
544 A F F ties de celle-ci font plus attirées fur elles-mêmes.
30. On ne doute plus depuis Newtoh, que ce ne
cation direPe de là loi générale de la gravitation aux
affinités', c’eft-à-dire,.. en calculer les effets d’après
la loi du quarré des diftances, il en eft de même de
l’afcenfion des liqueurs dans les tubes capillaires, ou
entre deux plans pofés parallèlement à une très-petite
diftance ; ce qui a fait croire à quelques-uns que la
loi qui. détërminoit les cohéfions, les affinités , étoit
: auffi celle4 qui convenoit à , cedernier phénom ène ;
mais ce fimp.le rapprochement exclut encore l’idée
d’une puiffance qui né réçoit plus d’intenfité que
. dans là condition du contaél, puifgue le tube capillaire
foit l’attra&ion qui détermine la figure ' Iphérique
qu’affe&ênt les fluides, & même lés corps qui paflent
de l’état fluide à l’état folide ; il y a cependant un
phénomène très - familier, qui préfente une exception
à cette lo i , c’eft la cryjlallifatio/i. Ici ' les molécules,
au lieu de fe difpofer régulièrement & comme
par couches concentriques autour d’un centré , de
maniéré que le centre de gravité foit àufli le centre
de figure delà mafle, engendrent par leur réunion
dès tétraèdres, des cubes , des rhombés, des oélaëdres,
des prifines allongés , en un mot, des polyèdres
de toiite efpèce ; & même nous verrons que par une
manipulation appropriée;, on eft parvenu a découvrir
ces formes coimpofées de differens plans réguliers
, jufques dans l’intérieur de; ces petites mafles
métalliques liquéfiées par lé fe u , lefquèlles ne pré-
fentent extérieurement qu’uiie forme arrondie, quand
on n’interrompt pas l’aâion des forces qui tendent
à en former des aggrégats fphériques. Voÿe^ C r y s -
t a l l is a t io n .
! Ces cryftallifations font bien finement des effets
de l’attraélion réciproque des molécules crÿftallinés,;
!& même lés effets les plus palpables de cette püif-;
fance ; mais pour çétte fois elle eft évidemment mo-.
f difiée par la figuré ; je n’en donnerai-ici d’autres
preuves que la variété de configuration des maffes
que produit l’aggrégation de ces molécules, & cet
écart'de la loi générale de gravitation & même de
cohéfion , fuivant laquelle les molécules d’un fel
quelconque ( abftraâion faite de, leur arrangement
intérieur ) devroient fe grouper extérieurement en
maffes fphériques , toutes les fois qu’elles féroient.
abandonnées à leur àttràétion réciproque. Or f i . la
figure des élémens cryftallins influe ici àflez puif- '
fàmment pour changer l’ordre des attrapions , quand
on ne confidère que les maffes & les diftances efti- 1
mées du centre des maffes, pourquoi ne croirions-
hous pas que les divers degrés d’adhéfion, de cohé-
fion & d’affinité ne’ font auffi que les effets de la;
même propriété générale de la matière , c’eft-à-dire
de la même puiflàncé, fuivant la même , loi , modi-i
fiée de mêmè par la, figuré ? Il n’y a ici ’d’autre différence
, fi ce n’eft que. les produits de la cryftal-
lifation frappent nos y e u x , au lieu que les atomes
fur lefquels s’exercent les affinités., échappent à tous,
nos fens. On voit même au premier coup d’oeil
que les phénomènes. d e. la cryftallifation ne peuvent
dépendre non plus d’une loi particulière, telle qu’on
la fuppoferoit pour le .contaél ; car, quoique le fluide
diffolvant dans lequel les élémens cryftallins font
fufpendus, ne ceffe pas d’être contigu au cryftal
qui s’y forme, & qu’il puiffe conféquemment les lui'
tranfmettre prefque fans intervalle, il y a pourtant
néceflàirement un inftant on la dernière molécule qui
complète un cube de,fel commun, femeut par fa-
’ propre affinité, avant que de recevoir le contaél
immédiat qui doit la fixer.
’ 4°. Si l’on n’a pu jufqu’à préfent faire une applif
ne retient pas feulement les molécules qu’on y
a portées, mais qu’il les attiré réellement avant de
les.toucher, c’eft-à-dire à une diftance donnée ; &
il faut bien que cette attraction s’ex erceà une dif-
tancè même très-fenfiblë, car, il fliffit dè préfenter
l’orifice du tube à la furface de la liqueur, pour qu’elle
y monte fpontanémerit jufqu’au point pu le poids de
fa mafle doit faire équilibre'a.'la force qui l’attire.
Il eft certain que cet effet ne peut avoir lieu fans
qu’il y ait un inftant où la matière du tube agit déjà
efficacement fur des molécules qu’elle ne touche pas
encore. Ainfi,. ce phénomène, qui troublé auffi'en
apparence l’ordre de la gravitation uniyerfelle, ne
dépend pas plus que l’affinité, d’une force particulière
pôiir le contaéf ; il ne paroît pas plus fufoeptible
de l’application ^dë la loi du quarré des diftances ; &
fi l’on ajoute qu’il varié de même fuivant la qualité
des fubftances , & fans qu’il y ait aucun rapport
1 avec les maffes, il devient difficile dé fe refufer à
penfer que tout dépend ici des circonftances différentes
dans léfquelles s’exerce la même puiffance ;
; qu’il n’y a , dans tous ces ças, qu’unè irrégularité
apparente, parce que ces circonftànçes fe dérobent
à nos fens ,> tandis qu’ils font étonnés de la grandeur
des effets ; en un mot, quêl’attraélion ne varie réellement
que par les diftances, & les diftances par
les figures. Sans cela ce ne feroit plus feulement une
loi particulière pour le contaél, ce feroit une loi
-tout à la fois pour le contaél & pour des diftances
bornées qu’il faudroit admettre ; ce feroit un principe
d’un nouvel ordre qu’il faudroit imaginer, ,tout-à-
fait étranger à la gravitation ', puifqu’il ne garderoit
plus les rapports ni des mafles, ni des diftances;
c’eft-à-dire^ au lieu d’une propriété générale &
confiante de la matière, autant de caufes occultes
qu’il y a d.e fubftances différentes.
5°. Nous, n’avons jufqu’à préfent aucune connoii-
; fance de la denfité des parties qui conftituent les
élémens des corps, & comme le dit très-bien le célébré
Macquer (au motpefànteur) , nous ne* pouvons
en juger par la. denfité des aggrégés formés de leur
union, parce qu’il eft très-poffible qu’un corps dont
les parties primitives n’ont que fort péu de dennte,
devienne par leur union un aggrégé qui en ait beaucoup
; il fuffit pour cela que ces parties foient de
nature à avoir lés unes avec les autres des.contafts
très-intimes'dans toutes leurs faces. ; Par la meme
'.raifon un compofé peut n’avoir que fort peu de
denfité, quoique fes parties compofantes en aient
beaucoup
Vesucoup ; 1 « t pour cela que leur configuration
(hit telle, qu’elles ne puiflent avoir que peu de con-
t ià les unes avec les autres. A in fi, quoique le
cuivre en mafle fenfible ait moins de denfité que
l’argent, il eft frès-poffible que fes parties primitives
intégrantes en aient beaucoup plus que celles de
l’argent ; il eft également poflible que les parties du
cuivre , quoique moins denfes, exercent une aétion
plus puiffante fur les parties d’un troifième corps,
& qui foit équivalente à celle d’une plus grande
denfité, fi leur configuration les difpofe à fe toucher
en plus de points ; car nous concevons très-bien
que les contaEls peuvent fuppléer à la denfité. Que Ion
demande après cela pourquoi le cuivre eft plus attiré
que l’argent par l’acide nitreux ? On en découvre
une raifon poflible & fuffifante, ou dans la denfité
fupérieure des parties du premier de ces métaux,
ou dans une configuration plus favorable au contaél.
fit dans l’un de ces cas, comme dans 1 autre , nous
pouvons concevoir en même temps & comment 1 ,at-
traélion d’affinité paroît croître dans une proportion
auffi fupérieure à celle de la gravitation, & pourquoi
cette force varie dans des degrés fi fenfibles,
fins aucun rapport "avec les mafles, queftion qui
demeurera touiours infoluble dans l’hypothefe d une
Je pourroîs donc conclure de ces réflexions que,
comme il n’y a dans la nature qu’une feule propriété
générale de la matière, qu’une feule puiffance
que nous nommons attraélion, il n’y a de même
qu’une foule loi ; que fi l’application de cette loi
ne réfout pas tous les cas d’affinité, ce n’eft qu’un ,
problème plus compliqué qui refte indéterminé, parce
que les données nous manquent encore pour en trouver
la folution ; en un mot, qu’il n’y a jufqu’à préfent
aucune raifon folide pour admettre une autre
loi, ou, pour mieux dire, une autre puiffance , pour
l’explication de ces phénomènes. Je ferois d’autant
mieux fondé dans cette conclufion , que la loi particulière
fuppofée par quelques Phyficiens pour les
cas de contaél, ne peut recevoir une. jufte application
à ce qui fe pafle dans les combinaifons par
affinité ; ce qu’ils appellent contaél n’eft rien moins
que le point de faturation refpe&ive & de repos ;
pour en avoir la démonftration , il ne faut que cpn-
fidérer la manière dont s’attirent deux globules métalliques
fluides & deux globules folides du même
métal : l’attraélion de toutes les parties des premiers
s’épuife réellement-, parce qu’elles fe touchent en autant
de points qu’il eft poflible, en ne formant qu’une
foule mafle fpnérique ; le contaél des féconds n’eft
que le choc de deux points de leur furface ; c’eft-
à-dire, le point où leur, folidité fait obftacle à la
fomine de toutes les attrapions de leurs molécules.-
Ce qu’on a nommé les anomalies apparentes des
affinités, me fourniroit encore d’autres argumens ;
par exemple : la -matière de la chaleur, dont je n’aî
pas-encore fait mention, qui décide quelquefois la
combinaifon, quoiqu’elle augmente réellement lesi
diftances des molécules ; la furfaturation fi manifefte.
de quelques compofés par l’une, des parties compo-,
fantes ; les alternatives fi fréquentes de l’admiffiorf
ou de l’exclufion d’un troifieme corps , &c. & c.;
( Voye^ cï-apres §. IV .) Tant d’attraélions éleélives,'
tant d’effets qu’il n’eft pas poflible de confidérer uniquement
comme les produits des maffes des diftances,
deviennent contradiéloires avec l’idée d’une
loi quelconque appropriée. à tous ces cas ; & s’il,
n’y a toujours que les variétés de figure & de denfité
des molécules primitives qui puiflent ramener
| ces divers, phénomènes à une loi conftante, nous}
n’avons pas le droit d’en créer une autre, ni d’attribuer
à la matière une propriété nouvelle, diffo-,
rente de celle qui eft établie par . les mouvemens
de tous les corps fonfibles , du moins jufqu’à ce que
l’on foit parvenu à en démontrer l’mfuffifance par
une application rigoureufe à des cas de ce genre l
où les figures & les denfités de ces molécules primitives
feroient d’avance connues.
Je pourrois ajouter enfin à l ’appui de cette conclufion
, que ce n’eft pas feulement cette {implicite,'
cette uniformité que nous devons préfumer dans les;
agens de la nature (i) , qui nous follicite de ne pas"
nous écarter {ans de très-fortes raifons de la marche,
qu’elle nous a une fois tracée ; que c’eft encore
l’hiftoire des erreurs dans lefquelles les plus lavans
hommes font tombés , quand ils ont abandonné
cette bouffole. Le mouvement des apfides de la
Lune a paru fe refufer, pendant quelques temps.
au fyftême général de. la gravitation ; & le. célèbre
Clairaut lui-même s’étoit laiffé aller au foupçon qu’il
pouvoit dépendre d’une loi différente de la raifon doublée
des diftances , avant que des calculs plus exaéls
lui euffent montré la manière de relier ce phénomène
à la Phyfique célefte (2). Il eft donc au moins
raifonnable d’efpérer que, quand on fora parvenu à
raffembler tous les élémens néceffaires au calcul des
(1) Lots même que le grand Newton paroiffoit le plus difpofé à admettre des réputfions & des loix d’attr-a&ion differentes,
il n’étoix pas moins frappé de la néceffité de cette harmonie de la nature , comme on peut le voir dans le dernier
livre de fon Optique, où il dit précifément que la nature f e trouvera très-/impie &. très -con firm e a e lle -m em e , en fanant
procéder tous les mouvemens de fes parties de puiffances attra&ives. M. d’Alembert femble s etre pénétré du meme
principe, lorfqu’il a écrit que nous devions bien nous garder d’ ajfurer que quelques parues de la matière s attiraient fuivant
d’ autres lo ix que celles du quarré.......... qu’ i l n*étoit pas encore bien certain que la lo i d attraction a de petites diftances fu t
o y ji générale q u ’ on vouloit le fu p p o fe r .............que la pefànteur des co rp s, qui etoient immédiatement contigus à la terre.,
étoit a la pefànteur de la Lune à peu pr'es en raifon inverfe du quarré de la diftance, Y0YE2 le Dictionnaire de Mathé-
«natique de l’Encyclopédie, au mot Attraction.
I2) Voyez les Mém. de l’Acad. Roy. des Sciences, année I74J»
Ç h ym ie , T om e 1, Z z z