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propofïtion fui van te , une liaifon logique & nécef-
faire. Pour ce qui regarde le choix de ces deux
ponctuations & l ’ufage des deux Points dont on vient
de parler , voye^ P o nctua tion.
3°* On met deux Points horizontalement au
deflus d’une voyelle, pour indiquer q u il faut la
prononcer féparément d’une autre voyelle qui l’a-
voifine, avec laquelle on pourroit croire qu’elle
fcroit une diphthongue, fi l ’on n’en étoit-averti
par cette marque , qui s’appelle Diérèfe ; comme
dans S a ü l, q u i, fans la diérèfe, pourroit fe prononcer
Saul', comme nous prononçons Pa ul. J’ai
expofé ( en parlant de la lettre I ) l ’ ufage de la
diérefe ; & j y ai dit qu’un fécond ufage de ce
ligne eft d indiquer que la voyelle précédente
n elt point muette, comme elle a coutume de
1 être en pareille pofition , & qu’elle doit fe
faire entendre . avant celle qui fuit y qu’ainfi ,
i l faut .écrire aiguille , contiguïté, afin que l ’on
prononce ces mots autrement que les mots ang
u ille , guidé, où Vu eft muet. Mais c’eftdema
part une correction abufïve à l ’Orthographe ordinaire
j fi l ’on écrit aiguille comme contiguïté,
on prononcera l ’un comme l ’autre, ou en divifànt
la diphthongue ui du premier de ces mots, ou
'en 1 introduifant mal à propos dans le fécond. Il
faut donc écrire contiguïté, ambiguë, à la bonne
neure \ Vu n’y eft point muet, & cependant il
n y a pas de diphthongue : mais je crois maintenant
qu’il vaut mieux écrire aiguille, Gitife (ville)j
en mettant l ’accent grave fur Vu , il fervira d marquer
, fans équivoque,, que Vu n’eft point muet
comme dans anguille, guife ( fantailie) , & n’empê-
c ^?.ra Çoint <Juï° n ne prononce la diphthongue, parce
-qu il n y aura point dediérèfe fur la fécondé voyelle.
Cujufvis hominis ejl errare, nullius niji• inji-
pientis in erroreperfeverare. Cic. Philipp. X I I , 2.
4 . On difpofe quelquefois quatre Points horizontalement
dans le corps de la ligne, pour indiquer
la fuppreffion , foit du relire d’un difcours
commencé & qu’on n’achève pas par pudeur , par
modération, ou par quelque autre motif, foit d’une
partie d^’un texte que l ’on cite ou d’un difcours que
l ’on raporte :
Quos ego . . . . fed motos prcejlat comgonere ftuclus.
Yirg. Æn. J , ijp.
5°. Enfin la crainte qu’on ne confondît Vi écrit
avec un jambage d’u , a introduit l ’ufage de mettre
un Point au deflus ; c’eft une inutilité qu’on ne doit
pourtant pas abandonner, puifqu’elle eft confacrée
par l ’ufage.
Les hébraiïants connoiflent une autre efpèce de
P o in ts qu’ils appellent Po ints - voyelles , parce
que ce font en effet des Points - ou de très-petits
traits de plume qui tiennent lieu de voyelles dans
les livres hébraïques. On eonnoît l ’ancienne = manière
d’écrire des hébreux , des çhaldéens, des
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fyriens, des fàmaritains , qui ne peignoient guère
que les confonnes , parce que l’ufagë très - connu
de leur langue fixoit chez eux les principes de la
lecture , de manière à ne s’y pas méprendre. Depuis
que ces langues ont ceffé d’être v ivan te son a
cherche à en fixer ou à en revivifier la prononciation
j & l’on a imaginé les Points - voyelles
pour indiquer les voix dont les confonnes écrites
marquoient l ’explofîon. Ainfi , le mot dbr.,
fe prononce cfe différentes manières , & a des feus
différents , félon la différence des Points que l’on
ajoute aux confonnes dont il eft compoféj '^\2M
ddbàr , lignifie chofe & parole > deber ,
lignifie pejle, ruine ; " ï|H l dober, veut dire bercail
y &c. Avant l ’invention des Points-voyelles',
l ’ufage , la conftru&ioh , 1e fens total de la phralè ,
la fuite de tout le difcours, fervoient à fixer le fens &
la prononciation des mots écrits.
Il y a trois claffes différentes de Points-voyelles ,
cinq longs , cinq brefs, & quatre très-brefs. Les cinq
longs font appelés :
Kamets, ou d lo n g , comme 3 , bd;
Tferé, ou é lo n g , comme 2 , bê ;
Chirik long , ou î long , comme , bî ;
KJiolem , ouû long , comme > bô$
Schourek , qui eft o u , comme 1 3 boit.
Les cinq brefs font appelés :
Phcitach, ou à bref, comme 3 > bd;
S eg o l, ou é bref, comme’ 2 > bé ;
Chirik bref, ou 1 bref, comme 2 > b i; ■
Kamets-kateph , ou 6 bref, comme 2 j bô 3
Kibbuts , ou û bref, comme 3 , bû.
Les quatre très-rbrefs font appelés :
Sçhéya, ou e brevilfime , comme 2 > be »
Kateph-phatach, ou a très-bref, comme 3 , ba;
Kateph-fegol, ou é très-bref, commet , bé ;
Kateph-kamets, ou 6 très-bref, comme 3 , 16*
Outre qu’il eft très-aifé, dans un fi grand nombre
de lignes fi peu fenfibles , de confondre ceux
qui font les plus différenciés, il y en a qui différent
très-peu, & le -kamets ou d long eft pré-
cifément le même que le kamets - kateph ou o
bref. D’ailleurs l ’emploi de tous ces fignes entraîne
des détails innombrables & 'des exceptions fans fin,
qu’on ne faifit & qu’on ne retient qu-’avec peine 3
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& qui retardent prodigieufement les progrès de ceux
qui veulent étudier la langue fainte.
Après avoir examiné en détail toutes les difficultés
& les variations de la leélure de l ’hébreu
par les Points - voyelles , Louis Cappel - ( Crit.
facr. liv. F l , c. ij ) remarque que les Points
étant une invention des mafforèthes , dont l ’autorité
ne doit point nous fiibjuguer, lès réglés de
la Grammaire hébraïque doivent être d’apres les
mots écrits fans P o in ts , & qu’il faut cqnféquem-
ment retrancher toutes celles qui tiennent a ce
fyftême faétice. Il ajoute que , dans la leéture, il
ne faudroit avoir égard qu’aux, lettres matrices,'
ma très leclionis , H HK > mais que , comme elles
manquent très - fréquemment dans le texte , cette
manière de lire lui paroît difficile à établir. Voici
fa conclufion : Age fané Punélationi niajfore-
thicce eatenits adhcereamus , quatenùs ne que cer-
tior neque. commodior vocales ad yocum enun-
tiationem necejfarias defignandi ratio, ufque
hodie inventa ejl \ atque ex confequenti eam
tradendoe & docendae Grammaticce rationem fe-
quamur qius illi Punétationi inhititur , necpte
temerè eam convellamus aut follicitemus, nififorte
aliquis aliam rationem certiorem & commodiorem
inveniret punétandi.
Au lieu d’imaginer un fyftème plus fimple de
Points-voyelles, Mafclef, chanoine de la cathédrale
d’Amiens, inventa une manière de lire l ’he-
breu fans Points. Cette méthode confîfte à fup-
pofer après chaqiie confonne la voyelle qu’on y
“ met dans l ’épellation alphabétique. Ainfi, comme
le 2 fe nomme beth , on fuppofe un e après
cette confonne , comme le “t s’appelle daleth ,
on y fuppofe 'un a , &c ; “0 * 1 011 dbr doit donc
fe lire daber. Ce fyftême révolta d’abord les Savants,
& cela devoit être ainfi : i° . c’étoit une
nouveauté , & toute nouveauté alarme toujours les
efprits jaloux & ceux qui contractent fortement &
aveuglément les habitudes : 2°. ce fyftême réduifit
à rien toutes les peines qu’il en avoit coûte aux
érudits pour être initiés dans cette langue ; & il
leur fembloit ridicule .de vouloir y introduire de
plain pied ' 8c fans embarras ceux qui viendraient
après eux. On fit pourtant des objections, que l ’on
crut foudroyantes *5 mais dans l’édition de la Grammaire
hébraïque de Mafclef, faite en 17 31 par
les foins de l ’abbé de la Bletterie , on trouve dans le
fécond tome, fous le titre de Novce Grammaticce
argumenta ac vindicioe , tout ce qui peut fervir
à établir ce fyftême & à détruire toutes les objections
contraires. Auflï le Mafcléfifme fait - il au-
jourdhui en France & même en Angleterre , une
feCte confîdérable parmi les hébraifants ; & il me
femble qu’i l eft à fouhaiter d’en voir hâter les
progrès.
Les mafforèthes avoient encore imaginé d’autres
fignes pour la diftinétion des fens & des paufes ,
lefquels font appelés dans les Grammaires hébraïques
p o 1 a O.
écrites en latin 4 Accentus padfantes & diflin-
guentes , & gardent en françois le nom de P oints.
Ils ont encore , pour la plupart, tant de reflem-
blance avec les Points -voyelles , qu’ils ne fervent
qu’à augmenter les embarras de la leCtare 5
& Maiclef, - en fouhaitant qu’on introduisît notre
Ponctuation dans l’hébreu, en adonné^ 1 exemple.
Puifque nos fignes ,d.e Poticlnation n ont aucune
équivoque & font d’un ufage facile , iis non uti ,
dit.Mafclef ( Gramm. hebr. cap. j , n\ 5 ) nihil
aliud ejl quant invento pane glande vefci. ■
( M , B e a u z é e . )
* PO IN TE , f. f. Ar t de parler & d'écrire. Jeu
d’efprit qui roule fur les mots.
Jadis de nos auteurs ,les Pointes ignorées
Furent- de l’Italie en nos vers attirées.
La Rajfon outragée , ouvrant enfin les ieu x,
La bannit pour jamais des difcours férieux :-
Et dans tous, fes écrits la-déclarant infâme,
Par grâce lui laiffa l ’entrée en l’Épigramme;
Pourvu que fa fineffe, éclatant à propos,
Roulât fur la penfée , 5c non pas fur les mots.
Ce n’étoit pas feulement dans les ouvrages d’e£
prit qu’on imaginoit devoir donner place aux
Pointes ; elles fefoient les plus riches ornements
de nos fermonaires. Un prédicateur de ce temps-
là , parlant de S. Bonaventure, promit de montrer,
dans les deux parties de fon difoours , qu’il avoit
été le docteur des féraphins , & le féraphin des
dofteurs. L e P. Cauffin , dans fia. Cour fa in te , dit
que les hommes ont bâti la tour de Babel, &
les femmes la tour de babil. « Tout eft fouple
» devant vous , dit le P. Coton à Henri IV j votre
» fceptre eft un caducée qui conduit, induit, &
» réduit les âmes à ce qu’il veut ». Mais pour
venir à des exemples plus modernes, ce que dit
Mafcaron, dans YOraifon funèbre de Henriette
d'Angleterre, ne doit - il pas paffer pour une
Pointe, des plus ridicules ? « Le grand, l ’invin-
» cible , le magnanime Louis, à qui l ’Antiquité
» eut donné mille coeurs, elle qui les multipliok
» dans les héros félon le nombre de leurs grandes
» qualités, fe trouve fans coeur à ce fpe&acle ».
L e moyen de découvrir fi une Pointe eft bonne
ou mauvaife, c’eft de la tourner dans une autre
langue : lorfqu’elle foutient cette épreuve,, ots
peut,la regarder pour être de bon aloi 5 mais c eft
tout le contraire , quand.elle s’évanouît dans 1 operation.
On pourroit appliquer à la véritable Pointe
ingénieufe, l ’éloge qu’Arifténite fefoit d’une belle
femme, qu’il trouvoit toujours plus, belle,.foit-
qu’elle fût parée ou en déshabille.
On ne fubftitue fouvent les Pointes à la force
dii difcours, que. parce qu’il eft plus facile d’avoir
de l’efprit que d’ être à la fois touchant & naturel.
Quand on ne fut plus capable d’admirejj le