
raifîtis paffés & foulés au prefToir pour en exprimer
les fucs. En Bourgogne , de même qu'en
Dauphiné , & dans quelques autres provinces, on
fait des eaux-de-vie avec des lies de vin , mais
elles y reftent pour la confommation des habitans.
Les eaux-de-vie étant, ainfi qu'on l'a dit , fujettes
à des droits confîdérables en pays d’aides,
on pris toutes les précautions poflibles pour
empêcher de les éluder, tant à la fabrication des
eaux-de-vie, que lors de leur débit & de leur
tranfport. En conféquence les bouilleurs, c’ eft-à-
dire , ceux qui fabriquent des eaux-de-vie , font
alfujettis, avant de mettre le feu fous la chaudière,
à déclarer la quantité qu’ils prétendent fabriquer ,
& la qualité qu’ils entendent leur donner $ car on
diftingue les eaux-de-vie (impies des eaux-de-vie
doubles ou rectifiées, & de l’efprit-de-vin. Us
font tenus de déclarer aufli les vins & autres boif-
fons qu’ ils ont chez eux , & de fouffrir qu’ils
foient marqués & vilîtés par les commis , à peine
de cinq cens livres d’amende, qui ne peut être ni
xemife ni modérée par les juges î & ils ne peuvent
difpofer de la moindre partie d’eau-de-vie , fans
qu’au préalable ils n’en aient fait déclaration. Te l
eft le précis des difpofitions des réglemens des 9
décembre 1687-, 26 janvier 1692 , & 30 janvier
1 7 1 7 . E ntrepô ts:
Dans quelques provinces , notamment dans les
paroifles des généralités de Paris & de Soiffons,
qui font lîtuées dans les trois lieues limitrophes de
la généralité d’Amiens , où les eaux-de-vie font
fujettes à un droit de quinze livres à l’arrivée ,
par barrique de vingt- fept veltes ou cent-huit pintes
ÿ ibavoit été défendu à tout marchand détailleur
d’eaii-de vie , par l’arrêt du confeil du 30 octobre
17 7 4 , de tenir en magafin des eaux-de-vie en
pipes , bulles , muids , demi-muids, quarts de
muids , & autres tonneaux 5 il leur étoit feulement
permis de s’approvilîonner en barrils de foi-
xante pintes & au-deffous. Mais fur les repréfèn-
tations faites par les négocians en gros qui four-
nifTent ces détailleurs , que la confommation de
l ’eau-de-vie pouvoit être gênée dans des paroilfes
confîdérables ou l’approvifionnement' fixé à foixante
pintes pouvoit être infuflifant, l’ârrêt du
4 mars 1775 détendit à une pièce de foixante à
foixante-dix veltes ou deux cens quarante pintes.
Cette faveur ne fut pas de longue durée. Un autre
arrêt du 23 janvier 1782 , rappellant les dif-
pofitions de celui du 30 oCtobre 1774 , en a de
nouveau ordonné l ’exécution. Ses motifs ont é té ,
que pendant l’année 1780 il avoit été confommé
douze mille veltes d’eau de-vie dans les villages
du Beauvoifîs , dont il n’ eft pas poflible , porte
cet arrêt , que l’univerfalité des habitans en ait
confommé la quarantième partie j d’où il réfulte
que le furplus a été yerfé en fraude dans la généralité
d’Amiens , où les droits font beaucoup
plus confîdérables que dans celles de Paris & Soif*
fons. A cette reftriCtion , l’arrêt aj'oute la condition
de n’avoir qu’un feul barril à la fois , & de
n’en faire la revente qu’ à pot & à pinte, ou autres
moindres mefures , & feulement pour la confommation
des lieux qu’habitent les débitans > à peine
de confifcation de l’eau-de-vie , & de cinq cens
livres d’amende.
Le tranfport des eaux-de-vie n’ eft pas affujetti à
moins de formalités. La déclaration du' 24 août
1728 , & différens arrêts du confeil de 1740 Sc
1743 , ont défendu d’enlever & conduire deà
eaux-de-vie, en barrils au-delïous de foixante pintes
, fans avoir déclaré au Bureau du fermier Te
nom , la demeure & la qualité des vendeurs &
des acheteurs , la quantité d’eau-de-vie vendue ,
le lieu de fa dellination , & fî c’eft pour être vendue
en détail , ou pour la confommation de l’acheteur.
D ’autres réglemens enjoignent à ce dernier, &
à toutes perfonnes indiltinCtement qui font venir
de l’eau-de-vie, de déclarer au moment de fon arrivée
en pays d’aides, fî elles entendent la vendre
en gros ou en déta il, ou l’employer à leur ufage.
A défaut de cette formalité , elles font dans le cas
d’être contraintes au paiement des droits de détail
de l’eau-de-vie qu’elles ont reçue.
Ceux qui expédient l’eau-de-vie font tenus, de
leur c ô té , de faire leur foumiffion, & de donner
caution folvable , de rapporter le certificat du
commis du lieu pour lequel l’eau-de vie ell deftf-
née , portant qu’ elle y a été déchargée véritablement
, après avoir acquitté les droits d’entrée qui
étoient dûs. Si l’eau-de-vie a dû palfer en pays
étranger, il faut rapporter la quittance des droits
de fortie du dernier bureau de la frontière. Des
eaux-de-vie enlevées fans remplir ces formalités ,
deviennent fujettes à confifcation avec cinq cens
livre d’amende.
Jufqu’ en 1746 il étoit dû cinquante quatre îiv.
par barrique de vingt-fept veltes d’eau-de*vie entrant
dans la généralité d’Amiens, & pour les autres
vailfeaux à proportion , foit que cette liqueur
fût deftinée pour des marchands revendeurs &
autres perfonnes î & les marchands en gros étoient
autorifés à prendre un crédit de deux mois pour
le paiement de ces droits , en conformité des arrêts
& lettres-patentes du 30 mai 1724. A l’époque de
1746 il s’éleva une conteftation entre les marchands
en gros , les détailleurs d’eau-de-vie, & le fous-
fermier des aides , qui faifoit le commerce d’ eau-
de-vie. On reprochoit à ce dernier d’accorder la
remife du droit annuel de neuf livres douze fo ls,
aux détailleurs & débitans qui s’approvifîonnoient
à fon magafîn, & de vouloir envahir, par ce moyen
le commerce exclufîf de cette liqueur, au préjudice
de plus de trois mille particuliers , dont le
droit de cinquante-quatre livres étoit rigoureufe-*
ment exigé. Cette conteftation fut terminée par
l'arrêt du confeil du 27 mai, q u i , en maintenant
le fous-fermier des aides des généralités d’Amiens
& de Soiffons dans la faculté de faire ven ir , vendre
& débiter telle quantité d’eau-de-vie qu’il ju-
geoit â propos, lui fit défenfe de remettre le paiement
du droit annuel aux détailleurs qui fe fourni-
roient d’eaux-de-vie dans fes magafins & cantines,
fous telles peines qu’il appartiendroit.
Un autre arrêt du zz novembre 1777 a confirmé
ces difpofitions , en y ajoutant que le droit de
cinquante-quatre livres feroit partagé en deux parties
i Tune de trente-neuf livre s3 qui feroit payée
par lés détailleurs à mefure de leur confommation
feulement, & l’autre de quinze livres , qui feroit
acquitté par les marchands en gros & autres, dès
l'arrivée des eaux-de-vie , fans pouvoir prétendre
aucun crédit 3 nonobftant les lettres-patentes du
•30 mai 1724. Il fut en même tems expédié des
lettres-patentes 3 adrefifées à la cour des aides de
Paris ; & elles y furent enregiftrées le 6 février
1778.
Nous ne devons pas omettre de dire que , fui-
vant la déclaration du 9 décembre 1687 3 il eft
défendu de faire aucun mélange d'eau avec de
l ’eau-de-vie , à peine de mille livres d’amende
pour la première fois 3 & du quadruple en cas de
récidive. Cette déclaration ordonne aufli que le
double des droits qui ont lieu fur les eaux-de-vie
fimples, fera levé fur les eaux-de-vie reélifiéeSj &
le triple fur l’efprit-de-vin.
C e s dernières difpofitions ont été confirmées
par des lettres-patentes du 13 février 1782. Et
pour conftater les différentes qualités des eaux-de-
vie , elles ont ordonné que la vérification en feroit
faite dans tous les pays d’aides , par l'aréo-
metre ou pefe-liqueur j inventé par le fieur Cartier
, & dont l’ ufage , d’après le rapport ée l’académie
des fciences , a précédemment été^prefcrit
parles arrêt & lettres-patentes du 3 août 1771.
Q u’en conféquence , l’eau-de-vie dans laquelle le
pefe-liqueur enfoncera jufqu’au vingt-deuxieme
degré exclufivement , fera qualifiée eau-de-vie
fimple ; celle où il s’enfoncera depuis & compris
le vingt-deuxieme jufqu’au trcnte-quatrieme degré
exclufivement, fera déclarée eau-de-vie double ou
rcétifiée 5 & celle où il s’enfoncera depuis & compris
le trente-quatrieme degré & au aeffus 3 fera
réputée efprit de vin. La cour des aides, par fon
enregiftrement des lettres-patentes de 1782 , a
impofé la condition, que la vérification des eaux-
de-vie 3 par l’ aréometre, ne pourrait être faite par
les commis , qu’après qu'elles auront été ramenées
au dixième degré au-deffus de la congélation
du thermomètre de Réaumur ; circonftance dont
ils feront tenus de faire une mention expreffe dans
leurs procès-verbaux.
Pour entendre cette claufe, il convient de donner
quelques notions de l ’aréometre & de Ton
aCtion.
L ’aréometre eft un infiniment en argent, d’une
forme ronde de deux pouces de circonférence,
allongée & terminée en pointe. Il eft furmonté
d’un tube cylindrique , formant une échelle dont
les degrés font en progreflion arithmétique.
Le propre de l’aréometre eft de nager perpendiculairement
dans les fluides , en s’y enfonçant
plus ou moins fuivant leur denfîté y"de façon que
îe degré de cet enfoncement détermine la pefan-
teur fpécifique des différentes liqueurs.
La graduation de l'aréometre comprend trente-
trois degrés. Le premier, qui eft le n°. i o , indique
l’eau-de-vie pure j les autres font pour le
vin & les liqueurs fpiritüeufes. '
Comme tous les corps font fournis aux effets
de l’ air qui les environne , de'même les liqueurs
en reçoivent une imprelfion fenlîble. Le froid , en
les condenfant, augmente leur pefanteur fpécifique
j la chaleur, au contraire , qui les raréfie, les
rend plus légères. Il a donc fallu fixer le degré de
température où elles doivent être ramenées lors
de leur vérification, & c’eft le dixième degré au-
defTus de la congélation du thermomètre de Réaumur,
comme le prefcrit la cour des aides. l i e n
réfulte qu’une eau-de-vie ordinaire vérifiée dans
un air tempéré, & prife au dixième degré, biffera
enfoncer l’aréometre jufqu’au vingt-unieme degré}
au lieu que fi cette même eau-de-vie eft frappée
par le froid, & fe trouve dans une température de
glace , elle ne donnera à l’aréometre que vingt
degrés j fî elle eft échauffée jufqu’au trentième
degré de chaleur , l'aréometre descendra à vingt-
trois degrés.
Pour affurer d’autant mieux l’exécution des réglemens
concernant les eaux-de-vie , on a établi
à Paris un bureau chargé de toute la correfpon-
dance relative à cette liqueur, ,& dont les frais
font payés à moitié, par la ferme générale & par la
régie générale. Tous les directeurs des provinces
font tenus d ’envoyer, chaque mois, à ce bureau, un
état des eaux-de-vie enlevées de leur département,
pour une généralité étrangère à la leur ; ce bureau
en envoie l’extrait au directeur dans le département
duquel fe trouve le lieu de la deftination, &:
il fait vérifier fî réellement l’eau-de-vie y eft arrivée.
Dans le cas contraire , le directeur du lieu
de l’enlèvement eft chargé de pourfuivre le fou-
mifïionnaire ou la caution qui n’a point rapporté
le certificat de déchargement de l’eau-de-vie au lieu
déclaré, de la même manière qu’il en eft ufé pour
les acquits à caution.
Il eft une obfervation intéreffante à faire fur le
commerce des eaux-de-vie nationales, & fur les
encouragemcns qu’ il attend du gouvernement j en*
couragemens fans lefquels il feroit bientôt anéanti.