
François I . fe propôfant d’établir rûniformité,
par fon ordonnance du mois d'avril 1541 , fixa
lur-tout le fel qui feroit vendu, troqué ou échangé
aux fàlines & marais de Bretagne ,- Poitou ,
Saintonge, ville & gouvernement de la Rochelle ,
Guienne , Picardie , Normandie , Languedoc ,
Provence, Dauphiné, & autres lieux, provinces
& endroits du royaume, avec quelques perfonnes
que ce fû t , fes fujets ou autres , fans nul except
e r , une fomme de vingt-quatre livres tournois ,
pour chaque muid de fe l, mefure de Paris, payable
par le vendeur du fel , 8c lors de la vente,
pour tous droits de gabelle , quart Sc demi-quart,
quint & demi-quint.
Cette nouvelle forme de perception excita les
.plus vives repréfentations de la part des propriétaires
des falines 8c des marchands de fel. Ils ex-
’pofèrent que fi le fel qu’enlevoit l’étranger reftoit
affujetti aux droits de la gabelle , c ’étok priver le
royaume de cetre branche de commerce j que la
pêche , par la même raifon, cefleroit entièrement.
Leur réclamation fut écoutée, 8c par une nouvelle
ordonnance du 29 mai 1543 , le droit fur les fefs
enlevés par les étrangers des marais ., fut fixé 3
vingt fols par chaque muid, mefure de Paris 5 droit
qui feroit payé, par les propriétaires des marais
falans, comme droit royal.
Les étrangers furent déclarés exempts de payer
aucun droit de gabelle , pour les feis qui feroient
par eux enlevés pour être confommés hors du
royaume , en obfervant néanmoins lés formalités
que prefcrit cette ordonnance , pour prévenir les
fraudes qui pourroient être commifes à ce fujet.
Les pêcheurs des provinces de Bretagne » Poito
u , ville 8cgouvernement de la Rochelle, Saintonge
8c Guienne , furent pareillement affranchis
du paiement de la gabelle des fels-qu’ ils enleve-
roient des marais pour les employer à leur pêche j
& la même exemption fut accordée aux pêcheurs
des provinces de Normandie Sc de Picardie.
Les propriétaires des marais y réfidans, ou dans
une diftance de dix lieues , furent autorifés à
prendre & retenir , pour leur ufage , & celui de
leur maifon 8c famille feulement, la quantité de
fel néceffaire , fuivant les rôles qui en feraient
dreffés.
5 Les habitans de Bretagne forent aufll exemptes
du droit de gabelle des fels delHnés à leur con-
fommation , fuivant la délivrance qui devoir leur
en etre faite , d apres les rôles qui feroient formés.
Le droit de gabelle , qui , par l ’ordonnancé du
mois d avril 154 2, avoit été réduit, par muid de
fel , mefure de Paris , â vingt-quatre livres tournois
, dans h. vue de compenfer l’affujettiffement
des fels enlevés par l’étranger j & de ceu* deftinés ,
tant’ à la Bretagne qu’à la pêche , fut reporté &
quarante cinq liv. par cette ordonnance de 1 y43 ,
& lur fon produit fut afligné le paiement des gages
des cours de parlement , chambres des comptes,
& cours des aides.
Il fut réglé que lorfqu’ on enlëveroit plus de dix
muids de fel , le paiement du droit de quarante-
cinq livres fe feroit au moment de l'enlèvement.;
mais que quand^ la‘ quantité feroit plus confidéra-
b le , on auroit l’option , ou de payer le droit de
gabelle for les marais “o u , en donnant caution, de
ne l’acquitter que par quart , en quatre paiemens
égaux.
Les pays de Languedoc , Provence & Dauphin
e , font déclarés , par cette ordonnance , n’être
point fujets- à fes. difpofitions. 11 paroît par celle
du 6 décembre 1544, qu’ il étoit réfulté beaucoup
d inconvéniens de la liberté accordée aux marchands
, après avoir acquitté la gabelle , de transporter
leur fel où bon leur fembleroit. Des pro-
virices s’en trouvoient fuFchàrgées , & d’autres en
manquoient. Il n’y avoit plus, d’ailleurs, aucune
police ni ordre dans les ventes , ce qui occafion-
noit des débats continuels entre les marchands.
Du moins, ces cdnfîdérations font rappellées dans
cette dernière ordonnance , comme ayant déterminé
François I. à ordonner que tout le fel feroit
remis dans les magafins 8c greniers précédemment
établis dans les différentes généralités , 8c que la
vente en feroit faite par les officiers de ces greniers
chacun dans leur renort.
Il enjoignit aux généraux des finances de- prendre
les mefures , & défaire les diligences né*
ceffaires pour que tous les magafins fofient fournis
de fel pour deux années , conformément aux anciennes
ordonnances..
Ces difpofitions n’etoient que la fuite 8c l'exécution,
d’une ordonnance du mois de juillet précé*
dent| qui faifoit cêfier toute perception, de gabelle
a l achat des fels fur les marais, en remettant
les chofes , à cet égard., fur l’ancien pied.
Cette ordonnance de 1 avoit prefcrit que ,
pour la fourniture , 8c en même tems pour la per*
ception des droits de gabelle,fur le pied dequarante*
cinq livres par muid, mefure de Paris, les magafinS
8c greniers feroient rétablis , 8c qu’il l en feroit
placé même dans les provinces où cet établiffement
n’avoit pas encore eu lieu.
i Les marchands conduifant les fels» le long des
rivières de Loire 3 Seine , Somme, 8c autres y
affluentes, pour le fourniflement des magafins à
fel des généralités de Languedouy > Normandie >
Outre-Seine , Yônne Sc-'Picardie , fe plaignirent
que la perception des péages , prétendus en ef-
fence de fe l , leur caufoit des retardemens 8c des
féjours très-préjudiciables , eh ce qu’ils étoient
obligés d’attendre les fermiers de çes droits, éa
qu’ ils éprouvoient, de leur part, beaucoup de
difficulté fur la qualité des fels qu ils leur livroient 5
ce qui caufoit des déchets 8c du dérangement dans
leur chargement: ils demandèrent que pour faire
ceffer ces inconvéniens, ces péages fuflent eva- »
lues en argent 5 leur demande fut accueillie par
édit du 9 mars 1546 } fes difpofitions furent en-
fuite confirmées par ceux des 15 août 1579 ,■ oc
28 avril 14 9 9 , 8c notamment par l’article I , du
titre 12, de l’ordonnance des gabelles, ainfiqu on
le dira ail mot Péage.
La nouvelle forme donnée à la perception de la
gabelle par les ordonnances 8c réglemens que 1 on
a rftppellés , excita les plus grands troubles dans
la Guienne 8c les provinces limitrophes.
Dès l’année 1 y 47 , le peuple , en Saintonge ,
maffacra huit des officiers du grenier a fel j les
habitans de Périgueux maltraitèrent 8c chafserent
de leur ville ceux qui avoient été envoyés pour
ÿ publier l’édit de la gabelle.
Henri d’ Albret,. roi de Navarre , 8c gouverneur
de Guienne , envoya quelques troupes qui.,
troD foibles pour réfifter à la multitude J furent
obligées. de fe retirer } la révolte s’étendit à Bordeaux
, où Triftan de îvlorienoé , lieutenant? de
roi en Navarre , fe tranfporta, 8c fut maffacre.
Le connétable de Miontmorency ne rétablit 1 ordie
que par des exemples de févérité.
Ces troubles ayant été entièrement diffipés,
les habitans dit Poitou, de la Saintonge , des
villes 8c gouvernemens de la Rochelle, de 1 An-
goumois, du haut 3c bas Limofîn, de la haute
8c baffe Marche , du Périgord , >8c des enclaves
8c anciens refforts de ces pays, offrirent a Henri
II une fomme de quatre cens cinquante mille libres
pour obtenir la fuppreflion de la gabelle,
établie par François I , ainfi que’ des greniers 8>c
magafins à fel , & des officiers Qui avoient ete
gréés & infiitués à: ce fujet : ils fe foumettoient a
rembourfer les finances que le roi avoit reçues
pour ces offices 3 & fupplioient le roi de rétablir
fes chofes dans leur ancien état , qui étoit le
paiement du quart & demi-quart fur le fel , qu ils
s'engageoient à porter chaque année jufqu a la concurrence
de quatre-vingt mille livres. Ces offres
furent acceptées ; l’argent étoit à quatorze
livres onze fols huit deniers le marc , taux moyen
des trois fixations fous ce règne. Un édit donné à
Amiens au mois de feptembre 1549 > téduifit les
droits au quart & demi quart du prix du fel , fui-
Yant l’ancienne forme; mais ces droits furent encore
rachetés poftérieurement ^ & fupprimés. par
un édit du mois de décembre. 155 J.
le s pays compris dans cet édit, font lé Poitou
& ancien reffort/la Saintonge , les villes & gouvernemens
de la Rochelle j Marennes 3 -Oleron 3
Alleyevt j Hiers, Rhé & autres ifles adjacentes,
i'Angoumoîs 3 le haut & bas Liniofîn « la haute
& baffe Marche , le pays de Çombrailles 3 le
Franc-aleu 3 le Périgord 3 la fenéchauflee de
Guienne , & le pays Bordelais, y compris Sour
lac l’Agenois . le Bazadois . le Qucrcy . lé
Condomois. les Landes, Armagnac . Fefeozac.
Comminges | Saint-Giron , les Viguerie.s: de Rivière
& Verdun i & autres pays 8c beux qui. [e
foürniffoient de fel dans les marais falans de 1 oi-
to u , Saintonge, Guienne, & des ifles adjacentes.
On voit par cet édit que dans la fomme fixes
pour le rachat de la gabelle , n’étoit point comprime
celle de neuf mille fix cens liyres pour la
compofitiôn de l’Auvergne.
Cette province , à l’exception d’une partie de
la haute Auvergne qui étoit des - gabelles du
Languedoc, ayoit été admife a payer , pour .tenir
lieu de la gabelle , un équivalent annuel d’abord
fixé à neuf mille fix. cens livres. Différens édits de
Charles VII & de Charles VIII , entr’autres celui
du 14 octobre 1493 , avoient fixé les rivières d’A-
lagnon 8c de Jourdanne, pour fervir de limjtes entre
les paroiffes qui dévoient être affujetties à fe
fervir du fel de Languedoc , & cë!les; qui avoient
la liberté de fe fervir du fel de Guienne & d&
Poitou.
François I ayant ordonné le rétabliffement des
greniers à fel en Auvergne , Henri II , par différens
édits , 8c entr’autres par des lettres-patentes
du mois d’o&obre .1557, permit aux habitans de
la partie de l’Auvergne ^indépendante de la gabelle
de Languedoc, de pYendre,où bon leur fembleroit
le fel dont ils auroient befoin , fans payer
aucun droit de gabelle , moyennant une fomme
de quatorze mille quatre cens livres , que les gens
du tiers-état du pays s’obligèrent de payer annuellement
au roi par forme d’équivalent. C e t
équivalent a été impofé avec la taille , 8c diftinguç
long-tems par un article féparéj il eft aujourd'hui
confondu avec le principal de cette impofition.
En 1604 , le fermier général des gabelles de
Languedoc prétendit affujettir vingt-quatre pa-
rôiffes de l'éleclion de Saint-Flour au fel de Languedoc
5 mais par arrêt contradiéloire du confeil,
du 17 avril 162 ƒ , il fut permis à ces vingt-quatre
paroiffes de fe fervir du fel de Guienne 8c de Poitou
, attendu qu’ elles étoient en deçà des rivières
d’Alagnon 8c de Jourdanne. Le fermier renouvela
en 172.6 la même prétention ; relativement
à la paroi.ffe de Bredon. $ mais l’ arrêt du 27 août
1726', la maintint dans le privilège de fe fervir du
fel de Guienne 8c de Poitou , comme étant de la
partie de .l’ Auvergne fujette au droit de l’équivalent
, 8c en-deça de la rivière d’Alagnon,. du côté
du Limofin.
En donnant attention aux difpofitions des or