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que chofe de plus propre, de plus permanent ;
à marque quelque choie de plus accidentel & de
moins néceflaire. Il faut dire, par la même raifon,
qu un nom efi de tel genre , par exemple , du
genre mafculin , & qu’un adjeétif eft à tel genre,
au genre mafculin : le . genre eft fixe dans les
noms, & leur appartient en propre ; i l eft variable
& accidentel dans les adjeérifs.
Comme la différence, des Perfonnes n’opère
aucun changement dans la forme des fujets , &
qu’elle n’influe que fur les terminaifons dès verbes,
cela a fait croire au contraire à San&ius ( Mi-
nerv. I. iz . ) , que les verbes ont feuls des Personnes
, & que les noms n’en ont point, fed
finit alicujus per fonce verbalis. I l devoit donc
raifonner de même fur les genres à l ’égard des
-noms & des adjeétifs , & dire que les noms
n’ont point de genres , puilque leurs tçrminaifons
font invariables à cet égard ; & qu’ils font propres
aux adje&ifs, puifqu’iis en font varier les terrni-
naifons. Cependant, par une contradi&ion furpre-
narite dans un homme fi habile -, i l a pris une
route tout oppofée , & a regardé le genre comme
appartenant aux noms , à l ’exclufion des adjeétifs ,
quoique l ’influence des genres fur les adjectifs foit
la même que celle des Perfonnes fur les verbes.
Mais outre la contrariété des deux procédés de
Sanélius , il n’a trouvé la vérité ni par l ’un ni
par l ’autre. Les genres font, par raport aux noms,
différentes clâffes dans lefquelles les ufages des
langues les ont diftribués ; & par raport aux
zdjeélifs , ce -font différentes terminaifons adaptées
à la différence des claffes de chacun des noms
auxquels on peut les raporter. Pareillement les
Perfonnes font, dans les fujets , des points de
vue particuliers fous lefquels i l eft néceflaire de
les envifager ;. Sc dans les verbes ce font des terminaifons
adaptées à ces divers points de vue en
vertu du principe d’identité, y oyez Genre & Identité.
De' là vient que , comme les adje&ifs s’accordent
en- genre avec les noms leurs corrélatifs, les
verbes s’accordent en Perfônne avec leurs fujets :
fi un adjeârif fe raporte à des noms de différents
genres , on le met' au pluriel à caufe de la pluralité
des corrélatifs , & au genre le plus noble ;
frater & forer fun t p ii : de même fi un verbe
fe raporte à des fujets de diverfe,s Pehfonnes,
on le met au pluriel, à caufe. de la pluralité des
fujets , & à la Perfônne la plus noble ; ego & tu
ibimusi C’eft de part & d’autre , non la même
raifon, fi vous voulez , mais une raifon toute pareille.
Voye\ au Jurplus Personnel & Impersonnel.
( M. B e a u zé e . )
P E R S O N N E L , E L L E , adj. Gramm.
Ce mot fignifie qui eft relatif aux perfonnes ,
ou qui reçoit des inflexions relatives aux per-
fonn.es. On applique ce mot aux pronoms, aux
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terminaifons de certains modes des verbes , à ces
modes des verbes, & aux verbes mêmes.
On appelle pronoms perfonnels ceux qui pré-
fentenc à l ’efprit des êtres déterminés par l’idée
précife dé l ’une des trois perfonnes. Les pronoms
perfonnels, dans le fyftême ordinaire des grammairiens,
ne font qu’une elpèce particulière; &
l ’on y ajoute les pronoms démonitratifs, les pol-
feffifs, les relatifs, &c. Mais il n’ÿ a de véritables
pronoms que ceux que l ’on nomme pèr-
fonnels ; & les autres prétendus pronoms font ou
des noms, ou des adjedifs, ou même des adverbes.'
Iroye\ Pronom.
Les terminaifons perfonnelles de certains modes
des verbes font celles qui font relatives à l ’une
des trois perfonnes , & qui fervent à marquer
l ’identification du verbe avec un fujet de la même
perfônne déterminée. Ego amo , tu amas, Petrus
amat ; voilà le même verbe identifié, par la concordance
, avec le fujet ego , qui eft de la première
perfônne; avec le fujet tu, qui eft de la
fécondé ; & avec le fujet Petrus , qui eft de la
troifième.
On peut encore regarder comme des terminaifons
perfonnelles ou comme des cas perfonnels,
le nominatif & le vocatif des noms. En effet ,
dans une proportion on ne çonfidère la perfônne
que dans^le fujet, parce qu’il m’y a que le fujet
qui prononce le difeours, ou à qui on l ’adrefie ,
où dont on énonce l’attribut fans qu’il parle ni
qu’il foit apoftrophé. Or le nominatif eft le cas
qui. défigne le nom comme fujet de la troifième
perforine, c’eft à dire ;. comme . le fujet dont on
parle ; Dominus probavit me : le .vocatif eft
le cas qui défigne le nom -comme fujet de la fécondé
.perfônne , c’eft à dire; comme le fujet à qui
on parle; Domine probafli me : C ’eft la feule
différence qu’il y ait entre ces deux cas : & parce
que la terminaifon perfonnelle du verbe eft toujours
fuffifante pour défigner fans équivoque cette
idée accefloire de la lignification du nom qui eft
fujet , c’eft pour cela que le vocatif eft femblable
au nominatif dans la plupart des noms latins 'au
fingulier , & que ces deux ca.s , en latin & en
grée , font toujours femblables-au pluriel, Voye\
V o c a t if . . Les modes perfonnels des verbes font ceux ou
les verbes reçoivent des terminaifons perfonnelles , au moyen defquelles ils fe mettent en concordance
de perfônne avec le nom ou le pronom qui
en exprime le fujet. Ces modes font directs pu
obliques; les directs font l’indicatif , ‘l’impératif,
& le fuppofîtif, dont le premier eft pur & les
deux antres mixtes ; les obliques , qui font àufli
mixtes , font le fubjonétif & l’optatif. ,Voye%
M o d e , & chacun de ces modes en particulier.
Enfin les grammairiens ont encore diftingué des
verbes perfonnels & des verbes irriperfonnels :
mais cette diftinétion eft faufle en lo i , & fuppofe
p E u
un principe également faux, comme je l ’ai fait voir
ailleurs. Voye i Impersonnel (M . B ea u zé e.) J
P E R S P I C U I T É , f. f. Grammaire. Clarté, (
netteté d’idées & de difeours ; c’eft une qualité
effencielle d’un auteur ou d’un orateur. Sans e l le ,
i l fatiguera ceux qui l ’écouteront, & fes écrits
auront befoin d’un commentaire. Ce mot eft emprunté
delà tranfparence ou,de l ’air, qu de l ’eau, ou
du verre..
PEUR , FRAYEU R, TERREUR. Synonym.
Ces trois expreflions marquent par gradation les
divers états de l’âme plus ou moins troublée par
la crainte. L ’apprëhénfion, vive de quelque danger
caufe la Peur ; Ci cette appréhenfion eft plus frapante,
elle produit la Frayeur; fi elle abat notre efprit,
c’eft la Terreur.
L a Peur eft fouvent un foible de la machine
pour le foin de fa confervation , dans l’idée qu’i l y
a du péril» La Frayeur eft une épouvante plus
grande & plus frapante. La Terreur eft une paflïon
accablante de l ’âme , caufée par la préfence réelle
©u par l ’idée très-forte Jd’un grand péril.
Pyrrhus eut moins de Peur des forces delà République
romaine, que d’admiration pour fes procédés.
Attila fefoit un trafic continuel de la Frayeur des romains;
mais Julient, par fa fageffe , fa confiance, Ion
économie , fa valeur , & une fuite perpétuelle d’actions
héroïques, rechafla les barbares des frontières
de fomEmpire; & la Terreur que fon nom leurinf-
picoit, les contint tant qu’il vécut.
• Dans la Peur qu’Augufte- eut toujours devant
les ieux d’éprouver le fort de fon prédécefleur, il
ne fongea, qu’à .s’éloigner de fa conduite : voilà
la clef de toute la vie d’Oilave.
On lit qu’après la bataille de Cannes ,( la
Frayeur fut extrême dans Rome : mais il n’en
eft pas de la confternation d’un peuple libre &
belliqueux , qui trouve t-oujours des refiources dans
fon courage, comme de celle d’un peuple efclave qui
ne fent que fa foiblefle.
On ne fauroit exprimer la Terreur que Céfar
répandit , lorfqu’il pafla le Rubicon ; Pompée
lui-même éperdu ne fut que fuir , abandonner
l ’Italie, & gagner promptement la mer. Voye\ A larme, T erreur , Effroi , Frayeur, Épouvante,
Crainte, Pe u r , Appréhension. Syn.
( Le chevalier DE JAUCOURT. )
PH A L E U C E o u PH A L E U Q U E , adj. Belles-
Lettres. Dans la Poéfie grèque & latine , c’eft
ainfi qu’on défigne une forte de vers de cinq pieds,
donf le premier eft un fpondée , le fécond un dac- -
tyle , & les trois derniers font des trochées. On
prétend que ce nom eft tiré de celui de Phaleucus,
qui inventa cette forte de vers.
On l ’appelle aufiî Hendécafyllabe, parce qu’il
eft compofé de onze fyllabe ; comme
F un quant divitias deos rogavi ,
. ' Contenais modicis meoque lté tus. Martial,
P H É s 3
Ce vers eft très-propre pour l ’Épigramme & pour
les poéfies légères. Catulle y excelloit. Voye£ H endécasylla'be. ( Le chevalier d e J a u -
c o u r t : )
( N. ) PHÉBUS , f. m. Vice de ftyle , oppofé
à la netteté , & qui confifte à exprimer, avec des
termes trop figurés & trop recherchés , ce qui doit
être dit plus Amplement & avec moins aaprêt ;
d’où naît bien fouvent une obfcurité très - aprochante
de celle du Galimathias. Voye^ ce mot.
Une oraîfon funèbre de Louis XIII , prononcée
dans la fainte chapelle de Paris, eft un peu de ce
caractère. Elle a pour texte, A fe n d it fuper oc-
cafum y parce que le roi mourut le jour de l ’Af-
cenfîon ; petite allufion digne de préluder à l ’exorde
qui fuit :
Quoi' d o n c g r a n d Soleil de nos. rois !, las !
au milieu de votre courfe, êtes - vous déjà au
couchant ? & d’un f i haut point de gloire, êtes-
vous précipité dans une éternelle défaillance ?
Non, n on , bel Aflre ; vous monter en vous
abaiffant, & vous mefure\ même vos élévations
par vos chutes. Pompes funèbres, pourquoi me
déguifeç- vous fe s triomphes ? S i ma fainte chapelle
efi ardente, elle n éclatera quen f e u x de
jo ie ; ce fera dans les évidentes démonfirations
oii je reproduirai notre 'monarque. tout augufie.,
parce qu’ i l a été tout humble ; & hautement
relevé dans Dieu par une fervitude couronnée,
pour n avoir point eu de couronnes qui ne luifujfent
affujetties.
Cela n’eft pas abfolument inintelligible, & ce
n’eft pas tout à fait du Galimathias ; ce n’eft que
du Phébus : car il y a quelque différence entre
l ’un & l ’autre. ( Vqye\ G alimathias, Phébus ,
Syn. ) Mais voici véritablement du Galimathias
dans cet autre morceau du même difeours.
Après avoir, dit, que l ’homme dans Se roi veut
ce qu’i l p eu t, que le roi dans l ’homme peut
ce qu’ i l v eut, que l ’un fa it fon foible du .fort
de l ’autre; l ’orateur loue le prince d’avoir été
infenfible à tout ce qui flatte les fens , & termine
cette tirade, étincelante en s’ écriant : B oy ale abf-
iinence des plaifirs , fo leil naiffant dans les
~ abîmes , plénitude dans le vide , marine dans les
défer ts , toi fon sèche oit tout efi trempé, toi-
fon trempée où. tout efi f e c , corps defféché
où les plaifirs le peuvent noyer, corps trempé &
tout imbu de confolations où Vaufiérhé le defsè-
ches î
On ne fait ici qu’admirer le plus, du Phébus
ou du Galimathias ; & il feroit difficile de décider
lequel des deux l ’emporte far l ’autre : rien
de plus brillant ni de moins clair. Mais ce qu’il
y a d admirable r c’eft qu’il y a des, gens qui le
font un mérite de cette obfcurité ; & ce vice n’eft
pas nouveau, dit Quintiiien ( In fi. orat viij. i . ) .
Quum jam apud T i- Puifque je trouve dans
tum - Liviuni inveniam Tite-Live qu’il y a eu
fuiffe prceceptorcm ali- un maître qui recoin