
• P O È
*- d ^Q“ ao§ e ^es vers <l“i font honneur au prince 4c
à Ronfard $ on les connoît :
L ’ art <îe faire des v e r s , d û t-o n s’ en in d ig n e r ,
D o i t être- à plus haut p rix que celui de régner.
T o u s d eu x éga lement nous portons des couronnes :
M a is , r o i , je les reçois -, Poète, tu les d o n n e s . , ,
Les faveurs de nos rois & les récompenfes qu’ils
^ceordent aux Po è te s, en les élevant aux dignités
j ^État, leur infpirent fans doute
de I indifférence pour une vaine couronne, qu’on
n accordoit ailleurs aux P o è te s , que parce que
Ion navoit communément rien de mieux à leur
donner,
U neft donc pas furprenant que nous ayons eu
parmi nous des Poètes , tels q uA d te lin i/D orâ t,
Nicolas Bourbon, 6 e , qui fe foient glorifiés du
titre de Poete dit roi, tandis que nous n en connoif-
ions aucun qui ait pris celui de Poète lauréat. ( Le
chevalier d e Jau co u r t .) , ' •
POÈTE DRAMATIQUE. V 0}q PoÈTE COMIQUE ,
D rame , T r a g éd ie , C om édie, <Sv .
P oète épique , Poe'fie. On nomme Poètes épi-
$ues ’ les auteurs des Poèmes héroïques en vers ':
tels font Homère , Virgile , Lucain, Sîatius, Si-
le Camoëns, le Taffe ,
don Alqnze d Ercilla , Milton , & Voltaire. Nous
avons parie de chacun d’euz & de leurs ouvrages ait
mot roÈME épique. °
P oète fabuliste, Poéfie. V o u s. trouverez le
•caractère de ceux qui f e f a n t le p lu s diftingués en
ce genre depuis E fope jufqu’à nos jo u rs, a ux mots
JT AELE & r ABULISTE.
P oète lyrique , Poéfie. Tous les gens de
lettres connoiflent les Poètes lyriques du premier
orJre, anciens & modernes; mais l ’abbé.Batteux en
a tracé le caraftère avec trop de goût pour ne
pas railembler ici les principaux traits de fon ta-
oleau.
> .à. la tête des lyriques ; fon nom
n eft guere plus le nom d’un Poète , que celui de
l ’enthoufiafme même : il porte avec lui l’idée de
transports, d’écarts, de défordre, de digreflions
lyriques ; ^cependant il fort beaucoup moins de
ies fujets qu’on ne le croit communément. La gloire
des héros qu’il a célébrés n’étoit point une gloire
propre au héros vainqueur ; elle apartenoit de
plein droit à fa famille, & plus encore d la ville
dont il étoit citoyen ; on difoit, Une telle ville
a remporté tous les prix aux jeux olympiques.
Ainfi , lorfque Pindare rappelôit des traits anciens
foit des aïeux du vainqueur foit de la ville à laquelle
i l apartenoit, c’étoit moins un égarement du Poète
qu’un effet de fon art.
Horace p arie de- Pindare avec un. enthoufiafme
P o È
d adm iration , q ui prouve bien qu’il le troüvoit fu-
blim e ; il prétend qu’il eft tém éraire d’entreprendre
de 1 im iter ; il le com pare à un fleuve grofli par
les to rre n ts, & qui précipite ■ fes eaux bruyantes
du haut des rochers. I l ne m éritoit pas feulem ent
les lauriers d’A p o llo n par les dithyram bes & par
les chants de viéloire ; il favoit encore pleurer le
jeune epoux enlevé a fa jeune époufe , peindre
1 innocence de lâ g e d’o r , & fauver de l’o ubli les
nom s qui avoient m érité d’être im m ortels. M a l-
heureufem ent il ne nous refte de ce Poète admirable
que la moindre partie de fes ouvrages, ceux
qu il a faits a la g lo ire des vainqueurs : les au tre s,
dont la m atière éto it p lus riche & plus intéreflante
? OUrÂes hommes en g é n éral, ne font p oint parvenus
jufqu’â nous.
Ses poéfies/ nous paroiflent difficiles , pétk plu-
fîeurs raifons : la prem ière , eft la grandeur même
des idees qu’elles renferm ent ; la fécondé, la har-
dieffe des tours ; la troisième , la nouveauté des
m ots , qu’il fabrique fouvent pour l ’endroit m êm e
ou il le s p lace ; enfin il eft rem p li d’une érudition
détournée , tirée de l ’hiftoire p articulière de
certaines fam illes & de certaines villes , q ui ont eu
peu de p art dans les révolutions connues de l’H if-
to ire ancienne.
Pindare naquit à T hèbes en B éotie, la 65e o lym piade
, 5 00 ans avant Jéfus-C hrift. Q uand Alexandre
ruina cette v ille , il voulut que la m aifon 011 ce Poète
avoit demeuré fut confervée.
A vant Pindare , la G rèce avoit eu plufieurs lyriques,
dont les noms font encore fameux , quoique
les ouvrages^ de la plup'art ne fubfiftent plus. A ie-
man fut célèbre à Lacédém one ; Stéfechore , en S icile
: Sapho fit honneur à fon fexe , & donna fon
n0n\„ au vers faphique qu’e lle in v en ta; e lle é to it
de l ’île de L e fb o s, auffi bien qu’Alcée , qui fleurit
dans le même tem p s, & qui fut l ’inventeur du vers
a lc a ïq u e , celui de tous les vers lyriques qui a le plus
de majefté.
t Anacréon , de T é o s , v ille d’Ionie , s’éto it rendu
célébré plufieurs fiècles auparavant : il fu t con-
l en?Pora*n L y ru s, & m ourut la 6 e o lym p iad e,
âgé de 83 ans. 11 nous refte encore un affez grand
nombre de fes p ièces, qui ne refpxrent toutes que
le plaifir & l ’am ufem ent : elles font courtes ; ce
n eft le p lus fouvent qu’un fentim ent gracieu x , une
idée douce , un com plim ent délicat tourné en a llé
g o rie ; ce font des grâces (im pies, naïves, dèm i-
vetues : fa Colombe eft un ch ef — d’oeuvre de d éli-
cateffe; M. le Fevre difoit qu’il ne fem bloit pas que
ce fût l’ouvrage d’un hom m e , mais celui des Mufes
m êmes & des G râces.
Q uelquefois fes chanfons ne préfentent qu’une
feene g racieufe, que l ’im age d’un gazon qui invite
à fe repofer :
« Mon cher B athylle , affeyez-vous â lo m b re de
» ces beaux- arbres ; les- zéphyrs-agitent m o lle -
» m ent leurs feuilles. V çy ez cectb claire fontaine
p o m )
» qui coule & qui femble nous .inviter. Êli ! qui
t> pourroit, en voyant un fi beau lieu, ne point s y.
» repofer » ?
Quelquefois c’eft un petit récit allégorique.
« Un jour les Mufes firent l ’Amour prifonnier ;
t> elles le lièrent auffi tôt avec des guirlandes de
» fleurs, & le mirent fous la garde de la Beauté.
» La déeffe de Cythère vint pour racheter fon
» fils : mais les chaînes qu’i l porte ne font plus
t» des chaînes pour lui ; il veut refter dans fa cap-
» tivité ».
Rien n’eft plus ingénieux & en même temps
plus délicat que cette fiétion. L ’Amour apparemment
avoit dreffé des embûches aux Mufes ; l ’en-
nerni eft pris, lié, &misen prifon. C ’eft la Beauté
qui eflr'chargee d’en répondre : on veut lui rendre
la liberté ; il n’en veut pas , il aime mieux être
prifonnier. On fent combien il y a de chofes vraies,
douces , & fines dans cette image : rien n’eft fi
galant.
Horace , le prem ier & le feul des latins qui
a it réufli parfaitem ent dans l’O d e , s’éto it rem pli
de la le& ure de tous ces lyriques grecs. I l a ,
félon les fujets, la gravité & la mollefTe d’A lcée
& de Stéfichore , l ’élévation & la fougue de P in dare
, le feu & la vivacité de S a p h o , la mollefTe
& la douceur d’A nacréon : néanm oins on fent q u elquefois
qu’il y a de l ’art chez lu i , & qu’il fonge
à égaler fes m odèles. A nacréon eft plus doux ;
P in d are, plus hardi ; S a p h o , dans les deux m orceaux
qui nous reften t, m ontre p lus de feu ; &
probablem ent A lcée , avec fa ly re d’or , éto it plus
grand encore & plus majeftueux : il fem ble mêm e
qu’en tout genre de L ittératu re & de g o ût , les
grecs ayent une forte de d ro it d’aîneffe ; ils font
chez eux quand ils font fur le Parnaffe : V irg ile
n’eft pas fi riche , fi abondant , fi aifé qu’H om ère ;
T éretice , félon toutes les apparences, ne vaut pas
to u t ce que v a lo it Ménandre ; en un m o t, s’il m’eft
perm is de m’exprim er ain fi, les grecs p aroiflent nés
ric h e s, & les autres au contraire reflem blent un peu
à des gens de fortfine.
On p'eut appliquer au Lyrique d’Horace ce qu’il
a dit lai-même du Deftin : « Qu’il reflemble à
» un fleuve q u i, tantôt paifible au milieu de fes
» rives., marche fans bruit yersla mer, & tantôt
t> quand les torrents ont grofli fon cours, emporte
» avec lui les rochers qu’il a minés, les arbres qu’il
» déracine , les troupeaux & les maifons des la-
» boureurs , en fefant retentirau loin les forêts & les
» montagnes ».
Quoi de plus doux que fon ode fur la mort de
Quintilius i Jules Scaliger admiroit tellement cette
pièce, qu’il difoit qu’il aimeroit mieux l ’avoir
faite., que d’être roi d’Arragon. L e fentiment qui
y domine eft l ’amitié compatiflante. Virgile avoit
perdu uo excellent arai : pour le confoler , Horace
commence par pleurer avec lui ; & enïuite
i l lui infinue qu’i l faut mettre fia à fes larmes. U
y a des réflexions très-délicates à faire fur ce tour
adroit du Poète confolateur. Le ton de fa pièce
eft celui de la douleur , mais d une douleur qui
fait pleurer; c’eft à dire quelle eft mélée.de
foiblefle , de langueur , d’abattement tout y eft
trifte & négligé ; les idées femblent s être arrangées
à mefure* qu’elles ont pafle dans le coeur.
Malherbe eft le premier en France qui ait montré
l ’Ode dans fa perfection. Avant lu i , nos lyriques
fefoient paroître peu de génie & de feu : la tete
remplie des plus belles expreflions des Poètes
anciens , iis iefoient un galimatias pompeux.^de
latinifmes & d’hellénifmes cruds & durs , qu ils
méloient de pointes , de jeux de mots , &J de rodomontades
: auffi vains & auffi romanefcjues fur leurs
pégafès , que nos preux chevaliers 1 étoient dans
leurs jodtes & dans leuts tournois, « ils déco-
» choient leurs tempêtes poétiques deflus la lon-^
» gue infinité ; & vainqueurs des fiècles , monftres à
» cent têtes, ils gravoient les conquêtes fur le front
» de l ’éternité ».
Malherbe réduifit ces mufes effrénées aux règles
du devoir : il voulut qu’on parlât avec nette:e ,
juftefle, décence ; que les vers tombaflent avec
grâce. Il fut en quelque forte le pere^ du bon
goût dans notre Poéfie : & fes lo is , prifes dans
1e bon fens & dans la nature , fervent encore de
règles, comme l ’ a dit Defpréaux , meme aux auteurs
* d’aujourdhui. Malherbe avoit beaucoup de
feu , mais .de ce feu qui eft chaud & qui dure. I l
travailloit fes vers avec un foin infini, & ména-
geoit la chute des fiances, de maniéré que leur
éclat fût à demi envelopé dans le tiflu meme de
la période. Ce n’eft point un trait épigrammâti-
que, qui eft tout en faillies; c’eft une penféefôlide,
qui ne fe montre â la fin de la fiance , qu autant
qu’il le faut pour l’appuyer & empecher qu elle ne
foit traînante.
Pour trouver Malherbe ce qu’il eft, il faut avoir
la force de digérer quelques vieux mots, & d’aller
à l ’idée plus tôt que de s’arrêter à Fexpreffion.
Ce Poète eft grand, noble, hardi, plein de
chofes, tendre & gracieux quand la matière le
demande:
Racan difciple de Malherbe , a fait auffi quelques
odes. Les chofes n’y font point auffi ferrées
que dans celles de fon maître ; c’étoit affez le défaut
de fes pièces : la forme en étoit douce ,
coulante , aifée ; c’étoit la nature feule qui le
guidoit : mais comme i l n’avoit point étudié les
lources, i l n’y avoit pas toujours au fond affez de
ce poids qui donne la confiftance.
I l a traduit les Pfeauoees ; ôc quoique fa traduction
foit ordinairement médiocre, i l y a des endroits
d’une grande beauté : tel eft celui-ci dans la para-
phrafe fuivante du pfeaume 9% ;
L ’ empire du Seigneur f ft reconnu partout ;
L e mo ufle eft e ïu b f i l i , de l ’ un à l’ autre b o u t ,