
 
        
         
		g'ucnt  par  un  go û t  et  une  odeur  fortement  prononcés ;  le  lala-  
 n ic r ,  qui  donne au.t  femmes  de T o n g a   de  légers  éventails pour  
 cliasscr  lo in  du  ch e f qui  dort  les  insectes  importuns ;  le vacois ,  
 avec  ses  bizarres  rejetons  ,  qui  d’un  seu l  arbre  font  cent arbres  
 issus d’une  tige  commune;  le   frêle hibiscus d o n t l’ écorce  g lu t i-   
 ncuse  s’étend  en  étoffes  immenses;  les  élégantes  fougères  dont  
 les  dessins  déliés  ornent  ces mêmes  étoffes ;  telles étaient les  r iches  
 productions de  la  nature dont  j ’étais  entouré  ,  et p a r -d e s sus  
 tout  ce la  sc  b a lan çait  majestueusement  le  c o c o t ie r ,  cet  
 arbre  bienfaisant  qui  désaltère  les  hommes  et n o u r r it  les  an im 
 a u x ,  qui  donne  à  ces  peuplades  une  huile  douce  et  suave  
 p ou r   la  p a ru r e ,  du  bois  p o u r   élever  les  maisons,  un  chaume  
 impénétrable  p o u r   les  c o u v r ir ,  et  des  cordes  pour  gréer  les  
 pirogues.  S o u v e n t ,  au milieu  de  ce magnifique  sp e c ta c le ,  fa vorisé  
 par  le  silence  des  b o is ,  je  me  suis  involontairement  
 lai.ssé  a lle r   à  des  rêveries  dont  les  heureux  mensonges  me  r e portaient  
 au  rtiilicu de ma  famille  et  de mes  amis, ca r  la  France  
 é tait  toujours  le  bu t  de  nos  p ensées , même  lorsque mille  émotions  
 nouvelles  venaient  nous  charmer  par  leur  v a r ié té ...  E t   
 p u i s ,  si  je  venais  à  songer  quelle  distance  nous  séparait  de  la  
 p a t r ie ,  par  combien  de  dangers nous  devions acheter  notre  re -  
 to u r ,  j’osais  à  peine  espérer  que  nous  reverrions  un  jo u r   notre  
 cher  pays ! 
 Quelques  cabanes  éparses  sous  les  arbres  servaient  de  demeure  
 à  un  très-petit  nombre  d’insulaires.  Lo rsque  nous  a r rivions  
 chez  ces bonnes  g en s ,  ils  nous  inv ita ient  fo rt  poliment  
 à  nous  asseoir  sur  la  natte  qui  Couvre  le  sol.  Les  jeunes  gens  
 montaient  aussitôt  au  sommet  du  cocotier  le  plus   prochain   ,  
 et en  faisaient  tomber  les  fruits;  ils  se  servaient  de  leurs  dents  
 p ou r   enlever  le  brou  tenace  et  filandreux  qui  entoure  la  n o ix ,  
 et  cette  opération  exige  beaucoup  de  fo rce  et  d’adresse;  p u is ,  
 lorsque  le bols  est mis  à  nu  ,  ils  enlèvent  adroitement  le  des.su.s  
 du  f r u i t ,  du  côté  de  la  pointe  ,  et  l’offrent  à  leurs  h ô te s ,  qui  
 n ’ont plus  qu’à  bo ire   la  fraîche  liq ueur. 
 Lorsque  nos  hôtes  avaient  montré  p our  nous  ces  aimable* 
 p ré ven an ce s ,  nous  les  en  récompensions  au  moyen  de  q u e lques  
 grains de v e r r e ,  et  certes  nous  nous montrions généreux  ;  
 aussi  ne  nous  la is saient-ils   p artir  qu’en  nous  engag eant  à  re v 
 enir   souvent  les  visiter. 
 Bien tô t  nos  promenades  durent  prendre  plus  d’extension  ,  
 c a r   les oiseaux,  effarouchés  par nos coups  de  fu s il,  avaient déserté  
 P an g a ï-M o d o u .  A u   moyen  de  la   marée  bas.sc,  qui  ne  
 laissait  sur  ce  r é c if  qu’un  ou  deux  pieds d’e a u ,  nous  passions  
 dans  les  petites  îles  voisines  ,  jusqu’à  ce lle  q u ’on  nomme  
 Onéata  ,  qui  offre  une  assez  grande  étendue.  L à   se  bo rnèrent  
 nos  courses  pendant  quelques jours ;  mais nos liaisons  avec  les  
 chefs  et  la   confiance  que  nous  avions  dans  les  insulaires  nous  
 inspirèrent  bientôt le  désir de mieux v o ir  le  pays et d’alle r   chez  
 les naturels  eux-mêmes  étudier  leurs moeurs  et  leurs  usages. 
 L e   ch e f  T ah o fa   m’engagea  un  matin  à  l ’accompa gner  sur  
 i ’îlc   O n é a ta ,  où  ses  gens  se  liv ra ien t  à  la  pêche  :  mon  ami  
 Lesson  consentit  à  être  de  la  partie ;  e t ,  nous  étant  fait mettre  
 à  terre  sur  P an g a ï-M o d o u   ,  nous  traversâmes  à  p ied  le  
 r é c i f ,  qui  en  ce moment  restait presque  à  découvert ;  la  nombreuse  
 suite  du  ch e f marchait  derrière  nous.  A r r iv é s   sur  une  
 p etite  île   où b r illa it  la  p lus   fraîche  v e rd u r e ,  nous fîmes h a lte ,  
 et  nous  v îm e s ,  aux  préparatifs  qui  se  fa isa ien t,  q u ’il  s’agissait  
 d’un ka va . C’ était  la première occasion  qui s’ offrait à nous d’être  
 témoins  de  ce t  acte  si  fré q u en t ,  e t ,  selon  les  circon s tan ces ,  si  
 solennel  quelquefois  dans  la   v ie   des  insula ires .  Jamais  ils  ne  
 se  dispensent  de  p rendre  cette  boisson  forte  le   matin  ;  et  si  
 quelques  graves  événemens,  comme  une  gu e r re ,  un  c o n s e il,  
 des  fu n é ra ille s ,  réunissent  les  n a tu re ls ,  l ’assemblée  débute  
 toujours p ar  un  ka va  ;  le  ch e f p r in c ip a l y   p ré s id e ,  et les droits  
 de préséance y   sont  réglés  avec  la   plus  sévère  étiquette. 
 Outre  le  g o û t naturel  des  insulaires  p our  la  boisson  extraite  
 du  kava ,  g o û t  qu’ils portent  quelquefois  à  un  excès  nuisible  à  
 leu r   santé,  des  idées  superstitieuses  s’attachent encore  à  la   racin 
 e  elle-même.  A   l ’instant oû nous jetions l ’an c re ,  la Tamaha,  
 OU  re in e -m è re ,  nous  envoya  par  un  exprès  une  grosse  racine 
 2 3’