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un point de vue moins général ( Mém. de VAcad.
R. de*Sciences, ann. 1778 , p a g . 60 ) ; c’eft , comme
l’a très-bien prouvé M. Berthollet, dans un Mémoire
lu à l’Académie le 19 Avril 1785 , que l’acide
nitreux fe décompofe dans cette opération, qu’il
donne une partie de Ton air vital à l’acide muriatique,
& le change par-là en acide muriatique dé-
phlogiftiqué. L’odeur d’eau régale obfervée par M.
Cornette lui-même ne laide aucun doute fur la vérité
de cette explication.
Pour ce qui eft dé la décompofition des vitriols
allcalins par les acides nitreux & muriatique, elle
procède néceffairement d’une caufe toute différente.
J’expoferai ailleurs en détail ce qui a été propofé par
deux favans Chymiftes, MM. Bergman & Kirwan,
pour faire dilparoître les anomalies qui réfultent de
ces décompofitions ( V o y e^ A cid e v it r io l iq u e ,
§ . V I , n. V ). Je me bornerai à annoncer ici leurs
opinions.
M. Kirwan regarde ces décompofitions comme
produites par une double affinité entre l’alkali, les
acides & la matière de la chaleur ; affinité qui fuffit
pour décider l’échange ; la chaleur fpécifique de ces
acides étant différente, & leur affinité avec les alkalis
fixes étant égale dans fon fyffgme. j?
Bergman avoit obfervé que plufieurs. fels avoient
la propriété de fe charger par excès, de l’un de leurs
principes ; il imagina que cette portion, qui fe trou-
voit en excès , ne pouvoit pas être attirée 6t retenue
avec la même force ; il en conclut que,puif-
que les vitriols alkalins n’étoient jamais décompofésg
qu’en partie par les acides nitreux & muriatique ,
ces derniers ne. fàifoient réellement que s’approprier
îa portion de bafe alkaline qui étoit en excès. Cette
explication a été adoptée & confirmée par M. Ber-
thollet, qui, dans le Mémoire ci-deffus cité, a fait
voir contre M. Cornette , que la décompofition des
vitriols alkalins n’étoit jamais entière ; que lorsqu’on
pouffoit à un grand feu le mélange de vitriol de
foude & d’acide muriatique fumant, le fel commun
formé d’abord de la portion de foude en excès,
étoit décompofé , parce que la chaleur difpofant l’acide
muriatique à fe volatilifer, fon affinité avec
l’alkali devenoit plus foible ; enfin , que le vitriol
de potaffe chargé de tout l’excès d’acide qu’il peut
retenir au feu d’incandefcence (quieft de 159 grains
par once, ou de o ,*27604 de fon poids), decom-
pofoit aufli le îpuriatç de potaffe, à raifon de cette
portion furabondante d’açide.
Y a-t-il véritablement divers degrés de faturation
d’un même fel ? ou bien l’union qu’il contracte avec
la portion excédente à la faturation , n’eft-elle que
l’effet d’une furcpmpofition comme avec un troifiçme
corps étranger ? Voilà une queftion qui mérite toute
nptre attention, non-feulement parce qu’elle intéreffe
la théorie générale de l’attraâion chymiqfce ^gipais
encore par la néceffité de bien cpnnoitre le genre de
cette affinité avant que de penfer à la fopinettre au
calcul, ou même à en déduire une explication fa-
jj^gifante des phénomènes qui en dépendent,
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J’avoue quex l’idée de divers degrés de . faturation
d’un corps par un même corps, me paroît répugner
à toutes les notions que nous avons acquifes juf,
qu’à ce jour, de la manière dont fe font les coin-
binaifons. Je conçois très-bien que le point de faturation
de l’eau par un fel peut changer fuivant
fa température, que l’eau plus froide peut abforber
plus de gas acide ; l’augmentation ou la diminution
de la matière de la chaleur dans le diffolvant, changeant
la difpofition refpeétive, la denfité, peut-être
la figure de fes molécules, il n’eft pas étonnant que
leur force attra&ive fe trouve aufli modifiée par ces
çhangertiens ; qu’ils donnent lieu à un contaél plus
ou moins parfait ; & que la puiffance d’affinité devienne
capable, par ce moyen-, de fouftraire à la
loi de la gravitation une plus grande quantité de matière
dans un cas que dans l’autre : mais 'nous n’ayons
rien de femblable dans l’hypothèfe dont il
s’agit ; les circonftances font les mêmes, le point
de faturation ne peut varier, puifqu’il n’eff que l’effet
d’une caufe qui ne change pas.
Pour rendre cette vérité plus fenfible, demandons
ce que l’on entend par faturation ; tous les Chy-
miffes répondront qu’ils entendent cet état d’iin
compofé .tel que l’une de fes parties compofantes
ne peut recevoir ni retenir en combinaifon une plus,
grande quantité dé l’autre. Telle eff l’acception na-,
turelle & néceffaire du mot faturation, fans laquelle
il devient vuide de fens : o r , fuppofer, en confer-
vant cette acception, qu’une fubftance peut être
faturée par des quantités différentes d’une même,
fubftance, c’eft réellement affirmer lès deux contradictoires.
Je fuis fort éloigné de vouloir réduire ce problème
important à une pure queftion de mots ; mais il me
femble que la première choie eft de convenir de
la valeur des termes qu’on emploie, fi l’on ne veut
s’expofer à tout confondre. Sans nous départir de
ce principe, examinons avec un peu plus d’attention
ce qui fe paffe dans çes prétendues faturations
à diverfes dofes , effayons fur-rtout de rapprocher
tous les faits analogues, dç les généralifer en les
ramenant à des caafes plus phyfiques, & nous arriverons
à une folution plus fatisfaifante.
L’effet ordinaire de toute faturation, & qui peut,
fans doute fervir à en déterminer le point abfolu
d’une manière invariable, eft que les deux parties
compofantes perdent autant qu’il eft poflîble de leurs
propriétés particulières, pour ne plus ip$nifefter que
des propriétés nouvelles, égalèrent étrangères à l’une
& à l’autre, Lorfque cela n’arrive pas,., la tendance
à l’union n’eft pas moins fatisfaite , comme quand
l’eau eft chargée de tout ce qu’elle peut difloudre d’un
acide concret ; & il y a par conféquent faturation,
quoique l’acide continue d’altérer encore les couleurs
bleues végétales ; mais lorfque cela arrive, on a un
indice plus fur du terme de çette faturation. C’en
d’après cela que l’on a dpnné à quelques fels le nom
de fels neutres parfaits.
Cependant, rien n’empêche que lorfqu’on préfgiUô
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$ un de ces fels neutres ^parfaits une nouvelle quantité
d’un de leurs. principes il n’y ait encore entre
ces deux fubftances une force attraélive, & meme ■
fians un degré capable de produire diffolution, com- !
binâifon ou affinité; mais ce qu’il faut bien remar-
qU€i- | c’eft que cette affinité n’eft plus de l’acide a
la bafe ou de la bafe à l’acidê, mais du compofé
neutre avec la portion ajoutée ; d’ou il fu it, 1 q ue .
cela ne touche pas à la compofition préexiftante qui
fubfifte dans Ion intégrité, comme fi le fel neutre
étoit furcompofé par ûrté fubftànCé éfrangèré ; 2°.
que le point de faturation n’en eft pas changé; 3 ° . ’
enfin , que la puiffance qui unit cette portion ajoutée j
au fel neutre, peut être beaucoup plus foible que j
celle qui unit la même fubftance à la même fubftance !
au point de faturation , fans qu’il en réfulte aucune |
contradiction. Les ' exemples qui Tondent cçtte étiologie
ne font pas rares , j’en choiïirài quelques-uns
où il fera fiicile de la fuivre.
Le vitriol,de barote*, ou fpat pefant, eft, de l’a--
veu de tous les Chymiftes, une des combinatfons
les plus fermesy imj des--fels les ‘plus parfaits que
l’on connoiffe ; fi 011 fiait bouillir iiir ce fel terreux
de l’acide vitriolique concentré,' la liquèür décantée
claire •& limpide , elle conferve très-fenfiblement
les propriétés acides ; mais elle tient une quantité
confidérable de vitriol barotique , que l’on peut en
féparer fur-le-champ par la feule addition de l’eau.
Il y a donc affinité entre l’acide & le f e l , fans
cela il n’y auroit point de diffolution ; mais cette
affinitérfi’eft plus celle de l’acide ,avec la bafe, elle
eft même bien éloignée; d’avoir le même degré de
puiffance, puifqu’elle eft encore audeffous de celle
que l’acide a lui-même avec l’eau.
-On--conçoit dès-lors, que fi l’on vouloit fe rendre
compte du jeu de ces affinités, en les repréfentànt
Si les exprimant en nombres > dans un fymbole, il
faudroit bien feg a i^ e f de divifer les parties compofantes
du vitriol de barote, & de les difpofer
comme ; dans les-fymboles d’affinités doubles, püif-
que ce fel ne joue en effet que le. rôle d’un corps
fimple,. foit dans la difîolution de ce fel par l’excès
de fon acide , foit lors de fa précipitation par l’eau
pure. Il ne fera pas inutile d’en donner ici la figure
pour fervir d’exemple dans tous les cas femblables.
Pour conftruire cette figure fymbolique, il faut
d’abord déterminer les nombres qui doivent y entrèr.
On a vu précédemment que l’affinité de l’acide v i-
triolique avec le barote, ou terre bafe du fpat pefant
, étoit = 65 ; mais ce n’eft pas cette puiffance
dont il peut être ici queftionelle'feroit trop disproportionnée
à l’effet ; l’affinité qui unit le fpat pelant
à l’acide eft néceffairement beaucoup plus foible,
dite eft même très-certainement inférieure à celle de
l’acide avec l’eau , puifque l’expériençe nous apprend
que celle-ci l’emporte : je puis donc fuppofer, fans
foécarter d’aucun des rapports indiqués par les faits,
■ que cette affinité de l’acide avec le fpat pefant n’eft
qwe == 4 , tandis que l’affinité de l’acide avec l’eau
jÇhynùe. Tpme l\
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Ces nombres ainfi déterminés, on peut fe rendre»
compte facilement & de la manière dont s’opère la
furcompofition du fél neutre avec fon propre acide,
& de la manière dont elle celle, parce que cet acide,
uni à l’eau, n’a plus d’affinité avec lu i , ou ne l’attire
pas affez pour le tenir en diffolution«
Exemple de Vaffinité à?lin Sel neutre avec un’excès de
fon acide, 6* de la féparation dé cet excès par UUA
autre affinité fimple de compofition.
Acide vitriolique délayé
1 Acide vitriolique 6 Eau
V en exc^s
Diffolution 1
de vitriol 1 ,
de barote A 4
dans: . J
fon acide J : ^
i ’ Vitriol
*> / de barotç
Vitriol de barote
Çette diftinâion de l’affinité de deux fubftances
entre elles de l’affinité du compofé qui en réfulte
avec l ’une de ces fubftances, eft d’autant plus
importante, qu’elle devient, à ce qu’il me femble,,
la clef d’un grand nombre de phénomènes jufqu’ici
très-obfcurs, tels que la cryftallifàtion de certains
fels avec excès d’acide , ou avec excès de bafe,
l’efflorefcence à laquelle plufieurs font fujets, la
déliquefcence des uns , l’infolubilité de quelques
autres, les précipitations par l’eau pure, la décompofition
fpontànéede quelques diffolutions métalliques,
enfin, l’incertitude des limites entre lefquelïes s’é-
. tend ou fe refferre fi diverfement ce que .nous appelions
le point de faturation.
L’alun fe cryftallife avec excès d’acide ; il en eft
de même du vitriol de potaffe ; le tartre de potaffe
avec excès d’acide eft non-feulement plus difpofé à
prendre la forme cryftailine, mais même beaucoup
moins foluble que celui que l’on regarde comme
neutre.; l’arféiiiate de potaffe, qui prend fi facilement
la forme concrète quand l’acide y eft dominant, re-
fiife abfolument de cryftallifer quand la bafe. y eft
en plus grande quantité. Au contraire, le muriate
& l’acéte de plomb fe furchargent de la chaux de
ee>métal; le phofphatequ’on dit furfaturé de foude,
& le borax donnent des cryftaux avec excès de bafe.
A côté de ces faits, en apparence déjà fi incohé-
rens, plaçons ceux qui tiennent plus directement
aux affinités. Le vitriol de potaffe avec excès d’acide
décompofe le nitre & le fel commun l’acide ni* B bbk