
tranfmette à un objet différent du fujet qui la produit
: par conféquent ils ne peuvent jamais devenir
tranfitifs.
Les grammairiens hébreux, de qui Ton a peut-
être emprunté ce terme , me paroiffent en faire un
ufage plus raifonnable. Ils divifent leurs verbes efl
trois claffes générales y les tranfitifs , les intran-
f i t i f s , & les communs, ( Voyez la Gramm. hébr.
de Malclef, ch, iv , §. ï . )
Ils appellent tranfitifs, ceux qui paffent du
fens aétif au paflïf par un changement de forme ou
de voix , comme en latin trado , eufiodio , audio ,
& en hébreu "|QQ ( me for ) tradidit, ( chimer )
cufiodivit, po© ( chim-ha) audivit, lefquels paf
fent tous à la voix & à la lignification pafiive. -
Ils appellent intranfitifs, ceux qui ne pafTent
jamais à un autre fens par un changement de voix ,
comme en latin fîo , ju ro , Icetor , & en hébreu
npj? ( hamed ) f ie t i t , $2102 ( nouchibha ) jura-
Vlt > m n ( hêde ) fartants efi ; on voit que cette
clafle comprendrait en latin les verbes neutres 8c
les déponents»
Ils appellent communs , ceux qui , fans changer
de forme & de voix | ont tantôt le fens aétif &
tantôt le fens pafSf j ou ceux q u i, fous les deux
formes ou voix, ont toujours le même fens. Ceux
de la première efpèce font ceux que j’ai nommés
moyens dans notre langue ,à l'imitation des grecs:
criminor te ( je t’accufe), & criminor ahs te (je
fuis accufé par toi ) , en eft un exemple en latin
y en hébreu ( mêla ) implevit & impletus
ef i y q 7n ( hêlaph) mutavit 8c mutatus efl. De
là fécondé efpèce font en latin ajfentio & afien-
tior{ je confens ) , reverto 8c revertor ( je retourne ) y
& en hébreu (daber) & 1313 (noudaber ) parler,
,133 (beche ) & ,1333 ( noubeehe ) pleurer,
( M . B e a u z é e , )J
(N .) TR AN S IT IO N , f. f. Rhétorique. On
entend ordinairement , par Tranfition , un tour
particulier qui facilite le paffage d’un point, d’une
matière , à un autre point, a une autre matière ,
& qui fert de liaifon à l’un & à l ’autre pour les
faire concourir fans difparate à former enfemble un
même Tout.
Le P. de Colonia en diftingue de deux efpèces $
la Tranfition p a rfa ite , & la Tranfition imparfa
ite , Par la première , dit-il, on rappelle l ’idée
de ce qu’on vient de dire & l’on avertit fommai-
rement de ce qu’on va dire y comme dans cet
exemple de Cicéron ( Pro leg. manil.vïij. 20 ) :
Quoniam de généré
Après avoir parlé de la
belli disci, nunc de
nature de cette guerre , je
magnitudinepauca di~
yas maintenant vous dire
quelques mots de fon importance.
cam.
Par la féconde , on infifte feulement fur l ’un de
ces’déux points, 8c plus communément fur-le fécond j
comme dans cet autre exemple de Cicéron ( Prff
Rofcio amerino , x x x v j 104 ) :
Age , nunc ilia Eh bien', voyons main-
videamus , Judices , nant, Meilleurs , quelles
quae flatinv-confequuta en ont été d’abord les
fu n t. fuites.'
Tous les précepte^ qu’on donne pour former
■ les Transitions, pour les placer à propos , pour
l’es varier avec goût, font autant de préceptes fri-
| voles. » L a natute , dit l ’abbé Batteux \ Cours
de Be lles -Le ttre s y Part. I I I , feét. r , art. ii/,
$. xij ) y, la nature veut que toutes les parties d’un
difeours , grandes 8c petites, foient unies comme
le font celles d’un Tout naturel : c’eft la vraie
liaifon & prefque la feule qu’il y ait. On en
voit l ’exemple dans un arbre j fruits, fleurs, feuilles,
branches , tiges, tout eft un. Il- y a de même une
tige direéfê pour les idées & pour les mots. C ’eft:
là que font tous les avantages & tous les droits
de la nature. Tout ce qui- eft collatéral ou qui
ne tient que par infertron artificielle, eft prefque
étranger dans le difeours y & il y eft traité comme
tel par ceux qui eh lavent juger
» C’eft ce qui- rend fi difficile la pratique des
Transitions, à ceux qui- ne font pas affez maîtres
de leur fujetJ qui ne l’ont pas affez aprofondi-
pour en connoître tontes les articulations. Ils
veulent mener la matière, parce qu’ils ne peuvent
. la fuivre : & faute dfovok reconnu 8c faifi une
partie médiante qui fervoit de liaifon, ils font
aboutir, les unes aux autres, des parties qui-ne
font point taillées pour joindre. De là les Tranfitions
artificielles , les tours gauches, employés
pour couvrir un vide y enduire une cicatrice , &
tromper ceux qui jugent de la- folidité de l ’édifiée
par le plâtre dont il eft revêtu ».
» Qu’on parcoure les ouvrages des célèbres
écrivains ; on n’y verra point de ces tours de toupie
ffe , fi j’ô’fe m’exprimer ainfi. Le fujet fe dè-
velope de lui - même 8c s’explique franchement :
tout fe fuit 5 & quand ils ont dit fur un chef tout
ce qu’il y avoit à dire , ils paffent à un ; autre
fimpiement , & avec un air de bonne foi beaucoup
plus agréable pour le leéfceur, que ces fubtilités qui
marquent la petiteffe de l ’efprit ou au moins un auteur
trop oifir».
» La Tranfition, dit M. de Befplas ( Ejffai fur
VÊloq. de la Chaire Contin. du ch. V ) , » ne
» confifte, ni dans la liaifon des mots, ni- dans
» celle des penfées raprochées avec peine par des
» fubtilifés & de petits moyens •: de tels paffages
» ne font que des fupercheries , des Tnmfitions
» tout au plus ingénieufes y les vraies font dans
» l ’union des membres d’une phrafe avec l’autre ,
» dans l ’unité du fujet. Le difeours eft une efpèce
» de matière en fufion , qui doit fe porter d’eile-
» même dans toutes les branches 011“ fon mouve-
» ment naturel la dirige : i l vaut mieux lai fier.
« les parties à cêté l ’une de l’autre fans les atfa-
» ch er, que de les. lie r feulem ent en_ apparence J.
» leur Ample raport vaudra mieux qu’une Tranfi-
», non déplacée ». .
Écoutons encore un orateur qui a écrit.fur l ’E loquence
de la Chaire, c’eft, M. l ’abbé Maury
A . x x x i j ) : » Cet art des Zranfiuons , dit il.,
J, eft au Ai difficile à être, fournis a des réglés, qu a
» être réduit en pratique- On cite , avec railon,
„ comme un chef-d’oeuvre en ce genre , VHMoire
» Jes Variations, où le grand Bofluet rallembie
» toutes les branches de fon fujet par le feul lien
» de la Logique, & raproche ainA fans confuAon
» les queftions les plus abftraites^ & les plus dif-
» patates. Les Tranfiüons , qui ne font .fon-,
» dées que fur le méchanifipe du ftyle;, & qui
n ne ConAftent que dans une liaifon fiflive entre
» le dernier mot du paragraphe qui finit & le
b premier mot du paragraphe qui commence., ne
B font point, à proprement parler, des Tranfi-
b fions naturelles , mais des raprochements forcés.
b Les véritables Tranfitions oratoires font celles
B qui fuivent le Cours du raifonnement ou du fen-
b timent, fans contrainte & prefque fans art, &
b dont l’auditeur ne s’aperçoit point ; celles qui
b ufiiffent lès maffes , au lieu de fufpendre feule-
b meut quelques phrafes les unes aux autres ; celles
b qui enchaînent tout le difeours, & n’obligent
b point le prédicateur de faire un nouvel, exorde
» à chaque foudiviAon que lui préfente fon plan j
b celles que le dèvelopement des idées place ,
b pour ainA dire ,à l’infu de l ’orateur, avec ordre
b & méthode; celles qui s’appellent & fe corref-
s pondent par une analogie inévitable., 8c non
b par une rencontre imprévue ; celles eiiAn que la
» méditation engendre en infpirant de grandes
» penfées, St non celles que là piüme fournit en
» infpirant des raports combinés. Des idées nettes
» 8c précifes 1e prêtent mutuellement à des Tranfi-
» dons faciles & heureufes ».
Tous ces avis raproçhés fe réunifient a établir ,
que le feul moyen de trouver dans le befoiu St
de placer à propos les Tranfitions néceftaires , .
c’eft de bien pofleder la matière dont ôn traite,
dç l’avoir bien examinée dans tontes fes parties,
d’avoir Conçu-le plan le plus propre à les mettre
en jour : St Horace avoit indiqué tout cela dans un
feul vers (A r t. poet. 3051 ) :
. Scribendi reBi, fapere ejl & principiitm &fpns.
(M. AE4UZÉU.)
(N.) TR AN SPO S ITIÉ , I V K , adj. Gramm.
LrjÆm Girard ( ,Princip. Difc-, I , tom. 1 ,p . a j )
djvife les langues en deux efpèces générales, qu’il
nomme analogues St tranfpofiùves.
11 appelle Langues analogues /celles dont la
fy.ntax,e 8t la conftrudfion ufuelle font tellement
analogues à l’ordre analytique , que la fuççeA'ion des
mots dans le difeours y fuit communément la gra-
dation d e s id é e s . / ' ■ _ : 11 appelle Langues tranfpofitives, celles quj,
dans l'Élocution ^ donnent aux noms & aux adjectifs
des terminaifons relatives à l’ordre analytique ,
& qui aquièrent ainfi le droit de leur fàireTuivre
dans le dilcours une marche entièrement indépendante
de la fucceflion naturelle des idées. Voye\ Langue,
art. i i j , §. u (M . B e a u z è e .)
* T R É M A , , adj. Les imprimeurs qualifient
ainfi une voyelle chargée de deux points difpofés
horizontalement : dans leur langage ï eft un i
tréma ; 8c dette dénomination même eft la preuve
que le mot Tréma eft employé comme adjeftif
qualificatif delà voyelle qui porte les deux points.
Ge terme donc peut 8c doit fubhfte-r avec- celui
de Diérèfe ( Voye\ D ié r è&E ). Celui - ci eft lp,
nom du figne • * qui fe met fur la vpyelle., & qui
marque que cette, voyelle doit fe prononcer fépar*
rément d’une autre voyelle qui l ’accompagne.»
' ( Jufqu’iei l’on n’a fondu pour rimprimerie que
des ï 8c des ii tréma ; mais fi l*on veut faire, de
la diérèfe, Tufage le plus convenable pour éviter
lés équivoques d’Orthographe y il eft neceffairP
de fondre aufli des d 8c des o tréma. On écrit ,
par exemple, de la même manière Aorifie 8i
Aorte f 8c cependant, on prononce diversement
Orifie 8c A-orte : en confervant ces prononciation,
ne conviendrait - i l pas d’écrire A ô r te ,' 8c
fi l ’on revenoit à prononcer A - orifie, Comme*
je l ’infinue à l ’article Aoriste , ne fâu-*
droit-il pas écrire Aorifie , tant pour peindre
eîaélement la.prononciation, que pour prévenir
les impreflions de l ’ancienne manière de prononcer
ce mpt ? Dans le mot Dia ble , les;fieux voyelles,
ia font- diphthongue y fans Irrémédiable-, ces deux
voyelles fe prononcent féparément : il ferait donc
• jufte d’écrire Irrémédiable.,
. ; Un e tréma eft; inutile • parce que tout ^ qui,
doit fe prononcer féparément. de- la voyelle qui
l ’accc mpagne, s’il la précède, eû uji é ferme,,
fuffifamment caraâérifé par l ’accent aigü , comme;
dans D é ifie ,- Théologie /. s’il, vient après,., la né-,
ceflîté de conferver fon accent doit faire porter la
diérèfe fur la voyelle précédente, comme-dans envié
en trois fyllabes. Ÿoye\ I & Point») (M x B p a ü -*
z i.E i )
TR É PA S , M O R T , D É C É S . Synonymes.
Trépas eft poétique , &. emporte dans- fon idée le
paffage d’une vie. à l ’autre. TéLort eft du ftyle ordinaire
, & fignifie. préclfément.la;ceffation de vivre».
Décès eft d’un ftyle plus recherché, tenant un peu
de l’ufage du Palais,. & marque proprement le
retranchen^ent du nombre des; vivants. Le fécond,
de ces mots fe dit. à. Pégard de toutes fortes d’animaux*,
& les deux autres ne le difent qu’à l’égard de
! l ’homme. . Un Trépas glorieux eft préférable 4 une vie