Les dé (ordres que cette forme de vente favori-
foie, étoient en grand nombre; pour les faire ceffef,
Philippe de Valois nomma, par Tes lettres patentes
du 10 mars i $41, des commilfaires quJil chargea
de fe rendre dans les différentes provinces du royaum
e , pour y établir des greniers, 8c y faire les
règlemens qui leur paroîtroient propres à faire
affilier au gouvernement, tout l’avantagequ’ il devoir
naturellement retirer de ce nouvel ordre de
chofes.
L’hiftoire ne nous ayant tranfmis aucun réfukat
du travail de ces commilfaires, il y a lieu de pré-
lumer qu’après avoir placé des greniers dans-tous
les lieux où ils le jugèrent à propos , ils indiquèrent
aux habitans de chaque poroiffe où ils
devroient à l'avenir faire l'achat du fel de leur
confommation, & qu’ ainfi-ils formèrent pour chaque
grenier une forte d’arrondiilement, ou reffort
particulier.
Ces arrondiffemens, quoique formés avec peu
de précifion , fe font néanmoins maintenus dans
leur état primitif jufqu’en 1725 ; fur ce qu'on re-
préfenta alors au confeil,qü’cn général iis" étoient
mal compotes , il ordonna de les réformer. Cette
opération, véritablement utile , fut exécutée, tant
pour les directions d’Alençon, Amiens, Angers ,
C aen, Je Mans , Rouen, & Tours , que—pour
une portion de celle de Bourges ; mais elle ne fut
point étendue aux autres départemens des grandes
gabelles ; en forte que dans - ceux-ci les greniers
ont encore les mêmes refforts que ceux qui leur
ont été aflignés en 1342.
11 feroit cependant fort à défiler que la réforme
importante commencée en 172-5, & depuis abandonnée
, fut reprife & portée au point de perfection
dont elle eft fufceptible. Pour arriver à ce
but , il conviendroit d’examiner, s’il n’exifte pas
dans les refforts des greniers non réformés de la
généralité d’Amiens, 8c de ceux des généralités
de Châîqns, Moulins, Orléans, Paris & Soiffons,
quelques paroiffes auxquelles il feroit plus commode
& moins difpendieux de s'approvifionner
4e fel à crautres greniers. C e travail feroit fans
doute d’autant plus pénible qu’il faudroit une très-
grande attention pour parvenir à confervër a chaque
grenier j un reffort d’une étendue à-peu près égale
à celle dont il jouit aujourd’hui. Mate on, trou-
yeroit la récompenfe de ce foin , dans 1^ fatis-
faétion de ne plus entendre les habitans d’un grand
nombre d.e paroiffes, fé plaindre de ce que l’ on
exige qu’ils aillent chercher du fel à cinq ou lîx
Jieues de chez eux/tandis qu il exifte à une dif-
tance infiniment moindre , un grenier où ils pour-
j-o’ient s’approvifiopner à moiiis de frais, 81 avec
plus de convenance.
On ne trouve, au furplus, ni dans les greffes des
greniers , ni dans ceux des cours des aides , au-
puns vçftigçs des ordonnances que les coramtffaires
furent autorifésù rendre en 1342 ; en forte
que i'arrondiffement de chacun des grèn;ers non-
réformés, en 1725 , ne porte que fur l’ufage dans
lequel fo n t, depuis un tems immémorial , les
habitans d’y lever le feLnéceffaire à leur confom-
mation.
Par un privilège particulier à la Bourgogne ,
les greniers de cette province n’ont point d’ar-
rondiffement déterminé Tout particulier peut
s’approvifionner de fel où bon lui femble 5 il fuffit
pour qu’il fe trouve à l'abri de tout reproche
de contravention , que lorfqu’il eft rencontré avec
du fel, il juftifie, par la repréfentatipn d’un bulletin,
qu’il la levé dans un grenier. Cependant, les ju-
rifdi&îons des gabelles ont en Bourgogne, comme
dans les autres provinces du pays de gabelles, des
refforts très - diftinéls les uns des autres ; mais
comme on ne fuit aucunes des règles relatives ,
foit à l’impôt, foit à la vente volontaire , l’étar
bliflement de ces refforts ne produit d’autre effet
que d’empêcher qu’il ne s’élève des conflits entre
les diverfes jurifdi&ions.
Les greniers qui exiftent aujourd’hui dans le
pays de grandes gabelles, ont été long-tems di-
vifés eh greniers proprement dits, & en chambres
à fel.
On appelloit greniers } ceux dans lefquels il fe
trouvoit une jurifdi&ion j & chambres à fe l, ceux
qui , en railbn de ce qu’il n’y avoit été particulièrement
établi aucuns juges, étoient dans la
dépendance d’un grenier. Cette ciiftin&ion fubfîf-
toit à l’époque de la publication de l’ordonnance
du mois de mai 1680, & elle avoit été maintenue
par l’édit du mois de Janvier 1685, qui
avoit réuni aux éleétipns , les juiifdidhons des
greniers établies dans tous, les lieux où il exiftoit
des fièges de- la première efpèce.
L’édit du mois d’oéiobre 1(594 * après avoir
ordonné que les jurifdi&ions des greniers a fe l
feroient défunies des élections, créa de nouvelles
jurifdiétions , tant dans les greniers où l’union s’é-
toit effectuée /que dans ceux qui j'ufqu’alors n’a-
voient été connus que fous le nom de chambres
à fel ; par fuite de cette opération , fur laquelle
on n'eft pas revenu depuis , il n’ exïfte plus'aujourd’h
u i, dans le pays de grandes gabelles, que
les çhambtes à fel de la province de Bourgogne,
qui fe trouvoient d’une trop foible importance
pour qy’iï fut poflible de lès ériger en greniers.
C ’eft par une fuite de la* police obfervée dans
les greniers , pour âflurer l’entier exercice du privilège
excliifif qui conftitue la ferme des gabelles,
qu'on a diftingué les greniers d'impôt, les greniçrs
dé vente volontaire, 8c les greniers mixtes.
Les premiers font fitués.à la proximité des provinces
exemptes ou rédimées, & forment pue
ligne
ligné circulaire qui environne le pays de gabelles.
1
•Les greniers mixtes font fîtués à la proximité
de cette ligne , qu'ils fortifient, en quelque forte.
Les greniers de vente volontaire fe trouvent
dans l’intérieur.
Quoiqu’ à l’époque de la publication de l’or"
donnante du mois de niai 1680, il éxiftât un grand
nombre de greniers mixtes, cependant il n’y en
eft pas fait mention.
Les titres cinq & fept qui ont dénpmîïfé les
greniers de vente VQlontaire, 8c ceux qui feroient
aflujettis à l'impôt, en ont à la vérité rangé quel-.
ques-uns dans ces deux clafles : ce qui femble avoir
annoncé qu’ils feroient en partie de vente volontaire
& en partie d'impôt. Mais il n’a pas été
parlé de tous lés greniers mixtes , & plufieurs de
ceux-ci, ont mal-à-propos été dénommés comme
greniers d’impôt, dans le titre fept de l’ordonnance
de 1680. ; Ù-, 1 ■
Plufieurs greniers 8c chambres à fe l, ayant été
déchargés de l'impôt, p&r l'édit du mois d’avril
1667, par les lettres-patentes du mois de mai fui-
vant, & par l’édit du mois de feptembre 1668,
ainfi que les habitans des chef- lieux, & de quelques
paroiffes, d’un aflez grand nombre de greniers
, c'eft une erreur du réda&eur de l ’ordonnance
de 1680 , d'ayoir placé ces greniers 8c ces
lieux dans la clafle de ceuxvqui font entièrement
fournis à l’impôt.
Il a d’ailleurs été établi, depuis 1(580, plufieurs
greniers ; on a fait différens changemens dans l’ar-
rondiflement de ceux qui exiftoient alors. Ainfi
l ’on n-auroit qu’une connoiflance imparfaite des
greniers qui fubfiftent aéhielletnent, fi l’on ne con-
fnkoit que l ’ordonnance de 1080. Mais comme les
édits 8c arrêts qui ont opéré ces divers changemens
font en trop grand nombre pour être rap^
pelles ici , on fe contentera d’ajouter à la fin de
cet article, l’état des greniers, foit de vente volontaire
, foit d’impôt, foit mixtes , actuellement
ex'iftans, eti indiquant la date & la napure du titre
4e leur établiflement.
§. IL
D u p r ix a u q u e l l e f e l f e v e n d , dans chacun
d e s Gr en ie r s de g ran d e s g a b e lle s .
Le prix du fel vendu dans les greniers établis 1
par les commiffaires de Philippe-de-Valois, en
1342, a longtemps été déterminé par la feule
réunion du droit de gabelle, au prix marchand
du fel ; prix qui comprenoit le prix d’achat fur les
- marais, les frais de voiture, & les droits payés •
«n route.
•Ce prix marchand éprou.voit chaque année une
variation relative à l’état dçs récoltes, 8c à celle
Finances. Tome I I .
que Péloignement plus ou moins grand des marais
falans, la difficulté des chemins, occafionnoienc
dans les frais de voiture. D ’ailleurs, il étoit facile
aux .marchands de fe concerter entr’e u x , pour
le prix marchand du fe l, & le tenir à un taux
füpérieur à fa valeur naturelle.
Dans la vue de remédier à ces abus, le gouvernement
ordonna d’abord, que le prix marchand
du fel feroit fixé par les officiers des greniers ,
chargés de .bien s’aflurer du prix du fel fur les
marais, & du véritable objet des frais de voiture.
Poftériôurement on établit, que lorfqu’un marchand
offriroit de donner Ton fel à un prix inférieur
à; celui qui étoit fixé, il feroit reçu à vendre,
par préférence à to'us autres/à moins que ceux
qui fe trouveroient en tou r , ne- coofentiflent à
vendre au même prix de rabais /enfin il accorda
aux officiers municipaux de plufieurs v ille s , à
titre d’o& ro i, le privilège d’approvifîonner les
greniers établis dans ces villes. Mais ces diverfe^
précautions, loin de produire les bons effets que
i’on en avoirr attendus/firent naître au contraire
une multitude de nouveaux abus.
Il fut reconnu que les officiers des greniers fe
prêtoient fouvent à régler le prix du fe l, à un
taux favorable aux marchands, 8c que les villes
qui avoient obtenu le privilège d’approvifionner
leurs greniers, en avoient vendu l’exercice à des
particuliers dont les abus étoient exceflifs. Pour
faire cefler ces défordres , Louis X I I , par une
ordonnance du 23 mai 1500 » révoqua les con-
ceflions faites aux villes ; ordonna que les généraux
des finances, chacun dans fa généralité , taxe-
roient, pour chaque grenier , le prix marchand du
fe l, eu égard à fa fituation, 8c que les prix ainfi '
fixés ne pourroient être crus, ni hauffés , mais
feulement diminués par les rabais, conformément
aux anciennes ordonnances.
Sous François premier, on fe flatta d’arrêter
plus sûrement les monopoles, en réglant par l’ordonnance
du premier juin 154?, que les droits de
gabelles feroient à l’avenir perçus fur le fel , à
l'inftant même où il feroit enlevé des marais. C e
changement ayant produit des inconvéniens qui
n’avoient pas été prévus, ce prince rétablit par
^ordonnance du 6 décembre 1544, les chofes dans
leur premier éta t, en preferivant l’exécution 'de
ce qui avoit été ordonné le 23 mai 1500.
Henri II adopta fur ce point un plan tout différent
de c,elui que fes prédéceffeurs avaient fuivi.
Le 4 janvier 1548, il régla que le fournifîement
de chaque grenier feroit adjugé au rabais, & parvint
ainfi à réduire dans chaque grenier le prix marchand
de trois livres fix fols huit deniers par muid ,
au-deflous du taux auquel il avoit été fixé le pre*
mier oétobre I 547*
Les troubles qui agitèrent le royaume pendant