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pas : au contraire, les difproportions font fi grandes &
ii confiantes, qu’il eft impofiible de les attribuer à
cette imperfection accidentelle de la manipulation
qui produit dç petites variétés dans les rélultats. On
n’imaginera pas fans doute que la différence de 74
grains que j’ai obfervée entre l’adliéfion de l’or_■ &
celle du bifmuth au mercure, que celle de 32 grains
entre l’adhéfion de l’argent & celle du plomb au
même fluide, &c. quoique ces métaux s’en féparent
fenfeblement mouillés , puiffent être rapportées à une
femblable caufe.Les expériences de M. Achard ne
font pas moins décifives à cet égard ; il fuffit de jeter
un coup d’oeil fur fes Tables, pour fe convaincre
que les variations dépendent d’une propriété étrangère
à la cohérence du fluide, que ces variations
affeétent une progreflion correfpondanteà la denfité
du folide, ce qui doit être dans notre hypothèfe,
ce qui ne devrait pas être dans le fyftême de l’ob-
jeCtion ; en un mot, que dans fix. cents elfais fur
trente fluides, il ne-«■ ’en efl pas trouvé un feul dont
les réfiiltats aient gardé cette uniformité qu’annonce
la rupture d’une Golonne égale d’une même fubftaiice.
Avec l’eau, la différence a été d e -80 à .101 ; avec
l’acide vitriolique, de 104 à 199 ; avec l’acide nitreux,
de 85 à 130 ; avec l’acide muriatique, de 83 à 164.
Xes différences font moins confidérables dans les
colonises des liqueurs volatiles, ainfi que l’on doit
s’y attendre, par la -raifon que j’en ai donnée plus
h au t, que leur peu de cohérence ne donne pas le
temps de mefurer toute la force d’adhéfion. Quelquefois
ces. différences , quoique foibles, s’accordent
fl bien avec celles d’un.autre fluide analogue, comme
dans les colonnes des huiles , qu’elles ne peuvent
encore être regardées comme l’effet des irrégularités
de ^expérience..
Il y a donc très-certainement une force étrangère
à la cohéfion que l’on peut mefurer dans ces expériences
, flnon rigoureufement, du moins par com-
paraifon & de manière à en tirer des rapports fo-
tisfaifans. Le P. Béfile femblè le reconnoître, lorf-
qu’il foutient ; ou, pour mieux dire, lorfqu’il prouve
que la çohéfion ne peut être exa&ement déterminée
que quand on. emploie des tubes qui ne reftent pas
fimplement mouillés, mais qui retiennent tout le
fluide qu’ils avoient reçu , de forte que la féparation
s’opère dans une ligne parallèle à la bafe du
cylindre, Voyeç. Cohésion.
Cette force n’eft .pas. la pefanteur du. fluide que
remporté le difque ;.la. portion de ce fluide ne varie
prefque pas avec lés fluides.qui .ne laiflent point de
traces fenfibles de diffolution .; même .avec les métaux
qui s’amalgament avec le mercure', i l j i ’y a
nulle proportion entre la petite augmentation de
poids qui en réfulte, & la grande réfiftance a là fe-
paration , quoiqu’on maintienne volontairement le
conta# plus que l’opération ne l’exige ; avec les
acides, fe folide entamé par la diflblution perd plus
de fon propre poids, qu’il n’en acquiert par fe. fluide
qui le mouille, & nous avons vu précédemment que
Celâ u’empêchoit pas l’acidç vitriolique de manifejf-
A D H
ter par l’adhéfion une affinité plus grande avec fe
marbre qu’avec 18 autres folides.
On demandera fans doute comment il peut fe
faire que ce foit 1e fluide qui fe fépare , & que ce
foit Tadhéfion au folide qui foit mefurée ? Il n’eft
pas aifé de donner une folution rigoureufe de ce
problème j mais, indépendamment de ce que la
pofîibilité efl: démontrée par une fuite d’obfervations,
cet effet peut fe concevoir de diverfes manières.
Que l’on applique, l’üné fur l’autre deux glaces
polies , telles qu’on les trouve ordinairement, elles
n’auront qu’une adhérence allez fbible ; que l’on
les mouille & qu’enfuite on cherche à fes écarter
dans une ligne bien perpendiculaire à leur-plan, 011
éprouvera une réfiftance non-feulement plus: confi-
dérable,mais qui furpaffera-de beaucoup toute efti-
mation de la cohérence de l’eau, par quelque procédé
que ce foit : voilà ce qui arrive quand la couche
d’eau intermédiaire efl aufli mince qu’il eft poflible,
ce qui n’empêcherait pas de dire que la féparation
fe foit dans la couche . d’eau elle-même , puifque les
deux glaces reftent mouillées^, & qui pourrait déjà
foire penfer que/malgré'cette circonftànceyla force
produite par le conta# du verre au verre fe combine
ici avec la force de cohéfion du fluide in-
[ terpofé.
I Mais il y a un moyen de rendre cette expérience
encore plus concluante ; au lieu de mouiller fimplement
fes deux glaces, que l’on laiffe entre elles
une lame d’eau telle qu’au premier effort que l’on,
foit pour fes féparer, on voie cette lame d’eau fe
retirer tout autour fous. 1e difque, & préfenter une
épaiffeur fenfible ; on obfervèra que ce premier
; écartement des glaces s’opère avec la plus- petite
force, quel’intenfité de la réfiftance ne commence
que quand toute l’eau eft raffemblée fous le difque,
que la féparation fe fait alors bien manifeftement
dans la tranche d’eau,. & cependant qu’elle exige
une force très-fupérieure à la réfiftance ordinaire
de ce .fluide.
J’ai pris une glace taillée en fond de 36 lignes
de diamètre; je l’ai appliquée, le plus exa#ement
que j’ai p u , à une autre glace ; je ne fuis pas parvenu
à. produire une .adhéfion au deffus de 13 grains :
j’y ai mis une feule goutte d’eau que j’ai- étendue
pour en couvrir toute la furfoçe, & n elle a été de
nouveau appliquée fur 1e même plateau de glace ;
je n’ai pas tardé à m’apperçevoir qu’il, me folloit
une forte balance & non un trébuchet pour mefu-
rer l’adhéfion qui en réfultôit ; 1e plateau de glace
pefant près de 10 onces a été enlevé ; après avoir
chargé fes bords, j’ai continué d’ajouter des contrepoids,
& la féparation ne sfeft faite que lorfqu’il y,
a eu dans 1e baflirt oppofé; 4.1 onces 7 gros
Une autre fois || au lieu^d’une feule goutte d’eau 9
j’en ai mis entre les deiix glaces une fuffifante quantité
pour former une lame de l’épaiffeur d’un 10®.
de ligne, de manière qu’elles coûtaient très-facilement
l’une fur l’autre ; alors 8 onces j gros 39 grains
ont fufïi pour vaincre la réfiftance à la féparation.
A’ D H
Si l’on cherche maintenant par fe calcul quelle
ferait la réfiftance d’un difque de 36 lignes de diamètre
en contaa avec une maffe d’eau frnvant le
nrocédè ordinaire, on trouve, en prenant pour bafe
leftimation de la Table XV pour un difque de 18
lienes de diamètre, que celui-ci ferait emporté par
flS contrepoids de 364! grains ; car 314 quant du
diamètre 18 : 1296 quant du diamètre 36 :: 91 : 5 6 4 .
D’où il réfulte que, dans, la première de ces deux
expériences, la réfiftance eft 66 fois plus grande, &
près de 13 fois dans, la fécondé. On n imaginera
certainement pas que la puiffance, qui lie entre elles
les molécules d’eau, puiffe varier dans une proportion
aufli prodigieufe ; cependant la féparation
s’opère bien encore dans la couche d eau ; cela eft
fur-toutmanifcfte dans la fécondé expérience : il eft
donc démontré que l’effet que Ton prend pour la
force de cohérence, varie en raifon de la force du
contaa du fluide qui fe rompt aux folides qu’il
touche. - . . .
D ’autre part, fi: l’on fe reprefente le cylindre
fluide, foulevé au deffus .du niveau de la maffe,
comme un foifceau de plufteurs files de petites fpheres
fufpendues perpendiculairement les unes au deffous
des autres en forme de chapelets, on peut imaginer
comment la cohérence paraîtra varier à raifon de
l’adhéfion au corps folide ; car; fi. on .fuppofe que
1e nombre de ces files foit = ioo , que le difque
folide A du même diamètre ne puiffe recevoir le
conta# que de 50 de ces fpheres ; que le difque
folide B admette au contraire le conta# de 80 de
ces molécules fphériques ; il eft évident que, la rupture.
fe foifant toujours dans 1e fluide, elle fe fera
plus promptement , ou exigera un moindre effort
pour le difque A , que pour le difque B ; par la raifon
qu’à poids égaux ajoutés pour détacher ces difques,
ou , ce qui eft la même chofe, a égalé hauteur du
cylindre d’eau foulevé, la charge qu éprouveront
fes molécules voifines de celles contiguës au folide,
fera en raifon inverfe du nombre des molécules en
conta# immédiat avec ce folide ; & qu’ainfi la puiffance
, qui, dans 1e premier cas, tend a fepafer de
ces molécules la maffe entière du cylindre, & qui
agit ainfi dire#ement fur la cohérence; fera a la
même puiffance dans fe fécond cas : : 50 : 20. On
ne fera pas embarraffé après cela d’expliquer comment
, la féparation faite, le difque fe trouve mouillé
par-tout uniformément, c’eft un fécond effet de
l’attra#ion abfolument analogue au phénomène que
préfente toute matière vifqueufe, lorfqu’etant déchargée
de la plus grande partie de la maffe qui l’entrai- .
noit, elle remonte fpontanément & reprend l’équilibre
de cohérence fur elle-même, & d’àdherence
au corps qu’elle touche.
Nous pouvons donc conclure maintenant que la
méthode du D r. Taylor eft exa#e ; que la force
qu’elle mefure eft véritablement l’adhéfion & une
adhéfion indépendante de toute preffion de l’air ; ;
qu’elle en donné une évaluation rigoureufe ou abfo- ]
Çhymie, Tome 1%
lu e , toutes fes fois que 1e folide ne refte pas mouillé ;
que , lors même que l’adhérence du fluide au folide
l’emporte fur la cohérence des parties du fluide,
pourvu que celle-ci ne foit pas très-foible, les re-
fultats de l’expérience participent tellement de la
force d’adhéfion, qu’ils peuvent être coiifidérés comme
des rapports très-rapprochés de l’intenfité de cette
puiffance ; que ces rapports peuvent être déterminés
même avec des fluides qui diffolvent les fojides, foit
par l’application des furfoces, foit par l’immerfion
fpontanée des cylindres à la .mâniére deM. Dutour,
qui paraît devoir laiffer moins de prife à l’a#ion.
répulfive dés gas ; que cette puiffance ne peut varier
qu’en faifon des points de conta# & .de.1 aptitude
des figures des parties élémentaires à en-augmen-
ter ou diminuer la fournie ; enfin, que tous ces effets
procédans de l’attra#ion procliaine, dépendans manifeftement
de la même caufe qui produit les affinités
, correfpondans déjà fenfiblement aux affinités ,
leur obfervation peut nous conduire à découvrir, à
comparer, à exprimer en nombre lés rapports d’affinités.
. : ' ,A
Convaincu de l’utilité de ces recherches pour hâter
fes progrès de la Chymie-phyfique, je n’ai' pas dû
négliger de mettre en : évidence les principes qui
leur fervent de. bafe, d’autant plus que quelques-
uns des plus célébrés Chyfniftes paroiflent encore
peu diipofés à les adopter. ; voilà ce qui m’a engagé
dans une difcuffion que l’on ne s attendoit peut-
être pas à trouver dans cet Ouvrage. Je la terminerai
par un exemple de la maniéré dont ces principes
peuvent être appliqués a la Chymie, & de
ce qu’il faut obferver pour en tirer dè juftes con-
féquences.
Dès mes premières expériences , j’eùs occafion de
reconnoître que le verre adhérait plus à l’eau qu’à
là diffolution de potaffe ; comme il ne s’agit pas ici
de potaffe cauftique, mais de potaffe faturée en
grande partie d’acide méphitique, cela n a rien d e-
tonnant, puifque les Chymiftes favent que l’eau
chargée d’acide méphitique décompofe fur-le-champ
la liqueur des cailloux. Si on confulte à ce fujet les
Tables de M. Achard, on pourra juger au premier
coup d’oeil que nos obfervations ne s’accordent pas ;
i l’adhérence du verre à l’eau diftillée y étant évaluée
a 9 1 ,. &. celle du même difqüe de verre à la
liqueur alkaline à 105 ; la vérité eft néanmoins que
nos réfultats concourent à établir la même différence
d’attraétion éle#îve. En effet, fi l’on tient compte,
çomme on 1e doit, de la denfité , on voit que, pour
que l’affinité fut feulement égale , il faudrait que
■ ceHe du verre au mephite alkalin fut de 124 , car,
1000 denfité de Veau : 1368 (Unfitè de la liqueur alkaline
: : 91 : 124,40. La force d’adhéfion de la dernière
eft donc réellement plus foible, & on l’aura
plus foibfe p£r expérience comme par le calcul, fi
on emploie, comme je l’ai fait, mie liqueur alkaline
moins -concentrée ; qu’elle foit délayée au point
de ne donner au pèfe-liqueur que 1050, le rapport
dè fon adhéfion à celle de l’eau pure fera, pour.