
<an remue fans cefîe , afin que le fucre ne s’attache 1
point à la chaudière, 8c ne foit point brûlé : en j
continuant ainfi, le firop fe change en une matière
femblable à de la farine ; alors on le met .
dans un lieu frais, 8c l’on a du fucre qui reffemble j
à la melaiïe. Il eft d’une couleur brune avant que
d’être raffiné, 8c communément on lui donne la
forme de petits pains plats , de la grandeur de la
main. Ceux qui font ce fucre avec plus de foin ,
le clarifient avec du blanc d’oeuf pendant la cuif- ■_
fo n , 8c alors ils ont un fucre parfaitement blanc.
On regarde le fucre d’érable comme beaucoup
plus fain qi/e le fucre ordinaire , 8c 1 on en vante
l ’ufage pour les rhumes 8c pour les maladies de
la poitrine. Mais, d’un autre côté, il ne fe diffout
point aufli aifément dans l’eau que le fucre des
cannes, 8c il en faut une plus grande quantité pour
fucrer. Il y a lieu de croire que fi on le prépa-
roit avec plus de foin que ne le font les fauvages
6c les François du Canada, on pourroit tirer de ce
fucre d’érable un' plus grand parti : la liqueur que
fournit l’érable, mife dans un baril, 8c expofée au
foleil d’é té , fait un très-bon vinaigre.
Les fauvages 8c les François du Canada mêlent
quelquefois le fucre dérable avec de la farine de
froment ou de maïs, 8c en forment une pâte dont
ils font provifion pour les grands voyages qu’ils
entreprennent. Ils trouvent que ce mélange, qu’ils
pomment quitfera, leur fournit un aliment très-
ïiourriffant,
On fait aufli une efpèce de firop avec la liqueur
qui découle de l’érable ; pour cet effet on
ne la fait point bouillir aufli fortement que lorf-
qu’on veut la réduire en fucre. Ce firop eft très-
doux , très- rafraîçhiflant 8c très-agréable au goût,
lorfqu’on en mêle avec de l’eau; mais il eft fujet
à s’aigrir , 8c ne peut être tranfporté au loin. On
s’en fort aufli pour faire différentes efpèces de con-»
fitures, .
La liqueur telle qu’elle fort de l’arbre eft elle-
même très - bonne à boire, 8c elle pafîe pour
fort faine ; celle qui découle des incifions faites à
l’arbre au commencement du printemps eft plus
abondante 8c plus fucrée que celle qui vient lorf-
que la faifon eft plus avancée 8c plus chaude. On
n’en obtient jamais une plus grande quantité qu’à
la fuite d’un hiver rude, 8c où il eft tombé beaucoup
de neige , 8c lorfque le printemps eft froid,
& quand il refte encore de la neige fur la terre , ;
6c lorfque les nuits font froides 8c accompagnées
de gelée,
On a remarqué que durant les vents d’e ft, ces
arbres ceffent bientôt de donner de la liqueur ;
ils en fourniffent plus dans^un temps ferein que
lorfque le temps eft couvert, 8c jamais on n’en
obtient plus que lorfqu’une nuit froide eft fuivie
d’un jour clair 8c doux. Les érables d’une grandeur
moyenne fourniflent le plus de liqueur , ceux qui
font dans les endroits pierreux 8c montueux donnent
une liqueur plus fucrée que ceux de la plaine.
Un bon arbre produit de quatre à huit pintes de
liqueur en un jour; 8c lorfque le printemps eft
frais, un foui arbre fournira de trente à foixante
pintes de liqueur , donrfoize pintes donnent communément
une livre de fucre. Un même arbre fournit
de la liqueur pendant plufieurs années, mais
il faut pour cela faire les incifions ou percer les
trous toujours du même côté, 8c les faire de bas
en haut, 8c non de haut en bas , fans quoi l’eau
de la pluie, en féjournant dans l’ouverture, feroit
périr l’arbre.
Tous ces détails font dus à M. Pierre Kalm, qui
a vu par lui-même le travail qui vient d’être décrit
, 8c en a rendu compte à l’académie de Stoc*.
k olm , dont il étoit membre , dans une^ difïerta-
tion inférée dans le tome XIII de fos mémoires,
ann. 1751 ; il conclut de ces faits, que l’on pourroit
avec fuccès tirer le même parti des érables
qui croiffent dans les parties foptentrionales de
l’Europe. M. Dudley a donné la defcription de ce
travail dans les tranfa&ions philofoph. tome XXX.
M. Gautier, correfpondant de l’académie des fcien-
ces de Paris , a pareillement rendu compte de la
manière dont fo fait le fucre d’érable, dans un mémoire
inféré dans le fécond volume des mémoires
dés favans étrangers.
M. Kalm obforve que l’on obtient pareillement
du fucre d’une efpèce de bouleau, qu^les Anglois
nomment fugar-birch , ou black-birch , betula folio,
ovali oblongo acumine ferrato. Gron. fior, Virgin.
188. Mais le fucre qu’on en tire eft en fi petite
quantité, qu’il ne dédommage point de la peine.
On tir* aufli du fucre d’un arbre d’Amérique
appelle par. les François le noyer amer , 8c par les
Anglois hïckory, nux juglans Virginiana alba mi-
no r- , fruitu nuci mofchatoe fimili, cortice glabro, fum-
mo - fafligio veluti in aculeum produtfo. Pluknet,
Phyt. La liqueur que donne cet arbre eft très-fucrée
, mais en très-petite quantité»
On obtient encore du fucre de la plante appellée
gleditfia par Gronovi-us 8c Linnoeus, hort. Upfal,
2p8, Lawfon , dans fon hifloire de la Caroline, p. 97,
dit qu’on en plante en Virginie dans beaucoup de
jardins pour cet ufage.
Lp maïs où bled de Turquie fournit aufli une
liqueur propre à faire du fucre : lorfqu’il eft verd ,
on trouve dans la tige un fuc limpide qui eft très-
doux; les fauvages d’Amérique coupent le maïs
pour en fucer le fuç. On peut encore obtenir du
fucre de l’ouatte ( Afclepias , caule ereflo fimplïd
ajinuo. Lin. Hort. Clifford, p. y8 ) ; on en tire aufli
des fleurs que l’on cueille de grand matin lorsqu'elles
font pleines de rofée , on en exprime un
fuc qui, épaifli par la cuiflon, donne du fucre.
Le P, Charleÿojx, dan? fon hiftoire de la nouvelle
France, dit qu’on tire du fucre d’yne liqueur
que fournit le frêne; M, Kahn croit que le P»
Çharleyoi^
Charievoix aura pris pour du frêne l’érable qui a '
des fouilles de frêne,, acer fraxini foins, qui croit
abondamment dans l ’Amérique foptentrionale, 8c
que les habitans nomment frêne.
M. Cartheufor place encore au .nombre des
végétaux qui donnent du fucre, l’aloës d Amérique,
karaguata magvet, metl, dont les habitans de
ia nouvelle Efpagne recueillent un fuc abondant
qu’ils font cuire.
Le même auteur fait mention, d’après Borru ;
chius, d’une efpèce d’algue-marine qui croît fur les
côtes d’Iflande, 8c dont les feuilles jettées par les
flots fur ie rivage, préfontent des grains de fucre
à leur furface, lorfqu’elles ont été expofées quelque
temps au foleil, ou qui, enfermées dans des
tonneaux après avoir été lavées 8c féchées , fe
couvrent d’une farine qui a la faveur du fucre.
Le célèbre Margraff a reconnu que plufieurs
racines communes en Europe étoient propres à
fournir un vrai fucre, femblable à celui qui fo
tire des cannes. Il en a obtenu , i°. de là bette-
blanche , cicla offcinarum , C. B. 2°. du chervi,
Jifarum dodonoei ', 30. de la betterave. Toutes ces
racines lui ont fourni un -fuc abondant, dans lequel
, à l’aide du microfcope , on pouvoit découvrir
des molécules cryftallifées, fomblables à celles
du fucre ordinaire. Pour -s’aflurer de la préfonce
du fucre, il mit ces racines divifées en digeftion
dans de l’efprit-de-vin bien reâifiè , fur le bain de
fable; il pouffa la chaleur jufqu’à faire bouillir; il
filtra l a liqueur encore toute chaude, 8c la mit
dans un matras à fond plat, qu’il plaça dans un
fieu tempéré ; au bout de quelques fontaines , il
trouva qu’il s’étoit formé des cryftaux au fond du
vaiffeau ; il les fit difloudre de nouveau, afin d’avoir
ces cryftaux plus purs. Par ce procédé , une
demi-livre de racines sèches de bette-blanche donna
1 once de fucre, la bette-rouge une once, 8c
le chervi une once 8c demie. Cette méthode eft
. très-propre pour eflayer fi une plante contient
du fucre ; mais elle feroit trop coûteufo pour l’obtenir
en grande quantité. Il fora donc beaucoup
plus court de tirer le fuc de ces racines par expref-
fion , de le clarifier avec du blanc d’oeuf, de l’évaporer
fur le feu , 8c de le faire cryflallifer comme
pour le fucre ordinaire ; c’eft ce qu’a fait le célèbre
Chymifte de Berlin , pouf une partie de fos expériences
, 8c dans la vue d’en aflurer les réful-
tats. M. Margraff a aufli tiré du fucre des panais ,
des raifins focs, 8c de la fleur de l’alo.ës d’Amérique.
En Thuringe , on tire des panais une efpèce de
fyrop dont les gens du pays fe fervent au lieu
de fucre , ils en mangent même fur le pain : il
jpaffe pour être un bon remède contre les rhumes
de poitrine, la pulmonie, 8c contre les vers auxquels
les enfans font fujets. On commence par
couper les panais en petits morceauxy on les fait
bouillir dans un chauderon, jufqu’à devenir affez
Çhymie, Tome /.
tendres pour s’écrafer entre les doigts ; 8c en les
faîfant cuire , on a foin de les remuer , afin qu’ils
ne brûlent point : après cela on les écrafo, oc on
exprime le fuc dans un chauderon, on remet ce
fuc à bouillir avec de nouveaux panais, on en exprime
le tout de nouveau ; ce qu’on réitère tant
qu’on le juge à propos. Enfin , on fait évaporer le
jus , en obforvant d’ehlever l’écume qui s’y forme,
on continue la cuiflon pendant 14 ou 16 heures;
ayant foin de remuer lorfque le fyrop veut fuir.
Enfin l’on examine fi la liqueur a l’épaiffeur convenable.
Si l’on continuoit la cuiflon trop longtemps
, la matière deviendroit folide, 8c forme-
roit du fucre. Màgaf. d’Hambourg, tome VIIJ.
Pour juger, combien de fortes de plantes différentes
tiennent le principe muqueux fucré, il fuf-
fit de confidérer, comme le dit M. Hermfladt, que
tous les fruits focs, tels que les pommes , les
poires, les prunes , les raifins,-les cerifos, les
figues 8c plufieurs autres, fo couvrent avec le
•temps d’une croûte blanche , qui eft un vrai fucre
qui n’auroit befoin que d’être raffiné. M. Gle-
; ditfch afliire avoir recueilli, fans travail, du fucre
de plufieurs troncs de choux 8c autres végétaux ,
8c M. Gerhard a obtenu du fucre cryftallifé d’un
extrait aqueux de raifin. N eue fl. Entdeck , &c. Crell,
part. IX.
On lit enfin dans les annales chymiques de
M. Crell ( janvier 1784}-, que l’on vient de répéter
en Hongrie les expériences de M. Jacquiti,
pour retirer le fucre des tiges du blé de Turquie,
8c qu’elles ont parfaitement réufli.
.Telles font les matières premières de l’acide
dont nous allons nous occuper , ou plutôt du
compofé végétal dont nous le retirons le plus ordinairement.
§. IV . De la manière d’obtenir T acide faccharin.
Si l’on n’a pas perdu de vue ce que j’ai dit au
commencement de cet article, on ne fora pas
étonné de voir retirer l’acide faccharin de bien
d’autres fubftances que du fucre ou des végétaux
qui en tiennent. Je donnerai d’abord le procédé
fur le fucre même, d’après M. Bergman , non que
ce fo it , comme il le dit, la matière qui le donne
le plus abondamment 8c le plus pur, mais parce
que c’eft la première fubftance dont on l’a retiré,
8c celle qui paroît le fournir le plus facilement.
L On met dans line cornue tubulée une once
( de 480 grains ) de fucre très-blanc pulvérifé, 8c
trois fois autant d’acide nitreux, dont lapefameur
fpécifique foit à-peu-près 1,560. Quand le fucre
eft diffous, 8c que les premières vapeurs rouges
font forties , on y adapte un récipient , 8c on
entretient un fou doux.
Il fo dégage, pendant l’opération , une grande
quantité de gas nitreux , 8c le mélange prend une
couleur brune ; alors on ajoute 3 onces du même
Mm