
( T T e l e ft de venu F a t â force de Ie ftu re ,
Q u i n eût été q u 'u n Sot en fu iv ant la nature.
{D u R e sn e l . )
L a Sotife dans l ’ un fe fa it v o ir tou te pure »
E t l'é tu d e , dans l ’a u t r e , a jo â te à la nature . . ,
L e fa v o i r dans un Fat d e vien t Impertinent. >
( Mo l iè r e . )
Un Sot ne fe tire jamais du ridicule ; c’eft Ton
cara&ère. Un Impertinent s’y jette tête baillée T
fans aucune pudeur. Un F at donne aux autres des
ridicules , qu’i l mérite encore davantage.'
a k e £ot y au lieu de fe borner à n’être rien, veut
etre quelque choie : au lieu d’écouter, il veut parler
; St pour lors il ne fait & ne dit que des bétifes.
Un F at parle beaucoup , & d’un certain ton qui
lui eft particulier; i l ne fait rien de ce qu’il importe
de favoir dans la vie ; il s’écoute & s admire :
i l ajoute a la Sotife la vanité & le dédain. U Impertinent
eft un F a t qui pèche en même temps
contre la politeiTe & la bienféance ; fes propos font
fàns egard, fans confidération, fans refpeâr; il
confond 1 honnête liberté avec une familiarité ex-
celfive ; il parle & agit avec une hardiefte infolente :
c eft un Fat ente fur la groftièreté. [Le chevalier D E
J A u CO U R T .)
S O T IS E ou S O T I E , f. f. B elles-Lettres.
Elpèce de Drame , qui, fur- la fin du quinzième
fiècle & au commencement du feizième , fefoit
chez nous la fatire des moeurs. L a Sotife répon-
doit à la Comédie grèque du moyen âge ; non
qu’elle fut une fatire perfonnelle, mais elle alta-
quoit les états , & plus expreflement l ’Églife. La
plus in^énieufe de ces pièces eft, fans contredit,
celle ou Y Ancien monde, déjà vieux , s’étant endormi
de fatigue , Abus s’avife d’en créer un nouveau
, dans lequel i l diftribùe à chaque vice & à
chaque paffion fon domaine , en forte que la guerre
s’allume entre eux, & détruit le monde oyéAbus a créé5 alors le V ieu x monde fe réveille & reprend £bn train. >
Dans cette fatire , le Clergé n’eft point épargné ;
i l l ’eft encore moins dans la Sotie du Nouveau
monde, dont les perfonnages Çont-Pragmatique,
Bénéfice «rand, Bénéfice p e t it , P è r e fa in t , le
L ég a t, l ’Ambitieux, &c. Bénéfice grand, à’ qui
1 on fait violence pour fe livrer à Ambitieux, le
jiiéf a crier plaifamment, Volens nolo , nolens
volo.
Mais la plus célèbre de toutes les Soties eft
celle de Mère fo te , compolee & repréfentée par
ordre exprès de Louis XII. Dans cette pièce, le
prince des Sots s’informe de l ’état de fes fujets* le
premier Sot lui répond :
N o s .prélats n e fo n t point in g ra ts , '
Qu elq u e chofe qu’ on en bab ille ;
I ls ont f a i t , durant les jours g r a s ,
B a n q u e ts .^ b e ign e ts , & tels fracas
A u x mignonnes de cette y il'e .
Sote commune ( le peuple ) fe plaint au roi de»
Sots , qu’elle dépérit de jour en jour , & que l’Églife
enlève tout fon bien. Mère Sote paroît alors, habillée
pardefibus en Mère fo t é } & par de f u s
ainfi que VÊglife. En entrant fur la fcène , elle
déclaré a Sote Occafion & à Sote Fiance , fes
deux confidentes , qu’elle veut ufurper le temporel
des princes. » Difpofez de moi, lui dit Sote Fiance ;
» je confens à éblouir le peuple par vos amples
» promelfes, & en cela je rifque peu de chofe » :
O n d it que vous n’ avez point d ’honte
D e rompre vo tre f ç i promife.
S ote O ccas ion.
Ing ratitude vous furmonte ;
D e p ro mefl.es n e ten ez compte - ,
N o n plus que bourfiers de V en ife .
Mère Sote dit elle-même , fur la prédiction d’uts
juif :
A u ffito t que je ceAerai
D ’ être p erv e rfe , je mourrai .
Elle déclaré aux prélats , fujets des princes de»
Sots , que le fpirituei ne loi fuffit pas, & qu’elle y
veut joindre le temporel :
J e jo u ïs ainfi qu’il me femble ;
T o u s les deux veuil mêler enfemble,
P l a t e - B o u r s e .
Mais gardons le f p i r i tu e i j.
D u tempo rel n e nous mêlons.
M è r e S o t e.
D u tempo rel jo u ïr v o u lo n s : . -**i
[C om b a ts de prélats & de princes,}
U n S e i g n e u r .
N o t r e mère d e vien t gendarme 1
M è r e S o t e .
P ré la ts , debout ; A la rm e ! alarme I
L e prince des Sots , dans le combat, démalque
Mère Sote y 8c la fait connoître pour ce qu’elle eft.
[M . M a r m o n t e l . )
SO U H A IT , DÉSIR. Synonymes.
L ’un & l ’autre défignent une inquiétude qu’oa
éprouve pour une chofe abfente, éloignée, à laquelle
on attache une idée de plaifir.
Les Souhaits fe nourri fient d’imagination , ils
doivent être bornés. Les Défirs viennent des pallions
, ils doivent être modérés.
On fe repaît de Souhaits ,* on s’abandonne à fes
Défirs. Les parelfeux s’occupent à faire des Souhaits
chimériques ; les courtifàns fe tourmentent
par des Défirs ambitieux. Les Souhaits me femble
rat plus vagues ; & les Défirs, plus ardents.
Quelqu’un difoit qu’il connoilfoit plus les. Soü-
haits que les Défirs ; diftinélion délicate; parée
que les Souhaits doivent être l ’ouvrage dé la rai-
fon, & que les Défirs font prefque toujours une
inquiétude aveugle qui naît du tempérament. ( Le
chevalier d f . J A U C O U R T . )
SOUPIR , S A N G L O T , GÉMISSEMENT ,
CRI PLA IN TIF . Synonymes.
Tous, ces mots peignent les accents de la douleur .
de l ’âme ; en voici la différence félon l ’explication
phyfiologicjue donnée par l ’auteur de YHiftoire naturelle
de Vhomme. , . ^
Lorfqu’on vient à penfer tout à coup à quelque
chofe qu’on délire ardemment ou qu’on regrette
vivement, on relient un treffaillement ou ferrement
intérieur ; ce mouvement du diaphragme agit fur
les poumons, les élève , & y occafîonne une infpi- I
ration vive & prompte qui forme le Soupir j lorsque
l ’âme a réfléchi fur la caufe de fon émotion
& qu’elle ne voit aucun moyen de remplir fon
défîr ou de faire ceffer fes regrets , les Soupirs fe
répètent , la triftefle, qui eft la douleur de l ’âme ,
fu ccede à fes premiers mouvements. f
Lorfque cette douleur de l ’âme eft profonde &
fubite , elle fait couler les pleurs ; n l ’air entre
dans la poitrine par fecoulfes, il fe fait plufieurs
infpirations réitérées par une ëfpèce de fecouffe •
involontaire : chaque infpiration fait un bruit plus
fort que celui du Soupir, c’eft ce qu’on appelle
Sanglot. Les Sanglots fe fuccèdent plus rapidement
que les Soupirs, & le fon de la voix fe fait
entendre un peu plus dans le Sanglot.
Les accents en font encore plus marqués dans
le Gèmijfement. C’eft line elpèce de Sanglot continue
, dont le fon lent fe fait entendre dans l ’inf-
piration & dans l ’expiration : fon exprelfion confîfte
dans la continuation & la durée d’un ton plaintif,
forme par des fous inarticulés: ces fons du Gémif-
fement font plus ou moins longs , fuivant le degré
de trifteffe , d’affiiétion, & d’attachement qui les
caufe ; mais ils font toujours répétés plufieurs fois.
Le temps de l ’inlpiration eft celui de l’intervalle .
du filence , qui eft entre les Gémijfements ; & ordi- ;
nairement ces intervalles font égaux pour la durée &
pour la dillance.
Le Cri p la in tif eft un Gèmijfement exprimé
avec force & à haute voix; quelquefois ce Cri lé .
foutient dans toute fon étendue fur le même ton ; Ij
c eft furtout lorfqu’il eft fort élevé & très-aigu :
quelquefois aulfi il finit par un ton plus bas j ç’eft
ordinairement lorfque la force du Cri eft modérée.
( Le chevalier d e J a u c o u r t )
S P E C T A C LE S , f. m.pi. Inventionanc.&tnod.
Repréfentations publiques imaginées pour amufer,
pour plaire, pour toucher , pour émouvoir, pour
tenir l ’âme occupée , agitée, & quelquefois déchirée.
Tous les Spectacles inventés par les hommes
offrent, aux ieux du corps ou de l’cfprit, des
chofes'réelles ou feintes ;& voici comment Batteux,
dont j'emprunte tant de chofes, envilage ce genre de
plaifir.
L ’homme, dit-il, eft né fpeétateur ; l ’appareil
de tout l’univers, que le Créateur femble étaler
pour être vu & admiré r nous le dit allez clairement
: auffîi de tous nos Cens n’y en a - t - il point
de plus vif ni qui nous enrichifle d’idées plus que
celui de la vue ; mais plus ce feus eft a é tif, plus-
il a befoin de changer d’objers : auflitôt qu’il æ-
tranfmis à l’elprit l ’image de ceux qui l’ont frapé y
fon activité le porte à en chercher de nouveaux ;
& s’il en trouve, i l ne manque point de les faifir
avidement. C ’eft de là que font venus les Spectacles
établis chez prefque toutes les nations. Il en faut
aux hommes , de quelque elpèce que ce foit : &
s’il eft vrai que la nature , dans fes effets, la Ibciété,.
dans fes évènements , ne leur en fournilfent de piquants
que de loin en loin ; ils auront grande
obligation à quiconque aura le talent d’en créer pour
eux, ne fut-ce que des fantômes & des reflemb-lances
fans nulle réalité,
Les grimaces, les preftiges d’un charlatan monté'
fur des trétaux , quelque animal peu connu , ou
inftruit à quelque manège*extraordinaire , attirent
tout un peuple , l’attachent le retiennent comme'
malgré lui; & cela dans tout pays. La nature étant
la même partout & dans tous les hommes, favants
.& ignorants , grands & petits, peuple & non peuple
, il n’étoit pas poffible qu’avec le temps les
Spectacles de l'art n’euffent pas lieu dans lafociété
humaine ; mais de quelle efpèce devoient-ils être
pour faire la plus grande imprelïîon de plaifir ?
On peut préfenter les effets de la nature , une'
rivière débordée , des rochers elcarpés, des plaines,.
des forêts , des v ille s , dès combats d’animaux :
mais ces objets, qui ont peu de raport avec notre
être, qui ne nous menacent d’aucun m a l, ni ne
nous promettent aucun bien, font de pures curio-
fités : ils ne frapent que la première fois , & parce
qu’ils font nouveaux; s’ils plaifent une fécondé fois,
ce n’eft que par l ’art heureufement exécuté.
I l faut donc nous donner quelque objet plus ii*>
téieffant , qui nous touche de plus près; quel fera
cet objet? nous-mêmes. Qu’on nous falfe voir dans
d’autres hommes ce que nous fommes ; c’èft de
quoi nous intérefler, nous attacher, nous remuer
vivement.
L ’homme étant compofé d’un corps & d’une
âme ? i l y a deux for te s de Spectacles q u i p e u v e n t