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ï l y a dans quelques infe&es un Ton qu’on peut
'appeler V o ix , parce qu’i l fe fait par le moyen
de ce qui leur tient lieu de poumons, comme dans
les cigales 8c les grillons, qui ont une efpèce de
chant.
I l y a un autre fon commun qu’on trouve dans
les infectes aîiés, & qui n’eft autre chofe qu’un
bourdonnement caufé par le mouvement de leurs
ailes ; ce qui fe démontre par ce que ce bruit celle
suffi tôt.que ces infe&es cellent de voler.
Il y a un petit animal , nommé Grifon, qui
forme un fon en frappant avec fa tête fur des
corps minces & réfonnants , tels que font des
feuilles sèches & du papier; ce qu’il exécute par
des coups fort fréquents & efpacés également. Ces
animaux font ordinairement dansles fentes des vieilles
murailles.
Le chant du cygne , dont la douceur eft fi vantée
par les poètes, n’eft point produit par leur
gofier, qui ne fait ordinairement qu’un cri très-
rude & très-défagréable ; mais ce font les aîles de
cette efpèce d’oifeau , qui étant à demi levées &
étendues lorlqu’i l nage , font frapées par le vent,
qui produit fur ces aîles un fon d’autant plus
agréable , qu’il ne conlîfte pas en un feul ton,
comme dans la plupart des autres oiféaux, mais
eft compolë de piufîeurs tons qui forment une
efpèce d’harmonie , fuivant que par' hafard l ’air,
frapant plufieurs plumes diverlement difpofées , fait
des tons différents ; mais i l réfulte toujours que ce fon
n’eft point une Voix.
La V o ix , prife dans fà propre lignificationeft
de trois efpèces ;. favoir, la V o ix fimple qui
.n eft point articulée j celle qui ne l’eft qu’imparfai*
lement, & celle qui l ’eft parfaitement, qu’on appelle
Parole.
La V o ix fimple eft un fon uniforme qui ne
•fouffre aucune variation , telle qu’eft celle des
ferpents , des crapauds , des lions, des tigres , des
hiboux , des roitelets. En effet , la V o ix des
ferpents n’eft qu’un fifHement qui, fans avoird’ar-
liculation ni même de ton , eft feulement ou plus
fort ou plus foible. Celle des crapauds eft un fon
clair & doux, qui a un ton qui ne change point*
Les tigres, les lions , & la plupart des bêtes
féroces ont une Voix rude & lourde tout enfenoble
, fans aucune variation* L e hibou, le roitelet
& beaucoup d’autres oifeaux ont une V o ix très-
limple, qui n’a prefque point d’autre variation
que celle de fes entrecoupements : car quoique les
oifeaux foient fort recommandés pour leur chant,
on doit pourtant convenir qu’i l n’eft que foible-
ment articulé ; excepté dans le perroquet, le fan-
fonnet , la linotte, le moineau , le. g e a i, la pie ,
le corbeau, qui imitent la parole & le chant de
l ’homme.
Il faut même remarquer que, dans toutes les
inflexions du chant des oifeaux qui font, une fi
grande diverfi:é de fons, il ne fe trouve point de
V o l
fon ; ce n’eft que la diverfité de l’articulation qui
rend ces inflexions** différentes, par la différente
promptitude de l’impulfion dç l’air, par fes entre-
coupements , & par toutes les autres modifications
qui peuvent être diverfifiées en des manières infinies,
fans changer de ton.
Les organes de la Voix fimple font les parties
qui compofent la glotte, les mufcles du larynx
& du poumon. Les membranes cartilagineufes de
la glotte produifent le fonde la Voix, loifq.u’elles
font fecouées par le paffage foudain de l’air contenu
dans le poumon. Les mufcles du larynx fervent
à la modification de ce fon , & aux entrecoupements
qui fe rencontrent dans la Voix fimple.
L’ufage du poumon pour la Voix eft principalement
remarquable dans les oifeaux \ où il a
une ftru&ure particulière , qui eft d’être eompofé
de grandes veffies capables de contenir beaucoup
d’air ; ce qui fait que les oifeaux ont la Voix forte 8c de durée.
Dans les oies & les canards, ce n’eft point la
glotte qui produit le fon de leur Voix ; mais ce
font des membranes mifes à un autre larynx qui eft
au bas de leur trachée-artère. L’effet de cette ftruc-
ture fe fait- ailé ment connoître , fi, après avoir
coupé la tête à ces animaux & leur avoir ôté le
larynx, on leur preffe le ventre.; car alors on
produit eh eux la même Voix, que lorfqu’ils étoier.t
vivants & qu’ils avoieat un larynx. Il y a encore
un autre effet de cette ftrudlure, qui eft le nafard
particulier au fon de la Voix de ces animaux, &
que lés Anciens nommoient Gingrifme : on imite
ce gingrifme dans les cromornes des orgues par
une ftruôture pareille , en mettant par défias lés
.anches un tuyau de la longueur de l’âpre - artère
au delà des membranes qui tiennent lieu, d’anche.
Les grues ont le tuyau de l’âpre-artère plus long
que leur cou , & en même temps redoublé comme
celui d’ une trompette.
La ftmdture du larynx interne,- qui’ eft particu^
liere aux oies , aux canards , aux grues , &ç, cou-
fille en un os & en deux membranes, qui font dans
l’endroit où l’âpre - artère fe divife en deux pour
entrer dans le poumon. L’os eft fait comme un
hauffe - col. La partie fupérieure de leur, larynx
eft bordée de trois os., dont il y en a deux lon«s
& un peu courbés, & le troifième, qui eft plat,
fort entre les deux qui forment la fente ou la glotte;
de manière que le paffage de la refpiration eft ouvert
ou fermé, lorfque le larynx, s’applatiffant ou
fe relevant , fait entrer ou fortir ce troifième os
d’entre les deux autres , pour empêcher que la nourriture
ne tombe dans l’âpre-artére,. & pour laiffer
paffer l’air néceffaire â la refpiration.
Quelques animaux terreftres- ont la' Voix plus
articulée que les autres , & la diverfîfient, non feulement
par l’entrecoupement du fon, mais encore
par le changement de ton : & cette articulation
leur eft naturelle ; en forte qu’ils ne la changeai
v o i
8c ne la perfeftionnent jamais, comme certains
oifeaux. Les chiens , & furtout les chats, ont naturellement
une diverfité de ports de V o ix 8c d’accents
qui eft admirable ; cependant leur V o ix n’eft
articulée que très-imparfaitement, fi on la compare
avec la parole.
. C ’eft la parole qui eft particulière à l ’homme.
Elle confifte dans une variation d’accents prefque
infinie : toutes leurs différences, étant fenfîbles &
remarquables , dépendent d’un grand nombre d’organes
que la nature a fabriqués pour cet effet;
Cependant la parole, dans l ’homme , dépend
beaucoup moins des organes que de la prééminence
de l ’être qui les pofsède : car il y a dés animaux,
comme le linge , qui ont tous les organes de même
que l ’homme pour la parole ; & les oifeanx qui
parlent n’ont rien approchant de cette ftruôture.
C’eft une chofe remarquable, que la grande différence
qu’on voit entre la.langue du perroquet 8c
celle de l ’homme, qui eft aflez femblable a celle
d’un veau, tandis que celle du perroquet eft ordinairement
épaiffe , ronde, dure , garnie au bout
d’une petite corde , & de poil par deffus.
On fait parler des chats & des- chiens , en donnant
à leur gofier une certaine configuration dans le
temps qu’ils crient. Cela ne doit pas paroître fur-
prenant , depuis qu’on eft venu à bout de faire prononcer
une fentence affez longue à une machine
dont les refforts étoient certainement moins déliés
que ceux des animaux. On doit être encore moins
furpris de ce phénomène dans ce fiècle , après qu’on -
a vu le Auteur de M. de Vaucanfon.
* Remarquons enfin que dans chaque créature oh
trouve une difpofition différente de la trachée-
artère , proportionnée à la diverfité de leur V o ix .
Dans le hériffon, qui a la Voix très-petite , elle
eft prefque entièrement membraneufe ; dans le pigeon,
qui a la Voix baffe & douce , elle eft en
partie cartilagineufe, en partie membraneufe ; dans
l a . chouette , dont la V o ix eft haute & claire ,
elle eft cartilagineufe : mais dans le geai, elle eft
.compofée d’os durs, au lieu de cartilage ; il en
eft.de même de la linotte; & c’eft à caufe décela
que ces deux oifeaux ont la V o ix plus haute & plus
forte , &c.
Les anneaux de la trachée-artère font très-bien
appropriés pour la modulation différente de la
V o ix . Dans les chiens & les chats, qui , comme
les hommes, diverfifient extrêmement leur ton pour
exprimer diverfes paffions , ils- font ouverts &
flexibles, de même que dans les hommes : par là
ils font tous , ou la plupart', en état de fe dilater
ou de fe refferrer plus ou moins, félon qu’il eft
convenable à un ton plus ou moias élevé & aigu ,
ô c au lieu qu’en quelques autres animaux, comme
dans le paon du Japon , qui n’a guère qu’un feul
ton, ces anneaux font entiers, &c.Voye-{ déplus
grands détails dans la Cofmologie facrée de Grew.
j[L e chevalier D E J AU c o u r t . )
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Voix d e s o i s e a u x . Anat. comparée.^ Voix,
le cri dés oifeaux approche beaucoup plus de la Voix humaine que celle des quadrupèdes , que nous
examinerons féparément; il y a même des oifeaux
qui parviennent à imiter affez paffablement notre
parole & nos tons : cependant leur Voix diffère
beaucoup de celle de l’homme , & préfente un
grand nombre' de fingularités qui ne font pas
épuifées ; mais on en a découvert quelques - unes
qu’il convient dHndiquer dans cet ouvrage.
Les oifeaux ont, comme les hommes , une efpèce
de glotte placée à l’extrémité fupérieure de la
trachée-artère ; mais les lèvres de celte glotte,
incapables de faire des vibrations affez promptes
& affez multipliées, ne contribuent prefque en rien
à la formation des fons; : le principal & le véritable
organe qui les produit , eft placé à l’autre
extrémité de la trachée-artère. Ce larynx , que
nous' nommerons interne d’après M. Perrault, eft
placé au bas de la trachée - artère , à l’endroit
où elle commence à fe féparer en deux , pour
former ce qu’on appelle les bronches ,• du moins
M. Hériffant, de l’Académie des Sciences de Paris,
dit ne l’avoir encore vu' manquer dans aucun ‘des
oifeaux qu’il a difféqués. Cet organe , au refte, n’eft
pas le feul qui foit employé à la formation de
la Voix des oifeaux ; il eft ordinairement accompagné
d’un nombre plus ou moins grand d’organes
acçeffoires , qui font probablement deftinés à fortifier
les fpns du premier 8c à les modifier.
L’organe principal de la Voix varie dans les
différents oifeaux : dans quelques-uns , comme dans
l’oie , il n’eft eompofé que de quatre membranes
difpofées deux à deux , 8c qui font l’effet de deux
anches de hautbois , placées l’une à côté de l’autre
aux deux embouchures offeufes & oblongues du
larynx interne , qui donnent entrée aux deux premières
bronches ; mais , comme nous l’avons dit ,
ces anches membraneufes ne font pas le feirl organe
de la Voix des oifeaux ; M. Hériffant en a découvert
d’autres, placées dans l’intérieur des principales
bronches de ce poumon des oifeaux, que
M. Perrault nomme poumon charnu. On trouve dans ces canaux une grande quantité
de petites membranes très-déliées en forme de croit-
fant , placées toutes d’un même côté les unes au
deffus des autres, de manière qu’elles occupent
environ la moitié du canal , laiflant l’autre libre
à l’air , qui ne peut cependant y paffer aveeviteffe ,
fans exciter, dans ces membranes ainfi difpofées, des
trémoiiffements plus ou moins vifs, & par conféquent
des fons.
Dans quelques oifeaux aquatiques du genre des
canards, on découvre encore un organe différent,
Comme d’autres membranes pofées en divers fens
dans certaines parties offeufes ou cartilagineufes,
La figure de ces parties varie dans les différentes
efpèces; & on les rencontre, ou vers la partie
moyenne de la trachée-artère, ou vers fa partie inférieure.
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