
 
        
         
		-   ;i 
 ^  ...  i; 
 1S27. 
 Mai. 
 ; î 
 152 VOYAGE 
 se  montrer  avec  lui  ;  mais  il  me  répondit  (jue  Singleton  
 était  aussi  retenu  par  les  insulaires,  cl cju’il ne  
 pouvait point paraître. 
 ,l ’étais  convaincu que  les naturels n’avaient  d’autre  
 but  que de nous  tendre  un piège  pour tuer quelques-  
 uns  de  nos  hommes.  Aussi  je  me  gardai  bien  d’y  
 donner.  L ’ancre  à  une patte fut sur-le-champ élongée  
 dans  le  S.  S.  E.  et  mouillée  par  douze  brasses;  de  
 sorte  qu’en  virant dessus ,  nous  nous  rapprochâmes  
 encore de Mafanga  de  près  d’une  demi-encâblure.  A  
 dix  heures,  au  moyen  d’une  embossure,  nous  présentions  
 le  travers  de  tribord  à Mafanga,  dont nous  
 n’étions  pas  éloignés alors  de  plus  de  cent  cinquante  
 toises.  Six  de  nos  prisonniers  se  montrèrent  sur  
 la  plage,  et  nous  hélèrent  de  nouveau  d’envoyer  à  
 terre  un  officier  et  quelques  hommes  sans  armes.  
 Mais  les  fusils,  les  baïonnettes  et les  lances des naturels  
 se  montraient  avec leurs  têtes  au-dessus  des  palissades  
 ,  et faisaient voir clairement  que cette démarche  
 couvrait un  piège assez grossier. 
 Las  enfin  de  voir  toutes  les  voies  de  douceur  
 échouer  contre  l’obstination  des  sauvages,  à  dix  
 heures dix minutes ,  je  réunis  dans ma chambre tous  
 les officiers,  commandans  de  quarts;  après  leur avoir  
 exposé  l’inutilité de mes  efforts  pour  en  venir  à  des  
 moyens  de  conciliation,  je  leur  déclarai  que  j’étais  
 décidé  à  commencer  immédiatement  le  feu,  si  leur  
 opinion était  d’accord  avec  la mienne. Cela  fait,  chacun  
 d’eux  émit  son  opinion,  en  commençant  par  le  
 plus  jeune,  M.  Pâris,  et  en  finissant  par  le  comÜE  
 L’ASTl lOLABE. 153 
 mandant  en  second  de  l’expédition,  M.  Jacquinot.  
 J’eus  la satisfaction  de  les  voir  tous  se  ranger  à  mon  
 avis,  quelques-uns même exprimèrent le regret qu’on  
 eût  aussi  long-temps  attendu.  En  cela,  ceux-ci partageaient  
 certainement mon  intime  conviction ;  mais  
 je  le  répète,  j ’avais  cru  qu’il  valait mieux pécher  pat-  
 un  peu  de  lenteur,  que  d’encourir  le  reproche d’une  
 précipitation  q u i,  aux yeux  de  quelques  personnes,  
 eût pu  être taxée  d’une  injuste sévérité. 
 A  dix  heures  et  demie  le  feu commença,  et  le premier  
 boulet  coupa en deux  une  des  grosses  branches  
 du  figuier de l’entrée. Les  naturels  postés  au-dessous  
 se levèrent précipitamment et  s’enfuirent en poussant  
 de grands  cris qui étaient répétés par les détachemens  
 placés sur les divers points de Mafanga. Ces cris aigus  
 et  perçans,  sortis  des  épais  et  sombres  bocages  que  
 dominaient  les  cimes élégantes de plusieurs  centaines  
 de palmiers,  produisirent un effet  bizarre et lugubre.  
 On  eût  dit  que  les  ames  des  morts  qui  reposaient  
 dans  ces  lieux  venaient  de  se  réveiller  pour  se  plaindre  
 de voir leur  dernier  asile  profané. 
 Du  reste,  aux  coups  suivans,  les  naturels  gardèrent  
 un  profond  silence.  La hauteur  et  l’épaisseur  de  
 leurs  remparts  suffisaient  pour  garantir  l’intéi-ieur  
 du village de  l’atteinte  de  nos  boulets ;  quelques-uns  
 seulement,  en rencontrant les  troncs des  cocotiers el  
 les  charpentes  des  plus  hautes  cabanes  qu’ils  mettaient  
 en pièces, produisaient un grand fracas  accompagné  
 de  quelque  dommage. Mais nos  efforts contre  
 les  palissades  devinrent  inutiles.  Les  sauvages  s’ac- 
 1S27. 
 Mai. 
 l’I.  XGlIl. 
 ;  5  ï - ¿ ¡ S 
 l - r 
 '  il  
 -P ,  ï\ 
 /■  I;