
(N .) Q U A T R A IN , f. m . A ffortim ent de quatre
vers qui retiferm ent un fens com plet. O n p eu t en
difpoler les vers de trois manières.
i° . O n p eut faire rim er le p rem ier avec le troi-
fièm e, & le fécond avec le quatrièm e ; com m e dans
cet exem ple de M alherbe, pour fervir d’infcription
3 une fontaine ;
V o is-tu ,-PaCTant, couler cette onde
Ec s’ écouler in contin en t î
A in fi fuit la g lo ire du m o n d e ,
E t rien que D ie u n ’ eft p erm anent
^•°. O n p eu t faire rim er le prem ier avec le quatrièm
e , & le fécond avec le troifièm e ; com m e dans
eet exem ple de L a M otte :
fc. A m o u r , fi jamais , mo ins c r u e l,
P o u r m o i ru fléchillois S y lv ie ; -
D an s ces délices que j-env ie
J ’ou b lîro is que je fuis mortel.
O n p eut faire fuccéder les rim es deux à deux,
(ans les croifer ; com m e dans cet exem ple de
M alherbe ;
I l n’eft rien ic i-b a s d ’ éternelle du rée ;
U n e chofe qui plaît n’ eft jamais affurée ;
L ’ épine fuit la r o fe , & ceux qui fo n t contents
N e le fo n t pas lo n g temps.
L es Quatrains du fieur de Pibrac o nt eu autrefois
une réputation m éritée ; & e lle n’eft tom bée
aujourdhui , que parpe que le ftyle en eft furanné.
Ils ont été traduits en g re c , eii la tin , en tu rc ,
en a ra b e , & en perfan. C hacun de ces Quatrains
eft une m o ralité, énoncée d’une m anière fim ple 8c
d’un ton grave., ( M. Bea Uzée, )
( N . ) Q U E S T I O N , Cf.. Belles - Lettres.
Philofophie. A r t oratoire. T o u te difcuflion p h i-
lofophique ou oratoire fuppofe un doute.à éclaircir;
& l ’objet du doute eft la Quejlion, le p oint de
la Quejlion. Toutes nos idées viennent - elles
des fens ? La penfée peut-elle être un mode de
la matière l V o ilà des Quejlions m étaphyfiques.
E j l - ce élans le vide ou dans un fluide que les
corps celeftes f e meuvent ? & qgijfent - ils l ’un
fu r Vautre par un milieu ou fans milieu ? V o ilà
des Qüejlions de Phyfique. L e vice n e jl- il pas ■
toujours un fa u x calcul de l ’amour propre ? Y
a - t - i l rien de plus intérejfant pour l ’homme en
fociété, que dé être j iifte &bon ? V oilà des Quejlions
de M orale.
O n voit que les Quejlions philofophiques font
com m uném ent générales : elles le font toujours, dans
leu r principe 8c dans leu r résultat, lors même que la
•dilcufllonroule fur un objet particu lier, comme de fa-
vo ir, p a t exem ple, fi Socrate n’eut pas m ieux fait, en
^’échapant de fa prifon , d’éviter à fes juges le
crime de fa mort ; fi Caton d’Utique ffeùt paé
mieux fait de vivre pour tâcher d’être encore utile
a. . Patr*c > en inlpirant quelque pudeur à l ’ambition
deCéfar; fiBrutus devoit être au nombre des
affaflîns de fon ami ?
Les Quejlions oratoires font aulfi générales t
dans ce que les rhéteurs appellent le otoxe indéfin
i , c eft a dire , le genre philo fophi que , orné
des formes oratoires. Mais, comme je l ’ai dit ailleurs
, toutes les fois que la Quejlion n’en eft
pas réductible à des efpèces particulières, l ’Éloquence
eft perdue : fon objet doit être ufuel; &
quelque effor que prenne la fpéculation, fon but
doit etre la pratique. L ’épervier s’élève jufqu’aux
nues , mais c’eft pour fondre fur fa proie avec plus
de rapidité : c’eft l ’image de l ’Éloquence qni attaque
les vices & les abus, & fingulièrement de l ’Éloquence
de la Chaire,
Dans le genre délibératif, où il s’agit d’une ré-
folution à prendre, i l eft évident que la Quejlion
eft particulière.j elle l ’eft de même dans le genre
de controverfe, où il s’agit d’un jugement à prononcer.
Mais dans l ’un & l ’autre , il eft rare qu’elle
ne tienne point à quelque principe général, >
Rien ne femble plus ifolé qu’une Quejlion de
fait ; elle ne laiffe pas de conduire ibüvent à la
folution d’un problème j comme de lavoir | par
exemple, à quel degré de certitude peuvent s’èle-*
ver les probabilités , ou quelles font les forces
refpeftives des témoignages & des indices.
Lorfque l ’exiftence du fait ou de la chofe eft
décidée 8c que l’on ne difpute que de la qualité ,
la folution dépend toujours d’un principe qui peut
lui-même être reçu ou contefté entre les deuit
parties.
Milon a-t-il tué Clodius ? voilà un'fait que
Cicéron contefte , mais foiblement ; & ce n’eft pas
l ’endroit où il prétend fe retrancher. Mais lequel
des deux , de Clodius ou de M ilo n , a eu def-
fein d’ attaquer l ’ autre & lui a tendu des embûches
? C eft ici le point capital. Ce n’eft donc
plus de l ’exiftence, mais de la qualité de l ’aélion
qu’il s’agit : fi elle eft attaque ou défenfè ; fi
elle eft comprife dans ce principe, qu’//7z citoyen
qui tue un citoyen ejl coupable & digne de mort ;
ou exceptée par celui-ci , que tout homme a le
droit de conferver fa propre vie. Ç ’eft là ce qu’on
appelle l ’état de la Quejlion.
Le principe n’eft pas plus' contefté dans le procès
qu’Efchine intente à Démofthène ; ils conviennent
tous les deux qu’un mauvais citoyen , un homme
corrompu, un orateur pernicieux , eft indigne des
honneurs deftinés au mérite & à la vertu. Mais
que Démofthène ait été ce mauvais citoyen , ou
que fon zè le , fon dévoùment , la fagefle de fes
confeils, & les fervices fignalés qu'il à rendus à fa
patrie lui ayent mérité la couronne d’or qpp Ctè-
fiphon lui a décernée ; c’eft le problème de" cette
grande caufe l où Démofthène a déployé toute la
yigueu#
vigueurde cette dialectique, qui eft le nerf de fon
éloquence.
Lorfque c’eft le principe même qui eft en Quej-
xion, rÉloquence 8c la Philofophie s’y déploient
en liberté ; & ce font les plus belles caufes. T e lle
fut celle de Marc-Antoine , lorfque, forcé d’avouer
que Norbanus avoit foulevé le peuple contre Coe-
pion, il; ôta faire l^pologie d’une fédition populaire,.
Toute fédition eft criminelle: cela eft faux,y
difoit Antoine : toute fédition eft un malheur
f i n s doute , mais quelquefois un malheur nécef-
fairey & c’eft alors une aélion légitime : fouve-
nons-nous que -cejl à des féditions que Rome a
dû fa liberté.
Quand l ’orateur a réfuté le principe dp l ’adver-
faire & qu’il a établi le lien, il lui refte encore
le plus fouventà faire voir que la Quejlion—&gi-
tée tient au principe qu’il a pofé, & que fes
conduirons en font les conféquencés. La caufe a
donc alors deux points de controverfe : d'abord*
le principe de droit ; & puis, l ’efpèce & le raport
de la caufe avec ce principe. Alors Cicéron recommande
de fe tenir, le plus que l ’on peut, dans
la Quejlion générale, parce qu’elle offre un champ
plus vafte’ à l ’Éloquence , 8c que l’orateur y eft
placé comme dans un pofte éminent, d’où il domine
fur la caule. Ilmefenible pourtant que l’at-,
tention de. l’orateur, comme celle du Général d’armée
, doit fe porter fur le point le plus foible :
& que le principe une fois folidement prouvé, fi
c’eft le fait qui demeure équivoque, c ’eft vers l ’endroit
qui périclite que l ’Éloquence doit fe hâter de
réunir tous fes efforts. Proye\ Moyens, Preuve,
Rhétorique. ( M . M a r m o n t e l . ) \
Q U E S T I O N N E R : , I N T E R R O G E R ,
DEMANDER, Synonymes,
On quejlïonne , on interroge , & l ’on demande
pour fav o irm a is il femble que Quejlionner faffe
lentir un efprit de curiofîté; au Interroger fuppofe
de l ’autorité ; & que Demander ait quelque chofe
de plus civil 8c de plus reipeétueux.
Quejlionner & Interroger font feul un fens :
mais il faut ajouter un complément à Demander ,*
c éft à dire que , pour faire un fens parfait, il faut
marquer la chofe qu’on demande.
Lefpion queftionne les gens. Le jugé interroge
les criminels. Le foldat demande l’ordre au Général.
( L ’abbé G i r a r d . ) .
( N. ) QUIESCENT , E , adj. Terme de Grammaire
hébraïque. Les hébraïfants , attachés à la
ponctuation mafforétique font obligés, pour la
prononciation, de diftinguer les lettres en mobiles ,
&. quiefcentes. Voye^ Mobile.
Les lettres quiefcent.es font celles, dit l’abbé Lad-
vocat ( Gramm. hébr. pag. 7 ) , qui ne fe prononcent
pas toujours, parce qu’elles font comme
en repos en certaines occafions : ce font les quatre
^ 1 H (iileph , hé, o u , iod ). On les appelle.
- G r a m m , e t L i t t é r a t , Tome I I I ,
auïïî , dit ce grammairien, Ahéoui : c ’eft un mot
factice, compofé de la réunion des quatre noms des
lettres dontli s’agit.
Il remarque que les quiefcentes fe mettent affez
fouvent l ’une pour l ’autre dans l ’hébreu & dans
les autres langues orientales. Cela n’eft pas fort
étonnant ; des lettres purement orthographiques,
& qui ne font rien à la prononciation, peuvent
fans conféquence fe mettre l ’une pour l ’autre : i l ne
doit pas «en être de même des mobiles, qui le prononcent
toujours.
I l y a apparence que ces quiefcentes hébraïques
repondent aux muetes de notre orthographe fran—
çoife ( Voyei M u e t ). Si cela eft, elles indiquent
aulfi un défaut, je ne dis pas dans l’alphabet
hébreu, mais dans la prononciation des mafforètes ;
puifqü’elles ajoutent aux indications'naturelles de
l ’alphabet, qui fuffifoit fans doute à l ’origine pour
la prononciation primitive.
L e fyftême de Mafclef, qui fait prononcer toutes
les lettres félon leur dénomination alphabétique ,
n’a aucun befoin de ces diftinétions embârraffantes :
il femble fetraprocher par là de la (implicite originelle;
& à coup sur, i l n’altère pas plus la vraie
prononciation dés temps où les livres fiaints furent
écrits, que ne le fait le fyftême mafforétique.
( M . B e a u z è e . )
( N. ) Q U O L IB E T , f. m. Efpèce de pointe
commune & triviale, principalement fondée fur
1 Equivoque. Voye£ ce mot.
Il eft vrailcmblable que le nom de Quolibet
vient de la double entente , qui permet de tourner
le fens de l ’expreffion du côté que l’on veut, quo
libet : 8c cette origine me paroît plus fimple &
plus probable qu’aucune de celles qu’on trouve dans
la dernière édition du Dictionnaire étymologique
de Ménage.
» N’eft-ce pas un beau triomphe pour certains
» efprits ( dit Van-Effen , dans fon Mifanthrope
». Difc. Ixvf.y que de vous propofer un difeours
» équivoque ; & quand vous entrez dans le fens
» le plus naturel, de vous attraper dans un autres
» fens plus caché , comme dans un piège? J’avoue
» que j’ai toujours bonne opinion de ceux qui ne
» fe défient pas feulement d’un panneau fi grof-
» fièrement tendu, & que j’ai pitié de celui qui
» s’aplaudit de l ’heureufe réuffite de fon adrefle
» ridicule. On lui peut appliquervce que dit Ben-
» ferade dans un de fes Rondeaux :
» D e s animaux le pire , c’eft un foc
» P le in de fineffe ».
» Les Quolibets, dit le P. Bouhoiirs ( Rem.
nouv, Torri. 1 , pag. $.69 ) * » ne font, à pro-
» prement parler, que de miférables pointes, qui
» ne. portent d’ordinaire fur rien , & ©ù il y a du
» faux prefque toujours : ce font des allufîons
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