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Le moyen qu’emploie Ifabelle dans VÉcole des
maris , pour empêcher Sganarelle d’ouvrir la lettre j
Lui voulez-vous donner à croire que c’eft moi ?
n’eft ni moins naturel ni moins ingénieux, & il eft
d’un plus fin’ comique.
Mais! le prodige de l’art pour fe 'tirer d’une
Situation difficile, c’eft ce trait de caractère du
Tartuffe :
Oui, mon Frère, je fuis un Un malheureux pécheur, toumt épclehiann t, un coupable, d’iniquité, Le plus grand feélérat qui jamais air été. . .
Ce feroit là le dernier degré de. perfection du Comique
, fi , dans la „même pièce & après cette
Situation , on n’en trouvoit une encore plus étonnante
j je parle de celle de la table, au delà de
laquelle on ne peut rien imaginer.
S T~A N C E , f. f. En parlant de l’Ode rao*
derne , Stance & Strophe font fynonymes. Mais
comme, dans l’article S t r o ph e , je m’occuperai
fpécialement de la forme de l’Ode antique , je
diftingue ici , fous le nom de Stance, la coupe
4e l’Ode françoife.
La Stance eft une période poétique fymétri-
queraent çompofée. Il eft bien vrai qu'allez fouvent
elle contient plufieurs fens fiais, & qu’aufli quelque^
fois le . feus n’en eft que fufpendu j mais je la
prends, pour la définir , dans fa forme la plus
régulière : & au gré de l’oreille comme au gré
4 e l ’e fp r it ., la Stance la mieux arrondie eft celle
dont le cercle embraffe une penfée unique , & qui
fe termine comme elle & avec elle par un plein
repos.
J’ai dit quelle é to ït la mefure da la période
oratoire ( Voye\ P é r io d e ). Celle de la Stance
eft à peu près la même : & comme la moindre
étëndue qu’elle ait pu fe donner , eft celle de quatre
petits vers ; la plus grande eft celle de dix vers de
huit fyliabes, ou de fix vers alexandrins. V. P é r io d e .
Des diftiqnes, accolés l’un à l’autre , ne fauroient
fMoramlheerr buen e, iSYtz/zceJiarmonieufe : & cet exemple de
UIl nne’ ecfth orifeen q iucii pblaasî td ’né’teefrtn jealmlea idsu arléleu ;rée ; L’épNinee lfçu ift olan tr poifse ;l on&g cteemuxp sq:ui font contents,
jeet exemple lui-même fera fentir .que la rime plate
foutiendroit mal le ton de l’Ode, & manqueroit
de grâce dans les Stances légères. L’oreille y
yeut au moins quelque entrelacement de rimes , &
permet tout au plus un diftique ifolé à la fin de
J# Stance, comme dans l’octave Italiennes epçor#
S T A
l ’eflài qu’en a fait Malherbe n’a-t-il rien de bien
féduifant :
Laiffe-moi, R a i fo r t importune;
Ceffe d’affliger mon repos ’,
En me fefant , .mal à propos ,
Défefpérer dè ma fortune :
T u p e rd s temps de me f e c o u r ï r ,
Puilque je ne veux point guérir.
RoujTeau n’a pas laiffé d’employer une fois cette
forme de Stance; mais pour donner au diftique final
une cadence harmonieule, il l ’a formé de deux vers
héroïques.
Seigneur, dans ta gloire adorable,
Quel mortel eft digne d’entrer ?
Qui pourra , grand. Dieu, pénétrer
. Ce Tanétuaire impénétrable ,
O ù - r e s S a in t s inclinés , d’un oeil refpeâueux ,
Contemplent de t o n f r o n t l’éclat majeftueux !
En indiquant le vers mafeulin par une m , 8c
le féminin par une ƒ , je vas figurer les djverfes
combinaifons dont eft fufeeptible la Stance. Mais
je dois faire obferver d’abord que la clôture n’en
eft bien marquée que par un vers mafeulin , & qu’une
définence muette ne la termine jamais bien. Auffi ,
dans le haut ton de l ’Ode , nos poètes ont-ils
évité cette cadence molle foible. Roüf-
feau , dans fes odes facrées ,fe l ’eft permife une feul§
fols ;
Peuples, élevez vos concerts ;
Pouffez des cris-de joie & des chants de victoire.
Voici le Roi d e l’ unîyers ,
Qui vient faire éclater fon triomphe & fa gloire }
& une fois dans fes odes profanes :
Trop heureux qui du champ par fes pères laiffé
Peut parcourir au loin les limites antiques,
Sans redputer les cris de l’orphelin chaffp
Du fein de fes dieux domeftiqw.es.
Ce n’eft que dans l ’Ode familière & badine ;
dont la grâce eft la nonchalance, qu’il fied de
donner à la Stance ce cara&ère de molleffe ; comipe
dans l ’ode a l ’abbé de Chaulieu.
Je ne prends point pour vertu
Les noirs accès de triftefle
D ’ un loup-garou revêtu
Des habits de la Sagefïè.
Plus légère que le vent,
Elle fuit d’un ffux Savant
La fombre m é la n c o l ie , Et fe fauve bien fouvent
Pans les bras 4e la Folie».
Je
j e dois faire obferver encore que les poéfîes
Tegulières n’admettent guère, d’une Stance à l ’autre,
la fucceffion de deux vers mafculins ou féminins
de ‘rime différente. C ’eft une diffonnance qui déplaît
à l ’oreille ; & fi Malherbe fe l ’eft permife
dans des Stances libres & négligées, comme dans
eelle-ci,
Tel qu’au foir on voit le foleil .
TSee lj eatuer mauaxti nb rials f odrut dfoem l’omnediel,. Les affaires de l’homme ont un autre deftin i La nAuiptr èqsu iq luu’ii l Xeufrtv ipeanrt tin ’dau ja mmoanisd ed e, maria.
JNupe itreerj,e ttaem di ed efess mauotretles ls. Ni requêtes, ni facrifices, &c.
ni ce poète, ni RoufTeau n’ont pris fouvent cette
licence dans le ftyle pompeux de l ’Ode. Ils ont
bien lenti l ’un & l ’autre que la fucceffion de deux
finales du même genre & de différent fon, comme
matin & mortels, étoit déplaifante à l ’oreille , &
que , dans un poème qui par eifence doit être harmonie
ux, ilfa lloit l ’éviter.
Parmi les Stances que je vas figurer, ondiftin-
guera aifément celles qui n’ont aucun de ces deux
vices , & ce feront les feules dont je donnerai
4es exemples.
Stances de quatre vers. .
F , m j, f ,! m.
M ,. f , ni , f.
M , f , f , . nu
F , m , m ,, f.
L a prem ière coupe eft la feule qui convienne
égalem en t à la Poéfîe lég ère & à la Pocfie m a-
ieftueufe,
Votre défert eft fauvage;
Dans un plus fauvage encor,
Angélique, ftère Sc fage,
Rencontra Le beau Médor;
Deshoulicres9
Combien nous avons vu d’éloges unanimes,
Condannés, démentis par un honteux retour}
Et combien de héros ,'glorieux, magnanimes,
One vécu trop d’un jour !
Roujfeaiu
Stances de cinq vers.
D ans la Stance de cinq v ers, l’une des deux
G K AM M . e t Llttérat. Tome III.
rimes eft triple, comme dans tous le s . nombres
impairs : F, m, f,f, ». F, m, m , fm.
M , f , m , n i , f. MM,, ff,m f, , mf ,, mf... ; F , m, f, m, f.
Dans ces combinaifons, les deux premières font les
feules qui conviennent à l ’Ode.
DO onqut eD néed apleu ifsu-jte pfoufrf elfelsè uar î,les VEto ldeer taeusx c hliaenufxo nos ù- imtum mor’taeplpleesl les, Partager l’aimable douceur !
Roujfeaa.
APa rld’aofnpenéet , dDesi e-mu épcuhlafnlàtsn,t ,c poanrfduosn, néep ào umvaa nftoéi b,leffe* LMeo tnr ozuèblele mm’’aa ftaraifhi,i ,m Sese ipganse uorn, t jeh élfei téc o;nfeffe, En voyant leur profpérité.
Roujfeaa.
Stances de Jzx vers.
E lle fe 4îvife de deux en deux vers, rimes croi-
•fées; ou en un Quatrain & un Diftique , ou mieux
encore en deux Tercets.
F, m, f, m, f, m.
LC’ea mno’eufrt epfot ijnatl opuaxr edfef ofrets qdur’ooitns aime; IOl nn en ed élp’oenbdti eqnute q duee lpuai-rm foêmn ceh ,oix-; LTuoiu fté arel cnoen n-cooîtn nfaa îtl opio ifnutp rdême leo i,«.
Roujfeau.
F , m, m , f,. m , m.
SSoa itp aqruoele deen cfhesa ndtoe ucleess fmenesr v,eille» SFocaifp eq ulee sf ac oevuorisx ,p dare lefess oarcecilelnests ;, AQu q’ouni nnee lfaa itp-eeullte a fafvezo uleoru er ï
Malherbe.
F , f, m : f, f, m.
EVto uvso uavs epzo vuurr iteozm ebnecro rlees , pinlufes niflélusf tqruees tvêoteuss; êtes,
Ignorer le tribut que l’on doit à la mort !
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