
addition -à*impôt fur la terre, parce que les impôts
fur les objets néceffaires à tous les individus
pauvres ou riches , conîlituent toujours le prix
de la main d’oëuvre , foit qu’ils foient perçus en
recueillant oiren confommant.
Mais lés impôts fur les confommations particulières
aux riches, font dans un cas différent5 ils
n’ influent point fur les prix élémentaires des
chofes , & c’eft une manière adroite de tempérer
l ’inconvénient des gros intérêts. Cependant
ces impôts fur la contamination ont pareillement
un terme qu’il eft important de ne point
excéder. ' ,
Vo y e z encore la fin de cet article, où le
meme écrivain développe de nouvelles idées
propres à faire voir que les nouveaux fyftêmes,
en matière d’impofition , ne ttouvent pas moins
de difficultés dans les effets de l’opinion & de
l ’imagination , que dans l’incertitude de leur
réfultat.
Ici fe préfente la queftion de favoir s’ il vaut
mieux, dans le befoin, mettre des impôts nouveaux
que d’emprunter 5 elle a été traitée au mot Em p
r u n t , pag. 42. Voyez ce mot. On fe contentera
d’ajouter , que certainement, il vaudra toujours
mieux emprunter qu’impofer, lorfqu’on pourra
trouver dans l’économie des dépenfes,dans des dif-
pofitions d’ordre & de génie, des reffources propres
à fournir aux intérêts annuels de l’emprunt} ou
lorfque le crédit fortifié par la confiance, dans
un adminiftrateur, permettra de ne donner qu’ un
intérêt honnête & modéré. ,
M. Hume, dans fes di/courspolitiques3 en a eon-
facré un , à examiner l’effet des impôts. Il ne peut
être inutile de rapprocher fes réflexions de celles ;
qu’on vient de lire.
Lorfque l ’on met un impôt Çm les denrées qui
font contaminées par le peuple, il femble qu’il
doive s’enfuivre naturellement que le peuple '
retranche quelque chofe de fa manière de vivre
ou qu’il vende plus cher fa peine pour faire
porter au riche tout le fardeau de Y impôt',
mais les nouvelles impofîtions prodüifent un
troifième effet, c’eft que ces pauvres augmentent
leur induftrie, font plus d’ouvrage , & vivent,
auffi-bien qu’auparavant, fans demander davantage
pour leur, travail. ,
Cela arrive naturellement toutes les fois que
les impôts font modérés , qu’ils font mis par
dégrés & qu’ils ne regardent pas les chofes nécef-
faires à fa vie 5 & il eft certain que de pareilles
difficultés fervent fouvent à exciter l’ induftrie du
peuple a & à le rendre plus laborieux & plus i
opulent , que d’autres qui poffèdent de plus
grands avantages. Nous pouvons obferver , comme
un exemple de ce que l’on avance ici , que »
les nations les plus commerçantes n*ont pas tour
jours pofledé la plus grande étendue de terré fertile
, mais qu’au contraire elles ont eu à combattre
beaucoup de défavantages naturels.
T y r , Athènes , Carthage, Rhodes, Gênes^
V enife, la Hollande, en font des meuves. Dans
toute l’Hiftoire , ot\ne trouve que trois exemples
de pays vaftes & fertiles, qui ayent poffédé beaucoup
de commerce 5,les Pays-Bas, l’Angleterre ,
& la France : les deux premiers femblent avoir été
engagés par les avantages de leur fituation maritime
, & par la néceffité où ils fe trouvoient de
fréquenter les ports étrangers , pour fe procures
ce que leur propre climat leur refufoit.
A l’égard de la France , le commerce s’eft établi
très-tard en ce royaume , & paroît être l’effet
de la réflexion & de l’obfervation , dans un peuple
induftrieux & entréprenant , qui remarquoit
les richeffes immenfes qu’acquerroient ceux de fes
voifins qui cultivoient la navigation & le corn-,
merce.
Les places que Cicé ron , dans fon êpître à A t-
ticus , nomme comme étant de fon tems é;n pof-
feffion du plus grand commerce , font Alexandrie,
C o lch o s , T y r , Sidon, Andros, C h yp re ,
JaPamphilie, la L y c ie , C h io s , Byfancô, Leffios,
Smyrne , Milet & Coos. Si l’on en excepte Ale*
xandrié, tous ces lieux étoient de petites ifles , ou
des territoires très-étroits , & cette ville devoit
entièrement fon commercé au bonheur de fa fituation.
Puifqu’ on peut donc regarder quelques nécefli-
tés ou des défavantages naturels, comme favorables
à l’ induftrie, pourquoi des fardeaux artificiels
ne pourroierit-il's pas avoir le même effet ? Le chevalier
Temple, attribue l’induftrie des Holland'ois,
uniquement à la néceffité qui provient de leurs
défavantages naturels. 11 fait valoir fon fentiment
par une comparaifon très-frappante avec l’ Irlande,
o ù , dit-il, par l’étendue de la richeffe du fo l, &
la rareté du peuple , toutes les chofes néceffaires à
la vie font à fi bon marché, qu’ un homme induftrieux
en deux jours de travail peut gagner affez
pour vivre toute la femaine.
Ces circonftances font le véritable fondement
de la pareffe attribuée à cette nation 3 car lès hommes
préfèrent naturellement le repos au travail,
& ne fe foumettront pas à la peine s’ils peuvent
vivre oifîfs , quoiqu’il foit vrai auffi, que lorfque
le befoin les a fournis à l’habitude du travail de
bonne-heure , ils ne peuvent plus l’abandonner „
cette habitude l’ayant rendu néceffaire à leur fanté
& à leur diffipation : peut-être même le paffag,e
n’eft-il pas plus difficile/d’un confiant repos aut
travail, que d’un travail confiant au repos.
On a toujours obfervé que dans les années de
lîfe tte , fi elle n’eft pas extrême, que lés pauvres
travaillent davantage , & vivent mieux , que dans
les années de grande abondance, où rls-s’adohnent
à la pareffe & à la débauche. J’ai ouï-dire a un
manufaélurierconfîdérable, que dans l’année i 7 4° 3
où les bleds & les provifions. de toute efpece
ét.cdej^t très-chères, fes ouvriers avoient non-feulement
.trouvé le moyen de vivre , mais qu Üs
avoient payé des dettes,qu’ils avoient contractées
dans . les années précédentes , qui étoient plus favorables
8c plus abondantes.
Cette opinion, à l’égard des impôts, peut donc
être admife à quelque egard 5 mais il faut prendre
garde à l’abus , qui eft très-facile. Les impôts ,
ainfi que la nécèffité , lorfqu’ils font pouffes trop
lo in , détruifent l’induftrie, en faifant naître lé
découragement & le défefpoir } & même avant
que de produire cet effet , ils renchériffent les gages
du laboureur & du manufacturier , 8c augmentent
le prix de toutes chofes^
Un gouvernement attentif 8c défintéreffé , ob-
fervera le point où le bénéfice ceffe 8c le.dommage
commence 5 mais comme le caractère oppofé eft
beaucoup plus commun , il ■ eft ;à craindre que; les
impôts y par toute l’Europe , ne fe multiplient au
point d’écrafer entièrement toute induftrie, quoi-
_que peut-être leur première augmentation, 8c quelques
autres, circonftances , ayent pu contribuer à
Laccroiffement de ces avantages.
Les impôts, les plus avantageux font ceux qui
font levés fur les confommations , fpécialement
celles de luxe , parce que de pareilles taxes font
moins fenties par le peuple. Ils paroiffent, en
quelque forte , volontaires , puisqu’ un homme
peut choifir jufqu’où il peut faire ufage de la commodité
qui ell taxée. Ils fe payent par degrés , 8c
d’une manière infenfible , 8c étant confondus
•avec le prix naturel de la denrée , ils font à peine
appèrçus. par celui qui la. contamine, Leur feul.désavantage,
eft que les frais pour les lever font tre.s-
confîdérables.
Les taxes fur les poffeffions fe lèvent fans de
grands frais ; mais elles ont tous les autres défavantages.
-Plufieurs Etats font néanmoins obligés
d’y avoir recours , pour fuppléer au défaut des
autres importions. ’
Mais les .plus p.ernicieufes de toutes les taxes ,
font celles qui font arbitraires } elles deviennent,
par la manière dont elles font admi'niftrées, des
efpèces de punitions^ de l’induftrie -, & par leur
inégalité inévitable , elles font réellement plus à
charge que par le poids qu’ elles impofent •: uinfi il
eft étonnant quelles ayent Lieu chez quelques nations
eivilifées.
En général , toutes les taxes comme la capitation
, même lorfqu’ elles pe font pas arbitraires ,
ce qu’elles font communément , doivent paffer
pour dangereufes, parce qu’ il cil fi aife au fouve-
rain d ’ajouter un peu plus à la première foraine,
que ces impofitions deviennent tout-à-la-fois op«
preflives &-infupportables.
1 D ’ un autre cô té , une taxe fur les commodités
s’arrêtera d’elle-même , & un prince éprouvera
bientôt, qu’en augmentant l 'impôt , il n’augmentera
pas fon revenu , puifque cette augmentation
peut tout-à-fait ruiner le peuple.
. Les hiftoriens difent , qu’ une des premières
caufes de la deftruétion de l’empire Romain , rut
le changement que Conftantin fit dans les finances
, en fubftituant une capitation univerfelle au
lieu de la.plupart de ces dîmes , droits de douane
8c d’accife., qui compdfoient anciennement le revenu
de l’empire.
Les peuples furent, dans toutes les provinces ,
tellement foùl'és & opprimés par les traitans ,
qu’ils fe virent forcés de chercher leur refuge fous
les armes conquérantes dés Barbares , qui avoient
peu de bèfoins encore moins d’a r t , defquels la
domination fe riouvoit, par cette raifon , préférable
à celle des Romains.
II y a une opinion qui n’eft que trop commune,
que les impôts , de quelque manière qu’ils foient
levés ; tombent à la fin fur les terres , & j’avoue
quelle peut être utile à l’Angleterre , dans l’efprit
des pofïefleurs de fonds entre les mains defquels
eft l’adminiftration du gouvernement. Elle les
oblige à avoir de grands égards pour le commerce
& pour l’induftrie. Je penfe néanmoins- que ce
principe, quoique avance par un écrivain célébré .
eft fi peu fondé de raifon , que fans fon autorité,
il n’eut jamais été reçu par perfonne.
: Tout homme, affurément, fouhaite de fecouer le
fardeau d’une taxe qui eft .impofée , & le rejetter
fur les autres ; mais comme chaque homme a la
même inclination,. 8ç fe tient, fa t la défenfive, je
ne vois pas pourquoi , dans ces efforts recipioy
nues , une claffe d’hommes l’ emporteroit fur une
autre i. & comment peut-on réellement imaginer ,
que l’homme qui a des terres fera la viélimé de la
totalité , & qu’ il ne fera pas en état de fe défendre
auflî-bién que les autres ï Tous les marchands,
à là vérité , fouhàitefoient qu’ il devînt leur proie ;
mais quand il i f / aurait pas d’impô« , *ils auraient
toujours la même inclination & les"mêmes moyens
ceux q u i, avant les impôts, le défendent contre les
marchands , lui ferviront encore après , & les
forceront eux-mêmes de partager |e fardeau avec
lui.
Je terminerai ce fujet , en obfervant que nous
avons-, à l’ égard des ïmp&cs , un exemple dè ce
qui arrive fouvent dans les inftruaions politiques,
hue les conféquences’des chofes, font aiatnetràle-
.1 ' .