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dans cette route difficile qu’à la-faveur de la lumière
que fes observations y ont portée , autant par la j
Sagacité avec laquelle il a varié les moyens d'interroger
l’expérience, que par cette candeur rare
avec laquelle il a décrit les réfultats.
On ne peut, à mon avis, regarder le déchet de
l ’or comme l’effet' d’une fimple aélion mécanique :
i®. Si cela étoit, l’ébullition violente & long-temps '
continuée d’un autre fluide auffi denfe, produiroit
le même déchet fur les cornets d’or, ou du moins
fe r la chaux d’or des Eflayeurs ; c’eft ce qui n’arrive
p a s , quelque énergie que. M. Tillet ait tâché de
donner à t acide vitriolique il rûa aperçu aucun
effet fenfible; cependant l’érofion & la fufpenfion
dévoient 'être bien plus confidérables, & en pro- I
portion de la plus, grande den.fité de cet acide &
de celle qu’il acquiert par l’ébullition à caufe de
Ta fixité- A la vérité, MM. Tillet & Darcet ont
reconnu qu’en employant une partie d’acide vitrio-
lique avec deux parties d’acide nitreux, l’érofion
devenoit plus marquée 8c fournifloit une limaille d'or
q u e " d i f f in g u o i t à l’oeil fimple fur les cornets,
portant toujours le même caraélère métallique avec
fon éclat naturel; mais je ne penfepas qu’on puifle en
■ tirer d’autre conféqencequecelleque ces Savans ont
exprimée en ces termes : que Yacide nitreux acquéroit
plus de force par fa combinaifon avec P acide vitriolique:
or , s’il faut toujours de Y acide nitreux, fi c’eft toujours
lui qui agit, s’il eft jufques dans ce mélange
le feul inftrument, il ne peut être un pur inftru-
ment méchanique , cette condition appartiendroit
•indivifiblemeat à tout le fluide.
20. Si c’étoit une fimple aétion méchanique, elle
feroit confiante toutes les fois que l’or préfenteroit
la même furface , que l’acide feroit auffi concentré,- '
auffi bouillant, c’eft ce qui ne s'accorde pas encore
avec robfervation ; nous avons vu que les floceons
d ’or précipités de Yncide nitreux par l’argent 8c les
pellicules dépofées fpontanément, ne fe laifloient
plus entamer par cet acide, même à l ’aide de la
plus forte ébullition. On peut imaginer que la
forme lamellenfe que prennent ces précipités &
la ductilité dont ils fe trouvent pourvus avaat toute
fufion, annoncent un état d’aggrégation plus folide ,-
plus difficile à rompre, & que c’eft pour cela qu’ils
ne font pas attaqués; mais voici d’autres faits qui,
n’étant pas fufceptibles de cette explication, laiflent
l ’argument dans toute fa force. M. Tillet imagina
de faire feryir plufieurs fois le même q,cide nitreux;
il en mit d’aborâ fix onces dans un petit alambic
de verre fur un cornet d’or fin très - mince , du
poids de 24 .grains f | , i f diftilla lentement au feu
de fable, ayant foin cependant d’entrenir toujours
l ’acide dans une légère ébullition ; lorfqu’il n’en
refta plus que quelques gros , il arrêta l'opération
; la .teinte un peu jaune de la liqueu” de
l ’alambic annonça que l’or avoit été attaqué , il
avoit en effet perdu quelques trente-deuxièmes,
L 'acide nitreux qui avoit pafle dans le récipiént,
fut remis fur le même cornet, & l’attaqua de
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nouveau, mais plus foiblement; il fervit de cette
manière jufqu’à huit fois, & le poids du cornet
vérifié à chaque épreuve, fit voir que les altérations
devenoient plusfoibles à mefure que les diftillations
fe multiplioient. A la feptième opération, la perte
fe réduitoit à un cent vingt-huitième de- grain ; elle
fut infenfible à la huitième , auffi le réfidu de cette
dernière diftillation fe trouva-t-il blanc comme de
l ’eau diftillée. Enfin M. Cornette ayant remis à
M. Tillet de Yacids nitreux provenant d’un travail
entrepris pour l ’obtenir dans toute fa pureté, il
n’a point attaqué l’or, quoiqu’il eût bouilli longtemps
fur un cornet , 8c qu’il s’y fût réduit à
une très-petite quantité de liqueur. La conféquence
immédiate de ces faits, du dernier fur-tout, n’a
point échappé à M. Tillet; je ne puis mieux la
rendre que dans fes propres expreffions .• Si la
faculté d'entamer l'or étoit inhérente à cet acide,
elle ne s'évanouïroit point par de fimples rectifications...
elle ne fe perdroit pas entièrement, tandis que l'acide
conferveroit toute fa force., . . . la pojfibilité de priver
Vacide de cette faculté paroît prouver qu'il agit dans
cette circonfiance par unp force à laquelle contribue
une fubfiance qui efi étrangère à Y acide. Je ne ferai
que prévenir le jugement du leéteur en ajoutant:
ce n’eft donc pas l ’effet d’une fimple aétion mécanique.
30. La couleur pourpre que laiffe fur le filtre
Y acide nitreux bouilli fur l’or, 8c qui pénètre les
quatre plis du papier, & celle dont fe charge la
feuille d’étain qu’on y plonge avant la filtration,
me paroi fient encore des indices certains d’une
vraie diflblution ; car cette couleur eft propre à
la chaux d’or , c’eft-à-dire à l’or privé de partie
de fon phlogiftique ; je ne connois aucune obfer-
vation qui prouve qu’il puifle palier à cet état
fans rien perdre du principe métallifant, tandis
que tous les phénomènes les mieux confia tés concourent
à établir qu’il ne perd le brillant métallique
que par l’aélion de quelque fubftance qui exerce
fur ce principe une affinité quelconque. Je ne
rappelerai ici qu’un feul fait qui me paroît décffif.
11 n’y a fans doute point de divifioii méchanique
qui approche de celle que l’or éprouve lorfqu’il
eft élevé en vapeurs -par la violence de la chaleur
au foyer du verre ardent, & cependant cette yapeur,
qui, comme le dit l’illuftre Macquer, eft précisément
la portion qui échappe à la calcination
qui nefi compofée que des particules infiniment di-
vifées de ce métal'non-altéré, ne donne aucune trace
de couleur pourpre , elle s’attache à use lame
d’argent fous forme d’ une poujfière jaunâtre d'une
fineffe extrême, qui n’a aucun brillant métallique,
même vue à la loupe, mais qui le recouvre fur-
le-vchamp à l’aide du brunifloir.
4°. Une dernière cir.conftance qui vient à l’appui
de cette opinion, eft la teinte jaune que prend
Y acide nitreux chargé d’or, qu’il perd quand ce
métal en eft féparé par la filtration ou par- tout
autre moyen. Cette teinte uniforme ne peut réfulce*
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que d’une divifion chymique, de Féqui'p on d ér an ce
des parties, de l’attraélion qui les unit chacune à
chacune. 11 n’y a jufqu’à préfent aucun phénomène
connu qui puifle nous faire concevoir fans ces conditions
& par l’effet de la feule fufpenfion, le
paffage d’un fluide à une couleur fimple, tranfpa-
rente , homogène dans toute fa m a f f e & qui
fubfifte auffi long-temps dans le repos.
Si ces faits rapprochés paroiflent ne laifler aucun
doute fur 1 exiftence d’un vrai diflolvant.,. je ne me
diffimule pas qu'il y en à. d’autres qu'il efi difficile
de concilier avec cette opinion. Je ne parle pas de
la petite quantité du métal diflous, ni de Ja nécef-
ficé d’une ébullition violente ; la plus petite quantité
eft un effet, il y a. bien d’autres exemples où
Faétion du diflolvant eft auffi bornée, où elle exige
le feçours de la chaleur,, & où la diflblution eft
certaine1.
Je mets de même au rang des objections dont
îa folution n’eft pas impoffible, celle que M. Tillet
a- fondée fur ce que l ’éther vitriolique qui tient
du mercure à lia faveur d’un excès d'acide nitreux
n attaque pas l’o r, tandis qu’il attaque le cuivre
la facilité avec laquelle ce dernier cède fon phlogiftique
, fon affinité avec cet acide, plus grande
que celle du mercure, beaucoup plus grande que
celle de l’or, en un mot l ’état de combinaifon
aélueîle plus ou moins avancée, dans lequel fe
trouve l’acide, puifqu’il eft intermède néceflaire
confti tuent autant de différences dont une feule
fuffiroit pour écarter toute conféquence de la
eomparaifon fies réfultats.
La diminution progreffive' de l’aélion de cet
acide-, lorfqu’il eft cohobé plufieurs fois de fuite
fur le même cornet d’or, ceflè d’étonner lorfqu’Qïr
fe prête à la fuppofitioa vraifemBlable qu’il faut
une très - grande quantité de ce diflolvant pour
difloudre une très-petite partie de ce métal ; fi
©n 11e jugé pas cette raifon fatisfaifante, on peut
fuppofer qu'à chaque diftillation l’acide perd une
portion die quelque principe qui ajoutoit à fon
énergie ;. mais il eft évident que cette circonftance
eft plus contraire q,ue favorable ai l’hypothèfe de
ïàélion méchanique.
Ne peut-on pas en dire autant de là duélilité
extraordinaire que l’or féparé de cet acide acquiert
par un fimple recuit, de la propriété qu’il ma-
nifefte après cette féparation d’éluder toute aélioir
du même acide? Il n’ëft pas plus facile d’expliquer,
ees phénomènes dans l’idée d'une divifion purement
méchanique* que dans celle d'une vraie diflblution.
E’effet ne prouve rien que conféquemment à la*
eaufe qui le détermine immédiatement ; cette
caufe reftàat inconnue, oirne peut en tirer aucune
induélion fure«,.
Les, faits qui combattent lè fyftême d'e la diflb--
lition: fe réduifenc donc à la féparation du métal?
gaule filtre j, a f® précipitation Spontanée en état
métallique - mais oa* ae doit les* regarder/ comme-
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faits contraires qu’autant qu’ils s’excluent abfolu-
ment & dans tous les temps fucceflifs, qu’autant
qu’ils fe correfpondent dans des degrés égaux d’effet
ou de produit, qu’autant qu’ils ne peuvent fe concilier
dans aucune fuppofrtion poffible ; encore
n’eft-ce bien fouvent que par défaut de connoif-
fances que nous femmes conduits à nier Ja poflî-
bilité de les rapprocher ; fouvent auffi l’habitude
de confidérer les effets comme abfelus nous trompe;
on ne foupçonnoitpas, il y a peu d’années, ou’une
même quantité de métal pût être tenue en diAblution
de deux manières differentes dans le même
acide, qu’il y eût un degré de diflblution au-delà
de celui qui rend la terre métallique fufceptible
depafler par le filtre ; que le "métal pût retenir
dans ces diflblutions plus oh moins de pblogifti-
que , &c. On fait aujourd’hui- que la chaux de
manganèfequïcolore fon diflolvant n’eft point dans
un état de diflblution parfaite, que la difloluiioit
nitreufe de cuivre qui eft bleue retient plus de
phlogiftique que eelle qui eft v erte, &c. (Foyer
Ph osph ore de m a n g a n è s e , n it r e d e cuiv
r e , Nit r e m e r cu r ie l , -&c,)'. Appuyés de
ces-exemples, abandonnons un moment l’habitude
de chercher toujours les effets les plus familiers,
de ne vouloir juger que d’aprèVeux, & peut-être
découvrirons-nous la vraie caufe du phénomène
dans quelqu'une des hypothèfês qui peuvent fervisr
à- en concilier toutes les circonftances.
L'acide nitreux ne diffout pas l ’o r , parce qu’iï
ne peut lui enlever le phlogiftique , àc que. c ’tlt
une condition effennelle à route diflolutiowÉëtal-
ïiqae ;. avant les expériences de l’iJiuftre Macquer
on doutoit,que la chaleur put déphlogiftiquer' l’or
avec le concours de Pair, un degré plus confidé-
rable produit par‘ la réunion des rayons folaires en.
a démontré la poffibilité : pourquoi n'admettrions-
nous pas ici ce que nous voyons en tant d’autres;
ôccafions, un effet ihefpéré produit par le concours
de plufieurs forces par elles-mêmes impuif-
fantes? Si un métal ne devient felubië que lorf—
qu il a .fait échange d’une portion de fen phlogiftique
pour une portion d’air Vital, & fans doute
bien plutôt k raifon de ce qu’il acquiert que de
ce qu’il perd, les circonftances' de notre opération;
ne peuvent manquer d’être très-favorables à cee
échange ; car on ne peut tenir. Y acide nitreux à*
un certain degré de chaleur, qu’il ne fe ferme un
peu de gas nitreux , & ce gas nitreux ne peut fe-
former que par la dëcompofition d’une portion de:
Facide même, qui met en liberté une quantité proportionnelle
d’air vital ; voilà donc une troifieme
fubftance, & la plus néceflaire à la-déphlogifticatiom
qui, agiflant pour ainfi dire plus en maflè que.*
dans la calcination ordinaire , peut féconder Fàéljca:
des deux autres fluides,. 8c le rendre à.un certains
point efficace;.
Je dis à un certain point * &. de cêttecondjnoir,.
que 1 on ne peut plus regarder comme impoffible *
guilque noua-coimoiflons- déjè des diflbluiions.pîùs