
i> groflières, froides, infipides, quidéplaifent&quî
•> fatiguenr d’autant plus , que celui qui les fait
» a ae frein de plaire & de réjouira Je ne parle
» pas feulement des vieux Quolibets , qui font
» dans la bouche du petit peuple & qui fe com-
» muniquent de père en fils : Où efi monfieur ?
» i l ejl furfespieds : Où avey-vous diné? fous
» le ne\ : Brûle\ votre cherhife , & vous n'aure\
» p lu s mal dedans , en parlant à une perfonne
» qui a mal aux dents , La fortune Uù a tourne'
» le dos , en parlant d’une perfonne contrefaite,
» &c. Je parle des Quolibets qui fe font tout de
» nouveau en^écrivant ou en parlant , & dont
» çeux qui écrivent ou qui parlent fe favent quel-
» quefois bon gré. Un écrivain qui aura l ’efprit
» tourné au Quolibet, penfera être fort agréablè
» en difànt , pour fe moquer d’une exclamation
» que fon adverfaire aura faite , Son. grand O
» n e fi quyun o en chiffres : *il penfera dire un
» bon m o t, en l ’avertifrant de ne p as fuivre le
» grand nombre , de peur d'être un docteur à
» la douzaine . . . Un fameux prédicateur, pré~
» chant devant un grand prince, ayant pris pour
» fon texte Omnis caro foenum ( lfa ‘i , xl. 6 ) ,
» commença par dire, Monfeigneur, fo in de
» vous, fo in de moi , fo in de tous les hommes ;
» Om n i s CARO foe n um . . . C ’eft déshonorer
» la fainteté de la parole divine par une expref-
» lion bâfre & bouffonne ; & blefrer la dignité de
» notre langue, qui ne peut fouffrir qu’on plai-
» fante mal a propos & groffièrement. Ce n’eft
» pas qu’il n’y ait des occafîons où un Quolibet
» peut trouver fa place ; mais cés occafîons font
» rares, & i l faut que le Quolibet Cbit fpirituel&
» délicat, s’il peut y avoir de l ’efprit & de la
» délicatefle dans les Quolibets ».
J’ajouterai, s’il s’agit d’un Quolibet ancien &
déjà connu , que l ’emploi doit en être ingénieux
& extraordinaire , afin qu’ànobli par le mérite
d’une application inattendue , il puîfle faire en
quelque forte oublier le vice de là trivialité. Voici
l'exemple d’ün Quolibet fort trivial & très-bas ,
placé avec efprir & anobli par les circonftapces j
c’eft dans le dernier vers du fameux' Songe de Patris :
Je fong eois cette nuit que, de mal confümé
C ô t e à côte d’un pauvre on m ’a v o it inhumé;
E t q u e , n’ en pouv ant pas fouffrir le vo ifin a g e ».
E n mo rt dé qualité je lui tins c e langage •_
Retire-toi > Coquin » va pourrir loin d’ ici a
U ne t’apartient pas de m’âprocher ainji^
« C o q u in ! c e me dît-il d ’ une arrogance exrrême;
» V a chercher tes coquins a i lleu r s , Coquin to i-m êm ê -
*> T o u s ic i font égaux-; jp ne te dois-plus r ien ,
» Je fu is fur mon. fumier comme toi fur le tien m.
Ce qu’i l y a d’ingénieux , c’eft d’avoir mis le
Quolibet dans la bouche d’un homme de la lie du-
peuple, qui naturellement ne pouvoit guère prendre
un ton plus élevé fans choquer la vraifemblance|,
& la fimilitude tacite des vanités de la grandeur
avec ce qu’il y a de plus abject dans la nature ,
donne au Quolibet, qui ne fe montre ainfî que
par cbmparaifon , un degré d’élévation qui l ’anoblit
en cet endroit. « Si Virgile a dit qu’il tiroir des
» perles du fumier d’Ennius ne peut - on pas
» aire., obferve encore Bouhôurs, que Patris a
» changé le fumier même en quelque chofe de pré-
» cicux ?
» Comme i l eft difficile de rencontrer toujours
» fî. heureufement} à parler en général, le bon fens
» veut que, dans les ouvrages d’efprit, on évite
» toutes fortes de Quolibets, de peur que , fans y
» penftr-, on ne tombe dans ce ftyle froid, qui
» déplaît tant à Longin & à fon traducteur. I l faut
» même s’abftenir, dans la-cdnverfàtion la plus
» enjouée & la plus libre, de tout ce qui a l ’air
» de . . . Quolibet ,* & s’il échape quelque plai-
» fanterie de cette nature, i l ne faut pas manquer
»■ de faire entendre ou de laifler entrevoir ,.que c’eil
» une méchante plaifanteriè qu’on dit exprès ; il eft
» bon de s’en moquer le premier : car fî, au fen-
» timent de Pafcal , un difeur- de bons mots eft un
» mauvais caraétère, que fera-ce d’un difeur demé-
» chants mots ? Tout cela n’empêche pas néanmoins
» qu’on ne puiffe quelquefois uferd’un jeu de paroles
» pour s’expliquer finement : & c*èft ainfî que, quand
» on parla du mariage de- Catherine, .'foeur de
» Henri I V , avec le duc de Bar, la princeffe, qui:
» aimbit ailleurs , fi on en croit là- chronique fcan-
» daieufe,. dit de Bonne foi ofielle ne troùvoit pas■
» fon comte dans cette alliance , féfant allufîon à'
» la qualité de celui qu’elle àimoïtN»*
» Il en eft peut-être quelquefois de ces traits,
» dit encore Van-Effen ( loc. d u ) , comme des-
» faux brillants, qu’on a; fi. ingénieufèment mis en
» oeuvre, qu ils font prefqueautant d’honneur à ceux
» qui s’en parent que les bijoux lés plus précieux,..
» Mais à quoi fervent les Quolibets . . .' qu’ù
» confondre ceux quîs’ÿ amufènt avec les c'rocheteurs
» & les favetiers , qui d’ordinaire font les rieurs dé
» leur, voifîgnage » p|, JYL B e a u z é e . ).
(N .) Q UOLIRÉ TIQUE , adj. Fécond en Quolibets.
Surchargé de Quolibets.On f î t , Écrivain quoli
b étique , Style quo.lb’'tique ,. Converfation quoli«
bétique. ( M. B e a ^ ZÉE. ).
(N.)QUOLTBÉTISTE , f. m.. & f.'C e lu i, celle'
qui aime les Quolibets. Le prétendu art des Quolibets-
eft fi aifé & en même temps fi peu utile , que c’eft
avec raifon que l ’on ne fait aucun cas d’un Quoli-
bêtifie. Une chercheufe d’efprit eft ridicule, mais
une Quolibétifie eft méprifable. [M . B e a u z é e .)/
• * W *
R
R , f . f. Grammaire. C ’eft [la dix-huitième
lettre 8t la quatorzième confonne de notre alphabet.
Nous l ’appelons erre f nom féminin en effet:
mais le nom qui lui conviendroit pour la juftefle
l ’épellation eft re, f. m. C’eft le f des grecs, & le 1
des hébreux
Cette lettre repréfente une articulation linguale
& liquide, qui eft l’effet d’un trémoufrement fort
v if de la langue dans toute fa longueur. Je dis
dans toute fa longueur ; & cela fe vérifie par la
manière dont prononcent certaines gens qui ont
le filet de la langue beaucoup trop court : on
entend une explofion gutturale, c’eft â dire, qui
s’opère vers la racine de la langue, parce que le
mouvement n’en devient fenfible que vers cette
région. Les enfants au contraire, pour qui , faute
d’habitude , il eft très-difficile d’opérer aflez promptement
ces vibrations longitudinales de la langue ,
en élèvent d’abord la pointe vers les dents, fopé-
rieures, 8c ne vont pas plus loin : de là l ’articulation
l au lieu de r ; & ils difent mon pèle, ma
mêlei mes flè le s ,palier pour parler, coulil pour
courir, &c.
Les trois articulations 7, r , n , font commuables
entre elles , comme je l ’ai montré ailleurs. ( Voye\
L ). Les articulations f 8c r font au fri commuables
entre elles : parce que, pour commencer r , la
langue fe difpofe comme pour le fiffiement f ; elle
n’a qu’à garder cette fîtuation pour le produire.
De là vient , comme le remarque Fauteur de la
Méthode de Port-Royal ( Traité des lettres > ch. x j) ,
que tant de noms latins fe trouvent en er 8c en i s ,
comme vomer 8c vomis, ciner 8c cinisy pulver 8c
pülvis ; 8c des adjeétifs ,faluber 8c falubris, vo-
lucer 8c volùcris : que d’autres font en or 8c en
os ; labor & labos , honor 8c honos. Le favant
Voffius ( D e art. Gramm. I. 15 ) fait cette remarque
: A ttic i pro , ^aprvp aïunt ^aprvs, & ve-
teres latini dixere, Valefiii , Fufii , Papifii ,
Aufelii; qua: pofieriores per R maluerunt, V alerii,
F u r ii, Papirii, Aurelii.
L a lettre R eft fouvent muète dans la prononciation
ordinaire de notre langue : i° . à la fin des
infinitifs en er 8c en i r , même quand ils font fuivis
d’une voyelle j & l’on dit aimer â boire , venir à
fe s f in s , comme s’il y avoit aimé à boire, veni
à fe s fin s / on prononce r dans la le&ure & dans
le difcours foutenu : z°. R ne fe prononce pas à
la fin des noms polyfyllabes en ier , que l’on prononce
par ié , comme officier, fommelier , teinturier,
menuifier, &c ; c’ eft la même chofe des
adjectifs polyfyllabes en ie r , comme entier, particulier
, fingulier, & c : f 5. R eft encore une
R A C
lettre muète à la fin des noms polyfyllabes en e r ,
comme danger , berger , &c j l ’abbé Girard
( Tom. 1 1 , pag. 397 ) excepte ceux où la termi-
naifon er eft immédiatemént précédée de/’, m ou v ,
comme enfer t amer , hiver.
L ’ufage eft fur cela le principal maître qu’il!
faut conlulter; & c’eft l ’ufage, aétuel : celui dont
les décifîons font confignées dans les Grammaires
écrites , cefle quelquefois affez tôt d’être celui qu’il
faut fuivre.
L a lettre R é toit, chez les anciens, une lettre
numérale valant 80 ; 8c fi elle étoit furmontée
d’un trait horizoqfal, elle valoit 1000 fois 80 j
R =80000.
Dans la numération des grecs, le f furmonté
d’un petit trait marquoit 100 ; fî le trait étoic-
au deffous , il valoit 1000 fois 100 , 8c pt =
100000.
Dans la numération hébraïque, le vaut 200;
& s’i l eft furmonté de deux points difpofés horizontalement
, i l vaut 1000 fois zoo , ainfî =
zooooo.
Nos monnoies qui portent la lettre R ont été
frapées à Orléans. ( M. B e a u ZÉe , )
* R A C IN E , f. f. Terme de Grammaire. O a
donne en général le nom de Racine à tout mot
dont un $utre eft formé , foit par dérivation ou.
par compofition , foit dans la même langue ou
dans .une autre : avec cette différence néanmoins
qu’on peut appeler Racines génératrices, les mots
primitifs à l ’égard de ceux qui en font dérivés ; &
Racines élémentaires. , les mots fîmples à l ’égard
de ceux qui en font compofés Vqye\ F ormation.
•
L ’étude d’une langue étrangère fe réduit à deux
objets principaux, qui font le Vocabulaire & la
Syntaxe j c’eft à dire qu’il faut aprendre tous les
mots autorifés par le bon ufage de cette langue 8c
le véritable fens qui y eft attaché , & aprofondir
aufli la manière ufîtée de combiner les mots pour
former des phrafes conformes au génie de la langue.
Ce n’eft pas de ce fécond objet qu’il eft ici queftion ;
c eft du premier.
L ’étude des mots reçus dans une langue eft
d’une étendue prodigieufe ; & fi on ne prétend retenir
les mots que comme mots, c’eft un travail
infini, & peut-être inutile : les premiers apris
feroient oubliés avant que l ’on eut atteint le milieu
de la carrière ; qu’en refteroit-il quand on
feroit à la fin , fi on y arrivoit ? L’abbé Danet
dans la Préface de fon Dictionnaire françois-
M m z