
feu, il était poffible de féparer des produits dont
les propriétés étoient très - différentes : de fept
portions obtenues fucceffivement, les premières
étoient fans couleur, il y avoit entr’elles une gradation
très - fenfible d’acidité , elles étoient proportionnellement
plus péfantes 8c exigeoient d’autant
plus d’alkali pour leur faturation ; mais la dernière
liqueur fe trouva colorée d’un beau verd; elle
fut reconnue moins pefante quoique plus acide ;
elle fut, à vrai dire, la feule inflammable , puifque
le fixième produit échauffé au degré de F ébullition
ne put donner quelques fignes d’inflammation que
dans l’obfcurité; elle préfenta enfin , le phénomène
de la congellation , & fur - tout après fa
reéHfication à un feu doux, qui la débarrafla de
la partie colorante 8c augmenta encore fa concentration
, au point qu’elle prit dans le récipient la
forme d’une cryflallifation folide en grandes lames
& en aiguilles. Ce produit que l’on peut nommer
vinaigre glacial, ne fe liquéfie que quand la
température eft à 13 ou 14 degrés au-deffus de
zéro. M. de Courtenvaux foupçonne que cette fo-
lidité eft due à la combinaifon de l’acide végétal,
avec le phlogiftique , ce qui conftitue un efpèce
de foufre ; mais l’état de ce corps concrèt cryftal-
lifable & même inflammable , n’établit pas une analogie
fùffifante pour faire admettre cette hypothèfe.
Le réfidu de cette diflillation pouffée jufqu’à
rougir le fond de la cornue, efl une pouflière briine
qui a quelquefois un peu du brillant métallique du
cuivre. MM. le duc d’A yen & Prouft, ont obfervé
qu’il s’enflammoit fpontanément à l’air comme le
pyrophore; il fe réduit facilement en métal à rai-
ion du phlogiftique huileux dont toutes fes parties
font environnées.
Il n’eft pas douteux que le vinaigre radical ne puifle,
par des rectifications, être rendu limpide comme de
l’eau 8ccomplettement dépouillé de la petite portiou
de enivre,ou plutôt d’acéte de cuivre,qu’il a enlevé à
la première diflillation, mais il ne feroit pas prudent
de s’y fie r , lors même que l’alkali volatil ne le
colore plus en bleu. Il eu d’ailleurs tellement cauf-
tique qu’il ronge la peau & la cautérife ; aufîi n’eft-
il employé que pour les expériences Chymiques.
Comme il a une odeur agréable & très-piquante,
on en humeéte de petits cryftaux de vitriol de
potaffe, qu’on débite fous le nom très-impropre de
fe l volatil de vinaigre.
On peut enfin, obtenir un vinaigre très-concentré
des fels acèteux, par l’intermède d’un acide dont
l’affinité avec leurs bafes foit fupérieure à celle du
vinaigre, & ici l’on a l’avantage de pouvoir fubf-
tituer aux fels métalliques prefque toujours dangereux
, les fels terreux & même alkalins qui dans
Te cas laiflênt aller facilement leur acide. Le tartre
'raffiné & , à plus forte raifon, l’acide tartareux
pur,font en état d’opérer cette décompofition ; mais
la facilité avec laquelle l’huile du tartre fe rôtit,
fait que l’on préféré l’acide vitriolique , qui fe trouve
d’ailleurs dans le commerce à un prix fort inférieur.
On met dans une cornue de verre de l’acéte
de potaffe, bien fec , on verfe deffus à-peu-près:
un tiers de fon poids d’acide vitriofique concentré
& très-blanc > on diftille doucement au bain de
fable fans réverbère, & on trouve dans le récipient
un vinaigre extrêmement fort, qui faifit le nez pre£
que comme l’acide fulphureux , c’eft ce que M.
Wcftendorf appelle vinaigre fumant. Ce qui refier
dans la cornue eft du vitriol de potaffe mêlé d’une
portion de fel acéteux non décompofê ; car on
conçoit qu’il importe de dofer l’acide vitriolique
de manière qu’il le trouve plutôt au-deffous qu’au-
deffus de la proportion néceffaire à la décompofition*
Malgré cette précaution, on ne peut empêcher
qu’il ne paffe toujours un peu d’acide vitriolique
avec le vinaigre , & de-là vient la vapeur fiiffo-
quante qui s’en exhale dans les premiers infians.
Quelques Chymiftes confeillent de le rediftiller
fur le même fel pour le purifier de ces parties*
hétérogènes , 8c ils affurent que l’on parvient de
cette manière à lui faire perdre jnfqu’aux derniers
atomes de l’acide vitriolique qu’il avoit entraîné y
mais l’expérience m’a prouvé que cette méthode
étoit infuffifânte, il étoit même facile de le prévoir
par la théorie, puifqu’il ne s’agit pas ici proprement
de l’acide vitriolique, mais de l’acide vr-
triolique phlogiftiqué, que l’on fait être plus volatil’
8c moins adhèrent à la bafe alkaline que le vinaigre
luirmême, 8c qui fe formerait toujours nécef-
fairement, en plus ou moins grande quantité, dans''
l’opération de la re&ification, quand il n’y exifte-
roit pas précédemment.
Comme le degré extrême de concentration du
vinaigre pouvoit le rendre très - précieux, non-
feulement dans les expériences Chymiques, mais
encore pour renforcer les vinaigres diftillés,qui font
toujours fôibles ou aiguiféspar des acides étrangers,
fufpe&s, j’ai cherché, s’il ne feroit pas poffible de
lé purifier complettement, 8c voici comment j’y
fuis parvenu.
J’ai préparé une diffolution d’acéte barotique
fuivant le procédé indiqué à l’article Barote, pour
rétirer cette terre du fpat pefant, fans autre acide
que celui auquel on veut l’unir ; la diffolution fa-
turée, je l’ai rapprochée par l’évaporation, 8c j’ai
verfé goutte à goutte de cette diffolution dans le
vinaigre fumant, diftillé quelques mois auparavant,
jufqu’à ce qu’il n’y eût plus de précipité , ni le
moindre nuage ; il eft évident que par ce moyen
l’acide vitriolique eft paffè tout entier à l’état de
fpat pefant; que ce fel étant abfolument infoluble ,
il n’en refte point dans la liqueur, enfin , que le
précipitant n’y laiffe lui-même que du vinaigre ;
en forte qu’il ne peut y avoir de doute que
cet acide végétal ne fe trouve dans les deitfx conditions
fi difficiles à réunir de la plus grande pureté
8ç d’une extrême concentration.
Le ^vinaigre employé par M. Wenzel a fes expériences
, ayoit été retiré de l’acéte de potaffe
fuivant la méthode de M. Weftendorf, 8c l’examen
que M. Wenzel a fait de fa concentration, lui a
appris que fur 240 grains de ce vinaigre, il y avoit
encore 170 ^ grains d’eau qui s en feparoient pendant
fà combinaifon avec les bafes.
M. Gellert a placé le phlogiftique dans la colonne
des affinités du vinaigre , 8c on ne peut
douter qu’il r fy ait réellement quelque affinité entre
ces fubftances, puifque le vinaigre ne diffout le
fer qu’autant qu’il eft pourvu de fon phlogiftique ;
cependant il n’y a aucun exemple de combinaifon
direCte, ni même que le" vinaigre abandonne une
bafe quelconque pour s’unir au phlogiftique. M.
Wenzel a diftillé l’acéte de potaffe très-fec avec la
pouffière de charbon, 8c ayant pouffé le feu, il a
obtenu une liqueur qui approchoit beaucoup de
Fhuile fétide du tartre raffiné ; mais il convient
que tout le fel ne pût--être décompofé de cette
manière. Le peu de difpofition que cet acide montre
à slunir au phlogiftique, vient fans doute de
Te qu’il exifte déjà dans facompofition. M. Scheele
remarque très-bien que ce principe lui adhère plus
fortement qu’aux autres acides végétaux, puifqu’il
ne le cède pas à la manganèfe, 8c qu’il paffe fans
fe décompofer lorfqu’on le diftille fur cette terre
métallique.
M. Bergman a reconnu que la chaux n’enlevoit
pas le vinaigre à l’alkali fixe ; mais il. laiffoit à décider
file barote devoit refter à la tête de la colonne
où il l’avoit placé par analogie, j’ai vérifié
qu’en effet, l’acéte barotique n’étoit décompofé ni
par l’eau de chaux, ni par les alkalis fixes caufti-
ques, c’eft-à-dire , abfolument privés de gas méphitique
au point de ne pas blanchir l’eau de
chaux. Voye% Alkali CAUSTIQUE.
Ainfi les affinités du vinaigre avec les différentes
bafes par la voie humide, peuvent-être indiquées
dans Fordre fuivant : le barote, la potaffe, la foude ,
le calce, la magnéfie, l’ammoniac, le zinc ,1a manganèfe
, le fer, le plomb , l’étain , le cobalt, le
cuivre, le nickel, l’arfenic, le bifmuth, le mercure,
l’antimoine, l’argent, la platine , l’alumine 8c l’eau.
On ne trouve dans le tableau des affinités de cet
acide par la voie feche, que le barote, la potaffe,
la foude, le calce, la magnéfie , l’ammoniac 8c
l’alumine, parce que la portion de vinaigre qui fe
détruit par le feu , tend à réduire les fubftances
métalliques.
En général le vinaigre efl un des acides végétaux
les plus foibles, puifque,fuivantl’obfervation
de M. Schéele, il fe laiffe enlever la bafe alkaline
par les acides du citron 8c du tamarin.
Le vinaigre fe combine encore avec l’efprit-devin.
Voye{ jEther acéteux.
Le vinaigre diftillé ordinaire qui eft chargé de
beaucoup d’eau , ne s’unit que très - difficilement
8c en petite quantité aux huiles effentielles ; de-là
vient que les vinaigres aromatiques font toujours
moins agréables que les alcohols ou teintures fpi-
. ritueufes, & pour les avoir plus parfaits, on eft
!; obligé d’y ajouter, lors de la diftillation, un peu d’ef-
prit-de-vin, qui s’empare de l’efprit re&eur. Mais
les expériences de MM. Weftendorf 8c Achard ne
permettent pas de douter que F acide acéteux concentré
n’ait une aCtion très-marquée fur toutes
les huiles effentielles. Le premier eft parvenu à
diffoudre jufqu’à 80 grains d’huile de romarin dans
• 480 grains de vinaigre concentré , fuivant fa méthode
; ce vinaigre devint très - volatil, 8c après
la diftillation, pendant laquelle il en étoit paffé cinq
; fixièmes, il avoit un coup-d’oeil laiteux, 8c on
voyoit quelques goutes d’huiles nager à fa fur-
face. Le réfidu donna par l’évaporation 16 grains
: de réfine d’une odeur très - forte. Le même Chy-
mifte ayant pareillement diffous du camphre dans
fon vinaigre, il s’eft enflammé 8c a brûlé prefque
en totalité. Cette diffolution étoit décompo-
fée par l’addition de l’eau.
M. Achard a fait bouillir le viHaigre concentré
avec l’huile empyreumatique de corne de cerf,
l’huile effentielle a’anis 8c Fhuile eftentielle d’angélique;
il y a eu diffolution entière quand l’acide
s’eft trouvé en affez grande quantité ; ces diffolu-
tions devenoient laiteufes par l’addition de l’eau
diftillée, 8c l’alkali y occafionnoit un précipité blanc
abondant.
Le vinaigre n’a pas, à beaucoup près, une aCtion
auffi marquée fur les huiles graffes. M. Achard Fa
fait bouillir avec Fhuile d’olive 8c avec Fhuile d’amandes
: la première n’éprouva aucun changement,
la dernière s’épaiffit un peu, mais l’affufion de l’al-
kali ne troubla pas l’adde 8c n’y occafionna aucun
précipité.
Le vinaigre diffout très-bien les gommes, & c’eft
par-là qu’il acquiert les propriétés des plantes dont
les parties actives réfident dans le principe gommeux.
Le vinaigre faturé à froid de gomme arabique ,
ou même de la gomme indigène que Fon débite
fous ce nom , forme un firop économique dont
l’ufage peut devenir très-avantageux dans les campagnes
pour fervir de boiffon aux malades qui font
hors d’état de fe procurer des citrons ; le vinaigre
feul, 8c même le vinaigre fucré, auxquels on eft
forcé de recourir, font le plus fouvent contre-indiqués
par la propriété qu’ils ont de pouffer à la peau ,
au lieu que le vinaigre uni à un principe auffi fuf-
ceptible de mucidité fe rapproche infiniment de la
nature de l’acide du citron.
La diffolution acéteufe de gomme fournit encore
une colle très-commode , èn ce qu’elle fe conferve
fans altération & dans l’état de fluidité que l’on
défire pour pouvoir l’employer fur le champ.
Le vinaigre ne paraît avoir aucune aétion fur
les réfines pures, il eft sûr du moins qu’il n’attaque
pas le caoutchouc, M. Berniard Fa fait digérer
à froid 8c à chaud fur cette réfine élaftique,
les morceaux font reftés agglutinés au fond de ia
liqueur fans la moindre altération.
On avoit recommandé en dernier lieu le vin ai