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■ : M
1827.
juillet.
18.
On a encore fait du bois et de l’eau, et l’on a nettoyé
les murailles du navire en les frottant avec du
sable. Les naturels sont encore revenus dans leurs
deux pirogues, apportant quelques racines et de très-
petits cochons pesant au plus six ou huit livres. Mais
comme ils se montrent singulièrement exigeans dans
leurs demandes , les marchés ont été peu animés, et
ils ont été obligés de remporter avec eux la plus
grande partie de leurs provisions.
Enfin mes douleurs se sont sensiblement apaisées.
Pour la première fois, depuis soixante-douze heures,
j’ai pi'is quelques bouillons dans la journée, et dans
la nuit j ’ai dormi deux ou trois heures d’un sommeil
tranquille, symptôme infaillible d’un prompt rétablissement.
La journée a encore été agréable, à cela près d’un
grain violent qui a duré depuis deux heures jusqu’à
quatre. Je regrette fort ces journées de beau temps
qui auraient été si utilement employées le long des
côtes de la Nouvelle-Bretagne, mais il faut se soumettre
aux lois de la nécessité. Néanmoins je vois
avec plaisir mes douleurs apaisées, et je commence
à prendre quelques alimens fort légers. Il me reste
encore une lassitude extrême, un accablement général
dans toutes les parties du corps, et ce n’est qu’avec
peine que je puis risquer quelques pas sur le pont.
Le grand canot a fait un premier voyage à l’eau,
puis un second pour prendre du sable. En revenant
de celui-ci, il a ramené à la remorque le crocodile
poursuivi, dans la journée du dimanche lo , par nos
chasseurs, el dont M. Dudemaine a trouvé le corps
flottant à la surface de la mer dans le canal. M M. Quoy
et Gaimard ont voulu préparer cet animal pour le rapporter
en France, mais ses chairs étaient corrompues
et répandaient déjà une odeur infecte : nos naturalistes
ont été contraints de renoncer à leur projet, et se sont
contentés de faire prendre, par M. Sainson, le dessin
de cet animal, et de conserver sa tète dans l’alcohol.
Ge monstrueux reptile n’avait pas moins de douze
pieds trois pouces de longueur, des dents fortes et
acérées garnissaient sa large gueule, et son dos était
dans toute sa longueur,muni. d’une double arête
1827.
J iiillet.
d’écailles redressées qui formaient un véritable sillon
bordé de deux lames tranchantes. Les sauvages qui
nous tiennent compagnie depuis hier ont paru stupéfaits
en voyant le corps de ce monstre percé par
nos halles, et cette observation a dù leur donner
une haute opinion de la puissance des armes européennes.