
Malgré c e s f a v e u r s 8c c e s e n c o u r a g em e n s 3 cette
( C om p a g n ie g é n é r a l e n e fubfifta dix années , qu'en
fubrogeant à fes droits, des négocians qui faifoient
de commerce, avec des permiflions particulières 8c
limitées, qu'elle accordoit. C e t état des chofes fit
juger que le commerce pouvoit fleurir davantage
do us l'empire de la liberté, 8c fervir à former une
marine puiffante. La compagnie des Indes occidentales
fut donc fupprimée en 1674 > 8c le roi
réunit à fon domaine toutes les terres qu'il lui
avoir concédées. Dès-lors le commerce devint
libre , 8c fut fav.orifé par le double aflranchifle- ;
ment de tous droits , fur les marchandifes exportées
dans les .colonies, & fur celles qui en étoient
importées.
Les réglemens néceflaires pour concilier la
.profpérité de nos établifTemëns en Amérique >
avec la fûreté des droits du roi , s'étant multipliés
au point que leurs difpofitions fe contrarioient,
:les lettres patentes du mois d’août 1717 , fixèrent
invariablement les privilèges 8c les conditions
.de ce commerce.
Dix apnées après , ceft-à-dire en 17 2 7 , des
lettres-patentes en forme d'édit , du mois d'oéto-
i>re , prefcrivirent les formalités 8c les précautions
les plus propres à profcrire toute relation
.des colonies avec les étrangers, à éloigner ceux-
ci , 8c à en réfervet le commerce dans fon entier,
.aux fujets du roi.
Parmi les coloniesfrançoifes, étoient alors com-
prifes le Canada 8c la Louifiane. Le premier a été
cédé à l ’Angleterre par lé traité de paix de 1763 ,
8c la Louifiane appartient à l'Efpagne depuis 1764.
Ajoutons aufli, que depuis 1783, le traité qui a
terminé la guerre d'Amérique, a afluré à la France
la pofleflion de Yijle de Tabago.
Les lettres-patentes-de 17 17 n'avoient alors permis
le commerce des ijles 8c colonies françoifes
en Amérique, qu’aux ports de Breft 8c de Bordeaux,
de Calais 8c de Cette , de Dieppe, de
Honfleur, la Rochelle 8c le Havre, de M orlaix
8c Nantes , de Rouen 8c Saint-Malo,
Marfeille 8c Dunkerque furent enfuite admifes,
en 1719 8c 1721 , au même commerce : enfuite
Vannes, en 1728.5 Bayonne 8cSaint-Valéry, en
1754 5 Cherbourg, Caen 8c Libourne, en 1756 5
T ou lon , en 1758 , mais avec-huit vaifleaux feulement
> Grandville 8c Fécamp, en 1763 j les*Sables
d ’Olonne, en 1764 5 Rochefor.t, en 177J 5 Sainf-
jBrieux, en 1-77.6.
Enfin, en 1784, Fartât du confeil du 31 o c tobre
, a permis, par l'article I I , de faire des arméniens
pour les (fies & colonies françoifes, dans
tous Les pores qui pourront recevoir , a moyennes marées
, des navires de la contenance de cent cinquante
tonneaux ; fous la condition que les négocians des
ports , qui n’ont pas encore fait le commerce des
colonies, 8c qui voudront profiter du bénéfice de
cet arrêt, feront tenus d'avertir, trois mois d'avance
, l’adjudicataire des fermes générales, de
l’intention où ils font de fe prévaloir delà faculté
qui leur eft accordée.
L'article III du même arrêt difpenfe les armateurs
8c négocians de l'obligation qui leur a été
im.pofée par les lettres patentes de 17 1 7 , de faire,
dans le port de leur armement, le retour des navires
qu'ils auront expédiés, à la charge néanmoins
que le retour des navires fera fait dans un
des ports du royaume ouverts au commerce des
colonies. Cette facilité avoit déjà été accordée par
une décifîon du confeil de 17^3.
Le même article porte encore, que les armateurs
,8c négocians feront tenus de faire, au greffe de l’amirauté
, leur foumiflion , par laquelle ils s'obligeront,
fous peine d’une amende de trois mille livres,
qui ne pourra être modérée,de faire revenir directement
leurs vaiffeaux des ijles , dans l'un des ports
ouverts au commerce des colonies,hors dans le cas
de relâche forcée , de naufrage ou autre accident
imprévu, qui fera juftifié par des procès-verbaux ;
8c que les négocians fourniront au bureau des
fermes du port de l'armement, une expéditiofl
de leurdite foumiflion, laquelle y fera retenue
pour l'exécution du préfent article, jufqu'au retour
du vaifleau dans le même port, 8c jufqu’à
ce qu'on y rapporte le certificat des commis de
l'un des autres ports, dans lequel le nayire aura
fait fon retour.
Toutes les denrées 8c marchandifes originaires
du royaume, jouififent, dès le lieu où elles font
chargées, de l'exemption des droits de route &
de fortie, lorfqu’eljës font déclarées pour les ijles
8c colonies françoifes de l'Amérique 5 fous la
condition d’être accompagnées d'un acquit à caution
qui aflure leur arrivée au port de l'armement.
Quant aux marchandifes étrangères, 8c arrivant
de l’étranger pour la même deftination , elles acquittent
l.es droits d’entrée du royaume, 8c ceux
qui font dûs dans l ’étendue des provinces qu'elles
traverfent, pour paffer au port de leur embarquement
i 8c jouifient feulement de l'exemption des
droits de fortie.
Il faut pourtant excepter de cette dafie, le boeuf
falé, les Jards, beurres, fuifs 8c chandelles , 8c
les faumons falés. Leur abondance ne pouvant
être trop grande dans les colonies , pour la faVôt-
ri fer, ces denrées ont été exemptes de tous droits
à leur importation dans le royaume, lorfqu'elles
font deftinées à être réexportées dans ces poffef-
fions, fuivant l.es lettres-patentes de 17^7 8c Fai>
rêt du 24 août 1748.
Dans tous ces cas, les négocians qui font venir
des denrées ou marphandiles, de quelque lieu du
joyaume
1 s L
royaume que ce fo it, font tenus d’en faire décla-
nation au bureau des fermes du lieu, ou au plus
prochain fur Ja route , pour être vifitées 8c envoyées
dans le port de l'armement, fous acquit
à caution 8c en franchife des droits de circulation.
A leur arrivée dans le port, les particuliers à
qui elles font adreflees, doivent faire leur foumiflion
fur un regiftre d'entrepôt, de les expédier
aux ijles dans l'efpace d’ un an ; 8c à l'expiration
de ce délai, les droits dont les marchandifes
ont été affranchies, par ces deftinations privilégiées
, font dans le cas d’être perçus, à moins
qu'il ne foit accordé une prolongation de l'entrepôt.
Voyez le mot E n t r e p ô t , ce qui eft dit
aux pages 65 8c 66.
Confèquemment à ces précautions , dans tous
les ports où le commerce des ijles eft permis, il
eft tenu un regiftre fur lequel chaque négociant
à un compte ouvert, pour fuivre le fort des marchandifes
qui lui font arrivées, pour s’aflurer
fi elles ne font pas diftraites de leur deftination,
8c pour en faire'payer les droits, avec une amende
fi elles ont été fouftraites.
S i , d'un c ô té , cette' régie des entrepôts eft ri-
goureufè ; fi elle excite journellement les plaintes
du commerce, fatigué par les vifîtes 8c les re-
cenfemens des contrôleurs aux entrepôts; de l'autre,
il faut convenir que , dans l'état des chofes, elle
eft néceflaire pour empêcher l’abus des exemptions
privilégiées , 8c des faufles deftinations. Malgré
toutes les précautions poffibles,îl eft encore
des inconvéniens qu'on ne peut pas prévenir. Par
exemple, un négociant fait venir, de l'extrémité
du royaume , des marchandifes qu'il deftine en
apparence pour le commerce des ijles, quoique
fon projet foit de les faire entrer dans la con-
fommation du royaume. Ces marchandifes font
exemptes de tous droits ; c'eft-à-dire, le négociant
fait que , par fa déclaration, il fe procure
du moins le crédit des droits , jufqu'à ce que fes
marchandifes foient vendues dans le royaume 5 il
peut même fubftituer des qualités inférieures, qui
relient toujours en entrepôt, à des efpèces de
qualités fupérieures qu'il a vendues ainfî, en fraude
des droits dûs fur leur valeur... C'eft fur-tout fur
les vins que ces manoeuvres fe pratiquent avec
facilité.
I l en eft de même des marchandifes de retour
des colonies. Elles font également mifes en entrep
ô t à leur arrivée, après avoir acquitté les droits
du domaine d’Occident, 8c ne payent ceux d’entrée
du royaume que lorfqu'elles y entrent pour
fa confommation ; 8c les mêmes abus n'ont lieu
qu'à l’égard des marchandifes deftinées à com-
pofer une cargaifon pour les colonies.
Parmi les marchandifes coloniales,les unesjouif-
T inances* Tome II.
fent d’un trahfît par terre, en exemption de tous
droits, au moyen d'un acquit à caution qui les
accompagne, & défigne le bureau par ou elles
doivent fortir du royaume ; tels .font1 les fucres
terrés , l'indigo, le rocou* le gingembre, les cafés
8c le Cacao,
Les autres efpèces , à l'exception des cotons-,
peuvent être expédiées,par mer, en franchife abfo-
lu e , pour le pays étranger. Dans ce c a s , il faut
juftifier qu'elles ont été déchargées au lieu de leur
deftination, en rapportant dans, les fix mois de
leur exportation , au dos de l'acquit à caution expédié
pour les fuivre, un certificat figné du conful
françois, s'il y en a , o u , à fon défaut, des ma-
giftrats ou juges des lieux, qui çonftate le déchargement,
à peine de payer le quadruple des
droits. Ces formalités font preferites par l’article
X V I des lettres-patentes de 1717.
Lorfque des .marchandifes coloniales font une
fois entrées dans le royaume, pour y être con-
fommées, 8c qu’enfuite elles font expédiées pour
le pays étranger, non-feulement on ne feroit pas
fondé à réclamer le rembourfement des droits d’entrée
, mais même on feroit affujetti au paiement
de ceux de fortie, excepté toutefois, pour les
fucres de toute forte, pour l’indigo, le gingembre,
le rocou, le cacao, 8c toutes Tes denrées qui font
du genre des drogueries-épiceries. Voyez le mot
'D r o g u e r i e .
En Bretagne, toutes les marchandifes des colonies,
à l’exception des cafés, ne font point fou-
mifes à cette régie des entrepôts, parce qu’ à leur
arrivé, celles acquittent, avec les droits de domaine
d’O ccident, ceux de^prévôté 8c d'oCtroi, foit que
les marchandifes paflent à l'étranger, foit qu'elles
entrent dans la confommation de la province.
Mais aufîi, lorfqu'elles font portées dans les provinces
voifines, elles acquittent les droits de confommation
dûs uniformément dans les autres ports,
fans égard pour les droits qui ont déjà été payés.
S i , comme on vient de le dire, le double
entrepôt des marchandifes deftinées pour les colonies,
8c de celles qui font rapportées de ces ijles ,
a de grands inconvéniens pour les finances de l'E tat
8c pour le commerce, il feroit donc fort à
fouhaiter qu'il fût fupprimé. C'eft ce qui arrive-
roit en adoptant une forme de régie 8c de perception
plus fimple, à l'égard du commerce dont
il s 'a g it, 8c des denrées qui en font l’objet.
On fentira fans doute mieux les avantages de
cette réforme, en difant que le préjudice que reçoivent
les revenus publics de l'état aCtuel des
chofes, eft d’environ trois millions, tandis que
le produit entier des droits de confommation qui
font acquittés, ne vont guère qu'à deux millions
I fix à fept cens mille livre s , en y comprenant
N n n n