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porer pour retrouver le fin-plus du fel. Cependant
comme les fleurs de benjoin font difficiles à pul-
vérifer à caufe de leur légèreté , il vaut mieux
conferver ce fel en état de précipité qui eft en
poudre très - fine , indépendamment de ce qu’il
s en perd toujours beaucoup pendant cette cryf-
tallifation.
M. Schéele recommande de fe fervir d’une toile
pour filtrer la diffolution , parce qu’il a remarqué
que le fêl fe cryftalbfoit fouvent fur le papier &
en bouchoit les pores. Il penfe même, que l’on
pourroit négliger cette filtration ,qui n’a d’autre objet
que de rendre les cryfiaux plus nets, en en fé-
parant environ a grains de fubftance réfineufe.
M. G. R. Lichtenftein, qui a publié depuis en
Allemagne, de très - bonnes obfervations fur le
fel de benjoin , affure que le procédé'de la diftilla-
tion eft celui qui en donne le plus ; que par la
fublimation dans le cône de papier, oh l’obtient
plus pur, mais avec perte ; enfin, que cette perte
eft encore plus confidérable avec l'eau de chaux.
Je fuis très-porté à croire, avec M. Schéele , que
dans cette dernière opération, le produit ne peut
diminuer qu’en proportion de la reéfification, &
dans ce cas, ce n’en pas une perte réelle.
i Le fel de benjoin rougit les couleurs bleues végétales
; il forme des combinaifons avec les différentes
bafes ;X en eft allez {ans doute, pour le placer
au nombre des acides. A la vérité ce n’eft pas
un acide aufli fimple que l ’acide vitrîolique ; il
eft certain qu’il retient une portion d’huile ténue,
qui le met prefque à l’état de fel effentiel, & qui le
rend volatil pmais l’acide tartareux n’eft également
qu’un fel effentiel concret, & la fublimation de
l’arfenic blanc, ne nous empêche pas d’y récon-
noître une fubftance difpofêe à produire un acide
parfait , quoique fes propriétés foient afluellement
mafquées en partie par le phlogiftique qui lui relie
uni. '
Lorfqu’on étoit moins avancé dans la connoif-
fance de la formation des acides, on pouvoit foup-
çonner que les fels effentiels , qui manifeftoient
quelques propriétés acides , receloient en effet, un
des acides minéraux Amplement modifié ; mais,
d’après ce que j’ai expofé à l’article Acide , il n’eft
pms poffible de défendre cette opinion , & puif-
que l’acide benqonique entre tout entier dans les
combinaifons falines , puifqu’il en eft dégagé tel
qu’il étoit auparavant, il faut dire qu’il exifte dans
le benjoin une fubftance capable de s’unir au principe
acidifiant commun, & de former avec lu i, un
acide propre, aufli effentiellement différent de tous
les antrp acides, que le font entre eux tous les
compofes qui n ont qu’une partie femblable.
Si on parvient à dlcompofer le fel de benjoin, à
le dépouiller d’unepartiede fùn huile, comme on fé-
pare celle du fucre, il en réfultera, fans doute , un aci-
deplus fimple & plus puiffant; mais cela n’empê-
chera pas de confidérer encore les propriétés & les
affinités particulières de cet acide affoibli par la
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combinaifon phlogiftique, que nous nommerons
alors pour le diftinguer, acide benzonique effentiel.
J ai tenté cette décompofition, en diftillant l’acide
nitreux fur les fleurs du benjoin ; mais les
vapeurs rouges n’ont paru que fur la fin , lorfque
le mélange étoit prefque réduit à ficcité ; une partie
du fel s’eft fublimée au même inftant, & il
n eft rien refte au fond de la cornue ; ainfi mi
peut conclure de cette expérience, que le principe
inflammable adhère bien plus fortement dans le fel
de benjoin que dans le fucre, & que l’affinité de
1 acide nitreux avec le phlogiftique n’eft pas capable
de rompre cette union,
i \ ac'^el benzonique a fort peu de l’odeur propre
du benjoin ; il n’eft pas acide au goût, mais plutôt
douceâtre & très-irritant; il prend fortement
a la gorge.
Il ne caufe pas au firop violât une altération
fenfible. M. Lichtenftein ayant mêlé du fel de Benjoin
dans ce firop étendu avec de l’eau froide, la
couleur ne changea pas ; il en fut de même, lorf-
qu’il verfa dans le firop une diffolution chaude
de S d e benjoin ; il lui parut feulement, lorfqu’il
fit digérer fur le feu le mélange de fel de benjoin
& de firop délaie, que la couleur tournoit un peu
plus au rougeâtre, & redevenoit plus obfcure en
réfroidiffant ; mais il eft poffible-, comme il le remarque,
que cette légère variation ne foit due qu’à
la diffolution du fel par la chaleur, & à fa cryf-
talifation par le réfroidiffement.
Laélion de cet acide eft plus marquée fur
l’infufion de tournefol ; fi on étend cette teinture
avec de P eau diftillée chaude, jufqu’à ce quelle fe
trouve d lin beau bleu, & que 1 on y ajoute du
fel de benjoin , en agitant la liqueur pour hâter
la diffolution du fe l, on lui voit prendre une
belle couleur rouge. Cette expérience réuffit même
avec l’eau froide; mais l’effet eft plus lent, & i l
faut remuer plus long-temps.
L ’acide benzonique fe volatilife fur le feu, & répand
une odeur forte qui excite la toux. M. Schéele
a remarqué que l’huile empyreumatique que le
fucre de lait donnoit à la diftillation avoit une
odeur fort analogue. M. Lichtenftein a obfervé que
lorfqu’on l’expofoit au feu du chalumeau, dans une
cuiller d’argent, il devenoit fluide comme de l’eau,
& s’évaporoit fans s’enflammer. Lorfqu’on le laifr
foit refroidir -après l’avoir fondu, il le" durciffoit
& fa furfàce fe couvroit d’une croûte rayonnante.
R ne brûla que quand il fut placé immédiatement
dans la flamme ou fur le lumignon, & alors la
flamme en parut augmentée. La même' chofe arriv
e , fi on veut allumer du papier fur lequel on a
jetté un peu de ce fel, & il .n e laiffe aucun réfidu
charbonneux. Sur le charbon ardent , , i l s’élève
tout de fuite en vapeurs blanches, épaiffes, & ne
donne point de flamme.
L’air fans la chaleur n’a aucune aftion fur l’acide
concrèt du benjoin. On affure, qu’après avoir
été confervé pendant ao ans dans un vaiffeau de
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verre négligemment bouché, à la vérité dans un
lieu fec, il étoit tout aufli pur, & n’avoit rien perdu
de fort poids. Cependant le peu d’odeur de benjoin
qui lui refte, fe diflipe à l’air libre, toujours fans
diminution de poids. Cette odeur fe manifefte de
nouveau, dès qu’il p rou v e de la chaleur.
L’eau froide ne diflotft qu’une quantité prëfqu’in-
fenfible de cet acide concrèt ; l’eau chaude le dif-
fout affez facilement. MM. Wenzel & Lichtenftein
s’accordent à dire, que 480 grains d’eau diftillée
bouillante , en prennent 26 grains ; le dernier
ajoute qu’elle n’eii retient qu’tin grain, lorfqu’elle
eft réfroidie, & que tout le refte fe dépofe en crÿf-
taux. Quand le réfroidiffement eft prompt, ces
cryftaux font de très - petites aiguilles ; quand il
fe fait lentement, une moindre quantité de fel
donne de beaux cryftaux, longs, minces , feuilletés
& reffemblans à des barbes de plumes. M.
Lichtenftein a fu tirer avantage de cette indiffolu-
bilité dans plufieurs de fes expériences lur le fel
de benjoin, en ce qu’en opérant à une chaleur de
ç 8 degrés du thermomètre de Fahrenheit, il étoit
afliiré que la diflolution aqueufe ne pouvoit l’induire
en erreur.
Il a verfé, goutte-à-goutte, de l’acide vitriolique
blanc, concentré fur 20 grains de ce fel , il s’y
eft fondu, fans chaleur & fans bruit ; l’acide y a
pris une couleur brune ; mais il fe trouva tout aufli
acide qu’auparavant, & femblable à l’acide vitriolique
, noirci par le phlogiftique ; cependant ce
mélange feeomporta avec l’eau d’une manière bien
différente de l’acidè vitriolique brun ordinaire ;
car dès qu’il y eût verfé quelques gouttes d’eau,
le fel fe fépara de l’acide, & le coagula à la fur-
face de la liqueur. Après l’édulcoration de ce précipité
, le fel de benjoin fe trouva tel qu’il étoit
avant l’opération. L’acide vitriolique , affoibli d’une
demie partie d’eau, n’a plus d’aéfion fur le fel du
benjoin. Il en eft de même de l’acide vitriolique
fulfureux.
M. Lichtenftein a pareillement diffous 20 grains
de fel de benjoin dans l’acide nitreux filmant, la
diffolution s’eft faite promptement, mais tranquillement
; elle a pris une couleur jaune , l’eau l’a
décompofée comme la précédente, & le fel retiré
du coagulé n’avoit éprouvé aucun changement ; il
préfume,avec raifon, que c’eft principalement la
partie phlogiftique du fel de benjoin , qui décide
.l'affinité ; mais c’eft une affinité fimple dé diffolu-
'tion & non de décompofition , puifque le fel n’eft
point altéré.
Suivant le même Chymifte, le fel benzonique
ïie fe difîbut ni dans l’acide muriatique ordinaire,
ni dans l’acide muriatique déphlogiftiqïié.
L acide acéteux ne dinout le fel de Benjoin, que
que comme l’eau, c’eft-à-dire, à l’aide delà chaleur
; & le fel fe cryftallife par le réfroidiffement.
Lorfqu’on mêle le tartre raffiné , & le fel d’o-
feille, avec parties égales d’eau froide, & de fel
M benjoin, il ne fe diffout rien de ce dernier ,
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particuliérement avec le fel cl’ofeille. A la chaleur
de la digeftion, le tartre & le fel d?ofeille fe dif-
folvent les premiers ; mais le fel de benjoin a l’avantage
, l’orfque l’eau eft très - chaude, & il fe
Cryftallife dès que la chaleur diminue, quoiqu’il
refte en diffolution du tartre & du fel d’ofeille*
En évaporant la liqueur, on retrouve l’un & l’autre
de ces fels acides, aufli purs qu’auparavant.
Les acides fébacé & formicin , fe comportent
avec le fel de benjoin à-peu-près comme le v inaigre
; l’acide karabique, comme les acides v é gétaux
concrèts.
L’acide phofphoriqtie aqueux, le plus concentré,
n’a pû diffoudre le fel de benjoin.
L’acide concrèt du benjoin s’unit avec effervef-
cence aux alkalis & aux terres non cauftiques ; les
fels réfultant de fon union avec les différentes
bafes prennent le nom générique de Benzones.
Voye? ce mot.
Nous .n’avons jufqu’à préfent, pour déterminer
les affinités de l'acide benzonique , que quelques
expériences de M. Lichtenftein, dont on peut conclure
qu’il cède les alkalis , la chaux, la magnéfie
& l’alumine aux acides vitriolique, nitreux & muriatique.
M. Lichtenftein , dit encore , qu’il préfère les
alkalis fixes & même l’alkali volatil, à ces trois
terres; mais il ne paroît pas qu’il ait opéré ces
décompofitions, par des alkalis cauftiques. Acide benzonique (pharm. ) Cet acide, connu
en médecine fous le nom de fleurs de benjoin,
eft retiré de la réfine nommée benjoin amigda-
loide , ou ajja doux, il y a plufieurs procédés
employés pour fon extraoion.
Le premier que l’on fuit le plus ordinairement
& que M. Baumé a perfe&ionné, confifte à vola-
tilifer les fleurs de benjoin , par la voie sèche.
On met cette réfine réduite en poudre groflière,
dans une cucurbitte que l’on place fur un bain de
fable , modérément échauffé. On recouvroit autrefois
cette cucurbite d un cône de papier, auquel
s’attachoient les fleurs, & comme on ne tarda pas
à reconnoître que la porofité du papier, caufoit la
perte d’une portion de ces fieurs , on prit le parti
de l’enduire d’une colle compofée de farine de froment
& de blanc d’oeuf ; on y fubftitua bientôt
après des cônes de terre cuite ; mais à moins de
donner un feu très - violent, les fleurs ne s’éle-
voient qu’environ à la moitié de ces vafes, & une
chaleur forte décompofoit le benjoin au point
de volatilifer une grande partie de fon huile, qui
jauniffoit les fleurs ; d’ailleurs la furface du cône
n’étoit point affez étendue pour favorifer l’adhérence
de fleurs. Ces inconvéniens ont engagé M.
Baumé’à employer deux terrines d’égal diamètre
& peu profondes, dont les bords, ufés par le frottement
,• fe touchent immédiatement. On met le
benjoin dans l’intérieur, on lutte les joints avec
un papier enduit de colle, & l’on donne un feu