
ta. vérité de la religion chétienne font invincibles ;
cette proposition totale eft principale, fi on la compare
à l'incidente qui e ft , dont on appuie la vérité
de la religion chrétienne / hors de la compa-
raifon, elle n’eft qu’une propofition complexe.
V o y e z P r o p o s i t i o n & I n c i d e n t e .'
( M . B e a u z é e . )
( N . ) PR IV A T IF , IVE. adj. Qui fert à priver
de quelque chofe. Qui marque privation. Un mot
privatif. Une particule privative..
Ce mot ainfî entendu nous vient de la Grammaire
grèque, où l'on diftingue fpécialément- l ’alpha
p r iv a tif, qui en effet, étant mis a la tête
d’un mot, lui fait fignifîer le contraire & marque
la privation de la chofe énoncée par le mot. Nous
avons gardé en françois l ’alpha privatif des grecs
dans les mots que nous avons empruntés de leur
langue : Abîm e , acéphale, amazone, athée, qui
viennent des mots grecs j6vâ-os ' ( fonds ) xscpaA«
( chef ) pâlis ( mamelle), ©£«V Dieu ) , & qui, avec
l ’alpha p r iv a tif lignifient littéralement fa n s fonds,
fa n s ch e f, fa n s mamelle , fa n s Dieu.
Nous avons aulfi dans notre langue plufieurs particules
privatives qui fe mettent de même a la tête
des mots. D é , dans débandé, déconcerté, dédire,
défaire , démafqué, &c. D é s , dans défaccoutumer,
défennuyer, déshonoré, déjintérejfement, défordre,
Bec. D i s , dans difeonvenir , difgrâce , 5cc. Ê ,
dans écervelé, énervé, &c. E x , dans exhéréder, ex-
recteur, exjéfuite , &c. In , dans inattentif, indocile,
infoutenable, &c ; & qui change n en m
dans immaculé, immodejïe, impudent, imprévu ,
Bec ; en / , dans illégal, illicite, &c ; & en r dans
irrationel, irrégulier, irrévérence , &c.
Il faut néanmoins obferver que ces particules ne
font pas toujours privatives dans notre langue.
Voyez Particule. ( M.. B e au zé e . )
(N.) PROCÉ LEUSMATIQU E. Adj. pris fubftântivement.
C’eft un terme par lequel on défîgne,
dans la Profodie latine ,• un «pieu de quatre fy l-
labes brèves, ou compofé de deux pyrrhiques; comme
dnïmüld, homïnîbüs , renuere.
P rocéleufmatique lignifie, Qui commande d’avancer
: RR. mç*, ante, en a v a n t hortatio,
de xitevco, jubeo , hortor.Quatre brèves de fuite précipitent
la prononciation, & femblent preffer celui
qui parle daller en avant avec célérité. On le
nomme encore Dipyrrhiche, Voye\ ce mot.
( M. B e au zé e . )
PR O JE T , DESSEIN. Synonymes. L e Projet'
eft un plan ou un arrangement de moyens pour
l ’exécution d’un Dejfein. L e Dejfein eft ce qu’ôn
veut exécuter*.
On dit ordinairement des P r o je t s , qu’ils font
•beaux j des Dejfeins, qu'ils font grands.
L a beauté des Projets dépend de Tordre St de
la magnificence qu’on y remarque. La grandeur des
Dejfeins dépend de l’avantage &de la gloire qu’ils
peuvent procurer ; i l ne faut pas toujours fe laiffer
éblouir par cette beauté ni par cette grandeur, car
fouvent la pratique ne s’accorde pas avec la Ipé-
culation. L ’ordre admirable d’un fyftême, & l ’idée
avantageuse qu’on s’en eft formée , n’empêchent pas
quelquefois que les Projets n’échouent, & qu'on
ne fe trouve dans l ’impolfibilité de venir à bout de
fon Dejfein.
L’expérience de tous les fîècles nous apprend que
les têtes à grands Dejfeins, & les efprits féconds
en beaux P ro je ts , font fujets à donner, dans la chimère.
L e mot de Projet fe prend aufli pour la chofe
même qu’on veut exécuter, ainfi que celui AeDe f-
fein. Mais quoique ces- mots foient alors encore
plus fynonymes, on ne laiffe pas d’y trouver une
différence qui fe fait fentir à ceux qui ont le
goût fin & délicat. La voici telle que j’ai pu
la dèveloper. I l me femble que le Projet regarde
alors qilelque chofo de plus éloigné; & le
Dejfein ^quelque chofe de plus près. On fait des
Projets pour l’avenir ; on forme des Dejfeins pour
le temps préfent. Le premier eft plus vague, l ’autre
eft plus déterminé.
L c Projet d’un avare eft de s’enrichir. Son D e f-
fe in eft d’amaffer. Un bon miniftre d’État n’a d’autre
Projet que la gloire du prince & le bonheur de
fes fujets. Un bon Général d’armée a autant d’attention
à cacher fes Dejfeins, qu’a découvrir ceux
de l ’ennemi.
L ’union de tous les États, de l’Europe dans un
feul corps de république , pour le gouvernement
général ou la difcufliôn des intérêts, fans rien
changer néanmoins dans le gouvernement intérieur
& particulier de chacun d’eux , étoit un Projet
digne de Henri I V , plus noble , mais peut-être aufli
difficile à exécuter , que le Dejfein de la monarchie
univerfelle, dont l ’Efpagne étoit alors occupée.
( L ’abbé Gir ar d .) .
(N. ) PRÔLEPSE. f. f. Figure de penfée par
raifonnement, par laquelle on prévient & l’on réfute
d’avance les obje&ions que l ’on pourroit ef-
füyer ; ce que l ’on fait fouvent , moins par la
crainte de ces objections , que pour avoir occafion
d’ajouter, de nouvelles raifons à celles qu’on a
déjà alléguées, pu de les préfenter fous un jour
nouveau & propre a en affurer,l ’efficacité.
Mais i l eût mieux valu , me direz-vous, demeurer
endurci dans mon habitude , & ne faire
jamais d\efforts pour en fortir. C’ejl à 'dire que,
pour éviter d’ être profanateur, vous voulez devenir
impie. A h ! fa n s doute i l eût mieux valu
demeurer pécheur, que de venir profaner le fang de
Jéjus - Chrijl : mais n aviez-vous point d’autre
moyen d’éviter le facrilège 1 Ne pourriez-vous pas',
par une fîhcère pénitence, aprocher dignement'de
l ’ autel 1 JVtaflillon.
D efpréaux va au devant de ce qu’on pouvoit
dire pour la défenfe de C hapelain ; & fous p rétexte
de fe juftifier^ il achève d’accabler ce m alheureux
P o ète .-( Sat. jx. 203.— 224. )
I l a tort , dirait-on pourquoi fa u t - il qu’ i l nomme i
Attaquer Chapelain ! ah ! c'eft un f i bon homme !
Salçac en fa it l ’éloge en cent endroits divers.
I l eft vrai, s’ i l m’ eût cru , qu’ i l n’eût point fa it de n .
I l fe tue à rimer ; que n’écrit-il énprofè ?
Voilà ce que fo n dit. Eh 1 que dis-je autre chofe î.
En blâmant fés écrits, ai-je d’un .'ftyle affreux
Diflilé fut fa vie un poifon dangereux ?....
Ma mufe, en l’attaquant j. charitable &,difçrète.,
Sait de l’homme d'honneur diftingjiej: le poète. .
Qu’on vante en lui la fo i , l’honneur, la .probité$
Qu’on prife fa candeur & fa.civilité 5 .-
Qu’il foitdoux , complaifant, officieux, fincère ï
O n le veut, j’y fouferis, & fuis prêt de me taire.
Mais que pour un modèle on montre fes écrits ji
Qu’il foit le mieux-rente de tous les beaux efprits ;
Comme roi des auteurs, qu’on l’élève à l’empiie:
Ma bile alors s’échauffe , & je brûle d’écrire.;
Er s’il ne m'eft permis de le dire au papier,
J’irai creufer la terre, & , comme ce barbier,
Faire dire aux tofeaux, par un nouvel organe ,
JUidas, le roi Jüidas a des oreilles d’âne.
Dans l ’Éloquence du Barreau furtouf, la Pro-
lepfe a fouvent de grands avantagés : une objection
preffentie & repouffeen’eft plus qu’un trait émou fie
quand i ’adverfaire 'veut, s’en, fervir. « Un coup
» prévu, dit Crévie r ( Rhét. f r . tom. 11. , pag.
» 227 ) ne fait plus la même impreflîon : & fi l ’on
» me permet de donner ici l ’exemple d’une Pro-
» lepfè d aétion, je citerai le fait de ce fénatèur
»> romain,, (Senec. deBenef. n i. rz7 ) , qui, ayant
» mal parlé d’Augufte dans un repas1, & fachant
» que fes .difeçurs incoiifidérés & téméraires avoient
» été. foigneufement recueillis par quelques-uns des
» convives-, alla fe dénoncer lui-même à l ’empe-
» reut, & obtint ainfi fon pardon & même une
» gratification .confidérable. Ceux qui fe prépa-
>» roîent. a fe rendre fes délateurs, manquèrent leur
» coup, parce qu’ils avoient été prévenus te.
Dans les -mains du prédicateur , la Prolepfe peut
avoir de grands effets. Les prétextes font comme
des retranchements où le pecheur fe met a couvert :
il allègue les bienféances de la qualité, du rang,
de 1 acre, du fexe ; l ’opinion des hommes; les licences
\auîorifées' par l ’ufage; l ’exemple & le ref-
pedl humain; le ménagement d’une -fâuffe fageffe;
J^tefftaïïon7 Le4 empérament, & l ’occafion ; la confiance
préfomptueùfo^en la bonté de Dieu , & la
facilité du retour ; &e.' C’eft au prédicateur à forcer
ces retranchements, au m\ÿen de la Prolepfe. Qu’i l '
paroiffe .d’abord prendre le\parti de ceux qu’il veut
combattre ; qu’il, donne à léurs raifons les couleurs
favorables dont elles font fufceptibles ; qu’i l ne-
faffe point difficulté d’avouer, quand l ’occafion le
demande, que leurs prétextes font fondés fur de
bons principes : mais qu’il démontre enfuite , ou la
fauffelé des prétextes, ou celle des conféquencfîs
qui les ont fait naître. Qu’i l ait foin furtout de
de ne fe faire aucune difficulté qu’il ne puiffe réfoudre
d une manière fatisféfante pour les auditeurs
les plus difficiles , pourvu qu’ils foient raifonnables.
Prolepfe; eft un mot grec ,>a^M<vs<ru, compofé
de /arpo , ante, & de Aa^ûav© , capio ; i l ;fo traduit
littéralement par Antéoccupation, ou Préoccupation
: & ces. deux mots, ainfidque celui Occupation
, font employés par différents rhéteurs pour
défignér la figure dont il s’agit. Je crois que le
terme de Prolepfe doit être préféré, parce qu’i l
eft connu & reçu chez, les rhéteurs & dans notre
langue, & qu’il n’eft pas fujet à équivoque comme
les trois autre^, qui ont en effet dans le langage
ordinaire des fens très-différents. ( M. B e a u z é e . )
( N ) 'PROLIXE, adj. Si l ’on parle du ftylé , ce
mot fignffie Qui a , delà prolixité: fi on l’applique
aux perfonnes, il veut dire, Qui écrit ou qui parle
avec prolixité. ( Voyez P r o l ixit é . ) Scudéri etoit
un auteur prolixe &-fécond. Le ftyle de l’abbé du
Guet eft prolixe,, mais correél & lumineux.
( M . B e a u z é e . )
(N ) PROLIXEMENT. adv. D'une manière
p ro lix e , Avec prolixité. Un ouvrage écrit trop.
prolixement , quelque mérite qU’jl ait d’ailleurs ?
ne peut manquer de perdre beaucoup ( M . B e a u z
é e , ) r
( N ) PRO L IX ITÉ , f. f. Vice de ftyle, oppofé
à la precifion , & qui confifté à entrer dans des
details minutieux & inutiles , & à fuivre fans retenue
des idées étrangères au fujet que l ’on traite ,
qui n y tiennent point ou qui n’y tiennent qu’ac-
cidentellement. v oyezPRÉ£is,Succinct, C oncis,
fynon.
Scuderi*, livre III de fon Ala r ic , emploie près
. de 500 vers à la defeription d’un palais, qu’il
commence pat la façade & finit par le jardin ; c'eft
à cela même que Boileau ( A r t. poét. I. 4^- 5 8) fait
allufion dans ces vers :
Un auteur, quelquefois trop plein de fon objet*
Jamais fans l'épuifer n’abandonne un fujet :
S il rencontre un palais, il ru’en dépeint la face j
I l me promène après de terrafle en terraffe;
Ici s’ offre un perron, là règne un corridor.
Là le balcon s’enferme en un baluftre d’ or ;
Il compte les plafonds, lés ron d s , & les. ovales 5
Ce ne font que f étions, ce ne font qu’aftragales t
Je faute vingt feuillets pour en trouver la fin
E t je me fauve à peine au travers du jardin.