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» Pyrrhus alluma dans la ville de Troie ; & i l èft
» au figuré par raport à la paillon violente que
» Pyrrhus dit qu’il reifentoit pour Andromaque...»
I l me femble que cette figure n’eft d’ufage que
dans les phrafes explicitement comparatives, de
quelque nature que foit le raport énoncé par la
comparaifon, ou d’égalité, ou de fupériorité, ou
d’infériorité : brûlé d’autant de fe u x .que j ’en
allumai, ou de plus ou de moins de fe u x que
j e n’ en allumai. Dans ce cas, ce n’eft pas le
mot unique exprimé dans la phrafe , qui réunit
fur loi les deux fens ; il n’en a qu’un dans le pre-
mier terme de la comparaifon , & il eft cenfé
répété avec le fécond fens dans l ’expreilîon du
fécond terme. Ainfi , Coagulatum eft f ia it lac cor
eoriw ( P f . 1 18 ) , eft une propofition compara-
(ive d’égalité , d ans laquelle le mot coagulatum ,
qui fe raporte à cor eorum, eft pris dans un fens
métaphorique; & le fens propre, qui fe raportê
a la c , "eft néceffairement attaché à un autre mot
pareil foufentendu; cor eorum coagulatum ejl fient
lac coagulatum.
L a Syllepfe, bien entendue, n’eft donc rien autre
chofe que la figure de Di&ion par confonnance
phyfîque, déjà connue fous le nom d’Antanaclafe
( Voye\ ce mot ). On peut feulement obferver
que cette figuré peut prendre deux formes différentes
: l ’une, ou le mot à double Jens eft répété
pour cha'cun des deux fens , Simiafertiper fimia ;
l ’autre , ou le mot à double fens n’eft exprimé
qu’une fois pour les deux, Galathcea thymo mihi
dulcior Hybloe. Mais cette fécondé forme n’empêche
pas la figure d’être la même, puifque la
conftruélion la ramène néceffairement à.la première
par le moyen de l ’anâlyfe ; Galathoea mihi dulcior
præ dulci thymol H y b las.
Du Marfais femble infînuer, que le fens figuré
joint dans la Syllepfe au fens propre eft toujours
métaphorique. Il me femble pourtant qu’i l y a
Syllepfe dans la phrafe latine Nerone neronior
ipfo, & dans ce vers françois Plus mars que le
Mars de la Thrace ; puifque Nero d’une part &
Mars de l’autre font pris dans deux fens différents.:
or le fens figuré de ces mots n’eft point une Métaphore
; c^eft une Antonomafe , ce font dés noms
propres employés pour des noms appellatifs. Je
dis plus : les deux fens du mot de la Syllepfe
peuvent être propres, comme on le voit dans ces
deux vers :
Armand, qui pour fixvers m’as donné fix-cents livres
Que ne puis-je à ce prix te vendre tous mes livres.!
. I l y a auffi une figure de conftruélion que les
grammairiens appellent Syllepfe ou Synthèfe. Je
n’adopte que ce dernier nom , & c’eft fous ce nom
que j’en parlerai. ( M. B e a u z e e . )
(N.) SYMBOLE , f. m. Belles-Lett. Signe,ou
»arque diftinélive d’une perfonue, ou d’une chofe.
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On a v u , dans Y article Emblème , que celle
efpèce de métaphore demande une reffemblance
entre l'objet fenfible & la penfée qu’il exprime. Il
n’en eft pas de même du Symbole : celui - ci ne
fuppofe qu’une liaifon d’idées établie par l ’habitude.
Ainfi, entre le carâ&ère de Faigle ou du
lion & le caractère d’une âme élevée ou d’une
âme forte & courageufe , il y a réellement de
I analogie & de la reffemblance ; c’eft un Emblème
: au lieu qu’entre les lignes du Zodiaque &
les faifons de l ’année , il n’y a qu’un raport de
coexiftence & d’affinité $ & ce ne font que des Symboles.
Encre les deux idées du Symbole , c’eft â dire,
entre celle du digne & celle de la chofe , le raport
eft réel, lorfque , dans la réalité , les objets mêmes
fe correfpondent ; le raport eft fiélif Ou conventionnel
, lorfque la liaifon des idées edi l ’ouvrage
de l ’opinion, ou de. l ’imagination : c’eft ainfi que
le Caducée eft le Symbole de l ’Éloquence. Comme
II eft rare que la liaifon des deux idées foit affez
étroite. & allez exclufive pour ne laiffer aucune
équivoque fur. leur raport, l'intelligence du Symi
bole a toujours befoin d’un peu d’aide , & fa fio-ni-'
fication eft un myftète auquel-il faut être initié
par exemple, quoique le printemps commence
fous le ligne du bélier , quoique le foc foit le
principal infiniment" de l'Agriculture ; l ’image du
bélier & celle de la charue n’éveilleroient dans
l ’âme que l’idée de leur objet, fi l’on n’étoit pas
convenu d’y attacher les idées du printemps & du
labourage.
On doit voir â préfent quelle ell la différence
du Symbole & de l'Emblème , & comment la même
figure peut être l ’un & l’autre fous différents ra-
ports. Ainfi , l ’image du l io n fert d’Emblême pour
exprimer le caraétere d’un héros, & de Symbole
pour défigner un des mois de l ’année : ainfi, le
gouvernail eft tantôt employé commè Symbole,
pouf réveiller l ’idée de la Navigation ; & tantôt
comme Emblème, pour exprimer allégoriquement
l ’adminiflration d’un État.
Le Symbole d iffé ré e l’Emblème, comme l ’idée
particulière diffère de l ’idée générale ; en forte que ,
pour reftreindre la l ig n i f ic a t io n de l ’Emblème , on
y ajoute le Symbole. Néméfis eft; la confcience
perfonnifiée : qu’on lui mette en main une balance,
c eft la Juftice diftributive ; qu’on lui donne une
bride & un glaive pour attributs, c’eft la Juftice
cohibitive & vengereffe ; qu’on l ’arme d’un fouet,
c’eft le Remords.
Vénus repréfente la beauté , ou la femme par
excellence. Dans la ftatue que Zeuxis en a faite,
il lui a mis fous le pied une tortue ; & avec ce
Symbole de la lenteur , Vénus devient TEmblême
d’un fexe deftiné à une vie tranquile & retirée.
Les Sages de Memphis exprimoient par des Symboles
les myftères| de leur doélrine ; & c’efl ce
que les grecs appeloient hiérogliphes , ou gravures
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Jacréès. Ges caraélères, inventés d’abord comme
la Métaphore dans les langues , par le befoin de
s’exprimer & faute de lignes plus fimples, fer-
virent enfuite dé voilé aux idées religieufes que les
prêtres d’Égypte vouloient dérober aux profanes Ôc
tranfmettre aux initiés.
Depuis on appela Symbple, toute expreflion allégorique
dans le langage des-philofophes. On nous
en a confervé des exemples dans quelques maximes
de Pythagore, comme dans celles - ci : Ne vous
ajféyei point fu r le boiffeau , pour dire, travaillez
à aquérir â mefure que vous dépenfez.
Ne teytde\ pas la main droite à tout venant ,
pour dire , choififfez vos amis. Ne'porte^pas un
anneau trop étroit, pour dire , évitez tout engagement
qui gêne votre liberté. Ne rtmue\ pas le
feu avec L’épée , pour dire, n’irritez pas l’homme
colère & violent. Abflene-^vcus de fèves ± pour
dire , ne vous mêlez pas des affaires publiques. Ne
vous promene\ pas fu r les grands chemins, pour
dire, ne vous réglez point fur l ’opinion de la
multitude. Aide\ celui qui' foulève un fardeau ,
pour dire, encouragez le travail. Ne loge\ point
fous vos toits l ’hirondelle, pour dire, ne formez
point de liaifons paffagères , ne vivez point
avec les babillards. Abfiene^-vous des coqs
blancs, pour dire , paffez - vous des biens difficiles
& rares. Ne ramajfe\ point les fru its qui
tombent, pour dire , attachez - vous à des" idées
faines & mures. Ne feme\ pas du-bois fu r les
chemins , pour dire , ne foyez pas difficile à vivre ,
ne vrous rendez pas embaraffant. En adorant, tourne^
autour de vous, pour dire, voyez Dieu partout,
& adorez-le en toutes chofes.
Les Symboles de convention font encôre aujour-
dhui une langue myfférieufe, & qui n’eft entendue
que des hommes inftruits : c’eft pour eux feulement
que le pavot réveille l ’idée de la fécondité ;
l’olivier, celle de la paix; la palme ou le laurier,
celle de la vi.étoire ; le lierre , celle du talent
poétique ; le cyprès , celle de la mort.
Mais comme i ’inflruétion s’eft répandue , cette
•langue eft devenue plus familière & ti’eft plus
une énigme pour un peuple civilifé. Quand le
maréchal de Saxe, apres la bataille deFontenoi,
revint en France , il voulut, pour l ’exemple, qu’à
la barrière de Perronne fes équipages fuffent fouillés
, afin qu’on vît s’il n’y avoit rien qui fut fujet
aux droits d’entrée. Paffe\, Monfeigneur, lui dit
un-commis, les lauriers ne payent rien. Je ne
veux pas taire que pour ce mot les fermiers généraux
donnèrent au commis une gratification, qu’il
n auroit pas eue du temps des Turcarets, dont la pie
étoit le Symbole.
Chez les anciens ’ on dohnoit par extenfion le
nom de Symbole à l’étiquette des vafes , à l’empreinte
des monnoies , aux mots de rallîment dans
les guerres civiles , & à ce qu’on appelle le mot
du guet dans nos armées. Le mot de rallîment de
Marius etoit le dieu Larè „• celui de S y ï l^ Apollon
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delphiqite ; celui de Céfar, Vénus mère. Dans
les camps, le mot de l ’ordre étoit, comme au-
jourdhui, donné aux fentinelles , & on le changeoit
tous les jours : c’étoit P a lm e , Gloire, Valeur ,
&c.L
’ufage des Symboles, établi une fois & tranfmis
d’âge en â g e , a donné lieu aux armoiries ; & celte
inftitution , l ’une des plus dégradées par la fotlife
& la vanité, étoit peut - être une des plus pré-
cieufes à conferver dans l ’efprit de fon origine :
car le Symbole étoit communément l ’expreffion du,
cara&ère de celui qui en décoroit fes armes, &
un engagement public de ne fe démentir jamais.
Ce caractère , perfonnel au chef d’une famille ,
paffoit à fes enfants, avec fes armoiries & avec
la réfolution d’être digne de les porter. Ainfi,
dans chaque race il y avoir un type de moeurs,
j’entends de vertu militaire , car on n’en connoif-
foit pas d’autre ; & , de la part de la Nobleffe ,
-c’étoit un garant pour l ’Etat de fon ardeur à le
fervir.
Cet ufage eft d’une antiquité très-reculée. On
dit qu’à la guerre de Thèbes chacun des chefs avoit
fur fes armes un Symbole particulier : Polinice, un
fphinx ; Capanée, une hydre ; Amphiaraus, lin dragon,
&c. A la guerre de Troie, fi l ’on en croit
Homère , Agamemnon avoit de même fur fon bouclier
un lion ; Uly ffe , un dauphin ,-Hippomédon,
un typhon vomijfant des feux . Le Symbole d’A lcibiade
étoit un amour la foudre à la main.
Dans la guerre de Marius contre les cimbres &
les teutons, on obferva que ces barbares portoient
fur leurs armes dés figures de bêtes féroces. Marius
lui-même avoit un aigle fur fon bouclier , &
Y aigle commença dès lors à être l ’enfeigne
des romains, qui jufques là n’avoient porté que le
manipule pour étendard. Les légions prirent auffi
des enfeignes particulières, & fur ces enfeignes des
figures diverfes , de loup, de cheval , de chevreau ,
de minotaure , &c. Le cachet de Pompée, que
Céfar reçut en pleurant, portoit l ’image d’un lion
tenant une épée. Céfar lui-même avoit pris pour
Symbole un papillon avec une écrevifle , pour
réunir les deux idées de célérité & de lenteur. Il
avoit auffi fur fon cachet un fphinx, Symbole de
la pénétration & du myftère dans les projets. On
fait que dans la fuite il prit fur fon anneau l ’imao-e
d’Alexandre, l ’objet de fon émulation.
Les nations eurent auffi leurs Symboles particuliers
: les athéniens, l ’oifeau de Minerve ; les thé-
bains , l ’image du fphinx; les perlés, un aigle
d’or , ou l ’image du foleil. Les nations modernes
ont .fuivi cet ufage : les fuiffes ont pour Symbole
des ours; les belges, des lions; les anglois, des léopards
, &c.
Les rois , les princes, les guerriers avoient auffi
leur Symbole : 1a mode en eft paffée. (Voyez D ev
ise ). Ce qui en refte eft en armoiries : mais les
armoiries nouvelles n’ont plus de caraélère , & ne
fignifient plus rien ; leur bon temps fut celui de lst