4V , A CI ble ces différentes manières d’opérer, je commencerai
par celle des Allemands qui réufliffent le mieux,
8c pafferai à la conversion du fer en acier, par voie
de cémentation.
De Vacier par la fontei
Comme l’acier de Styrie eft en très-grande réputation
depuis un temps immémorial, je vais détailler
la manière de le fabriquer près la Ville de Eifén-
Ertç , qui fignifie Ville de minerai de fer, à caufe
de l’abondance qu’en fournit une montagne voifine,
qui a 480 toîfes de hauteur perpendiculaire. Les minerais
s’y fondent par deux procédés, l’un en ré-
duifànt le métal ou fes parties régulines en fonte
claire, l’autre, en laiffant fuffifamment macérer ou
digérer les matières dans le fourneau,* pour que ces
parties métalliques fe débarraffent des parties étrangères,
d’où il arrive, comme aux forges catalanes,
que l’acier mêlé de fer fe coagule en maffe ou maffèt
au fond du fourneau.
Le fourneau fervant à réduire le fer en fonte coulante
fe nomme flojf-ofen , fourneau à couler, il
n’a que depuis 11 jufqu’à 12 pieds de hauteur;
fon diamètre dans le fond, 8c fuivant la dire&ion
du vent 8c des foufflets, eft de 2 pieds 10 pouces,
8c l’autre diamètre , qui eft dans le fens où fe fait
la percée, a deux pouces-de moins ; les parois circulaires
de ce fourneau s’élargiffent infenfiblement
depuis le fond jufqu’au tiers de fa hauteur, de forte
que fon diamètre, en cet endroit, eft d’environ trois
pieds, il diminue enfùite jufqu’à fa partie fupérieure,
ou gueulard, où il n’a plus que deux pieds de diamètre.
L’on eft dans l’ufage ici de battre au fond de ce
fourneau, environ un pied de brafque, compofée de
parties égales de charbon 8c d’argille, le deffus de
cette brafque fe trouve à peu près être au niveau
du fol de la fonderie. La tuyère, qui n’a que la grandeur
fuffifante pour y placer les canons des.foumets,
eiL faite avec de l’argille feulement, & placée de 1 <
jufqu’à 16 pou. au deffus de la brafque. Lorfque cette
tuyère efl endommagée, on la refait, ce qui arrive
plufieurs fois dans une femaine ; les bufes des fonf-
flets font difpofées de manière à porter le vent horizontalement
dans le fourneau , mais les foufflets qui
font de bois, & de 9 pieds { de longueur, font très-
inclinés fur le devant.
L’ouverture pour la percée a 4 pouces de largeur
& deux pieds de hauteur, on la bouche avec
de la terre graffe, o n .y laiffe dans fa partie inférieure
un trou que l’on bouche durant la fonte, 8c
que l’on ouvre pour faire couler la matière fur une
place préparée avec de la brafque, ce qui forme un
baflin d’un pouce feulement de profondeur & de 4
pieds de diamètre.
La fonte fe commence le lundi matin , l’on remplît
d’abord le fourneau de charbon de bois, il y en
entre environ 150 pieds cubes, on y ,m e t le feu,
•8c on fait agir les foufflets.
A c 1
Lorfque le charbon eft baiffé de quelques pieds :
on remplit le fourneau de charbon, & l’on y porte
tout de fuite du minerai de fer rôti à un feul feu
fans aucune caftine ni fondant. L’on fait la percée-
toutes les deux heures 8c demie, ou trois heures au
plus; le fer 8c le laitier coulent dans le baflin préparé
à cet effet, on bouche la percée avec une boule
d’argille, l’on jette de l’eau fur le laitier qui, comme
plus léger, prend le deffus, on l’enlève, on laiffe refroidir
le fe r , on le caffe en morceaux, chaque
coulée peut en fournir de 3 £ à 4 quintaux au plus;
cette fonte eft très-dure, blanche & fragile. Ce qu’il
y a de bien fingulier, c’eft que cette première fonte
eft toujours blanche jufqu’au mardi, environ midi,
que le fourneau étant échauffé, commence à donner
de la fonte tendre 8c grife; alors, la première tuyère
étant brûlée , l’on en fait une nouvelle auffl de terre
graffe bien pétrie; à cet effet, le Fondeur dérange
les foufflets, & démolit la vieille tuyère, en ôtant
tout ce qui eft vitrifié; durant ce temps, on charge
le fourneau, en obfervant, pour les premières charges,
de porter moins de minéral qu’à l’ordinaire, &
la même quantité de charbon, afin de réchauffer le
fourneau qui s’eft refroidi durant cette réparation qui
fe fait de la manière fuivante : l’argille pétrie eft mife
en boules, que l’on fait entrer mcceflivement dans
l ’ouverture que l’on veut réparer, l’on y en fait entrer
autant qu’il eft poflible, alors l’on perce dans cette
terre le trou de la tuyère avec un bâton fait exprès,
ce trou n’a que deux pouces de diamètre, &
on lui donne un peu de pente en devant du fourneau,
de forte que la direâion du vent qui, auparavant
étoit horizontale, plonge un peu. L ’on replace
les foufflets, & on les fait agir de nouveau; la fonte
que l’on obtient alors, eft griie, 8c eft bonne pour faire
du fer ; ^1 première, qui eft blanche, eft toute convertie
en acier ; l’on defireroit pouvoir faire plus de
fonte^grife afin d’en faire du ter, mais cette fonte
ne peut fe faire que pendant environ 50 ou 60
heures, au plus, durant la femaine, alors le fer s’attache
au fond du fourneau 8c coule difficilement;
l’on eft contraint de réparer la tuyère, 8c l’on n’obtient
plus que de la fonte dure 8c blanche, jufqu’au
famedi à midi que l’on ceffe la fonte. #
L ’on fond environ 400 quintaux de minerai par
femaine dans chacun de ces fourneaux, 8c l’on nous
a dit que l’on y confommoit aux environs de 600
mefures de charbon de 8 pieds | cubes, quantité
prodigieufe fur laquelle on ne peut compter, car les
ouvriers en prennent à leur volonté, fans favoir la
confommaiion. Chaque coulée donnant 3 ^ 4 4 quintaux
de fonte, il eft aifé de conclure que. chaque
fourneau n’en fait par femaine qu’environ 130 quintaux.
Prefque tous les minerais dont on fait le fer
8c l’acier à Eifen-Ert^, font fpathiques 8c rôtis à
un feul feu.
Nous avons déjà dit que, par le procédé qui vient
d’êtrè décrit, on obtient de la fonte blanche 8c de
la grife ; .comme cette dernière n’eft employée qu’à
faire du fer, 8c que ce n’eft pas ici Je lieu d’en parler*,
l’on a délayé de l’argille qui fournit àufli du laifier
en fe vitrifiant ; il faut que la loupe baigne dans le
laitier, elle n’eft jamais faite qu’après plus de trois
heures de travail, alors on la fort du foyer, an la
porte fous le marteau, où, fans la forger, on la
coupe en quatre morceaux, ces morceaux font chauffés
de nouveau fur un foyer, 8c ènfuite forgés au
marteau en groffes barres d’environ quinze lignes en
quarré, 8c trempés tout de fuite dans un çourànt
d’eau; on caffe ces barres en bouts, ceux qui, dans
leurs caffures, préfentent un peu de fer, font mis fé-
parément. Enfin, nous,dirons ailleurs comment l’on
donne la dernière perfe&ion à ces barres d’acier. Nous
avons détaillé îa méthode de faire l’acier à Eifen-Ertç
avec de la fonte blanche, nous allons donner le
procédé d’en faire en maffes coagulées dans les foür-
neaux où fe fondent les minerais.
Cette méthode de fondre, qui eft très-ancienne,
fe fait dans un fourneau que l’on nomme fluck-ofen,
fourneau à maffes; il diffère de celui des fiojf, dont on
a parlé, i°. en ce que n’y fai font point couler les matières
fondues, il n’y a point de trou percé, 20. en
ce, qu’il eft beaucoup plus grand, qu’il forme un
A C I 453
quarré long, un peu arrondi dans les angles, qui, au
fond du fourneau, a quatre pieds de. longueur ,8c
deux pieds 8c demi de largeur, prife dans la direction
.de la tuyère. La hauteur eft la même que celle
du fourneau des fiojf, 8c va de même un peu en
s’élargiffant jufqu’au tiers de fa hauteur, 8c enfuite
en diminuant jufqu’au gueulard. Les parois de l’un
8c de l’autre de ces fourneaux font faites fort Amplement
avec de la terre graffe bien pétrie ; celui cfos
maffes que nous décrivons ic i , a dans fa bafe, du
côté des foufflets, une ouverture d e4 pieds de largeur,
qui comprend toute la longueur de l’intérieur
du fourneau, 8c deux pieds 8c demi de haut, c’eft:
par là que l’on entre dans le fourneau, foit pour le
réparer, foit pour y battre la brafque, comme on
le fait à celui des floß'. L’on bouche exa&ement
cette ouverture ^vec de grandes briques encore toutes
molles, 8c l’on y forme la tuyère de la manière que
nous le dirons plus loin ; le fourneau étant bien fermé,
on le remplit entièrement de charbon, 8c l’on,
y commence auffi la fonte le lundi matin.
Lorfque le maître Fondeur préfume qu’il y a affez
de matières dans le fourneau pour en faire couler
le laitier, il fait un trou avec un ringard dans les
briques qui forment l’ouverture dont on a parlé ;
lorfqu’il ne coule plus de laitier par ce trou , on le
bouche 8c on l’ouvre de nouveau quelques heures
après.
L’on continue ainfi cette fonte jufqu’à ce qu’on
ait paffé 13 mefures de minerai grillé, contenant
chacune 3 pieds cubes, 8c pefant environ 350 livres.
Chaque mefure fait la charge du fourneau ; l’on n’y
emploie aucune caftine ni fondans ; la treizième mefure
de minerai étant chargée, on laiffe confommer
prefque tout le charbon qui eft dans le fourneau fans
y rien ajouter. Alors on recule les foufflets afin
d’avoir de l’efpace ; 8c pour lès garantir du feu ,
l’on met devant unè grande plaque de fer qu’on
arrofe prefque continuellement : on démolit le mur
de briques d’abord par fa partie fupérieure, deux
hommes avec des croards attirent 8c fortent les
charbons qui font reftés dans le fourneau , deux
autres jettent de l’eau deffus, il coule en même
temps des fcories 8c un peu de fer que l’on met
•de côté ; l’on en obtient ainfi 6 à 7 quintaux qui
font enfuite portés aux alfineries , lorfque la maffe
ou loupe eft à découvert, à l’exception feulement
du milieu où on laiffe un peu de charbon, pour les
raifons qu’on dira ci-après. On emporte 'dans des
paniers tous les charbons qui ont été éteints par
l’eau : ces charbons fervent à griller le minerai ; l’on
démolit le reife du mur en briques , l’on introduit
en deffous de la maffe ou loupe un gros levier de
fer avec lequel on la fouiève fuffifamment pour
pouvoir y paffer une des branches d’une grofle tenaille
à craffipon, à laquelle on attache une chaîne
de fer, qui, paffant à l’autre extrémité de la fonderie
fur un cylindre vertical mobile, vient envelopper
l’arbre de la roue qui fait mouvoir les foufflets
; l’on met l’eau fur cette roue, la chaîne traîne