
C e t établifiement procure aux habitans des
reflburces faciles fans être onéreufes , & ménage
à l'Etat un gain considérable qui paflbit aux ufurie
rs , auxquels on payoit précédemment foixantè
& quatre-vingt pour cent.
Lorfque le terme pour lequel on a prêté eft expiré
, li les effets ne font pas retirés , la vente en
eft faite , de manière qu'ils font portés à leur valeur
î l'excédent de la fomme prêtée, eft remis
fidèlement à celui qui a emprunté. On prétend
que ce lombard donne un bénéfice annuel d’environ
quatre-vingt-trois mille liv. de notre monnoie.
La cave de ville & l’apothicairerie, forment
encore un objet de revenu très-confidérable.
La cave de ville eft principalement fournie de
vin du Rhin. Cette cave qui eft immenfè, en
contient,qui a depuis cent feuilles ou cent années,
jufqu'à celui de la dernière récolte ; on y a pratiqué
des falles &' des chambres très-vaftes , où
l'on donne des repas. Un prépofé reçoit le prix
des vins qu'il livre & en rend compte à la chambre
des finances.
L'apothicairerie renferme également tout ce
qu’il eft poftible de raflembler en drogues de la
première qualité ; ce qui en rend le dépit très-
étendu y éç le bénéfice confidérable.
La douane pour la farine, eft affermée à des
boulangers , qui en rendent annuellement dix-
huit mille marcs , qui a trente-quatre fols , 'font
une fomme de trente mille fixcens livres. Chaque
fac de grain qui contient quatre mefures , péfant
chacune quarante-trois livres ou cent foixante-
douze livres les quatre, paye pour droit de mouture
, un marc ou trente-quatre fols de France.
Vo ic i maintenant ce qui concerne les impofî-
tions.
On les divife en impofitions ordinaires & impo-
litions extraordinaires.
Les impofitions ordinaires 3 font la taille 3 la
garde 3 les boues & lanternes.
La taille confifte dans le quart pour cent, que
tout habitant , fans exception 3 eft obligé de
payer de tout ce qu’il- poflède en meubles & immeubles.
Il ne fe fait aucune, répartition de cette taille 5
chaque bourgeois fe cottife lui-même & porte fon
impofîtion à la maifon de ville 5 on n’exige autre
chofe du contribuable , que le ferment par lequel
il eft tenu d’affirmer que ce qu’il paye , forme vé- 1
ritablement ce qu'il doit acquitter.
T ou t habitant eft tenu de monter la garde ou
de la faire faire par d’autres , & l’ufage s’eft établi
j d’avoir des gens entièrement deftinés à ce
fervice- C ’eft le capitaine du quartier qui fe
charge de les fournir, moyennant une rétribution
qui eft payée par chaque bourgeois. Les nobles ,
les perfonnes titrées , & les eccléfiaftiques, font
exempts de la contribution, parce qu’ils ne font
pas fujets à la garde.
Chaque habitant paye aufli une fomme annuelle
pour les boues & lanternes , & un fol par marc
du montant du loyer de chaque maifon j c’eft-à-
, dire ? le trente-quatrième.. Toutes les maifons
font infcrites, à cet effet, dans un regiftre, avec
le nom du propriétaire , la valeur de la maifon ,
& le prix de location qu'elle doit valoir : au tems
marqué, le propriétaire porte lui-même à la maifon
de ville l ’impôt qu’il fait devoir.
^Les impofitions extraordinaires confiftent ,
lA. dans une efpèce de capitation qui fe paye par
tete par tous les habitans , à l’exception des nobles
, des eccléfiaftiques & des perfonnes titrées.
Tous les contribuables font diftingués en neuf
claffes.
Ceux de la première, payent jufqu’ à fix cens
marcs ou mille vingt livres de notre monnoie:
la femme eft impofée pour moitié de la taxe de
fon mari 5 les enfaus pour moitié de la taxe de
la mère.
La dernière claffe, dans laquelle font compris
le petit peuple , les domeftiques , les nourrices
& ouvriers, paient un marc & douze fols, pour
les hommes, ou quarante fix fols j les femmes,
douze fols. C e font les capitaines de chaque
quartier qui font tenus de faire la colle&e de cette
taxe, d’après l’état qu’ils ont fourni de toutes
les perfonnes qui réfident dans leur diftri&.
i Q. Il faut mettre au rang des impofitions extraordinaires,
un droit connu fous la dénomination
de droit des fojfés j le produit de cette impofîtion
eft deftiné à fubvenir aux dépenfes d’entretien qui
font a la charge de la ville. La répartition & la
levée de cet im p ô t, fe font de la même manière
que pour la capitation dont on vient de parler : la
quotité du droit des fojfés varie , fuivant celle des
dépenfes auxquelles fon produit doit être appliqué.
w Mémoire concernant les impofitione & droits
en Europe, de 1‘imprimerie royale , tom. premier ,
pag. 68.
L U C E R N E , ville capitale d’un canton fuifle,
du même nom, qui eft catholique , & qui fait
partie du corps helvétique*
Le gouvernement de ce canton, eft purement
ariftdcratique , & entre. les mains d’un fénat ,
dont .les membres choifis parmi les bourgeois, acquièrent
le patriciat pour leur poftérité.
A u refte^ comme nous n’avons à confîdérçr
Lucerne que du côté de fes finances, bornons-
nous à emprunter ici de la collection de feu
M. de Beaumont, l’article qui regarde ,1e canton
de Lucerne.
On n’y lè ve , eft-il d it , tom. premier , p. r ,
aucune impofîtion pour les dépenfes & les befoins
de l’Etat, tant qu’ il refte dans le tréfor public des
fonds provenans des rentes foncières , des dîmes,
des péages, des lods & ventes & autres droits
feigneuriaux ou domaniaux 5 mais lorfque le tréfor
public eft épuifé, chaque habitant, fans excép-
tion , eft taxé a une fomme proportionnée à fes
facultés, & dès que le. befoin çefie, cette contribution
cefîe pareillement.
; On lève cependant dans la ville de Lucerne une
légère taxe fur les bourgeois , pour fubvenir à la
dépenfe de la garde de la ville.
Dans chaque bailliage , les- gens de la campagne
payent aufti aux baillis, chacun dans leur
diftriét, une fomme qui revient à environ trente
fols par tête , mais dont il rentre une très-petite'
partie dans la caiffe publique.
On a voulu établir fur le clergé de ce canton,
qui eft très-riche, une contribution fous le nom
de don gratuit ; mais Je pape a refufé jufqu’ici fon
confehtement pour la levée de cette taxe.
Les droits de lods & ventes, ceux qui font im-
pofés fur les fucceflions, ne font payés dans le
canton de Lucerne, que dans les diftriéte où le
fouverain eft feigneur direct j mais lorfqu’un
particulier vient abdiquer fon droit d’habitant
& emporter fa fortune en pays étranger, il
paye dix pour cent de la vente de fon bien.
Les a&es public* ne font fujets à aucuns autres
droits, qu a 1 honoraire du greffier qui les
rédige.
Les droits de péages, dans le canton de Lu-
*frni .3 ^ont a'Peu près les mêmes que dans celui
de Berne.
Les commerçans étrangers jouiffent dans le
canton de Lucerne des mêmes privilèges que les
négocians nationaux. Ils vont de foire en foire
& payent outre les droits de péages, deux fols
par florin du montant de la vente qu’ils fo n t, &
l ’on s’en rapporte pour percevoir cette taxe , à la
déclaration qu’ils donnent de la valeur dé leurs
marchandifes.
Les revenus qui proviennent des domaines &
des dîmes, font perçus par les baillis, qui en
rendent compte au confeil •, quant aux autres
droits, revenus ou impofitions, ils font levés
par des prepofes ou des receveurs qui verfent leurs
ronds entre les mains du tréforier de l ’Etat. On
s*en rapporte entièrement & fans aucun examen à
leur b^nne-foi. .
Le penchant que l'es habitans du 'canton de Lucerne
montrent pour leur liberté, & une entière
indépendance, eft fï marqué,que les magiftrats qui
compofent le fénat ou le coiifeil des cent, dans
lefquels réfident le pouvoir fouverain, font forcés
de ne faire qu'un ufage très - modéré des avantag
e que leur donne, fur le peuple, cette forme de
gouvernement, dans la crainte dé voir au. premier
moment leur autorité s'évanouir.
Les fels 8c les penfions que la France fait délivrer
& payer aux habitans du canton de Lucerne,
fourniflent aux befoins courant de l'E ta t, 8c aux
paiemens des appointemens de fes confeiliers.
En général, les, habitans du canton de Lucerne,
ont de modiques revenus , 8c vivent dans une
grande fobriété.
Les plus grandes reflburces même des maifons
patriciennes, confiftent dans Jes charges publiques,
dans le fervice militaire chez les puiflances
de 1 Europe , & dans 1 état eccléfiaftique , pour
les cadets de famille.
L U X E , f. m ., pat lequel on entend ordinairement
l 'ufage que l'on fait des richelfes & de
l’induftne , pour fe procurer des jouilfances
agréables, 8c non d'une néceflité abfolue.
Dans tous les états polices , le luxe eft un des
principaux alimens de la finance ; c'eft-à-dire
qu'il forme pour le fîfc, une branche de revenu
d'autant plus ptécieufe, que la claffe indigente de
la fociété , loin de contribuer aux impôts qu'il
fupporte, trouve au contraire dans ce qu’il commande
, des moyens très-multipliés de fubiîf-
tance.
Pour faire connoître les effets du luxe en.France
, amfi que fes rapports avec I’adminittration
des finances , & pour indiquer en même-rems les
moyens de tempérer.fes progrès, nous n'avons
qu a donner ICI les conjidérations qu'un ancien mi-
nijtre des finances a publiées fur le luxe , dans fon
ouvrage fur les finances. C e chapitre fera fuivi de
celui qui traite des fortunes de finance, que l'on
peut regarder comme une des caufes de i'accroif-
fement du luxe ; ce dernier article fervira d'ailleurs
de fiipplément à ce que nous avons dit ci-
devant, au mot F i n a n c i e r , pag. 2.06. ■
On s'égare en vains difconrs 8c en raifotme-
mens . vagues , lorfqu'on attribue uniquement les
progrès du luxe _ au changement des moeurs 5
la nature des gouvernemens, & à l'acquifitfon
des trefors du nouveau-monde. On ne fait
qu un premier pas vers la connoiffance de la vé-
rite , lorfqu on d it , en général, que le luxe eft
1 effet de 1 inégalité des fortunes. Cette idée