
^an? aS® ^ & Grammaire grèque eft encore
djttérent, lorfqu’il s’agit des terminailons qui caracr-
tériient les déclinaifons ou les conjugaisons : on
nomme alors cette figure Contraction ( Voyez ce
mot ). Ainfi, outre les déclinaifons analogiques
les grecs diftinguent encore les déclinaifons contractes
( yoyei C o n t r a c t e ) : & par raport aux
Verbes, ils appellent barytons ( voyez ce mot )
ceux qui fuivent la Conjugaifon analogique, parce
quon en prononce la dernière fyllabe avec l ’ac-
cent grave; & Circonflexes (voye% ce mot), ceux
qui admettent la contraction dans certaines termi-
*3aiJ°QS- Mais » (bit dans les noms, foit dans les
verbes , fo i t même dans l ’ùnion de deux mots, la
contraction prend différents noms , félon les difïé-
reiKes qu elle occafionne dans la prononciation.
r a i k “ omme Synckrèfe , lorfqu’on biffe fub-
Hiter les deux voix primitives , mais qu’on les
prononce en une feule diphthongue ; comme quand
qn du tcpy en deux fyllabes , pour oqp«V en trois
lyllabes ( fcrpentis ). , de <rvy, cum, &
de xp*«-«, ufus ; comme fi l ’on difoit, duarum
JimuL voeitnt ufus.
Elle s appelle Crafe, fi aux deux voix primitives
on en lubftitue une troifième toute différente •
comme quand on dit p0ur
( JJemoJthcnis ) , n f a pour rt!Xta ( mari ) : ou
même h Ion en fupprime tine ; comme dans t?»Sa.
pour e>. tnt« [égo novï ) KpaVu , mix tîo, de
, mijeeo.
Voilà des chofes qui, fans doute , peuvent être
traitées avec utilité dans les Grammaires particulières
! mais je penfe que cette grande abondance
de mots n eft bonne <ju'à jeter des ténèbres fur une
matière qui ne devroit pas en être fufceptible, &
a donner vainement un air feientifique à des observations
que l ’on retiendroit bien fans cet appareil.
Contentons-nous dans notre langue , & même , s’il
eftpoflîble, quand nous parlons des autres, dufeul
mot de Contraction. ( M . B e A ü z é e . )
, S Y N O N Y M E , adj. Mot compole de1 la
prépolition grècjue , cum, & du mot 7m/ut,
nomen : de la trvmiotàa ,u cognominatio ; &
vv.».v^.î , 'côgnominans : en forte que voca-
bula. lynonyma fun t diverja ejufdem rei nomina.
C eft la premièie idée que l ’on s’eft faite des S y nonymes
, & peut-être l a . feule qu’en avent eue
anciennement le plus grand nombre des gens de
Cettres. Une forte de Dictionnaire que Ion met
dans les mains des écoliers, & que l ’on counoît
tous le nom général de Synonymes, ou fous les
noms particuliers de Régla P a n am , de Gradua
a<~ ■ ^aTnaj f u-nt y & c , eft fort propre à per-
péîuer cette idée .dans toutes les têtes qui tiennent
pour irreformable ce qu’elles ont apris de leurs
maîtres. Que faut-il penfer de cette opinion ? Nous
allons 1 aprendre de l’abbé Girard, celui de nos grammairiens
qui a aquis le plus de droit de prononcer
lur cette matière.
» Pour aquérir la jufteffe , dit-il ( Pre f. des
Synonymes franfo is ) , » il faut fe rendre un peu
» difficile fur les mots ; ne point s’imaginer que
» ceux qu’on nomme Synonymes , le foient dans
» toute la rigueur d’une refïemblance parfaite, en
» forte que le fens foit auffi uniforme entre eux que
» l’eft la faveur entre les gouttes d’eau d’une même
» fource : car en les considérant de près , on verra
» que cette reflemblance n’embraffe pas toute
» 1 etendue & la force de la fignification ; qu’elle
» ne cohfifte que dans une idée principale , que
» tous énoncent, mais que chacun diverfifie à (a
» manière par une idée acceffoire qui lui conftitue
» un caractère propre & fingulier. La reflemblance
» que produit l’idée générale fait donc les mots
» fynonymes ,* & la différence qui vient de l ’idée
» particulière qui accompagne la générale, fait
» qu'ils ne le font pas parfaitement, & qu’on les
» diftingue comme les diverfes nuances d’une même
» couleur ».
( ^ Quand on ne confîdère , dans les mots qui
défignent une même idée principale , que cette idée
principale & commune y ils font fynonymes , parce
que ce font différents lignes de la même idée t
mais ils çeflent de l ’être , quand on fait attention
aux idées acceflbires qui les différencient; & i l n’y
a , dans aucune langue cultivée , aucun mot fi parfaitement
fynonyme d’un autre, qu’il n’en diffère
abfolument par aucune idée acceffoire, & qu’on
puifle les prendre indiftinCtement l ’un pour l ’autre
en toute occafion. » S’il y avoit des Synonymes
» parfaits, dit du Marfais. ( Trop. III xij ) , il y
» auroit deux langues dans une même langue :
» quand. on a .trouvé le ligne exaCl d’une idée, on
» n’en cherche pas un autre » ).
» Qu’une faufle idée de richefle ne vienne pas
» ici , dit l ’abbé Girard ( ibid. ) , pour frondèi
» mon fyftême fur la différence des Synonymes ,
» faire parade de la pluralité & de l ’abondance.
» J’avoue que la pluralité des mots fait la richefle
» des langues : mais ce n’eft pas la pluralité pu-
» rement numérale , elle n’eft bonne qu’à remplir
» les'coffres d’un avare...c’eft celle qui vient de
» la diverfité, telle qu’elle brille dans les produc-
» tions de la nature . . . Je ne fais donc cas de
» la quantité desVnots que par celle de leurs
» valeurs. S’ils ne font variés que par les fons , &
» non parle plus ouïe moins d’énergie , d’étendue,
» de précifîon , de compofition, ou de fimpliclté
» que les idées peuvent avoir ; ils me paroiffent
» plus propres à fatiguer la mémoire, qu’à enri-
» ebir & faciliter l ’art de la parole. Protéger le
» nombre des mots fans égard au fens, c’e ft, ce
» me femble, confondre l ’abondance avec la füpér-
» fluïté. Je ne fàurois mieux comparer un tel goût,
» qua celui d’un maître d’hôtel qui ferolt eonfîfter
» la magnificence d’un feftîn dans le nombre des
» plats plus tôt que dans celui des mêts. Qu’im-
» porté d’avoir plufieuis termes pour une feule
» îdéeî N’e ft- il pas plus avantageux d’en avoir
» pour toutes celles qu'on fouhaité d’exprimer? »
» On doit juger de la richefle d’une langue ,
dit du Marfais ( Loc. cit. ) , » par le nombre des
» penfées qu’elle peut exprimer , & non par le
„ nombre des articulations de la voix». Il femble
en effet que l ’Ufage, dans tous les idiomes, tout
indélibéré qu’il paroît être, ne perd jamais de
vue cette maxime d’économie : jamais il ne légitime
un mot fynonyme d’un autre fans proferire l ’ancien
, fi la reflemblance de fignification eft entière ;
& s’il laiffe (ùbfifter enfemble ces deux mots, ce |
n eft qu’autant qu’ils font différenciés réellement par
quelques idées acceflbires qui modifient diverfement
la principale.
( ^ Lorfque plufiéurs mots de la même efpèce
repréfencent une même idée objective , variée feulement
de l ’un à l ’autre par des nuances différentes,
qui naiflent de la diverfité des idées ajoutées de
part & d’autre à la première : c’eft la première
idée , commune à tous ces mots, qui eft l ’idée
principale ÿ celles qui y font ajoutées & qui en
différencient les fignes repréfentatifs , font les
idées accejfoires. Par exemple , les adjeétifs I n d
o l e n t , N o n c h a l a n t y P a r e s s e u x ,
N é g l i g e n t , expriment tous quatre un défaut
contraire à l’expédition & au fuccès du travail ;
c’eft. l ’idée commune & principale : mais on eft .
indolent par défaut de* fenfibilité , nonchalant par
défaut d’ardeur, parejfeux par défaut d’aétion,
négligent par défaut de foin ; ce font les idées
accefloires & différencielles. Voye\ Indolent ,
N onchalant, Paresseux, N égligent. Syn.
C’eft fur cette diftin&ion que porte la différence
des mots honnêtes & déshonnêtes , que les cyniques
traitoient de chimérique ; & c’étoit pour avoir négligé
de démêler dans les termes les différentes
idées acceflbires que l ’Ufage peut y mettre , que
ces philofbphes avoient adopté le fyftême impudent
de l'indifférence des termes , qui les avoit
enfuite menés au fyftême plus impudent encore
de l’indifférence des aérions par raport à l ’honnêteté.
Les bons écrivains, dans toutes les langues, ont
bien connu le prix & l ’importance de ces diftinc-
tions fines, & l ’idée d’obferyer les différences des
Synonymes eft fort ancienne. Sans remonter chez
les grecs, où l ’on en trouveroit des preuves abondantes
r Cicéron établit en termes très - clairs le
principe fondamental de cette doéhine. » Quelque
» aprochante que foit, dit-il ( Topic, viij ,\34 ) ,
» la fignification des mots , on a pourtant établi
» entre eux des différences proportionnées .à celle
». des chofes qu’ils expriment». Quanquam enim
vocabula prope idem valere videantur ; tamen ,
quia res differebant, nomina rerum dijferre vo-
tiierunt.
Il n’a pas feulement pofé le principe, il l ’a
jullifié par des dèvelopements & des exemples. Il
n*y a qu’à voir feulement les chapitres v ij, v iij,
& j x ou I V livre des Tufculanes , pour con-
noître avec quel foin & quelle précifion les anciens
ont fu définir : qu’on en juge ici par un fimple
extrait. E fl igitur Æ g r i t u d o , opinio recens
mali proefentis, in quo demitti contrahique ■ aixim.o
rectum ejfe videatur . . Subjiciuntur Æ grI- TUD1NI . . . . ANGORy J.,UCTUS , M.ÆROR , ÆRUMNA , DOLOR y LAMENTATlOy SOLLl- CITUDO y MOLESTlA , AFFLICTATIO , DES- PERATio , 6* f l quoe funt de genere eodem •
A ngor efl ÆGRITUDO premens : LUCTUS , ÆGRITUDO e x ejus qui carus fue rit interitu
acérbo : M æ RO R y ÆGRITUDO flebilis :
Æ r üMNA y ÆGRITUDO laboriofa : D o i. 0 R> ÆGRITUDO crucians : LAMENTATIO , ÆGRl- TÜDO Clim e ju la tu: SOLLl CI TU DO , ÆGRITUDO
cum cogitatione TUDO : MOLESTlA , ÆGRIpermanens
: A f f l ic tATlOy ÆCRITUDO
cum vexatione çorporis : D e s p e r â t io , ÆGRITUDO
fine ullâ rerum exfpeclatione meliorum.
Ce que Cicéron a fu diftinguer avec fagacité
dans la théorie, comme grammairien philofophe >
il a fu en faire ufage dans la pratique , comme
écrivain intelligent & habile. Voici comme il diftingue
Amare 6c DiLïgere ( IX. Èpifi. 14 ).
Quis erat qui putaret ad eum amorem quem
erga te habebam pojfe aliquid açcedere ? Tanium
accejfit y ut mihi nunc denique amare videar ,
antea dilexijje. » Qui auroit cru que mon amitié
» pour vous pût recevoir quelque accroiflement
» Elle en a tant reçu, qu’il me femble que je ne
» fais que de commencer à vous aimer, & qu'au-
» paravant je riavois pour vous que du goût ».
Et ailleurs ( XIII. E p ifi. 47 ) : Çuid ego tibï
commehdem éum quem tu ipfe diligis ? Sed tamen
, ut feires eum à me non diligi folum , fe d
' etiam amari, ob eam rem tibi h(B C feribo. » Pour-
» quoi vous recommander un homme pour qui vous
» avez vous-même de l ’affection ? Cependant, pour
» vous faire favoir que j’ai pour lui , non une fimple
» affeétion, mais une véritable amitié y je prends le
» parti de vous en écrire ».
Les deux adjeérifs Gratüs & Jucundus, que
nous ferions tentés de croire entièrement fynonymes
y & que les Dictionnaires traduifent également
par Agréable ; Cicéron en a très-bien fenti la différence
, & en a tiré parti. Répondant à Atticus >
qui lui avoit apris une trifte nouvelle ( IIL Ep.
ad Atticumy 14 ) , i l lui dit : Ifia veritas y etiam f i
jucunda non e f l , mihi tamen grata efl. » Cette
vérité, quoiqu’elle ne foit pas réjoiiijfante, m’eft
» cependant agréable ». Et dans une lettre qu’i l
écrit à Luccéius après la mort de fa fille T u liia
( V . Epifi. i y ) : Omnis amor tuus ex omnibus
f e partibus oflendït in his lit teris quas à te
proximè accepi ,* non itle quidem mihi ignotus >
f e d tamen gratus & optatus , dicerem jucundus ÿ
nifi hoc verbum in omne tempus perdidijfcm*