  arrivées  à  
 leur  terme.  Nous  comparions  surtout  avec  délices  
 notre position actuelle avec la perspective qui s’offrait  
 à nous lorsque nous échappâmes aux récifs de Tonga-  
 Tabou.  Aux  inquiétudes  d’une navigation  longue  et  
 péi’illeuse  succédaient  désormais  les  souvenirs  des  
 dangers  affrontés,  et  la  jouissance  d’avoir  accompli  
 de  grands  travaux  géographiques ! 
 Du moment  où nous donnâmes  dans  le chenal,  un  
 grand  nombre  de  pirogues  vint  nous  accoster  avec  
 confiance,  et les sauvages nous traitèrent comme d’anciennes  
 connaissances.  Malheureusement,  attirés par  
 la  simple  curiosité,  ils  ne  nous  apportèrent  pas  la  
 moindre espèce de vivres  frais, pas même un poisson. 
 Il  fallut  encore  nous  contenter  de  prendre  en  soupirant  
 notre  triste  ration  de  haricots  et  de  lard  salé  
 du  bord.  Sans  être  gastronome, j’al  toujours  trouvé  
 ce  régime  diététique  peu  agréable ;  et  cette  fois,  à  
 deux  doigts  de  la  terre  dont  la  brise nous  apportait  
 les  fraîches émanations,  après l’espoir dont je m’étais  
 flatté,  cet ordinaire me  parut  doublement  affligeant.  
 Par une sorte de  compensation,  toute la nuit,  comme  
 pour  célébrer  notre  arrivée,  les botes  emplumés des  
 forêts  voisines  de  notre  mouillage  ne  cessèrent  de  
 faire entendre  leurs mélodieux accens,  et nous  étions  
 pour  ainsi  dire  doucement  bercés  au  sou  de  celle  
 musique  aérienne. 
 1827. 
 Aoùl.