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i° . On fait «fage de ce Prétérit pour défigner
le Prétérit actuel. J 'a i LU L'excellent livre des -
Tropes y c’eft à dire, mon action de lire ce livre ejl antérieure au moment même oà je parle. Il y a plus j aucune langue n’a établi, dans fes verbes ,
un Prétérit attuel proprement dit $ c’eft le Prétérit
indéfini qui en fait les fonctions, 8c c’ eft par la
même raifon .qui fait que le Préfent indéfini tient
lieu du Préfent attu e l, raifon par conféquent que je
ne dois plus répéter.
i ° . On emploie fréquemment le Prétérit indéfini
pour le Prétérit poftérieur. J'AI FINI dans un
moment; f i vous a v e z r e l u cet ouvrage de-
main, vous m'en àire\ votre avis. Dans le premier
exemple , j ’ai f in i , énonce l’attion de finir
comme antérieure à l ’époque défignée par ces mots,
dans un moment, qui eft nécefiairement une époque
poftérieure ; c’eft comme fi l ’on difoit, T AUR
A I FINI dans un moment, ou dans un moment
j e pourrai dire y J 'a i f in i . Dans le fécond
exemple , vous ave\ relu, préfente l ’attion de
relire comme antérieure à l’époque poftérieure indiquée
par le mot demain ; 8c c’eft comme fi l ’on
difoit, lorfque v o u s AUREZ RELU demain cet
ouvrage y vous m’en diie\ votre avis , ou lorfque
demain vous pourre\dire que v o u s a v e z r e l u t
Si c .
3°. Le Prétérit indéfini eft quelquefois employé
pour le Prétérit antérieur. Que je dife, dans un
récit j Sur les accufations vagues & contradictoires
qu'on alléguoit contre lui y je prends fa
défenfe avec feu & avec fuccés : à peine Al-JE
PARLÉ y qu’un bruit fourd s’élève de toutes parts,
&c : dans cet exemple, ai-je parlé énonce mon
attion de parler comme antérieure à l ’époque défignée
par ces mots, un bruit fourd s'élève : mais
le Préfent indéfini s'élève eft mis ici pour le Préfent
antérieur périodique s'éleva ,• & par conféquent
l'époque eft réellement antérieure à Patte de la
parole. Ai-je parlé eft donc employé pour avois-
je parlé, & il énonce en effet l ’antériorité de mon
attion de parler à l ’égard d’une époque antérieure
elle-même au moment attuel de la parole,
4°. Le Prétérit indéfini n’eft jamais employé
dans le fens totalement indéfini comme le Préfent ;
c’eft que les propofitions d’éternelle vérité, effen-
ciellement préfentes à l ’égard de toutes les époques
, ne font ni ne peuvent être* antérieures ni
poftérieures à aucune : & les propofitions d’une
vérité contingente ont néceffairement des raports
différents aux diverfes époques ; raport de fimultanéité
pour l ’une, d’antériorité pour l ’autre, de pof-
tériorité pour une troifième.
II. L e fécond de nos Prétérits eft le Prétérit
antérieur fimple fueram ( j’avois été ) , laudave-
ram ( j’avois loué ) , miratus fueram ( j ’avois admiré
). Les grammairiens ont donné à ce Temps
le no m de Prétérit pluf-que-parfait; parce qu’ayant
poipméparfqitlc Prétérit indéfini, dont le carattçre I
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eft d’exprimer l ’antériorité d’exiftence , ils ont cru
devoir ajouter quelque chofe à cette qualification,
pour défigner un Temps qui exprime l ’antériorité
aexiftence & l ’antériorité d’ époque.
Mais qu’il me foit permis de remarquer que la
dénomination de p ia f q ue-parfait a tous les vices
les plus propres à la faire profcrire. i° . Elle implique
contradittion, parce qu’elle fuppofe le
parfait fufceptible de plus ou de moins, quoiqu’il
n’y ait rien de mieux que ce qui eft parfait.
x°. Elle emporte encore une autre fuppofition
également fauffe, favoir qu’il y a quelque per-
fettion dans i’antériorilé , quoiqu elfe n’en admette
ni plus ni moins que la fimultanéité 6c la pofté-
riorite. 30. Ces confidérations donnent lieu de
croire que les noms de Prétérits Parfait Si pluf-
que - parfait n’ont été introduits que pour les dif-
tinguer du prétendu Prétérit imparfait ; mais comme
i l a ete remarqué plus haut que cette dénomination
ne peut fervir qu’à défigner l ’imperfettion des
idées des premiers nomenclateurs, il faut porter le
même jugement des noms de parfait 6c de pluj-que-
parfait qui ont le même fondement.
Quoi qu’il en fo it, ce fécond Prétérit exprime
en effet 1 antériorité d’exiftence à l ’égard d’une
epoque antérieure elfe-même à.l’atte de la parole :
ainfi , quand je dis coer.averam cum intravit ( j avois
foupe lorl^uil eft entré') j caenaveram ( j’avois
foupé ) exprime l’antérioriorité de mon fouper à
l ’égard de l ’époque défignée par intravit ( il eft
entré): 6c cette époque eft elle-même antérieure
au temps où je le dis 3 ccenaveram eft donc véritablement
un Prétérit antérieur fimple , ou relatif à
une fimple époque.
III. En françois , en italien , | 6c en efpagnol,
on trouve encore un Prétérit antérieur périodique ,
qui eft propre a ces langues, 6c qui diffère du précédent
par le terme de comparaifon , comme le
Préfent antérieur périodique diffère cfii Préfent antérieur
fimple. J'eus étéj j'eus loué y j ’ eus admiré,
font des Prétérits antérieurs périodiques ; 6c pour s’en
convaincre, il n’y a qu’à examiner toutes les idées
partielles défignées par ces formes des verbes être,
louer y admirer, ôcc.
Quand je dis , par exemple y Teus foùpé hier
ayant qu'il entrât, il eft évident i° . que j’indique
^ 1 antériorité de mon fouper , à l ’égard de
l ’entrée dont il eft queftion; 20. que cette entrée
eft elle-même antérieure au Temps où je parle,
puifqu’elle eft annoncée comme fimultanée avec
Je jour d hier j 30. enfin il eft certain que l ’on
ne peut dire j ’eus foupé y que. pour marquer l’antériorité
du fouper à l ’égard d’une époque prife
dans un période antérieur à celui où l’on parle : il
eft donc confiant que tout verbe , fous cette forme,
eft au Prétérit antérieur périodique.
IV. Enfin nous avons un Prétérit poftérieur, qui
exprime l ’antériorité d’exiftence à l’égard d’une époque
pofterjeure au Temps ou J.’op parle j comme
juero
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fuero (j'auraiété) ylaudavero (j’aurailoué), miratus
ero ( j’aurai admiré),
» Le troifième Temps compofé , dit encore
» l’auteur de la Grammaire générale ( loc. c it.) ,
» e'ft celui qui marque l ’avenir avec raport au
» pafféj favoir, le Futur parfait y comme cccna-
» vero ( j’aurai foupé ) : par où je marque mon
» attioa de fouper comme future en foi , 6c comme
» paffée au regard d’une aiitre chofe avenir qui la
» doit fuivre ; comme Quand j ’aurai foupé il
» entrera : cela veut dire que mon fouper , qui
» n’eft pas encore venu, fera paffé lorfque fon
♦» entrée, qui n’eft pas encore venue, fera pré-
» fente ».
La prévention, pour les noms reçus fait toujours
iilufion à cet auteur ; i l eft perfuadé que le Temps
dont il parle eft un Futur , parce que tous les grammairiens
s’accordent à. lui donner ce nom ; c’eft
pour cela qu’il dit que. ce Temps marque Vavenir
avec rapo.rt au pajfé : au lieu qu’il fuit de l’exemple
même de la Grammaire générale , qu’il marque
le pajfé avec raport à l'avenir. Quelle eft
en effet l’intention de celui qui dit, Quand j ’ aurai
foupé i l entrerai C’eft: évidemment de fixer
le raport du Temps de fon fouper au Temps de
l ’entrée de celui dont il parle : cette entrée eft
l’époque de comparai fon , 6c le fouper eft annoncé
comme antérieur à cette époque ; c’eft l ’unique
deûination de la forme que le verbe prend en cette
occurrence, 6c par conféquent cette forme marque
réellement l ’antériorité i l ’égard d’une époque poftérieure
au Temps de la parole, ou , pour me fervir
des termes de Lancelot, mais d’une manière confé-
quente a l’obfervation, elle marque le pajfé avec
raport à l'avenir.
Une autre erreur de cet écrivain célèbre, eft de
croire que coenavero ( j ’aurai foupé), marque mon
attion de fouper comme future en fo i , 6c comme
paffée au regard d’une autre chofe avenir , qui
la doit fuivre. Ccenavero St tous les Temps pareils
des autres verbes n’expriment abfolument que le
fécond de ces deux raports 3 6c loin d’exprimer le
premier , il ne le fuppofe pas même. En voici la
preuve dans un raifonnement d’un auteur qu’on
naccufera pas de mal écrire , ou de ne pas fentir
la force des termes de notre langue ; c’eft Plucbe.
» Si le tombeau, .dit-il ( Spectacle de la naît
tare y dife. prél. du tom. • V I II , pag. 8 6c 9 ) ,
» eft pour lui ( l ’homme ) la fin de tout j le genre
» humain fe divife en®eux parties , dont l'une fe
» livre impunément au crime, l’autré s’attache fans
» fruit à la vertu . . . Les voluptueux & les four-
» bes . . . feront ainfi les feules têtes bien mon-
» tées y 8c le Créateur, qui a mis tant d’ordre dans
» le monde corporel, oaura établi ni règle ni
» juftice dans la nature intelligente, même après
» lui avoir infpiré une très-haute idée de la règle ôc
» de la juftice ».
Dès le commencement de ce difeours , on trouve
Cramm. e t L i t t é r a t . Tome III.
T E M yox
une époque poftérieure, fixée par un fait hypothétique
; f i le tombeau ejl pour l ’homme la fin <lç
tout y c’eft à dire, en termes clairement relatifs
■ à l ’avenir, f i le tombeau doit être pour C homme
la fin de tout. Quand on ajoùte enfuite que
le Créateur n A U R A É T A B L I ni règle ni ju flic e ,
on veut Amplement défigner l ’antériorité de cet
établiffement à l ’égard de l ’époque hypothétique j
6c i l eft confiant qu’il he s’agit point ici de rien
ftatuer fur les attes futurs du Créateur, mais qu il
eft queftion de conclure , d’après fes àttes paffes ,
' contre les fuppofitions abfurdes qui tendent à anéantir
l ’idée de la Providence. Le verbe aurd établi
n’exprime donc en foi aucune futurition, 6c l ’on
auroit même pu dire, Le Créateur n a établi ni
règle ni jujlice f ce qui exclut entièrement 8c in-
conteftablement l ’idée d’avenir : mais on a préféré
avec raifon le Prétérit poftérieur, parce qu’il étoit
effenciel de rendre fenfible la liaifon de cette con-
féquence avec l ’hypothèfe de la deftruttion totale-
de l ’homme, que l ’on fuppofe future j 8c que rien
ne convient mieux pour ceiaque le Prétérit poftè-
rieur, qui exprime effenciellement relation à une
époque poftérieure.
$. 3. Syflême des F U T U RSy ju ft ifié parles
ufages des langues. L ’idée de fimultanéité, celle
d’antériorité, 6c celle de poftériorité fè combinent
également avec l ’idée du terme de comparaifon :
de là autant de formes ufuelles pour l'expreffion
des Futurs, qu’il y en a de généralement reçues
pour la diftinttion des Préfènts 6c pour celle des
Prétérits. Nous devons donc trouver un Futur indéfini
, un Futur antérieur , Sc un Futur poftérieur.
I. L e Futur indéfini doit exprimer la poftériorité
d’exiftence avec abftrattion de toute époque de
comparaifon ; 6c c’eft précifément le carattere des
Temps latins 6c François , futurus fum ( je dois
être ) , laudaturus fum ( je dois louer) , miraturus
fum ( je dois admirer ) , 8cc. .
Par exemple, dans cette phrafe , Tout homme DOIT MOURIR , qui eft l ’expreffion d’une vérité
morale, confirmée par l ’expérience de tous lés
temps ; ces mots , doit mouriry expriment la poftériorité
de la mort, avec abftrattion de toute époque
y 6c dès là avec relation à toutes les époques 3
6c c’eft .comme fi l ’on difoit, Tous les hommes
nos prédêceffeurs DEVOIENT MOURIR , ceux^
d’aujourdhui DOIVENT MOURIR y 8c ceux qui
nous fuccèderont DEVRONT MOURIR : ces mots,
doit mourir , conftitnent donc ici un vrai Futur
indéfini.
Ce Futur indéfini fert exclufivement à l ’expreffion
du Futur attuel, de la même manière 8c pour la
même raifon que le Préfent 6c le Prétérit attuels
n’ont point d’autres formes que celle du Préfent &
du Prétérit indéfini. Ainfi , quand je dis, par exemple
, Je redoute le jugement que le Public d o i 't 1 p o r t e r de cet ouvrage i ces mots, doit porter*
». <; ce