
s’ efforcent à donner à leur V o ix un Ton fort aigu >
feroient enfin fuffbqués , s’ils contimioient long
ternes : car comme ils rétréciffent la glotte prefque
entièrement, i l ne peut fortir que peu. d’air ; il
leur arrive donc la même chofe qu’à ceux en qui
l ’on arrête la refpiration : mais fi on élargit trop
l ’ouverture de la glotte, l ’airs qui paffera fans peine
& fans beaucoup de viteffe , ne fe brifera point j
ainfi , il n’y aura pas de frémiffements : de là vient
que ceux qui veulent donner à leur Vo ix un ton
grave , ne peuvent former aucun fon.
L ’air qui revient lentement des poumons paffe avec
violence par la fente de la glotte , parce qu’il
marche d’un efpace large dans un lieu fort étroit :
1 efpace de la bouche & des narines ne contribue
en rien à le produire , mais il lui donne diverfes
modifications ; c’eft ce qu’on voit par l ’altération
de la Voix dans les rhumes , ou lorfque le nez
eft bouché. Le fon forme la parole & les tons , dont
la variété offre tant d’agréments à l ’oreille.
I l y a plufieurs inftruments qui fervent à la parole
; la langue eft le principal, les lèvres & les
aents y contribuent /aufii beaucoup ; l’expérience
le montre, dans ceux qui perdent les dents, ou qui
ont des lèvres mal configurées : la luette parok
auffi, félon plufieurs Savants, être d’ufage pour
articuler ; car ceux à qui elle manque ne parlent
pas diftinftement.
I l y a fur la glotte une languette nommée épiglotte
£ qui par fes vibrations différentes peut
donner à l ’air beaucoup de modifications ; les cartilages
aryténoïdes, qui font renverfé/ fur la glotte,
peuvent produire - un effet femblable par les divers
.mouvements dont ils font capables ; enfuite la bouche
modifie, augmente, tempère le fon, félon
les proportions qu’elle obferve en fe raccourcit
fant. Enfin la' glotte a une faculté étonnante de fe
refferrer & de fe dilater ; fes contractions & fes
dilatations répondent avec une exactitude merveil-
leufe à la formation de chaque ton.
Suppofons , avec l’ingénieux doéteur K e i l l , que
la plus grande diftance des deux côtés de la glotte
monte à la dixième partie d’un pouce , quand le
fon qu’elle rend marque'la douzième note à laquelle
la V o ix peut atteindre facilement : fi l ’on
divite cette diftance en douze parties, ces divifions
marqueront l ’ouverture requife pour telle ou telle
note pouffée avec telle ou telle .force - fi l ’on
confidère les fubdivifions des notes que la V o ix
peut parcourir, il faudra un mouvemeut beaucoup
plus fublil & plus délicat dans les' côtés de la
glotte ; car fi de deux cordes exactement tendues
a l ’uniffon on raccourcit l ’une d’une 2000e partie
de fa longueur , une oreille jufte diftinguera la
difcordance de ces deux cordes ; & une bonne V o ix
fera feqt« la différence des fons qui rie différeront
que de la partie d’une note. Mais fuppofons
que la V o ix ne divife une note qu’en cent parties,
i l s’enfuivra que les différentes ouvertures de la
glotte diviferont actuellement la dixième partie
d’un pouce en 1200 parties , dont chacune produira
dans le ton quelque différence fenfible
qu’une bonne oreille pourra diftinguerj mais le
mouvement de chaque côté de la glotte étant
égal , il faudra doubler ce nombre & les côtés
de la glotte diviferont en effet, par leur mouvement
, la dixième partie d’un poucè en 2400
parties. \
„ 11 eft aifé maintenant de définir ce que c’eft qne
la Voix & le chant ; car nous avons déjà vu ce que
c’étoit que la parole.
La Voix eft un bruit que l’air enfermé dans
la poitrine excite en fortant avec violence, &
frottant les membranes de la glotte ; il les ébranle
& les froiffe , en forte que le retour eaufe. un
trémouffement capable de faire impreflïon fur
l’organe de l’ouïe. Or eet air agité avec promptitude
va fraper la cavité du palais & laimem-
brane dont il eft revêtu ; ce qui produit la réflexion
du fon : la modification de ce fon ainfi
réfléchi fe fait par le mouvement des lèvres & de
la langue;, qui donnent la forme aux accents la ..de Voix & aux fyllabes dont la parole eft coin-
pofée.
Pour que la Voix fe forme aifément, i°. il
faut de la foupleffe dans les mufcles qui ouvrent
&refferrent la glotte j s’ils devenoient paralytique.^
on ne pourroit plus, former de fon»
2°. Il faut que les ligaments qui uniffent les
pièces du larynx obéiffent facilement.
'3 e*. Il faut une liqueur qui humeéle continuellement
le larynx ^peut-être que le fuc huileux
de la glande tyroïde exprimé par les inufcles
qu*on nomme Jlernoty ro'idiens , contribue à rendre
la furface interne dii larynx gliffante & par confisquent
plus propre à former la Voix. 40. Il faut que le nez ne foit pas bouché ;
autrement, l’air qui fe réfléchit & fe modifie diver-
fernent dans le fond de la bouche qui conduit ail
nez, forme un fon défagréable : on appelle cela
parler du ne\, mais mal à propos ; car alors tout
l’air paffe par la bouche , & le nez bouché n’en reçoit
que peu ou point.
5a. 11 faut que le thorax puifle avoir une dilatation
confidérable : car fi les poumôns ne peuvent
pas bien s’étendre, il faudra reprendre haleine à
chaque moment ; ainfi, la voix tombera, ou. s’inter^
rompra défàgréablement.
Remarquons, encore que la pointe de la langue
prend quelquefois part à la formation des tons ,*
car quand ils fe fuivent de bien près, la glotte
labiale n’étant pas a fiez déliée pour prendre fi
promptement les différents diamètres néceflaires ,
la pointe de la langue vient fe préfonter en dedans
à cette ouverture, & par un mouvement très—
prefte la rétrécit autant qu’il faut, ou la laiffe libre
un inftant pour revenir aufïî tôt la rétrécir encore.
A l’égard du fifflementi, on fait 'qu’il n’eft formé
que par les feules vibrations des parties des lèvres
alors extrêmement froncées & agitées pal lepafi*
fage précipité de l ’ait qui les fait frémir. Voilà
les principales merveilles de la V 0ix- ; il nous
refte à répondre à quelques queftioiis qu on fait a
fon fu,jet. ; ' • -
On demande ce qui caufe la différence de la
Voix pleine & de la V o ix de fauffet , qui commence
au plus haut ton de la V o ix pleine, 8c ne"
lui ajoute que trois tons au plus. M. Dodart a
obfervé que dans tous ceux qui chantent en fauffet,
le larynx s'élève fenfiblement , & par conféquent
le canal de la trachée s’alonge & fe rétrécit ; ce
qui donne une plus grande viteffe à l ’air qui y
coule. Cela feul fuffiroit pour hauffer le ton ; mais
d’ailleurs il eft très - vraifemblable que la glotte
fe reflerre encore , & plus que pour les. tons naturels.
Peut-être auffi le muficien pouffe l’air avec
Une plus grande force ; & par là le ton devient
plus aigu , comme il le devient dans une fliite
fur un même trou, lorfque le fouffie eft plus fort.
Mais comme la difpofition du larynx qui eft élevé
ne permet à l ’air que d’enfiler la route du nez, &
non pas cellé de la bouche , cela fait quela Voix
n’eft pas défagréable ; mais elle eft toujours plus
foible, 8c n’e ft, pour ainfi dire, qu’une demi-
Voix. •
La Vo ix fauffe eft différente du fauffet ; c’eft
celle qui ne peut entonner .jufte le ton qu’elle
voudroit. M. Dodart en raporte la caufé à l’inégale
conftitution des deux lèvres de la glotte , foit en
épaiffeur , foit en grandeur, foit en tenfion. L ’une
fait, pour ainfi dire , la moitié d’un ton ; l ’autre,
la moitié d’un autre : & l ’effet total n’eft ni l’un
ni l’autre. Mais M. de Buffon ayant remarqué ,
dans plufieurs perfonnes qui avoient l ’oreille & la
Vo ix fauffes , qu’elles entendoient mieux d’une
oreille quë d’une autre, l ’Analogie l ’a conduit à
faire quelques épreuves fur des perfonnes qui avoient
la Voix fauffe : il a trouvé qu’elles avoient en
effet une oreille meilleure que l ’autre ; elles reçoivent
donc à la fois par les deux oreilles deux
ienfatiôns inégales, ce qui doit produire une dif-
'cordance dans le réfultat total de la fenfation ;
& c’eft par cette raifon , qu’entendant toujours faux,
elles chantent faux nécenairement & fans pouvoir
même s’en apercevoir. Ces perfonnes , dont les
oreilles font inégales en fenfibilité, fe trompent
Couvent fur le côté d’ou vient le fon ; fi leur bonne
oreille eft à droite, le fon leur paroitra venir
plus fouvent du côté droit que du gauche. Au
refte, il ne s’agit ici que des perfonnes nées avec ce
défaut ; ce n’eft que dans ce cas que l ’inégalité
de fenfibilité des deux oreilles leur rend l ’oreille
& la V o ix fauffes. Or ceux auxquels cette différence
m’arrive que par accident 8c qui viennent avec
l ’âge à avoir une des oreilles plus dure que l ’autre,
r/auront pas pour cela l’oreille & la Vo ix fauffes;
parce qu’ils avoient auparavant les oreilles également
fenfibles ; qu’ils ont commencé par entendre
& chanter jufte ; & qüe , fi dans la fuite leurs
oreilles deviennent inégalemenr fenfibles & produifent
une fenfation de faux , ils la reétifient fur
le champ par l ’habitude où ils ont toujours été
d’entendre jufte 8ç de juger en conféquence.
On demande enfin pourquoi des perfonnes qui
ont le fon de la Voiix agréable en parlant, l ’ont
défagréable en chantant ou au contraire ? Premièrement
, le chant eft un mouvement général de
toute la région vocale, 8c la parole eft le feul
mouvement de la glotte; or puifque ces deux mouvements
font différents , l ’agrément ou le défagré-
ment qui réfulte de l ’un par raport à l ’oreille , ne
tire point à conféquence pour l ’autre. Secondem
e n to n peut conjecturer que le chant eft une
ondulation , un balancement, un tremblement continuel
, npn pas ce tremblement des cadences qui
fe fait quelquefois feulement dans l ’étendue d un
ton, mais un tremblement qui paroît égal & uniforme
, & ne change point le ton, du moins fon-
fiblement ; fembltble , en quelque forte, au vol
des oifeaux qui planent, dont les aîles ne laiffent
pas de faire inceffamment des vibrations, mais fi
courtes 8c fi promptes , qu’elles font imperceptibles.
Le tremblement des cadences fe fait par des
changements très-preftes & très-délicats de l’ouverture
de la glotte; mais le tremblement qui règne
dans tout le chant eft celui du larynx même. L e
larynx eft le canal de la V o ix , mais un canal
mobile , dont les balancements contribuent à la
Voix du chant. Cela pofé, on voit affez que , fi
les tremblements qui ne doivent pas être fenfibles
le font, ils choqueront l’oreille , tandis que dans la
même perfonne la V o ix , qui n’eft que le fimple mouvement
de la glotte, pourra faire un effet qui plaifo.
Ce détail nous a conduits plus loin que nous ne
croyions en le commençant ; mais il amufe, &
d’ailleurs le fujët fur lequel il roule eft un des plus
curieux de la Phyfiologie.
Nous avons fuivi, pour l ’explication des phénomènes
de la V o ix , le fyftême de MM. Dodart 8c
Perrault, par préférence à tout autre , & nous
[penfons qu’il le mérite. Nous n’ignorons pas cependant
que M. Ferrein eft d’une opinion différente,
comme on peut le voir par fon Mémoire
fur cette matière , inféré dans le Recueil de l ’Académie
des Sciences, année 1741* Selon lu i , l’organe
de la V o ix eft un infiniment à corde & à
vent, & beaucoup plus à corde qu’à vent ; l ’air
qui vient des poumons 8c qui paffe par la glotte
n’y fefant proprement que l’office d’un archet
fur les fibres tendineufes de ces lèvres, qu’il
appelle cordes vocales ou rubans de la glotte $
c’eft, dit-il, la collifion violente de cet air & des
cordes vocales qui les oblige à frémir ; 8c c’eft
par leurs vibrations plus ou moins promptes qu’ils
les rendent différents, félon les lois ordinaires des
inftrùments à cordes. Voy. D é c l a m a t i o n m n o t é e .
(L e chevalier D E J A U C O U R T . )
Vo ix d e s a n i m a u x , Phyjiol. L e fon que rendent
les animaux , infeétes , oifeaux , quadrupèdes ,
éft bien différent de la V o ix de l’homme.
M m m m a