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des greniers a fel dans les lieux convenables , fur
les rivières, & dans quelques villes éloignées des
rivières ; que dans chaque grenier il y aura un gre-
netier , & un greffier qui fera aufli contrôleur;
qu us auront chacun un regiftre , fur lequel ils
écriront , dans les villes ou il y aura des greniers
établis -, tout le fel qui fe trouvera chez les marchands
, les revendeurs, & les particuliers ; qu’ils
referont mettre dans .le grenier, en laiflant feulement
aux.particuliers leur proviiion pour quatre
ans. . .
Le grenetier & le controleur dévoient écrire fur
leuis regiftres, la quantité' de fel qui étoitdans le
grenier 3 le nom de celui à qui il appattenoit. &
le jour qu on l'y avoit porté.
• T-e grenier devoit fermer à trois clefs , dont une
entle “ s mains- du grenetier■, une fécondé dans
celles du controleur ; la troilième étoit pour le
proprietaire du fel.
On vendoit lé fel à tour de rôle , fuivant le
jour qu il avoit été apporté au grenier ; dans la
fuite il fut ordonné , que de dix muids en dix
muids on publierait le fel au rabais , & que le
marchand qui donneroit fon fel à meilleur marché
, ferait préféré aux autres pour la vente de
dix muids, & ainfi fuccelfivement. L’ordonnance
porte, que l'on fixerait le prix du fel pour le mar—
ohandj & qu'outre ce prix y il y. aurait vingt-quatre
livres pour le r o i , par chaque muid mefure de
Que 1 on vendra le fel dans les greniers y a
groffes mefures , à feptiers , minots & demi-mi-
nots ; que les regratiers le revendront en détail y
8c ne pourront en avoir que fix feptiers en ma-
gafin. *
Enfin y il eft défendu aux grenetiers 8c greffiers
de faire commerce de fel , d'être en fociété avec
ceux qui le font , S de recevoir d'eux aucuns
prefens.
Les Etats tenus à Compiegne en 13 66 ou 1.3^7
ayant fait des plaintes à Charles. V. au fujet de la
gabelle, il rendit le 19 juillet 1367 une déclaration,
dans laquelle il dit , qu'ayant toujours à coeur de
foulager fes fujets , il avoit' retranché la moitié du
droit qu'il avoit accoutumé de prendre fur le fel
ajoutant que le prix du, marchand fût diminué à
proportion. .
La gabelle étoit établie dans le Languedoc dès j
1367 ; mais comme elle n'avoit pas lieu dans le
Dauphine , les étrangers qui avoient coutume d'acheter
du fel en France, le prenoientdans les pays
etrangers, & le voituroient dans le leur , eh paf-
fant par le Dauphiné.
Charles V . pour réprimer cette fraude, donna,
le 1 ƒ_mai 1367, des lettres portant que, tant que
durerait ladite gabelle , le fel qui fottiroit du Dauphiné
y paierait des droits, à moins qu'ils n'eùf-
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fent déjà été payés dans les falines du royaume,
lorlqu il y aut-oit été acheté j déclarant que fon in-
tention n étroit pas que la gabelle fut levée fur le
e dmriDue dans le Dauphiné j mais que le droit
qui fe percevoir fur le fel fortant de cette province
j fut employé , moitié fuivant la première defti-
nation de la gabelle & l'autre moitié, appliquée à
la recette du Dauphiné.
_O n trouve dans des privilèges accordés par
Charles V. a la. ville de Rhodez , au mois de fé-
vrier 1369, qu il accorda entr autres chofes à cette
ville ,^une gabelle , Gabellam in'diHo Loco. Les lettres
n expliquent pas en quoi confîftoit ce privilège
, peut-être n’étoit-ce autre chofe que le droit
d avoir un grenier à fel.
Quoique J’impofîtion fur le fel m'eut été mife
que pour un tems , elle fut continuée dans tous les
Pays ’ tant de la Languedoil que du Languedoc:
hn effet, elle fe payoit encore en 1371 ■ fuivant
des lettres de Charles V. du 2o# juin, adrefféesà
un confeiller du r o i, fur le fait de la guerre. Voyez
les ordonnances du Louvre, tome V . pag. 404.
Ces lettres font mention , que Laide qui avoit
cours fur le fel dans les diocèfes de Lyon , Mâcon
& Châlons , apportoit peu de profit au roi,
parce que les habitans de ces diocèfes aohetoient
en fraude, du fel fur ies terres de l'Empire , dont
ils nétoient féparés que par le Rhône 8c la
oaône j & comme ils amenoient ce fel dès Avi-
gnon , par terre , parle Dauphiné , jufqii’à la
riviere d Ifere , & de-là le tranfportoient en l'Empire,
le roi ordonna que dorénavant on leveroit
fur ie fel qui pafleroit fur la rivière
d ifere.
C e même prince, fit encore, le 21 novembre
; 1379, un réglement pour la police fie la vente fin
u i- pour Ia Perception du droit de gabelle ; il
abolit l'ufage qui s'étoit établi, d'obliger les habi'
tans de chaque paroifle de prendre du fel- en ccr-
taine quantité.
C'eft donc au règne de Charles V . qu'il faut fi-
; yrlqtabliflement.de gabelle. X ü fatale journée
de Poitiers, où le roi Jean fut .fait prifonnier par
les Anglois , donna lieu au Dauphin, régent du
royaume , d'avoir recours à plufieurs moyens extraordinaires
, pour payer la rançon de fon père ;
8c l’établiffement d'un impôt fur ie fe l, & fu.r toutes
les autres denrées vendues dans le royaume
avec le confentement des Etats, fut l'un des principaux,
ainfi qu'on l*a rapporté dans le Difcours
préliminaire du tome I. pag. 28. 8c au mot A ide,
pag. 24. C e prince , parvenu à la couronne , confirma
ce qu’il avoit établi comme régent.
Le peuple 8c fur-tout celui de Paris, n'avoîc
pas vu fans mécontentement la propagation, Laug-
mentation même des impôts. Charles V. au liç
de là ruort, fe repentit Savoir furchargé fes fujets
pour
pour amaffer des tréfors, dont il prévit la difTîpa-
tion pendant la minorité de fon fils j il lui recommanda
, & à fes frères , de pourvoir à l'abolition
-, des impôts , & le 16 feptembrei'3 80, < jour de fa
mort, il abolit lui-même .les fouages ou tailles ,
, en remettant ce qui étoit dû.
Auffï-'tôt après fon décès , le duc d’Anjou fe
fait donner la régence, 8c s'empare de fes tréfors j
les querelles qui s'élèvent'entre lui & fes frères ,
font appaifées aux dépens des fonds publics -, 8c
les impôts continuent de fe percevoir avec tant de
rigueur, que le peuple fe fouleve, & fe porte aux
plus grands excès : l’abolition des aides eft le fçul
frein qu’on puiffe oppofer à fa fureur.
L’ordonnante du 16 novembre 1380, révoque
toutes les impofîtions établies dans le royaumeae-
puis Philippe le bel, 8c porte , « voulons & ordorir
nons que lefditç aides & fubfides, & de chacun d‘i-
ceux nofditç fubjet£ [oient & demeurent franc%ly
quiet es , 6’ exemps dorefnavanï à toujoursmais ,
comme ils étoientparavant le tems de notredit pré-
déceffeur Philippe le bel.
Une autre ordonnance du mois de mars 1380,
renouvelle cette révocation des impôts pour les
provinces de la Languedoil, dont il paroît que
les Etats s’étoîent affemblés à Paris au mois de janvier
précédent. Charles V I y déclare qu’il veut que
les aides, fubfides, impositions & fubventions quelconque
qui ont eu cours depuis le temps du roi Philippe
le bel3foient ôtées , cajfées & abolies. Il les met
au néant du tout, 8c entend que par le cours d'icelles
impofii ions, fes predécejfeurs & fucceffeurs n en
puijfent avoir acquis aucun droit, ne aucun préjudice
être engendré£ auxdites gens & peuple ; voulons qu’i/j
foient refiitués & rétablis dans les immunités &c.dont
ils jouijfoierit & ufoient au tems du roi Philippe le bel.
Charles V I preffé par les befoins de la guerre,
demande des fecours ; on les lui refufe, & le peuple
de Paris fe foulève. Bientôt le roi entre dans
cette ville avec fes troupes j.il punit 8c défarme les
habitans, les prive d’une partie de leurs privilèges j
8c apres avoir afîuré fon autorité par des exemples
de rigueur, il ne pardonne, qu’en rétablilfant de fa
pleine puiffance les aides & les gabelles qui depuis
cette époque ont toujours fubfifté, fuivant le mémoire
pour la cour des aides, fur fes conflits avec
la chambre des comptes, p. 89.'
■ # -p . ■ -u.-, /
C e fut par une ordonnance du 21 janvier 1382
que ces impôts furent rétablis 5 8c l’on voit par
une inftruéfcion du premier décembre 1383 que la
gabelle étoit alors de vingt francs pour chaque
muid de fel.
Au mois de janvier 138 7, Charles V I , pour
continuer la guerre , ordonna qu’outre les vingt
francs qu’on percevoit fur çhaque muid de fe l,
ion preijdroit epçore pour fon compte, vingt francs
Finances, Tonte II,
d*or ; mais cette augmentation fut abolie par les
lettres du 23 mars 1388, 8c le dççfit de gabelle fut
réduit à vingt francs par muid.
Dans le Poitou & la Saintonge, au lieu du droit
de vingt francs par muid de fel, oh mit une aide qui
confîftoit à faire payer au vendeur du fel, la moitié
du prix pour la première vente, 8c lorfque le fel
étoit enfuit,e revendu où échangé le vendeur
payoit cinq fols par livre: .
Une autre inftru&ion donnée par le même prince
fur le fait des aides le 6 juillet 1388 , ordonne qué
tout efpèce de gens conduifant du fel non gabeljéj
avec port d ’armes, ou autrement, foient, par les
grenetiers 8c contrôleurs, & par toutes juftices où
ils viendront & pafferont y»pris 8c punis de corps
& de biens, félon que le cas le requerra : que fî
les grenetiers, contrôleurs, ou autre gens dejuftice,
demandent aide pour le r o i, que chacun foit tenu
de leur aider fur peine d’amende arbitraire î &
fi ceux qui conduifent le fel non gabelle fe mettent
en défenfe, il eft ordonné que l’on faffe que la
force en demeure au gens du roi j &: que fi more
ou mutilation y advient contre aucun des conducteurs
du fel ou leurs aides & receveurs, ceux qui
l ’auront fait pour conferver fon droit 8c aider fes
gens, foient quittés,imppfant filence à tous Tes juf-
ticiers 8c procureurs, de même qu’ aux amis des
fraudeurs qui auront été occis ou mutilés.
C e même prince, par des lettres du 2.8 mars
1395*, diminua d ’un tiers le droit de gabelle dans
tout le royaume.
Les généraux des aides ordonnés pour le fait
dé la guerre , au pays du Languedoc & 'duché de
Guienne firent, en 1398, au nom du ro i, avec la
comteffe de Provence, une fociété pour deux ans,
par rapport à la gabelle du fel qui remontoit le
Rhône , pour être porté dans les terres de l’Empire.
. Outre le droit qui fe percevoit fur le fel, pour
le ro i, il accordoit quelquefois un koétroi fur le fel
aux habitans de certaines villes, comme il fit en
faveur de ceux d’Auxerre, pour deux années, par
des lettres du 3 mars 1401, portant que.le produit
de cet oélroi feroit employé aux réparations du,
pont de cette ville.
On trouve dans les réglemens faits par Charles
V & Charles V I les 7 décembre 13 6 6 , 20 novembre
13 7 7 , 21 janvier 1382, premier décembre
1383 , 11 mars 1388, & juillet 1411. la forme
dans laquelle les gabelles étoient'alors adminiftrées,
8c il paroît que fous Louis.XII la police preferite
par ces réglemens, s’obferyoit encore-
Différentes villes avoient obtenu , à titre d’ôc*
troi , le privilège de fournir les greniers qui y
étoient établis 3 la même conceflion avoit été faite
à plufieurs particuliers : ces villes*avoient la plu-
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