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plus habituellement, n’a pas feulement l’inconvénient
xl’abforber certains gas, elle fournit fouvent d’elle-
même de l’air commun; il faut favoir encore que
l’eau ne ferme pas exactement les vaiffeaux, c’eft-à-
dire qu’elle n’intercepte qu’imparfaitement la communication
de l’intérieur à l’extérieur ; c’eft ce qui
avoit fait penfer à M. Prieftley que le gas azotique
& le gas hydrogène perdoient par l’agitation dans l’eau
les propriétés qui les diftinguent de l’air refpirable.
I l eft bon d’être averti de ces chofes pour ne pas
fe laiffer induire en erreur ; on conçoit, par exemple,
que toutes les fois qu’il y a vuide ou feulement
raréfàélion au deffus de l’eau, l’air qu’elle contient
s’en dégage à l’inftant ; il eft encore très-vraifem-
blable que quand l’eau fe trouve en contaél avec un
gas qui a plus d’affinité avec elle que l’air commun,
celui-ci eft rendu libre pendant que l’autre eft abforbé.
D ’où l’on conclura facilement que dans des expériences
délicates ou que l’on veut rendre décifives,
il convient de n’employer que de l’eau privée d’air
par l’ébullition , & même d’en éprouver une portion,
en y mettant un cryftal de fulfàte de fer, qui eft,
comme je le dirai ailleurs, le réaélif propre à découvrir
la préfence de l’air vital. On conclura en
fécond lieu, que les gas ne doivent pas être gardés
long-temps fous des récipiens , ou dans des vaiffeaux
Amplement plongés fous l’eau d’une cuve qui ait
fa lurfàce expofée à l’air ambiant, mais qu’il faut
tenir l’orifice de ces vaiffeaux dans du mercure, ou
du moins enfermer les gas dans des bouteilles, qui
bouchent bien, dans lcfquèlles on laiffe à deffein
toujours un peu d’eau, & que Ton a foin de tenir
toujours renverfées fur leurs bouchons, ou l’orifice
en bas. Je puis affurer, d’après une longue pratique,
qu’au moyen de ces précautions on conferve affez
bien les gas pour les avoir toujours prêts au befoin,
& auflï purs que fi on venoit de les recueillir ; je
vois que les expériences de M. Prieftley s’accordent
fur ce point avec mes obfervations ( Continuation,
6»c. vol. III. fetf. 2? ). Je ne diffimulerai pas cependant
que j’ai quelquefois éprouvé , non fans furprife,
que du gas hydrogène des - diffolutions métalliques
tenu de cette manière dans une bouteille renverfée
& à demi remplie d’eau avoit perdu, au bout de
quelques mois, la propriété de détonner & même
de s’allumer, quoiqu’il n’y eût aucune diminution
fenfible dans le volume du gas, qui donnoit alors
jufqu’à 0,40 d’abforption par fon mélange avec le
gas nitreux. Je me propofe d’indiquer ailleurs la
caufe de ce phénomène ; qui n’a certainement pas
lieü pour le gas hydrogène obtenu par la diftillation
des végétaux, du charbon de pierre, &c. car j’en
conferve ainfi depuis plus de cinq ans, qui s’enflamme
encore comme le premier jour.
A I R Les autres gas que l’on peut tenir en provifioa
dans ces bouteilles, font principalement l’air v ital,
le gas azotique, le gas-nitreux & le gas acide carr-
bonique lui-même, qui eft trèsrbien enfermé par,
l’eau qui en eft faturée.
Je n’ai pas befoin de dire que l’eau de la cuve
pneumatique doit être renouvellée fréquemment, ou
même à chaque expérience, à moins qu’on ne foit
en état de fe rendre compte que les précédentes
opérations n’y ont rien laiffé qui puiffe influer fur
le réfultat de celle qu’çrn fe propofe ; c’eft ce qu’il
n’eft pas toujours aifé de décider, & que l’on ne
doit plus mettre en qtieftion , dès que l’appareil a
fervi à recueillir ou à tranfvafer quelques-uns des
gas qui s’uniffent à l’eau.
II. Il n’eft pas auffi facile de renouveller le mercure
, auffi cela eft-il bien moins néceffaire, il fuffit
de temps en temps de le filtrer dans un entonnoir
garni de ferge pour en féparer la pouffière dont il
s’eft chargé , & fouvent auffi une portion qui a
éprouvé un commencement d’oxidation, qui lui donne
une confiftance approchantI de celle de l’amalgame,
& le difpofe à falir les vaiffeaux en s’y attachant.
Quoique le mercure foit en genéfal d’iin ufage plus
fûr que l’eau pour les expériences pneumatiques ,;il
y a néanmoins beaucoup de circonflances dans lef-
quelles il pourroit occafionner des méprifes fi l’on
n’étoit fur fes gardes. Par exemple : fi la conditioft
de l’expérience eft d’exclure abfolüinent la préfence
de l’eat#, lé mercure ne la remplit 'que lorfqu’on l’a
fait chauffer; on fait encore que dans plufieurs opérations
fur, les gas, il y a produéflon d’acide, il
peut donc agir fur le mercure , & le gas~hyclrogène
qui accompagne les diffolutions métalliques fera un
produit accidentel ou étranger à l’expérience ; c’efl:
ce qui arrive toutes les fois qu’il y a oxidation d’une
portion de mercure , & elle eft d’autant plus fréquente,
que les gas & l’air commun lui-même peuvent
diffoudre du mercure , fuivant les expériences dont
MM. Monge 6c Vandermonde ont rendu compte à
l’Académie en 1781 (1). Enfin , toutes les fois qu’il
y a du mercure oxidé ou calcipé, il devient fuf-
ceptible d’abforber 6c de fixer une quantité" quelconque
de gas acide carbonique.
De tout ceci il réfulte qu’il feroit bien à defirer
que l’on pût trouver, pouy enfermer les gas, une matière
fluide qui fût à leur égard auffi inerte & , fi
j’ofe le dire , auffi impaffible qu’eft le verre pour
la plupart de nos liqueurs les plus aéiives ; cependant
on ne peut guère l’efpérer : les huiles , le
vinaigre, Y,eau gommée ou fucrée , les diffolutions de
certains fe ls, Ÿalcohol pur ou chargé de quelque réfine,
m’ont bien préfenté dans plufieurs circonflances des
(1) J’ai-tenu pendant quelques jours deTair commun renfermé fous une grande cloche de verre plongée dans le mercure,
& fous laquelle j’avois placé auparavant une petite capfule remplie d’eau de chaux j il fe forma autour de la'capfule un
cercle très-marqué d’oxide jaune mercuriel. 11 faut obferver que ces vaiffeaux étoient expofés une partie du jour aux
rayons du foleil, & que cette circonftance y occafionnQÎt de fréquentes viciflitudes de raréfaftiçn 8c de cgndenfation.
• n avantages
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avantages réels \ comme de prendre mbins facilement
le gas carbonique > de fe dépouiller plus complètement
d’air commun; mais tous ces fldides ont auffi
leurs inconvéniens qui dépendent de leurs propriétés
particulières. C’eft donc à ,1a fagacite du Phyfîcien à
vaincre ces difficultés, en choififlant celui qui convient
à l’objet de fes recherches, en tenant compte
de l’effet qu’il ajoute aux résultats, en féparant cet
effet par la répétition de l’expérience avec des fluides
différens.
I I I . Une autre clrconftance non moins embarraf-
fante dans la plupart de ces opérations, eft le mélange
inévitable de l’air commun des vaiffeaux avec
les gas que l’on fe propofe de recueillir. Ainfi, quand
on met dans un flacon ou dans une bouteille à fi-
phon les matières néceffaires pour produire du gas
ccide carbonique , du gas hydrogène , &c. on eft
bien dans l’ulage de n’engàger le bout du fiphon
fous le récipient qu’un certain temps après que le
gas a commencé à paffer ; mais il faut fe garder de
croire que l’air refté dans le flacon forte feul, ni
qu’il puiffe être entièrement expulfé, : les expériences
dont j’ai rendu compte à l’Académie de Dijon(Def-
cription de l’aérojlate, &c. p. $$ 6* fu iv .) démontrent
au contraire que cet air fe mêle au gas dans une
forte de progreffion relative aux quantités de l’un
& de l’autre fluide. Leur pefanteur refpeélive ne peut
pas même faire juger sûrement leur pofition ou l’ordre
dans lequel ils font expulfés, parce qu’il y a , comme
nous le verrons ailleurs, une affinité capable de vaincre
la différence de pefanteur qui tend à les féparer.
C ’eft ainfi qu’une bouteille remplie de gas acide carbonique
& laifféefans bouchon, ne contient plus , au
bout de quelques jours, que de l’air commun, quoique
celui-ci foit réellement plus léger. M. Prieftley a ob-
fervé que le mélange d’un tiers d’air vital & de deux
tiers' ae gas hydrogène confervoit la propriété de
s’enflammer, en quelque point qu’on portât l’étincelle
éle&rique, quoiqu’il eût été fait douze heures auparavant,
& que le vaiffeau eût été tenu en repos dans
une fituation perpendiculaire ( Continuation , &c. tom.
III. feft. 47. ) J’ai tenu pendant un mois en repos 114
pouces cubiques de gas hydrogène, & pareil volume
de gas acide carbonique, renfermés dans un vaiffeau où
•je pouvois faire entrer de l’eau par le bas, & par
conféquent expulfer fans agitation le gas le plus léger
par un fipnon placé à la partie fupérieure : tout
a brûlé jufqu’à la dernière bulle des 228 pouces cubiques.
En parlant de ia manière de remplir les globes
àéroftatiques, j’ai annoncé que j’étois parvenu avec
M. de V irly à déplacer tout Amplement l’air commun
du globe de verre par le gas hydrogène, fans
qu’il y eût de mélange, du moins en quantité fuffi-
iante pour le rendre fufceptible de détonnation ;
mais cela ne nous a pas empêchés de reconnoître
l’affinité qu’ils ont l’un avec l’autre, & dont l’a&ion
fut Amplement ralentie par l’attèntion que nous
Avions eu de porter directement le gas hydrogène
haut du globe , fans l’obliger à traverfer la
Çhymie% Tome, ƒ,
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màffe du fluide plus pefant ( Defcriptîon de paéroj-;
tate% &ç. p. 16. j y
IV. Plus la matière que l’on traite eft fubeile Si
fugace, plus pn doit apporter de précautions pour
ne pas fe laiffer furprendre par quelque accident. La
propriété qu’ont les veff.es des animaux de .ço.ntèfiir
l’air , les a fait regarder, dès les premiers temps de
ces expériences, comme des vaiffeaux très-appropriés
8c très-commodes, fur-tout à caufe de leur
flexibilité qui permet de. les vu-ider par expteffion
& d’en porter le gas où l’on veut, au moyen d’un
ajutage ou d’un tube quelconque fixé à leur orifice.
Cependant on n’a pas tardé à s’appercevolr qu’elles
étoient fujettes à tamifer l’a ir , 8c même qu’elles
étoient altérées à la longue par certains gas. Ces foup-
çons vagues font devenus fous la main laborieufe du
célèbre Prieftley des conclnfions rigoureufes 8c importantes
( Continuation . &c. vol. III. feEl. 26). Le
précis que j’en vais donner mettra fur la voie de dif-
tingùer les opérations dans lefquelles les veffies peuvent
être employées, & fixera en même temps la
mefure de la confiance que l’on peut prendre dans
I les effets décrits par les Chymiftes les plus exa&s.
Le fang noir mis dans une veffie exactement fermée
par une ligature 8c laiffée à l’air libre, reprit
la couleur rouge à fa furface, précifément commet
s’il eût été en contaCl immédiat avec l’air.
Une veffie bien ficelée contenant 20 mefures de-
gas nitreux, ayant été placée fous un récipient con-r
tenant 40 mefures d’air commun ; au bout de trois
jours , il y avoit déjà abforption de 6 mefures d’air
& de 11 mefures de gas ; lé feptième jour il ne-
reftoit que 31 , 5 mefures d’air commun qui n’étoit
prefque plus que du gas azote , & 4 , 5 de gas
nitreux qui n’agifloit que foiblement fur l’air ; le
vingtième jour l’air fe trouva réduit à 28 mefures
qui ne contenoient plus de gas nitreux, puifqu’elles
n’eurent aucune a&ion fur l’air commun.
Une veffie contenant 25 mefures de gas hydro
gè/ie fut introduite dans un récipient qui contenoit
123 mefures d’air vital: trois femaines après, il n’y
avoit plus dans la veffie que 2 mefures de gas qui
ne s’enflamma plus, & qui éteignit la bougie ; l’air
vital avoit été diminué de 7 mefures, il fut reconnu
, à l’eudiomètre, d’une qualité très-inférieure,
& il étoit mêlé de 0,05 de gas carbonique. Je reviendrai
dans la fuite de cet article fur ces phénomènes
dont ,1e célèbre Académicien de Londres tire
des conféquences que je ne puis admettre.
Une autre fois, il effaya, au bout de deux jours
feulement, par l’inflammation, tant le gas de la
veffie que l’air du récipient, & l’un 6c l’autre firent
explofion comme le mélange de l’air vital avec, le
gas hydrogène. *
Après cela il eft d’autant moins permis de douter
de la tranfmiffion des gas à travers les veffies dans
plufieurs circonflances , que M. Prieftley s’eft affuré
que celles qui avoient fervi à ces opérations étoient
tout auffi imperméables à l’air qu’auparavant, M. de