
privilège exclu fi £ de quinze années , par arrêt du
premier juin 1604,
Cette première aflodation n’cut aucune fuite.
I l s'en forma une autre fous Louis X I I I , qui l'au-
to.rifa par lettres-patentes du 2 mars 16 t i , pour
douze années , & la renforça de quelques nouveaux
alfociés le 2 juillet 1615.
Qn doute que cette compagnie ait pouffé fa navigation
jufqu’aux Indes orientales ; mais il eft fûr
qu'on lui doit des établiffemens dans l'ifje de Ma-
dagafcar.
La compagnie de Morbihan , créée en 1626
fous la protection du cardinal de Richelieu , ne
fut connue que par fon plan, qui devoit embraffer
le commerce général, tant par terre que par mer,
celui du Ponant & du Levant . & les Yoyaees de
long cours. - 5
Une autre, élevée en 1642 & confirmée en fep-
tembre 1643. par Louis X I V , jouit de fon privilège
exclufif jufqu'en 1.664.
Colbert , dont les grandes vues s'étendoient à
tout ce qui pouvoir contribuer à la profpérité du
commerce, fit alors répandre un mémoire fur les
avantages du commerce des Indes orientales , &
fur la conftitution qui feroit ■ donnée à la compagnie
qui voudroit l'entreprendre.
, C e t écrit eut tout le fuccès que le miniftre s’en
etoit promis. L'édit du 13 juin en confirma les
difpolitions , & Madagafcar devint le berceau de
eette puiffance commerçante , que nous avons vu
expirer en 1769.
. Tous les moyens de féduCtion qu'infpire un
zèle éloquent, & tous les fecours de l'autorité ,
furent employés pour attirer des colons , & leur
procurer des établilfemens. On alfuroit la naturalité
à tout étranger qui y prendroit un intérêt de
vingt mille livres ; tout ce qui devoit fervir à l'ar-
mçment, conftruCtion , avitaillement des vaif-
féaux , étoit déchargé de tous droits d'entrée &
de fortie, ainfi que de ceux d’amirauté.
L ’Etat s’obligeoit à payer cinquante livres par
tonneau de marchandifes de France portées aux
Indes , & foixante & quinze livres par tonneau de
celles qu'on en rapporte toit.
Indépendamment de cette compagnie protégée
par le gouvernement , il s'efï étoit formé une autre
qui avoit obtenu, la permilfion d'envoyer des
y ai fléaux a la Chine , & elle fe borna à cette première
entreprife.
La compagnie royale ne profpéroit pas, malgré
les privilèges' & les exemptions quelle avoit obtenus
en différens teras, $c notamment en 1676,
*682 1.68J.
Elle eut à fe défendre des plaintes des fabricant
, r,oy ‘*'’Jme, q u i, réunis à la ferme générale, fe
recrioient fur l'énorme préjudice que recevoit
l’ Etat , par l'importation des étoffes de l’Afie.
Elle eut à lutter contre les prérogatives de la
charge de grand-amiral, q ui, fuppriméeen 1627,
avoit été rétablie en 1683 , & enfin à repouffer
les coups que lui portoient la chambre de commerce
de Marfeille , & les Etats de Languedoc ,
en demandant que l'introduCtion dès foies & foie-
ries afiatiqües fût interdite dans le royaume. '
Toutes les conteftations dans lefquelles la compagnie
des Indes fuccomba, jointes à la décadence
de fon commerce , dont elle vendoit depuis quelques
années le privilège à des particuliers , achevèrent
de l ’abattre. Elle fe traîna ainfi , fur des
gains très-inférieurs au produit naturel de fes capitaux,
depuis 16S4 jufqu’en 1719.
Les grands projets dans Jefquels on cherchoit
alors de grandes reflources , opérèrent , ainfi
qu’on l’a dit au mot Billet de Banque , la réunion
de toutes les compagnies commerçantes en
une feule , fous le nom de Compagnie des Indes ,
& qui fut en même tems chargée de la perception
de tous les revenus du roi. T e l fut l’objet de l'édit
du mois de mai 1719 , dans lequel les caufes de
l'adverfité des affociations précédentes font attribuées
à une régie vicieufe } ainfi ce coloffe, défî-
gné par le nom de compagnie des Indes , embraf-
foit tout le commerce des deux hémifphères , &
toutes les finances de l’Etat.
Parmi les privilèges de la compagnie d’Occi-
dent , qui avoit été fondue dans la compagnie
d'Orient, étoit le privilège de faire venir des
peaux de caftor dans le royaume , en exemption
de tous droits , & exclufivement, avec la liberté
de les vendre tout.ee qu'elle voudroit , quoique
le prix qu'elle les achetoit, fût réglé à trois livres
la livre de caftor gras , & trente fols la livre de
caftor feç.
Lorfqu’en 1720 l'édit du mois de juillet rendit
libre le commerce des caftors , il attribua à la
compagnie des Indes , pour la dédommager du
privilège exclufif de ce commerce , la perception
d'un droit de neuf fols par livre pefant de caftor
gras, & fix fols aufti par livre de caftor fec, im-
pofé à l'entrée du royaume.
Cette liberté de commerce ne dura pas un an.
L'arrêt du confeil du30 mai 1721 , rétablit la
compagnie des Indes dans le privilège exclufif de
la vente du caftor , & prononça contre tout contrevenant,
trois mille livres d'amende, dont moitié,
applicable au dénonciateur, & l'autre moitié
à la compagnie , & ces difpofitions furent encore
confirmées l'année fuivante , par l’arrêt du 28
janvier.
C e monopole a fubfifté jufqu’en 176p. Laprifç
du Canada par les Anglois à la fin de l’année précédente
, détermina Je gouvernement à rendre la
liberté au commerce du caftor , &. même à l'affranchir
de tous droits à l’entrée du royaume. On
ne voit pas qu’aucun écrivain qui a parlé des revenus
de la compagnie des Indes, y ait fait entrer
celui qu’ elle droit du commerce exclufif des peaux
de caftor.
La confiance que la nouvelle compagnie des Indes
infpira fut fi grande-, que dans l’efpace de dix-
huit mois elle prêta quatre-vingt-dix -millions au
roi , qui rend des ténfoignages publics de fon
zèle dans l’arrêt du mois de juillet 1720.
A juger de fon commerce en 1715 par le montant
du dividende qui étoit fixé à cent cinquante
livres par aCtion , il fembloit toujours aller eft
profpérant 5 mais c'étoit bien moins le commerce
de 13Inde, que l'exploitation de la ferme du tabac,
d'où réfultoit un produit brut de huit millions,
qui faifoit illufion aux actionnaires.
On peut voir dans l ’excellent mémoire publié
en 1769 par M . l’abbé More let, comment le capital
de la compagnie avoit éprouvé fucceflive-
ment des dégradations depuis 1725 jufqu'en 1756
& 1769 , malgré les dons immenfes qu'elle avoit
reçus du ro i, & les bénéfices énormes qu'àvoient
rendus , depuis la même époque jufqu’en 1743,
& le commerce de Y Inde , qui rendoit .quatre-
vingt-quinze pour cent, & celui de la C h in e , qui
donnoit cent quarante-un pour cent. Mais le
goût du fafte & dé la dépenfe , tant en Europe
que dans Y Inde , avoit fain les adminiftrateurs ; on
élevoit à grands frais des magafins & des bâtimens
immenfes à l'Orient ; on conftruifoit un palais
magnifique pour le. gouverneur de Pondichéry ,
& des logemens fuperbes pour les employés de la
compagnie. De cetre manière , les fonds morts
augmentoient , les dépenfes annuelles fe multi-
plioient par l’entretien de tous les bâtimens, &
le capital deftiné au commerce s’anéantiffoit.
La compagnie Angloife , formée pour le même
commerce, avoit adopté le même fyftême C 'é toit
à qui étaleroit le plus de fafte & de magnificence
, dans un pays opulent , où l'éclat & la
pompe font regardés comme le figne de la puiffance.
Cette lutte de vanité & de dépenfe pro-
duifit I I rivalité de commerce & de pouvoir ,
avec l'envie réciproque de triompher de fon concurrent.
Dès-lors, le premier coup de canon tiré
par une des deux nations , devint , pour chaque
compagnie, le fignal d’une guerre d'autant plus
cruelle, que la haine & la jaloufie excitoient les
deux partis.
On en vit des exemples dans les guerres de
*744 , '756 & \111- Mais fi les effets de la première
furent funeftes aux Anglois, ceüx des deux-
autres le font devenus bien davantage aux Franço
is , puifque leur fituation actuelle dans Y Inde eft
entièrement précaire , tandis que les premiers y
poffèdent de rafles & riches territoires , qui leur
donnent un revenu net de quarante à cinquante
millions.
Pondichéry eft néanmoins redevenu le chef-lieu
des établiffemens François , parmi lefqueis les
principaux font Yanon, Karical ,*& Mafulipatan,
à la côte de Coromandel ; Mahé à celle de Malabar
5 & Chandernagor dans le Bengale.
Lorfqu’en 1769 le gouvernement, ainfi que
tous les gen^fenfés, eurent été convaincus par le
tableau fidèle de la fituation de la compagnie des
Indes, que l'exercice de fon privilège exclufif de
commerce dans ces contrées, étoit ruineux pour
elle , & très à charge à l'E tat, qui , en quarante
ans-, avoit dépenfé quatre cens millions, tandis
que les retours de ce commerce n'avoient rapporté
dans le même efpace de tems que trois cens
millions, on prit le parti de fufpendre ce privilège
, & de biffer aux particuliers la liberté de
faire Je commerce de Y Inde & de la Chine.
. Cinq années auparavant , le roi étoit déjà rentré
dans fes droits de fouveraineté | fur les if]es de
France & de Bourbon , & dès-lors on avoit pré-
fagé la chûte de la compagnie des Indes.
Ainfi il eft important de faire connoître, dans
ce nouvel état des chofes , à quelles formalités , à
quelles obligations font affujettis ceux qui veulent
armer pourl'JW* ou pour la Chine.
Les réglemens des. 1 3 août &. 6 feptembre ,
s’expliquent dans les termes fuivans :
» Le roi s’ étant fait repréfenter en fon confeil
*> les délibérations prifes dans les afiembjées géné-
33 raies des actionnaires de la compagnie des Indes,
*> des 14 & 29 mars, 3 avril & 8 du'préfent mois ,
33 enfemble les mémoires & états de fituation de
33 ladite compagnie, dreffés par les députés choi-
33 fis par lefdits actionnaires dans leur affemblée
33 du j 4 mars , conjointement avec les fyndïcs &
33 directeurs , fa majefté a reconnu que la com-
33 pagnje n’a fait , jufqu’ à préfent, aucunes dif-
33 polirions pour approvifîonner les ifles de France
33 & de Bourbon , & pour remplir l’obligation
! 33 que lui impofe fon privilège , dé faire , fans
| 33 difeontinuation , fon commerce des Indes : que
i 30 ce défaut de précaution ne vient point de la né-
33 gligence des fyndics & directeurs, & qu'il eft
33 la fuite du manque de fonds dont ils ayent pu
; 33 difpofer pour ce commerce ; mais que depuis la
. 33 première affemblée du 14 mars , les aCtionnai-
; » res , inftruits de leucfituation , n'avoient pré-
: 33 fenté aucuns moyens admiflîbles de fe procurer
- 03 les fonds néceffaires pour pourvoir aux arme-
33 mens d etette année , jufqu'au dernier jour de
1 33 la dernière affemblée, dans laquelle a été lu un