
confiance les pteferve du plus affreux défefpoir.
11 faut donc , je le crois , s'en tenir à ces vieilles
idées d'humanité , que le tems & les opinions de
tous les pays ont confacrées 5 & l'on doit fe défier
de cét efprit de raffinement , qui , en faifant
connoître quelque nouveaux rapports dans les affaires
d'adminiftration , entraîne plufieurs'personnes
à préjuger, que fi l'on avoit vu tout ce qu'elles
^perçoivent , rien de ce qui eft ne fubfifteroit ;
mais elles feroient bien plus frappées des motifs
qui ont fixé les opinions communes , s'il leur étoit
poffible de les découvrir aujourd'hui pour la première
fois.
Il eft 3 fur cette matière , des queftions moins
générales , mais plus fufceptibles de doute. Ne
vaudroit-il pas mieux 3 par exemple , donner aux
malades des fecours chez eux , que de les -traiter
dans une maifori publique ? C e t ufage eft parfaitement
applicable à tous les lieux d'une petite étendue
j mais dans les grandes villes , on ne pourroit
remplir ainfi les devoirs de la charité , à moins
d’une dépenfe infiniment plus confidérable. L'on
voit que dans une maifon bien réglée 3 telle que
l'hofpice de charité de St-Sulpice, le foin complet
de cent vingt-huit malades n’exige qu'un médecin,
un chirurgien, un aide externe, quatorze foeiirs de
la charité , y compris celles qui dirigent l'apothi-
cairerie, deux infirmiers, & trois infirmières : ce
nombre , comme il eft aifé de le voir , n'a aucune
proportion avec Celui qu'exigeroit le foin de ces
mêmes malades , s'ils étoient placés chacun dans
leurs réduits , & à une grande diftance les uns
des autres.
On pourroit ob fer ver encore, que, faute d'un
nombre fuffifant , ou de foeurs de la charité , ou
d'autres perfonnes animées également par l’efprit
de la religion , il faudroit néceffairement employer
des gardes mercenaires , fans furveillans, fans motifs
intérieurs , qui les attachaient conftamment
à leurs devoirs. Enfin, dans une maifon publique,
le médecin, Je chirurgien font foutenus dans leurs
travaux par l'amour de la réputation , & cet aiguillon
ne fubfifteroit point, fi l’on exigeoit d'eux
des foins obfcurs , & dont les effets feroient inconnus.
Je conviens cependant, q u e , par une négligence
extrême, on pourroit rendre un lieu d’hof-
pice tellement funefte , que les fecours les plus
épars & les plus infuffifans mériteroient la préférence
.5 mais il n'eft point d’établilfçment qùi put
foutenir aucune efpèce de parallèle , des qu'on lp
conficjéreroit dans un état abfolu de défordre.
Les hôpitaux qui fervent d’afyle aux fimples in=-
digens, à l ’âge où ils font devenus incapables de
travail j pourroient être beaucoup plus facilement
remplacés par des fecours annuels j cette claflfe
d'infortunés n’a pas les mêmes befoins que les malades,
& il fe ghffe ijn plus grand nombre d'abus
dans les hôpitaux deftinés â la retraite des pauvres
encore valides. L'âge & l ’épuifement des forces
Pas accompagnés de lignes extérieurs auffi
diitinéfs que la maladie, les adminiftrateurs peuvent
plus aifement fe laiffer aller à la proteétion »
1 a reconnu des vices de ce genre dans l'/td-
pitaL général de Paris 5 mais s'il eft du devoir des
miniftres du roi , de veiller fans relâche à l'obfer-
vation exaéte des règles établies dans tes hôpitaux,
il ne leur eft pas permis de les rendre plus févères :
ces difpofitions paroiflent dures quand elles font
ifolées, & 1 on ne pardonne au gouvernement lé
retranchement des aétes de charité mal entendus,
qu autant qu il paroît occupé d'étendre , d'une
autre.manière , les foins de fa bienfaifance.
Entre tous les établilfemens dûs à l'efprit d'hu-
manite , ceux dont l'utilité eft la plus mêlée d'in-
conyéniens , ce font, à mes yeux , les maifons
deltinees a fervir d'afyle aux enfans abandonnés ;
cette louable inftitution a empêché , fans doute ,
que des etres dignes de compaffion , ne fuffent la
viélime des fentimens dénaturés de leur parens ;
mais infenfiblement on s'eft accoutumé à envife-
ger les hôpitaux d enfans trouvés , comme des
maifons publiques, où le fouverain trouvoit jufte
de nourrir & d entretenir les enfans des plus pauvres
d entre fes fujets $ & cette idée , en s'étendant,
a- relâche, parmi le peuple, les liens du devoir
& ceux de l'amour paternel.
L abus groffit chaque jour , & (es progrès em-
barrafferont un jour le gouvernement 5 car le re*
mède eft difficile , enn'employant que des pallia-1
tifs , & les partis extrêmes ne feroient approuvés,
qu au moment où le défordre arriveroit à un excès
qui frapperoit tous les yeux. Cependant on nés
peut fe défendre d'un fentiment pénible , en ob-
fervant que 1 augmentation des foins du gouvernement
, pour fauver & conferver cette race abandonnée,
diminue.les remords des parens, & accroît
chaque jour le nombre des enfans expofés. L ’on
tranfportoit à Paris , chaque année , deux mille dé
ces enfans, expédiés, comme une marchandife, de
différens lieux , où il ne fe trouvoit point d'éta-
bliffemens autorifés à les recevoir jces enfans, dans
la proportion de neuf fur dix , périffoient. pendant
là route , ou peu de jours après leur arrivée : i l
n etoit pas pofljble de prendre connoiffance d'une
pareille violation des droits de l'humanité , fans
chercher à y porter remède. L e ro i, fur le compté
que je lui en rendis , défendit ces tranfports cruelè
par un arrêt de fon confeil , & fa majefié p r it, en
même tçrns , des précautions pour faire recévoit
ces enfans dans les maifons de charité, voifines du
lieu où ils étoient furpris entre les mains des voituriers.
11 eft. jmpoffible de ne pas fentir la jûf-
tice de ces difpofitions j cependant on éprouve
déjà que la néceffité où l'on s'eft trouvé d'ouvrir
de nouveaux afyles aux enfans abandonnés , en
augmente le nombre. Je l'avois prévu j mais entré
différens
différens maux , on ne pouvoit balancer à éloigner
, avant to u t , le facrifice annuel de tant d’innocentes
vi&imes.
Je ne faurois trop recommander , àcetteocca-
fion , de fuivre de plus en plus un ufage reconnu
généralement aujourd'hui pour le meilleur , c'eft
de faire nourrir ces enfans dans les dampagnes j
les lieux où on les réunit en trop grand nombre
deviennent de véritables tombeaux , & par l’in-
(uffifance d’ une tutele trop étendue t • & par les
dangereux effets de la corruption de l'air.
En eonfidérant tout ce que je viens de développer
fur l'accroiffement fucceffif du nombre des
enfans expofés , je ne puis m'empêcher d'inviter
les curés & tous les miniftres de l’églife , à redoubler
de z è le , pour détourner, par leurs inf-
tru&ions , de ces crimes fecrets , contre lefquels
les Ioix ont fi» peu de pouvoir. C'eft dans ces mo-
mens, entre tant d'autres, qu'on fent combien le
fecours de la religion eft néceffaire au maintien de
l'ordre public : c'eft bien peu connoître l’imper-
feétion de tous les moyens d'adminiftration, que
d'être indifférent à ce puiffant reffort ! L'homme
éclairé peut aimer la vertu pour elle-même } mais
la claffe nombreufe des fiommés , dépourvue des
•fe.co.urs de l'éducation } & déconcertée (ans ce(fe
par la mîfère de fon é ta t, a befoin 4 ’être foutenue
par une idée rapide du bien & du mal , & par un
fentiment de crainte & d'efpérance qui la contiens
ne au milieu des ténèbres.' Philofophes de notre
fiècle , contentez-vous d'avoir concouru à dégager
la religion des préjugés d'une dure intolérance
j vous alitez un grand to r t , fi vous voulez davantage
: laiffez , laififez aux hommes , & le frein
le plus falutaire , & la plus confolante des pen-
fées.
HUILES. D roit des huiles 8c fayons. Il ne
doit être queftion ici que du droit qu'on appelle
droit des huiles ; c'eft unç irppofition à laquelle
cette denrée a été aftujettie au commencement de
ce fiècle, &% qui, long-tems, a fait l'pbjet d'une ferme
particulière, féparée de la ferme générale. Elle
a des principes & une jurifprudence particulière.
Nous allons fuivre ce droit depuis fon établi f-
fem en to n verra combien un impôt mal conçu, &
gauchement combiné éprouvé de variations &
d'incertitudes. I] fera également curieux d'examiner
comment l'impofition du droit fur les huiles ,
de laquelle les produits & les effets n'étoient d’abord
vus qu'en maffe & confufément, s’ eft étendue
j comment elle a été aggravée &; perfectionnée
par le travail de la finance , & enfin .cqmbien
il faut de foips & de mefures, pour empêcher que
i’aétion du percepteur ne foi.t fans çeffe arrêtée &
contrariée par la iréaétion du redevable.
JL'origine du djoit de la ferme des huiles ne re-
i 7in une es. Tçmç II,
monte quJâ Tannée 170j , tems malheureux , où
les befoins de l'Etat & Tépuifement des finances,
faifoient chercher des reftources dans la création
de toutes fortes de charges , revêtues d'attributions
& de privilèges , dont le poids retomboir
fur le peuple. On croit devoir rapporter une partie
de l'édit primitif qui a établi ce droit, afin de faite
connoître à la fois les prétextes de fa création, &
les lieux où il devoir fe percevoir.
M Louis , par la grâce de Dieu , &rc. Salut. Le
>» commerce des huiles étant l'un des plus confia
« dérables de notre royaume , rien n'eft plus im^
» portant pour l'entretenir & l'augmenter , que
» de veiller à ce qu'elles foient façonnées avec
» tout le foin & l'attention néceffaires pour en
» rendre la qualité meilleure & plus parfaite,
w-Pour cet effet , nous avons réfolu .de créer &
*> ériger en titre d'office, des contrôleurs , ef-
« fayeurs, vifiteurs defdifes huiles , tant pôur nor
*> tre bonne ville de Paris , que pour les principa-
” les villes de notre royaume où lefdites huiles
« font amenées, & fervent de magafins pour la
« fourniture de tous nos fujets ; à quoi nous nous
n portons d’autant plus volontiers , que la créa-
» t.ion defdits offices , tant utile au public , nous
•? produira un fecours pour les dépenfes préfentes
*> .de la guerre. A ces eau fes , nous avons par le
prêtent éd it, perpétuel & irrévocable , créé 8c
« érigé , créons & érigeons en titre d'office &
m héréditaire, cent offices de jurés, contrôleurs,
*> eflayeurs , vifiteurs de toutes fortes d'huiles ,
» pour être établis dans les villes & fauxbourgs
» de Ly on, Dijon , Rheims , Châlons , T ro y e s ,
Amiens, Abbeville , Soiffons , Metz , Greno-
» b le , ^larfeille, A ix , Rouen, C a en , Alençon^
« Ilennes , Nantes , Saint-Malo , la Rochelle ,
»» Bordeaux, Montauban, Poitiers, T ou rs , An-
” gers, le Mans, Bourges, Tou loù fe, Montpel-
»9 lie r . Moulins, Riom, Clermont, Angoulême,
»j Orléans & Chartres , en nombre fuffifant, &
>9 ainfi qu’il fera fixé par les rôles que nous ferons
99 arrêter en notre confeil pour la finance defdits
99 offices j lefquels officiers contrôleront, eflaie-
99 ront & vifîteront toutes les huiles qui feront
99 amenées dans lefdites villes & fauxbourgs, tant
99 par eau que par terre, fans aucune exception 5
9» à l'effet de quoi nous voulons qq'ils aient des
99 bureaux établis dans lefdites villes , ès lieux les
99 plus commodes pour la facilité du commerce ,
99 dans lefquels les voituriers , marchands & par-
99 ticuliers à qui les huiles, appartiendront, feront
99 tenus de faire leur déclaration de la qualité &c
93 quantitç des huiles qiii leur feront amenées , ou
99 qu'ils feront venir dans lefdites villes , fait par
99 eau QU par terre, & de payeriez droits ci-après
39 réglés , avant qu’ils puiffent les faire entrer,
99 ferrer ni encaver , le tout à peine de confifca-
93 tion , & de trois cens livrés d'amende pour
«? chacune contravention , applicable , moitié