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» d allez bonne heure les grandes & générales maxi-
» mes . . . . Ce défaut a fait , qu avec l ’âme du
» monde la moins méchante , il a fait des injuf*
» tices ; qu’avec le coeur d’Alexandre, il, n’a pas
» été exempt, non plus que lu i , de fôibleffes ;
» qu’avec un efprit merveilleux > il eft tombé dans
» des imprudences*
» M. de Turenae a eu dès. fa jeuneffe tontes les
» bonnes qualités, & il a aquis les grandes d’àffez
» bonne heure. Il ne lui en a manqué aucune que
» celles dont i l ne s’eft point avifé. 11 avoit pref-
» que toutes les vertus comme naturelles, & il
» n a jamais eu le brillant d’aucune. On l ’a cru
»> plus capable d etre à la tête d’une, armée que
»> d un parti ; & je le crois au ffïp a rc e qu’il n’étoit
» pas naturellement entreprenant : mais toutefois
» qui le .fait? Il a toujours eu en tout, comme
» en fon parler , de certaines obfcurices, qui ne fe
» font dèvelopées que dans les occafions , mais
» qui fe font toujours dèvelopées à fa gloire
.V oilà l ’hiftorien ;• voici l ’orateur.
T ^ t7°n jamais en deux hommes , dit Boffuetr
*> les memes vertus avec des caraéVères fi divers-,
» pour ne pas dire fi contraires ? L ’un paroît agir
» par des réflexions profondes; & l ’autre , par de
» foudaines illuminations : celui-ci par conféquent
» plus v if , mais fans que fon feu eût rien de pré-
» cipite; celui-là d’un air plus froid, fans^avoir
» jamais rien dé lent,, plus hardi à. faire qu’à
» parler, réfolu & déterminé au dedans , lors même
* paroiffoit embarrafle au dehors. L ’un y, dès
» qu il paroît dans tes armées., donne une Jiaute
» idée de fa valeur, & fait attendre quelque chofe
» d extraordinaire ; mais toutefois .s’avance par
>r ordre, & vient comme par degrés aux-prodiges
» qui ont fini le cours de-fa vie: l ’autre comme
j» un homme ihfpiré , des fa première bataille ,
» s égale aux ifiaîïres les plus confommés. L ’un ,
•» par de vifs & continuels efforts,, emporte l ’àd-
» miration du genre humain , & fait taire l ’envié :
B 1 ,aAutre Je**e d!abord une fi vive lumière, qji’elle
» n ôferoit l ’attaquer. L ’un enfin', par la profondeur
» de fon génie & les incroyables reffources de fon
» courage, s’élève au deffus desplus grands périls,.
» 8c fait même profiter de toutes les infidélités de
» la fortune : l ’autre, & par l ’avantage d’ïrne
» fi haute- naiffance, & par ces' grandfcs penfées
» que le Ciel envoie, & par une efpèce d’inftinéi
» admirable- dont les hommes ne connoiffent
» pas le fecret, femble né pour entraîner la for-
» tune dans fes deffeins, & forcer les. defUnéès
». &c ».
Rien n’éblouît tant'les îeâeurs faperficjels que
les Portraits de fantaifie ; rien ne decèle mieux
î ignorance^ de l ’écrivain aux ièux dé l’homme ihf-
truit & clair-voyant. Sans même confulter lès faits
8c avoir prefent le modèle un leéleur judicieux
diftingue un Portrait qui reffemble d’un Portrait \
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vague & imaginaire* Par exemple , Ibrfque le cari
dînai de Retz dit de madame de Longueville r-
« Elle avoit une langueur dans fes manières , qui
» touchoit plus que le brillant de celles même
» qui étoient plus belles ; elle en avoit une, même
» dans 1 efprit, qui avoit fes charmes , parce qu’elle
» avoit des réveils lumineux & furprenants. Elle
» eût eu peu de défauts , fi la galanterie ne lui
» en eût donné beaucoup. Comme fa. paffion i’obli-
» gea de ne mettre fa politique qu’èn fécond dans
» la conduite, ; héroïne d’un grand p a r ti,. elle en.
» devint l’aventurière » ; lorfqu’il dit de màdanie
de Chevreufe : « Si le prieur dès Chartreux lui
» eût p lu , elle eût été folitaire de bonne foi. »
lorfqu’il dit du préfidènt Mç>lé : « Il jugeoit des
» àélions parles hommes, prefque jà mais des ho m-
» mes par les a&ionsV; lorfqoîi'dit deM.'d’E l-
boe'uf : « II- a été le premier prince que la pau-
» vreté ait avili... la commodité ne le releva point ;
» & s’il fût parvenu jufqu’à la richeffe, on l’eût envié
» domme un partifaff, tant la gueuferie lui étoit'
. » propre & faite pom^lui » : on voit que tout cela,
reffemble, parce qu’i l 5,y a je ne fais quoi d’original
& de naturel , qu’il faut que le peintre aif
réellement vu & qu’i l n’a «point imaginé. •
Mais lorfque le même écrivain trace le Por*
trait de la régente , il s’étudie à la nuancer avec
une fineffe fi recherchée, fi minutieufe, fi artificielle^
que l ’air de vérité n’y eft plus : toutes
ces antithèfes graduées ne font plus rien que du.
bel-èfprit ôc du faux bel-efprit. ( M. M ARM O N-
TEL. ) .
* POSITIF , IVE , adj' Grammaire-. C e terme ,-
dans l ’ufage ordinaire , eft oppofé à l ’adjeftif Nég
a t if , & veut dire, Qui fuppofe Vexifience ou-
La réalité , ou Qui énonce. La réalité,« au lieu
que le .mot Nég a tif fert à détruire la fuppofitiom
d’exiftenoe ou de réalité-y ç’eft» conformément à cette,
acception que les mots fctxic , oequalis-, égal
font pofitifs ; au lieu que les mots *v»p.a.kos, inoe-
qualis y inégal y, font négatifs. Wsfffa N é g a t
i o n .
Mais les grammairiens font encore ufage de ce
terme P o f it t f dans un autre fens , qui- diffère du
fins primitif que l ’on vient de voir , en ce qu’i l ’
exclut l ’idée de comparaifon, d’augmentation,. 81 de
diminution aétuelle; dans cette nouvelle' acception
, le mot P o f it if eft oppofé à ceux de Comp
aratif 8c de Superlatif C ’èft donc ain.fi qu’il faut'
entendre ce que l ’on dit, en Grammaire, de certains
adjeâifs & de certains adverbes, qu’ils font
fufceptibles de différents degrés de’ comparaifon ,
favoir, le P o f i t i f le Comparatif s & le Superla
t i f
Le degré p o fitif j que d’ordinaire on nomme,
fimplement-le P o f i t i f , c’eff la figni^cation primi- ■
tive & fondamentale de ràdje.élif ou. de l’adverbe^.
P o S
fans aucun raport au plus ni au moins dont eîîe
eft fufçeptible ; comme quand on d it , Un bon livre,
des meubles magnifiques , un profond filcnce ,
les hommtscourageux, écrire bien, meublé magnifiquement
, méditer profondément, combattre cou-
rageufement.'
Puifque le P o fitif eft. un des degrés dont eftfuf-
ceptible la fignilicatiqn de certains adjeélifs & de
certains adverbes., & que ce degré exclut toute idée
de comparaifon , d’augmentation , ou de diminution
actuelle,; il eft évident qu’il ne doit pas être
cenfé ni appelé un degré de comparaifon ; que
cette dénomination , pour me fervir des termes de
l ’École, eft de fa lfo fupponente\ 8c qu’au lieu
de dire des degrés de comparaifon, il feroit plus
vrai & plus raifonnable de dire des degrés de figni-
fication. Au refte on peut voir, au mot Super-
x a t if , un examen plus approfondi de la doctrine
des grammairiens fur ces degrés, dont Du Marfais â
à peinq donné une idée légère & très - imparfaite
au mot Degrés de comparaifon ou de fignifica-
tion.
( ^ J’ai encore étendu l ’ufage du m o \ fp f i t i f
en deux circonftances, o.ù la nomenclatuf^gram-
maticale m’a paru infuffifante pour empêcher qu’on
ne confondît des idées , qu’il ëtoit néceffaire de
bien -caraétérifer par des dénominations propres.
i°. Dans monfyftême des Articles ( Voye\ Article
),, je divife en deux claffes ceux que j’ap-
pele univerfels , parce qu’ils défignent la totalité
des individus-; & ces deux claffes,/ont les
pofitifs , & les négatifs. J’appelle les premiers
pofitifs , parce quils ne fuppofent point la négation
, quoiqu’ils ne l ’excluent pas : tels font
tout ou toute, tous ou toutes, qui eft collectif ; &
chaque, qui eft diftributif. .
Cet emploi du terme de P o fitif eft analogue au
premier fens que j’ai indiqué au commencement de
cet article, 8c eft également pppofé au terme de'
f i é g a tifi
a°. Dans le fécond fens, on Toppofe au terme
de Comparatif ; 8c c’eft dans.ce fens que je l’ai
introduit dans la nomenclature de mon fyftême des
Temps du verbe., fioye\ T emps.
Nos Prétérits françois font tous des Temps, com-
pofés du fupin ou du participe paflif du verbe conjugué
, & d’un ou de .deux auxiliaires: lanéceffité
de diftinguer les. Temps qui ne prennent qu’un
auxiliaire , de ceux qui en prennent deux, m’a
déterminé à donner aux premiers la dénomination
de pofitifs , & aux derniers celle de comparatifs..
L ’antériorité, qui cara&érife tous les Prétérits ,
eft pofitivement indiquée par le verbe auxiliaire;
& quand il eft unique , l’antériorité- eft poficive :
s’il fe trouve un fécond auxiliaire ., il defigne une
fécondé antériorité acceffoire , combinée & mife
en. comparaifon avec l ’antériorité fondamentale ;
-cette féconde antériorité eft comparative. Ainfi ,
j ai chanté, fa v o is chanté, f e u s chanté y f au-
P O S HNÜjjJ
tai chanté y font des Prétérits pofitifs ; mais fa i
tu chanté y favois eu chanté , feus eu chanté,
f aurai eu chanté -, font des Prétérits comparatifs.}
( M. B e a ÜZÉE. )
POSSESSIF, V E , Grammaire Adjectif ufîtd
en Grammaire pour qualifier certains mots que
l’on regarde communément comme une forte de
pronoms, mais qui font en effet une forte d’ad-
je&ifs diftingués des autres par l’idée précife d’une
dépendance relative à l’une des trois perfonnes.
■ Les adjeétifs pofiefjifs qui fe raportent à la
première perfonne du fingulier , font mon , ma ,
mes >v mienne, miens , miennes : ceux qui fe raportent
à la première perfonne du pluriel , font notre ,
nos ; nôtre y nôtres.
Les adjeétifs pofiefjifs qui fe raportent à la fo-*-.
conde perfonne du fingulier , font ton, ta , tes ;
tien , tienne , tiens, tiennes ■: ceux qui fe raportent
à la fécondé perfonne du pluriel., font votre, vos ;
vôtre y vôtres.
Les adjeétifs pofiefjifs qui fe raportent à la troi-
fième perfonne du lmgulier, font fon , fa , fes ;
fien, fienne, fiens, fiennes : ceux quife raportent à
la troifîème perfonne du pluriel, font leur , leurs.
Sur cette première divifion des adjectifs pofiefjifs, il faut remarquer que chacun d’eux a des -terminai-
fons relatives à tous les nombres , quoique la dépendance
qu’ils expriment foit relative à une perforine
d’un foui nombre. Ainfi, mon livre y veut
dire le livre au fingulier ) qui apartient à moi
( pareillement au fingulier ) ; mes livres , c’eft à
dire , les livres ( au pluriel ) qui apartiennent à
moi (, au fingulier ); :; notre livre fignifie le livre.
(au fingulier ) quiapartient à nous (au pluriel) ;
nos livres, c’eft la même chofe que les Livres
( au pluriel) qui apartiennent à nous ( pareillement
au pluriel ). C’eft que la quotité des êtres
qualifiés par l’idée précife de la dépendance, eft toute:
différente de la quotité des perfonnes auxquelles eft
relative cette dépendance.
Dans la plupart des langues, il n’y a qu’un ad-
fefkitpofiejfif pour chacune des trois perfonnes du
fingulier , & un pour chacune des trois performes du
pluriel. Mais en françois, nous en avons dé deux
fortes pour chaque perfonne : l’un , qui ne s’emploie
jamais qu’avant un nom, & qui exclut tout
autre article; l’autre, qui eft toujours précédé de
l’uu des articles le , la , lès , & qui n’eft jamais
accompagné d’aucun nom , mais qui eft toujours
en concordance, avec un nom déjà exprimé auquel
il fe raporte. C’eft la allemande, même chofe dans la lan&gue
Les Pofieffifs dé la première efpèce fofit mon ,
ma y mes y p uir la première perfonne du fingulier •
notre y nos y pour la première du pluriel : tony ta,
tes y pour la fécondé perfonne du fingulier«; votre,
vos y pour la fécond : perfonne du pluriel : fon . fa ,*
fes, pour la troüjèm»- du fingulier; & leur y leurs , pour la troifième du pluriel,1
A a z