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régies, à des réparations , à l'incertitude S c a
l-inégalité-des récoltes.
Il paro.ît qu'en 1310 les fonds fe vendoient au
denier vingt, en 1 541 au denier trente. Cependant
à la première de ces époques, Y intérêt de l'argent
étoit a douze pour cent avec hypothèque } Si dans
la fécondé, à huit Sc. un tiers pour cent5 en i;6 o
à fix & fept huitièmes pour cènt.
On a vu , depuis que l'argent eft à cinq pour
c e n t , les terres retomber au denier vingt & au-
deffous} elles fe vendent aujourd'hui ( en 1717 )
du denier vingt-cinq au denier trente-cinq. Il „ne
pàroît pas que le rapport entre^ le produit de
l'argent Sc Je produit des terres ait e u , dans cét
cfpace'de temps, auciln terme fixe.
On en peut dire de même du rapport entre le
prix du prêt hypothécaire, Sc le prix du,prêt
marchand 5 car en 1560 l'ordonnance de Charles IX
en fixant Y intérêt des rentes à fix 8c vingt-un , vingt-
quatrièmes pour cent ., :permit aux marchands
Y intérêt à, huit Sc huit vingt-quatrièmes ; ainfi la
différence étoit dlun & onze vingt-quatrièmes
pour cent', I
Aujourd’hui (en 17/4) l'argent eft réglé_par
la-loi à. cinq pour cent } les effets publics qui indiquent
le cours naturel de l'argent, s'achètent
fur le pied de quatre & demi & quatre pour cent ;
cependant le prêt du marchand fubfifte toujours à
fix pour cent. Il y a donc une différence, de pn
pour cent avec Y intérêt lé gal, &'d'iin Sc demi à
deux pour cent avec le ,cours naturel. Dès-lors
toute proportion eft évanouie-dans les rapports ,
fur-tout fi l'on fait attention à l'abondance-de l'ar-t
gent, à l'accroifiTement de la confiance par celui
du commerce, & par la tranquillité publique.
En 1785 les chofes font encore dans lé'même
état qu'en 1754 3 tant à l'égard de Y intérêt de l’ar-
gént, que pour le cours des effets publics, quoique
pendant ces trente années, le numéraire fort
augmenté d'un tiers , que le commerce & l’in-
duftrie fefoientfortétevnd üs ( V^oye^ N um é ra ire ).
C e qui a fouténu Y intérêt à ce taux, ce font les
emprunts multipliés du gouvernement, tant en
fon nom/ que par'Je'crédit des financiers & des
pays d'Étàts, & encorè là multitude d'affaires
dans lefquelles l'argent rapporte depuis neuf juf-
qu'à treize pour cent. Reprenons le fil du mémoire
de 1717.
11 paroît qu'en général la combinaifon de la
quantité d'argent offerte , avec.la quantité de l'argent
demandée , forme ce qu’on appelle le taux de
J‘intérêt, auquel la différence des furetés réelles
ou apparentes du prêt imprime, des nuances infinies.
Il s'enfuit que le prix de l'argent ne devroit pas
plus être fixé que celui des autres denrées , dont
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l'abondance ou la rareté règlent le prix j mais la
dureté & l’avidité des créanciers , Jes troubles
que leurs, rigueurs ont excité en divers États , la
facilité plus évidente de convertir l'argent en monopole,
à la faveur même des gros intérêts 3 que
toute autre denrée ; enfin les confeils de la charité
chrétienne ont engagé les légiflateurs à intervenir
dans uhe convention qui devoit être libre
dé fa nature.
La politique cependant connoiffant le danger
de donner des loix , que les hommes euffent in?
térêt de ne point exécuter, obligée d’en punir les
infraélions, & cherchant plutôt à guider les hom-
mes vers l'objet de la focieté qu'à les y contraindre,
a ,-dans.tous les tems, établi des fixations.générales
fur les convenances les plus ufitées, entre les
prêteurs Si les emprunteurs.
Comme les furetés du prêt influent de leur côté
fur fon p r ix , & qu'il eft impoffible, à la légifla-
tion d'entrer dai)S;!les évaluations particulières ,
elle s'en eft tenue, a. calculer la fureté générale qui
confifte dans l'hypothèque réelle Sc dans la confiance
publique.
A rnèfure: que lès idées fe font'p'erfeéftonnées ,
on a remonté vers lès caiifes qui influoient fur le .
nombre des prêteurs & des emprunteurs d’argent,
on a reconnu qu’il dépendoit dé la plus ou moins'
grande inégalité dans la répartition des richêfîes
péçuriîàires ; que cette inégalité dépendoit de
r’abondaiice ou de la rareté du travail parmi le
peupîe’ j Sc cette abondance’ où cette rareté de
travail^, de la perfection de l’agriculture Sc de
rindüfttie , qui forment le fonds des revenus primitifs
dans un État j enfin , pour raffembler toutes
ces chofes , que cette abondance ou cette rareté
de travail tenoit à J’aClivité de la circulation , fruic
de celte du commerce; dont la production des
valeurs nouvelles eft le moyen , Sc la confomma-
tionJafin.
Divérfes caufes ont introduit, dans tous les
États , une fécondé forte de biens qui n’a point la
production des valeurs nouvelles pour objet, ni
la confommation pour terme , Sc fans fâchât ou
la vente défquels la production & la confommation
des denrées fe feroient également. De ce genre
font les offices, lés rentes fur l'É ta t, & les particuliers
, les intérêts de finance, Sec. Cette fécondé
efpèce de biens fe trouvant en concurrence avec
les biens primitifs, dans les échanges que les
hommes font entre eu x , attire à elle une partie
de fargent qui fe trouve dans’ l’État. Lorfque fa
proportion avec les biens primitifs.fe trouve telle,
que l’argent n'eft plus aufli facilement préfent lors
de la confommation des denrées,l'aCtivite de la circulation
du commerce diminue 5 l’argent fe trouve
plus inégalement réparti, le nombre des emprunteurs
augmente, Sc dès-lors l'intérêt3 à moins
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qu'une augmentation proportionnelle dans la maffe
de l’argent n’arrête le fur-hauffement d'intérêt, Sc
ne le contienne dans fes bornes anciennes.'Ces
recherches & ces connoiffances ont augmenté la
difficulté de la combinaifon des légiflate,urs , lorf-
qu'ils ont voulu intervenir dans la fixation des
intérêts de l’argent.
D'un côté , il a été reconnu que la réduéiion
forcée des intérêts ne pouvoit en foi diminuer le
nombre des emprunteurs > de- l’autre, que fi ces
réductions forcées augmentoient la fûreté des
biens fonds, en accroiflant leur capital nùméraire,
elle ne pouvoit avoir le même effet fur la^fûrete
d’opinion dans les prêts fur le b ille t, Sc des-lors
augmenter le nombre des prêteurs dans le commerce.
On a craint que l’ ufure trop, refferree par la
loi n’en rompît les digues } que les prêteurs ne
croyant plus trouverune compenfation convenable
à leurs rifques dans le prêt marchand, ne portaient
leur, argent vers les fonds de terre, les
offices, ou qu'ils ne le cachaffent.
D ’autres perfonnes ont penfé que le proprietaire
de l’argent refferjé feroit invité, par la diminution
de fon revenu, "à augmenter la fomme de fon
prêt ; que le produit des terres étant toujours
plus borné que celui de l’argent , on fe dégoû-
teroit promptement de cet emploi exclufif > enfin
qu'il en réfulteroit toujours que l'emploi plus
abondant de l'argent dans la culture des terres,
fource primitive de tous les revenus , produiroit
néceffairement, avec le temps, une plus grande
confommation , foit intérieure, foit extérieure ,
Sc ranimeroit l’a&ivité de la circulation du commerce.
Refte à confidérer l’effet d’une réduétion d’intérêt
fur les productions de la terre, Sc fur les
-ouvrages de l’induftrie.
La réduction favorife évidemment l'amélioration
des terres , & l'amélioration des terres produit
l'abondance des-vivres & des matières premières,
Sc ordinairement l'abondance baiffe les prix.
Les ouvrages de I'induftrie, avant d'arriver au
terme de la confommation, paffent par les mains
de divers entrepreneurs, qui comptent parmi leurs
frais Y intérêt de l’argent avancé, ou fur leur crédit
, ou fur leurs capitaux ; o r , la diminution des
■ intérêts eft d on c , en cette partie, une diminution
fur le prix des productions de l ’ar t} elles gagne-
roient en outre le bénéfice du bon marché des
vivres Sc des matières premières,par l'amélioration
de la culture.
Si la réduction eft forcée, je conviens que dans
le commencement le négociant ne trouvera pas
plus d’argent qu'il n'en trouvoit j mais aufli il eft
probable qu'il ne lui en fera pas moins offert,
parce que Y intérêt du commerce fera toujours plus
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fort que Yintêtêt des hypothèques Sc celui des
terres.
Mais fi la réduction s'opère d’après le cours
naturel de l'argent, il en fera certainement offert
davantage au commerce, & cette facilité multipliant
les concurrences | baillera les prix. On peut
même efpérer, avec quelque confiance , qu’en peu
d'années il en réfulteroit autant d'une réduction
forcée.
On objectera que les entrepreneurs & leurs ouvriers
deftinent leurs gains à des placemens à
rente, Sc que ne retrouvant plus le même intérêt,
leurs falaires renchériront. il femble convenable
de féparer la confidéradon fur les entrepreneurs Sc
fur les ouvriers.
Rien ne feroit aflurément plus utile qu’un
moyen d’engager les entrepreneurs à continuer de
faire valoir leurs capitaux dans le commerce, dont
ils ne fe retirent point fans perte pour l’État} &
c’eft un des grands inconvéniens des gros intérêts
qui les y invitent.
Quant aux ouvriers Sc manouvriers, leur ambition
& leurs facultés fe bornent le plus communément
à l ’éducation Sc à l’établiffement commode
de leurs enfans, au moyen de quelque
argent comptant. Ceux dont la profèflion eft un
peu plus lucrative , cherchent à aggrandir leur
petit commerce, Sc fur cinq cens qui fe trouveront
dans cette fituation, à peine en verra-t-on
un qui s’avife de-placer fon bien à rente} il eft
beaucoup plus commun qu’ils portent leur aifance
vers l ’acquifition d’un petit ronds de terre} &
dans les provinces où il y a des fabriques, on
fait qu'aux environs des villes , ces fortes de biens
fe vendent communément du denier quarante au
denier cinquante } ce qui eft beaucoup au-delà de
ce que fe vendent les groffes fermes 3 preuve
certaine que -les -artifans qui cherchent à affurer
leur fort,* né calculent pas Y intérêt à cinq pour cent,
dans l’évaluation de leurs falaires..
Parmi les manouvriers , on ne voit que les do-
meftiques dans l'ufage de placer à rente , parce
qu’accoutumés à une efpèce d’oifiveté, & incapables
de tout lorfqu'ils avancent en âg e , ils n'ont pas
-d'autre reflource. Si l’on fait attention d ailleurs
à la manière dont ils font payés, Sc au traitement
accordé en général à de vieux ferviteurs ,
leur fort ne peut pas inquiéter le légiflateur.
Les profeffions lucratives Sc utiles, fans produire
de nouvelles valeurs, telles que celles de
la médecine, de la chirurgie., du barreau, peuvent
augmenter leurs honoraires, fans qu’il en
réfiilte un grand inconvénient pour l'État} mais
il eft vrai de dire que quelque foit le taux de
Y intérêt 3 les habiles gens s’enrichiront dans ces
profeffions , Sc les médiocres y fubfifteront diffi-
iement. T 1 11 ••
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