
du parlement du 16 janvier 1658, rendu fur la
requete des fix corps des marchands de Paris ,
qui s'étoient oppofés à l'enregiftrement du privilège.
C eft en 1660 , que l'on tira en France la
première loterie royale , dans un moment d’ivreffe
occafionné par le mariage de Louis X IV , & pour
la publication des, fêtes de la paix. Le goût pour
ces fortes de jeux prit fi bien dans la nation ,
que Ton en ^forma de particuliers de tous les côtés
j les maîtres & les valets eurent des loteries 3
proportionnées à leur moyens : on en fit de bijo
u x , de meubles, &c. 5 il y en eut à cinq fols
le billet.
Le parlement & la police s'élevèrent fouvent contre
ces petites loteries & lesfupprimèrent à diverfes
reprifes; , en remontrant toujours que celle de
2660 n'avoit été permife qu'en vertu d'une ré-
jouiflance extraordinaire , & pour'célébrer l'heu-
teux^ mariage du roi. C'el! ce qu'on voit dans
l'arrêt du parlement du n mai 16 6 1 , rendu furies
conduirons du procureur-général T alon , dans
des fentences de police de 1670 &: 1681 3 & dans
l'ordonnance du roi du 14 mars 1687.
En i6Sj-, on avoit vu renouveller à la cour ,Ies
anciennes loteries Romaines. Louis X IV , pour
célébrer les noces de mademoifelle de Nantes , fa
fille légitime 3 qui époufoit M. le Duc , fit établir
dans le fallon de Marly , quatre boutiques
remplies de ce que l'indufirie avoit produit de
plus recherché & de plus curieux 5 ces bijoux
furent tirés au fort par les perfonnes qui étoient
de cette fête.
En 1700, un arrêt du confeil ouvrit à l 'hôtel-
de-ville une loterie royale de dix millions de livres.
Voici les motifs que préfente le préambule
de cet arrêt ; « Sa majefté ayant remarqué l'in-
33 clination naturelle de la plupart de fes fujets
» à mettre de l'argent aux loteries particuliers
v à celles que des communautés ont eu la per-
3> million de faire pour l'entretien & le foulage-
33 ment des pauvres , même à celles qui fe font
»3 dans les pays étrangers, & délirant leur proas
curer un moyen agréable & commode de fe
33 faire un revenu fûr &• confidérable pôur le refie
'33 de leur vie , même d'enrichir leurs familles
33 en donnant au hafard des fommes fi légères
33 qu'elles ne puiffent leur caufer aucune incoin-
.33 modité, à jugé à propos , & c . 33
Cette loterie étoit compofée de quatre cent
mille billets de deux louis chacun 5 Je fond con-
'fiftoit. en cinq cens mille livres de rentes viagèr
e s ', avec une diftributïon de quatre cent quatre-
vingt-cinq lots en argent.
En 1704, a titre loterie de deux millions, dont
lé,s a&ions étoient de deux cent livres, & avec
des lots en rentes perpétuelles, &r en rentes viagères
, de cent mille livres pour chaque efpèce.
L année fuivante 3 on fit ufage de la même ref-
fource j mais fa médiocrité peut faire juger de la
detrefle dans laquelle fe trouvoit l'E tat, & juftifioit
la défiance publique. On établit une loterie de
deux cens quarante mille billets à vingt-fols 3 &
elle ne fut titrée qu'en 1707.
On en forma une autre encore , à vingt francs
le billet î mais elle ne fut ni remplie ni tirée. Eh
1714 , il fut ordonné que les billets de cette loterie
feroient portés au garde du tréfor royal, après
avoir été vifés du receveur, pour être convertis
en rentes au denier vingt-cinq.
C e feroit une longue & peu utile énumération ,
que de rappeller ici toutes les loteries qui ont eu
lieu depuis le commencement de ce fiècle 5 nous
nous bornerons à parler de celles qui exiftent actuellement,
1785 , après avoir toutefois rapporté
l'opinion de quelques philofophes du fiècle 3 fur
les inconvéniens de ces jeux de hafard.
M. de BufFon , dans fon traité à*Arithmétique
morale 3 obferve avec raifon , « que l'indifférence
. 33 apparente , que la fortune a pour le'bien ou
33 pour lç mal, produit avec le tems, la nécef-
33 fité du malt Qu'une longue fuite de hafards*,
»3 eft une chaîne fatale , dont le prolongemena
33 amène le malheur. 39
L'inftituteur du prince de Parme, M. l'abbé
de Çondillac , efpère que les fouverains renonce-*
ront aux loteries 3 comme ils ont renoncé à la
ruineufe refîource d'altérer les monpoies ; il fe
trouvera, peut-ê tre, dit ce penfeur profond,4
quelque calculateur habile, qui leur démontrera
que cette reflource momentanée , n'eft pas moins
préjudiciable que l'autre 5 . . . fi cette fraude mo*
derne duroit autant que la première , je fuis per-
fuadé quelle cauferoit bien-d'autres ravages.
On peut voir aufli. tout ce que la raifon & le
zèle du bien public ont infpiré à M. Dufàulx ,
contre l'établiffement des loteries politiques. En
France , il n’en exifte plus que trois , depuis l'arrêt
du confeil du 30 juin 1776 , qui en a fuppri-
mé trois. Celle de l’Hôtel de-Ville de Paris , qui
donnoit foixante lots fur mille, billets } la loterie
générale, où l'on comptoit douze lots fur mille 3
& enfin-, celles des communautés religieuses,
calculée à raifon de fix lots par mille billets,
La loterie royale de France, qui a remplacé la
loterie de l'école royale militaire, & adopté fes
combinaifons , tire à ce qu'on prétend , fon origine
de ce qui fe pratiquoit anciennement à Gènes
, pour l'éle&ion tous les fix mois, de cinqfé-
nateurs par la voie du fort. Les candidats fe trou*
voient quelquefois au nombre de cent 3 mais nç
f tu 1 m a
L O T
pouvoierit jamais être moins de quatre-vingt dix :
leurs noms étoient mêlés avec foin dans une roue,
& l'on remarque comme une fingularité , que celui
de Benedetto Gentile, refta près d'un fiècle
fans fortir. Le peuple qui penfoit déjà que ce nom
etoit devenu invifible , exigea la preuve du contraire
j on le fatisfit d'autant plus volontiers à cet
egard, que l'invention de la loterie de Gènes, établie
fous le titre de Seminario, étoit due à un
Gentile.
Au refie, comme la loterie royale eft devenue
une affaire de finance par la forme d'admi-
nilrration qu'elle a reçue en 1776, & parles nouvelles^
combinaifons qui furent à cette epoque
ajoutées aux anciennes 5 il eft à propos de donner
1/C1 L.r/ret ^LI con^e^ du 30 juin , qui a ordonné fon
ecabhlfement, avec le plan qui y eftannexé , & la
table de comparaifon des conditions de la loterie
de France, avec celles des, loteries étrangères.
Sur ce qui a été repréfenté au r o i, étant en
Ion confeil, que les différentes loteries établies
jufquà préfent dans le royaume, n'auroient pu
empecher fes fujets de porter leurs fonds dans
les pays étrangers, pour y courir les hafards &
tentef fortune dans le jeu des loteries qui y exif-
te,nV Çue Ia loterie que fa majefté avoit concédée
à l'école royale militaire, quoique pré-
ferctant au public un jeu femblable à celle de
R om e , Gènes, Vénife , M ilan , Naples &
Vienne en Autriche, n avoit pas arrêté ce ver-
fement de l'argent du royaume dans d'autres loteries
étrangères , \duquel il ré fuite un préjudice
fenfible pour l'Etat, & qui mérite d'autant plus
1 attention de fa majefté, que le montant, d'après
des informations certaines, forme un objet
confiaerable, & qu'il ne pourroit qu'augmenter
a 1 avenir par les différentes chances que les États
voifîns cherchent à mettre dans ces fortes de
jeux j^elle auroit juge que la prohibition ne pouvant
etre employée contre les inconvéniens de
cette nature, il ne pouvoit y avoir d'autre re-
mede, que de procurer à fes fujets une nouvelle
loterie dont les différens jeux , en leur pré-
fentanr les hafards qu'ils veulent chercher , foient.
capables de fatisfaire & de fixer leur goût. En
conféquence , fa majefté auroit fait examiner par
les perfonnes les plus verfées en ce genre , le
projet d’une loterie dans laquelle plufieurs chances
ont ete ajoutées à celle de l’école militaire &
a toutes celles qui exiftent dans les pays étrangers,
dont les tirages feront plus frequens pour
la ville de Paris, & pourront être exécutés dans
f c principales ^villes & frontières du royaume,
à l’effet d’empêcher plus sûrement l’exportation *
fi préjudiciable à l’Etat, de l'argent dans les pays
étrangers y & ce projet ayant été jugé le plus propre
a remplir les vues de fa majefté, elle fe feroit
portée à l'adopter & à fupprimer en conféquence
la loterie de l'école royale militaire, en hypothéquant
le produit de la nouvelle loterie à cette
école, jufqu'à concurrence de la fomme annuelle
a laquelle il a été reconnu que pouvoit monter,
celui de la concefïion qui lui avoit été fa ite , & .
pour le tems feulement qui refte à courir de ladite,
concefïion : fa majefté ayant confédéré que la multiplicité
des autres loteries exiftanres à Paris, porte
un préjudice notable aux unes & aux autres , &
occafionné en pure perte, des frais confidérables
pour leur régie ; elle auroit déterminé de fupprimer
trois de ces cinq loteries particulières qui fe tirent
dans ladite v ille , & de réunir les deux autres
fous la même adminiftration à laquelle fera confiée
la régie de la nouvelle loterie y mais fa majefté
a voulu en. même tems conferver à l'hôteLde-
ville de fa bonne ville de Paris, & aux autres
communautés & étabjiflemens publics & utiles ,
auxquels lefdites loteries ont été concédées , les
fecours qu'ils en retirent. A cêt effet, l'intention
de fa majefté , eft d'aflurer à chacun d ’eux , pour
le tems de leur concefïion , le montant du produit
net qu'ils en ont retiré , tel qu'il fe trouvera
conftaté fur le relevé des dix dernières années. Sa
majefté.-ne bornant point fes foins paternels aux
etabliflemens de charité & de piété qui exiftent
& qui font dignes de fa prote&ion ; elle auroit.
réfolu d'appliquer une partie du produit de la
nouvelle loterie , à former un fonds qui fera employé
à des objets de foulagemens & de fecours ,
conformément aux intentions que fa majefté fe
réfervè de faire connoître. La fûreté néceflaire des
fonds qui feront verfés dans la nouvelle loterie , &
1 execution la plus, exatfte des engagemens de la
régie envers le public, exigeant des fonds d'avance
& des- cautionnemens confidérables , les
détails de la régie & adminiftration de cette nouvelle
loterie , plus compliquée & étendue qu’aucune
de celles qui ont exifté jufqu'à préfent, ne-
pouvarrt d'ailleurs être que très -multipliés > fa'
majefté a jugé néceflaire de commettre un nombre
de perfonnes choifies & dignes de la confiance
publique, pat leur fortune & leur'bonne réputation
, p our, avec un intendant qui fera nommé-
par fa majefté, régir & adminiftrer lefdites lote- -
ries en qualité d ’admmiftrateurs généraux, fous-
les ordres du contrôleur général des finances. A
quoi voulant pourvoir : oui le rapport, &c.
A r t i c l e ' p r e m i e r .
La loterie établie par arrêtdu confeil du r y oélobre
i7 )7 > fous le nom de loterie de l'éçole royale
militaire, fera éteinte & fupprimée , à compter
du 6 août prochain , & fera remplacée à la même
époque pour le tems de trente années, par la /o-
terie .‘que fa majefté à créée & crée fous le nom
de Loterie royale de France, conformément au plan
qui fera annexé an préfent arrêt.
C c c c c i j
f e t a a