
effets , de refferrer le commerce de la province
privilégiée dans fes propres limites ; ce qui feroit
un autre vice d’adminiftration , 8c une fource de
dépenfe & de contrebande.
Les droits decontrôle fur les aétes, exigent encore
une légiflation uniforme , afin d’empêcher ,
qu’ au détriment des revenus du roi , l’on ne foit
engagé à pafifer , dans un lieu plutôt que dans un
autre, les tranfaCtions fourni les à cet impôt: ainfi
les différens droits que je viens d’indiquer , & les
autres du même genre , doivent être fournis à des
tarifs femblables , 8c les changemens qu’on fe
propofcroit d’y apporter, feroient du reuort des
loix générales.
Confidérons maintenant la nature des charges
publiques , qui peuvent être modifiées de différentes
manières , fans qu’il en .réfuite aucun inconvénient
i telles font toutes les importions fur
les terres 8c fur les facultés perfonnelles , comme
les vingtièmes , la taille , la capitation , les corvées
, & même quelques droits locaux , tels que
ceux connus fous le nom d’aides & d’oCtrois des
villes.
; C e qui importe à l ’Etat , & aux rapports effen-
tiels dt toutes les parties du royaume , les unes
envers les autres k c'eft que la part de chaque province
à ces mêmes contributions, foit réglée d’une
manière jufte ; mais l ’unité de forme n’intéreffe
point l’ordre général. Il exifte , fans doute , un
point de perfection auquel on doit tendre } mais
l ’idée qu’on en conçoit, n’ eft pas la même pour
chaque lieu , puifqu’une infinité de circonftances
morales & phyfiques , influent fur ce jugement :
ainfi le choix du tarif le plus convenable pour la
capitation ; le mode de répartition pour la taille ;
la manière de pourvoir à la confection des chemins
j la conyerfion d’ un droit d’aide dans un impôt
fur le revenu des propriétaires de terres, ou
d’un pareil impôt dans une dîmé réelle ; enfin le
choix de plufieurs autres difpofitions-encore, peut
dépendre raifonnablement, & de la nature des
biens dans une province , & du genre de fon
commerce , & de la quantité du numéraire en
circulation , & même de la force plus ou moins
grande de l’habitude.
L ’expérience vient appuyer l’opinion que j’ai
conçue du peu de convenance des loix générales,
pour la réforme d’une grande partie des importions.
L ’on voit dans YHiJloire des Finances, plufieurs
travaux commencés pour effectuer de grands
changemens dans l’affiette des tailles , & qui n’ont
eu aucun effet : & fans porter au loin fes regards,
©n a connoiffance de deux loix générales , promulguées
, l'une en 1763 , pour ordonner dans le
royaume un cadaftre général , 8c une bafe uniforme
de répartition 5 l’autre en 177^ , pour abolir
les corvées , & pour en convertir la dépenfe
dans une impofition additionnelle aux vingtièmes :
ces deux lo ix , quoiqu’enregiftrées l’une & I’aU-
tre dans un lit de juftice , ont été formellement
abandonnées. Cependant , fi l’on y prend garde
, Ion verra que ce fort , commun à tant
d autres inftitutions de finance , tient à des cau-
fes dont on doit, reffentir les effets dans tous
; les tems.
Ainfi , lorfqu’en s’occupant de la réforme de
ces fortes d’impôts , ou d’autres d’un genre fem-
blable, on voudra que le bien dont on aura conçu
1 idée, foit le réfultatd’un réglement uniforme &
général, on éprouvera confiammeut, & les difficultés
inhérentes aux" circonftances particulières
■ de chaque province, & toutes celles qui naîtront,
tantôt d’ un attachement à d’anciens ufages, tantôt
d’ un efprit de défiance fur les vues fifcales de
l’adminiftration 5 enfin l’attente probable de lafler
en peu de tems la confiance du gouvernement,
entretiendra toutes ces oppqfitions.
En effet, fi l ’adminiftration jéfifte quelquefois
avec courage aux réclamations, dans le tems
qu’ elle eft encore animée par les motifs qui l’ontgui-
dée , 8c par l’approbation qu’une partie du public
accorde à fes vues , ce courage n’eft plus le même,
à mefure que le zèle du premier moment s’affoi-
b lit , & que l’opinion publique, diftraire par de
nouveaux objets , laifle je miniftreaux prifes avec
les difficultés : fouvent elle même fe joint par inconstance
à la critique que font des meilleurs projets
, & ceux qui , bien traités de la fortune-,
haïflfent tous les changemens} & ceux qui s’ attachent
aux opérations d’un miniftre , pour effayer
de lui nuire 5 & ceux qui font une guerre d’amour-
propre avec tout le monde.
Que fi, fur ces entrefaites, l’adminiftrateur des
finances eft changé, fon fuccefleurs fe hâte de
fuivre une autre route , ne fût-ce que pour faire
preuve d’une opinion à lu i , & pour fe donner
l’air d’un architecte, en commençant par détruire.
Enfin, on ne peut pas même attendre que le fou-
verain tienne aux loix d ’économie politique, avec
cette vigueur de fentiment qui naît de la convie-,
tion ; parce que l’utilité de ces lo ix , n’eft pendant
long-tems qu’une forte d’abftraCtion , tandis
que les réfiftances & le bruit, font une fatigue
réelle.
Pénétré de ces réflexions , j’avois penfé qu’en
réfervant les loix générales pour les difpofitions
fimples , 8c dont l’exécution permanente pouvoit
être l’effet d’une première impulfion de l’autorité
, il falloît trouver quelqu’àutre inftitution
pour venir à bout des améliorations qui exigeoient
non-feulement de la fuite 8c de la perfévérance ,
mais encore des modifications appropriées aux
circonftances particulières de chaque partie du
royaume.
C ’eft fons ce point de Yue que l’établiffement
des adminiftrations provinciales m’ avoit paru un
des moyens les plus efficaces pour faire le bien.
J ’avois confédéré que de femblables adminiftrations
pouvoient feules aflurer tous les avantages qu on
a droit d’attendre, 8c de la continuation du meme
efprit, & d’une traduction fucceflîve d’obferva-
tions, 8c d’ une réunion de toutes les connoif- ;
fances locales , & de l’appui de la confiance publique.
Enfin, j’avois penfé que la conception ,
l ’exécution & le maintien de toutes les difpofi-
rions utiles à chaque province , étoient une tache
trop difficile pour être confiée uniquement aux
foins des hommes q u i, avec des talens & des
fentimens divers , fe fucc.èdent à pas précipités
dans la carrière de l ’adminiftration des finances.
Je dois aller au-devant d’une obfervation qu’on
fera vraisemblablement. J’ai moi-même propofé
au roi des loix générales pour les. vingtièmes ,
la taille & la capitation } ces difpofitions n’étoient-
elles pas en contradiction avec les principes què
je viens d’établir ? c’eft un doiite qu’il eft aifé
d’éclaircir. $
La loi fur la taille 8c la capitation, avoit pour
but d’empêcher formellement l’augmentation arbitraire,
de la forhme de ces impôts dans chaque
province. Un arrêt du eonfeil, émané du département
des finances, ou de celui de la guerre ,
pour quelques provinces, fuffifoit pour étendre
cette partie des contributions des peuples : le
roi , fur le compte que je lui rendis des incon-
yéniens qui jéfultoie*nt d’un pareil ufage , prit
la réfolution généreufe de circonfcrire lui même
cette facilité, en déclarant que la taille, à l ’avenir
, ne pourvoit plus être accrue fans l’autorité
d une loi enfégiftrée dans fes cours .Cette difpo-
fition, bien loin de gêner les modifications que
la nature de cet impôt pouvoit exiger , les ren-
doit plus aifées, puifque de cette manière il exif-
toit une bafe fixe qui permettoit aux adminiftrations
particulières de chaque province , de s’occuper
fans défiance d’ une nouvelle forme de répartition
, 8c des moyens d’établir une diftribution plus
égale 8c moins arbitraire.
La loi fur les vingtièmes n’étoît pas , on en
convient , d’ un même genre , puifque le roi s’y
propo.foit l’établiffement d’une répartition égale
de l’ impôt , entre les divers contribuables ; mais
cette lo i , antérieure à i’inftitution d’aucune admi-
niftration provinciale, corrigeoit feulement ce
qu’il y avoit de plus défectueux dans les moyens
dont on avoit fait ufage pour parvenir à la con-
noiflance du revenu des biens fonds. L ’on pouvait
fe plaindre avec fondement, de l'arbitraire
qui régnoit dans l’ordre fucceflif des vérifications
, & fur-tout des incertitudes & des importunités
. qui naiffoient du retour fréquent aux
mêmes examens. Les cours , en conféquence ,
avoient infifté fortement fur l’interruption abfolue
de ces vérifications, & elles avoient demandé
que les vingtièmes de chaque contribuable fuffent
fixés invariablement, tels qu’ils fe trouvoient à
cette époque. C ’eût été confacrer, dans plufieurs
provinces, des inégalités plus grandes que celles
dont on avoit été frappé, lorfque les premières
recherches avoient été ordonnées, puifqu’en s’arrêtant
tout à-coup, une partie d’une généralité
auroit été taxée d’après un ancien ta r if, & l’autre
d’ après un nouveau. Le roi jugea donc plus conforme
à fes principes de fageffe , de remédier
aux inconvéniens des vérifications , que de renoncer
au but qu’on s’étoit propofé dans J'établif-
fement de ces difpofitions. En conféquence fa
majefté ordonna, par une loi enregiftrée , qu’on
ne procéderont déformais à l’examen des vingtièmes,
que par paroi fie entière, afin qu’ il n’y
eût aucune apparence de choix entre les contribuables
, 8c auffi afin que les perfonnes chargées
au nom du roi de ces opérations, puffeht tirer
des lumières de la réunion des propriétaires , 8c
que ceux-ci, par le rapprochement de leurs'contributions
refpeCtives , fuifent plus en état de
juger de l’équité obfervée dans le réglement du
tarif. ;
Enfin , 8c ç ’étôit la condition la plus efîen-
tielle, fa majefté déclaroit que le vingtième de
chaque paroifle ainfi déterminé, l’on ne pourroit
ni changer la contribution d’un propriétaire , ni
la foumettre à aucun nouvel examen , avant
une révolution de vingt années. Une telle difpo-
.fition ne permettoit plus d envifager ces vérifications
comme importunes} 8c cependant on auroit
fucceflivement approché d’une répartition , fi
non parfaite , du moins infiniment plus égale.
Ces opérations ont été fuivies avec régularité :
l’adminiftration des financesrecommandoit foigneu.
fement un efprit de juftice 8c de circonfpec-
tion} 8c fans doute que MM. les Intendans avoient
adopté les mêmes principes, puifque je puis
citer comme une circonftance remarquable , que
depuis l’époque du nouvel ordre établi, il n’y
a pas eu dix requêtes portées au comité des finances
, pour fe plaindre d'aucun réglement 4e vingtième.
L ’on ne fauroit douter que chaque jour n’eut
ajouté une plus grande perfection à ces travaux,
& qu’il n’en fut encore ré fui té des lumières utiles
pour parvenir à la répartition plus égale des autres
importions territoriales. Cependant en prêfenrant
à l’enregiftrement le troifîème vingtième , l’on a
propofé au roi d’arrêter ces examens, & de fixer
immuablement les vingtièmes, tels qu’ils fe trouvoient
à cette époque.
La réunion de ces deux difpofitions s’explique
; facilement} 8c il n’eft rien de fi commun en
! France , que le facrifice d’une vue d’adminiftra