
montrer réellement l’erreur. Je n’ai pas befoinde
dire qu’en quelque temps que je reçoive cette
conviction, fut-ce' même dans le cours de la rédaction
d’un des articles de cet ouvrage , je me
ferai gloire d’en donner tout de fuite l’aveu : telles
doivent être les difpofitions de tout homme qui,
aime la vérité, & qui n’écrit que pour contribuer
à fes progrès.
§ . III. De l'aflion de Vacide régalin fur differentes:
bafeSy & de fes affinités*
JJeau régale s’unit à l’eau comme tous les/autres
acides. , & donne plus ou moins de chaleur,
fuivant fa concentration, c’efl-à-dire , qu’une partie
du calorifique de l’eau devient libre & fenfible,
& que ce fluide perd en même temps de fa capacité
de chaleur.
Comme on ne s’eft attaché à reeonnoître les
propriétés de ce diffolvant qu’avec les- fubftances
qu’il étoit feul en état de difloudre , ou dont il
donnoit une difTolution plus parfaite , on a peu
examiné fon adion les réfui tats de fes çombi-
naifons avec les bafes terreufes .& alkalineSi II
paroît que ces bafes régénèrent- des fels ordinaires
à deux parties-, favorr r des nitres, s?il n’y en a que
pour l’acide le plus puiflfant, & des nitres & des'
muriates en même-temps, & néanmoins diflinds ,
fuivant l’ordre de leur cryftallifation , fi ces bafes
y font portées en quantité fuffifante pour la fatu-
ration des deux acides.- Il efi aifé de voir que ce
n’eft pas ici une Ample féparation de ces acides ,
puifqu’ils n’étoient pas Amplement mêlés : cette
décompofition de Veau régale s’explique' dans nos
principes de la même manière que la production
des muriates ordinaires dans l’acide muriatique déphi
ogifti que..
Cette décompofition de Veau régale a lieu même
avec quelques fubflances métalliques, car ; comme
le dit l’illuftre Bergman, elle ne forme pas toujours
des fels triples, ou lorfque les fubflances
qu’on lui- préfente font folubles dans l’un & l’autre
acide féparément, les combinaifons qui en ré-
fultent fe diftinguent communément par leur
cryftallifation , du moinsen partie^ .
J’ai déjà annoncé que Veau régale étoit le diflblvant
propre de l’or & de la platine ; les propriétés
de ces diflblutions feront expofées à l’article des
fels produits par Vacide règalin ,. auxquels , fuivant
nos règles de dénominations, je donne le nom
générique de régaltes. Voye£ Régalte de platine,
Régalte d’or, &c.
D’après les eflais que j’ai 'faits fur l’o r , de
Veau régale par imprégnation , je ne puis trop en
recommander l’ufage rdeux gros d’une eau régale ,
ainfi préparée, qui n’étoit pas même faturée de
vapeur nitreufe, ont diflous à froid 12 grains ff-'
d’or de départ qui a été précipité par une feuille
d’étain , partie en pourpre, minéral, partie en or
l é vivifié formant pellicule épaifle*.
Je me félicite de recevoir à temps la troifième
partie de l’excellent mémoire de M. Kirwan, fur
• les affinités des acides minéraux , pour placer ici-
ce qui peut enrichir cet article. Il réfulte de fes
expériences, que les meilleures proportions pour
la diflblutions de l’or font de trois parties d’acide
muriatique réel, & d’une partie d’acide nitreux;
que l’un & l’autre doivent être aufli concentrés
qu’il eft poffible , quoiqu’il foit alors difficile d’en
faire le mélange fans qu’il s’en diflipe une partie,
à caufe d elà violence de l’effervefcence , &
que la dïflblution s’opère mieux à la longue que
par l’application de la chaleur. Suivant ce célèbre
académicien , 100 grains d’or ont exigé 246 grains
d’acide réel dans les proportions ci-deflus ; l’état
de concentration dans lequel il a pris fes acides-
• étoit de 1, 465 de pefanteur fpé'cifique pour l’acide
nitreux , & 1 ,178 pour l’acide muriatique r la chaleur
qu’il y a appliquée n’a pas excédé 90 ou icq
degrés du thermomètre de Fahrenheit (de .26 à-
31 de Réaumur ) ; il ne s’eft dégagé que très-peu
de gas , & la diflblution s’eft faite très4entemenr0-
Il croit que Veau régale compofée' avec l’acide nitreux
& le fel commun ou le fel ammoniac n’éft
plus difpofêe à donner des cryftaux d’or que parce
qu’elle eft naturellement beaucoup moins délayée
que celle qui fe fait par là combinaifbn des deux
acides. Comme il ne paroît fonder cette opinion
que fur une analogie qur pourroit bien, dans le
cas particulier, fe trouver en défaut, on peut fufi-
pendre fon jugement jufqu’à ce ? qu’elle ait été-'
confirmée par l’expérience. Tran/àfl„- philofoph,
Tom. LXXIIL.
U argent ne fe diflbut pas dans Veau régale ; mais
ee n’eft pas à dire qu’il n’y ait aucune aélion réciproque
dans le conta# de ces fubftances ; l’acide
nitreux abandonne l’acide muriatique pour attaquer
le métal ; à mefure qu’il fe diflbut, l’acidfe
muriatique s’en empare, & le précipite fous formé
de muriate d’argent, parce que ce fel eft peu for—
lubie. Ainfi l’argent pafleà l’état de fe l, tkVacicfe
régalin eft décompofé. La feule différence qui fê
rencontre dans la diflblution par l’acide muriati*
que déphlogiftiqué, c’eft que le premier effet réfulte
d’une double affinité', favoir, celle de l’acidè
fur le phlogiftique du métal, & celle de l’air vital
dont l’acide eft furchargé, qui, agiflant fur la terre
du métal à l'a faveur du calorifique , le rend fo-
lublè par l’acide régénéré dans fon état ordinaire;
On emploie Veau régale pour féparer l’o r de l’argent
par une forté de départ inverfe, que MIVF.
Bergman & Leonhàrdi regardent comme le plus-
sur pour obtenir l’or abfdumenf pur’ Voyeç Dépa
rt par Veau régale.
Le mtretire fe comporte dé là même manière
avec Veau régale; c’eft: l’acidè nitreux qui'opère là
diflblution , & l’acide muriatique là décompofé.
Ainfi, tout fe paffe ici commelorfqu’on ajoute dè
l’acide muriatique à une diflblution nitreufe mer-
curidie^ excepté que l’ordre, des phénomènes eft
moins fucceflif & plus rapproché. Il n’y a pas de
doute que le mercure ne porte aufli dans cette
combinaifon la même quantité d’air vital qui eft
ïiéceffaire pour !e rendre foluble ; au lieu de la
trouver dans cet acide même, comme quand il
eft déphlogiftiqué, il le reçoit, ou l’a reçu précédemment
, d’un autre acide qui a fiibi en con-
féquence la décompofition partielle qui fe mani-
fefte dans tous les cas femblables par la production
du gas nitreux. On peut voir à l’article mu-
fiate mercuriel les propriétés du fel qui réfulte de
ces diflblutions. Les différens états dans lëfquels
il fe préfente , de fel corrofif, de fel doux, de
précipité blanc, ne fe prêtent plus aufli arbitrairement
à toutes les hypothèfes depuis que l’on en
connoît la vraie caufe. C ’eft dans tous les cas du
muriate mercuriel corrofif qui fe forme, d’abord,
ainfi que l’a prouvé M. Schéele ( mém. de Chymie,
édit, franc, part. / , pag. 224); mais ce fel a la
propriété de fe charger d’une portion de métal
non calciné , il peut la recevoir ou à lafublima-
tion, ou d’une diflblution nitreufe , dans laquelle
elle fe trouve aufli quand elle eft parfaitement
faturée, & alors il paffe à l’état de muriate mercuriel
doux.-Le précipité blanc n’eft que du muriate
mercuriel doux qui retient accidentellement
un peu de muriate mercuriel corrofif.
Il ne faut pas chercher maintenant d’autre explication
du phénomène dont j’ai parlé à l’article
acide muriatique déphlogiftiqué ( page 138 ) , &
qui ayoit fait croire à l’illuftre Bergman que l’acide
marin ordinaire révivifioit la chaux de mercure ;
ce n’eft plus qu’une féparation de la portion’ de
métal complet qui exiftoit dans la diflblution.
Lors même que Veau régale tient plus d’acide
muriatique qu’il n’en faut pour précipiter tom le
mercure, il en refte toujours dans la liqueur ; ce
qui prouve feulement que l’acide nitreux peut retenir
une portion de muriate mercuriel.
Le cuivre donne dans Veau régale, une diflblution
d’un bleu verdâtre: comme le mélange des
diflblutions nitreufe & muriatique de ce métal
prend la même couleur, il y a lieu de croire,
ainfi que le remarque M. W e ig e i, que Veau • régale
n’agit ici que comme acide mixte, ou , pour
mieux dire , que les produits fe trouvent à la fin
de l’opération de même nature. M. Berthollet . a
obfervé que l’acide muriatique déphlogiftiqué donnoit
promptement aux chaux bleues de cuivre
une couleur verte pareille à celles qu’elles prennent
lorfqifelles font long-temps expofées à l’air.
J’ai éprouvé la même chofe avec la diflblution
nitreufe bleue de cuivre; mêlée dans un flacon avec
de l’acide muriatique déphlogiftiqué, elle a paffé
au verd en quelques heures, tandis que le mélange
d’un acide muriatique ordinaire blanc n’a
fait qu’affoiblir l’intenfité du bleu. On voit tout
de fuite que ce phénomène ajoute aux preuves de |
notre théorie toutes celles que nous avons d’ail- !
leurs de la préfence du principe inflammable dans [k
ces chaux bleues. ( Voye^ C h a u x métallique
& Nitre de cuivré ). On pourroit être tenté de
conclure de ces obfervations rapprochées , que
dans Veau régale l’acide muriatique n’agit pas pré-
cifément comme déphlogiftiqué, puifque donnant
par lui-même, une diflolution verte , & devant
dans cette fuppofition détruire la couleur bleue de
la diflblution nitreufe, la diflblution régaline de-
vroit être abfolument .verte; mais il me paroît aifé
de donner la folution de cette difficulté, Taéîion
des deux acides , qui font Capables d’agir chacun
féparément, met en liberté affez de phlogiftique
dès les premiers inftàns, pour reftiruer à l’acide
muriatique ce qui pouvoit lui manquer & lui enlever
la propriété qu’il reçoit de cette privation ;
le gas inflammable qui fe dégage même dans la
difloluflon de cuivre par l’acide muriatique feul,
eft une preuve affez démonftrative de la furabon-
dance de ce principe : & puifque l’acide muriatique
fec, en état de gas non condenfable par le
froid, prèfente le même phénomène avec, les métaux
, on ne peut plus douter que ce ne foient ces
corps mêmes qui en fourniffent la matière.
Le plomb, lorfqu’ii eft pur , n’eft prefque pas attaqué
par Veau régale. MM. Bayen & Charlard ont
effayé de faire diffoudré dans une eau régale forte
trois grains feulement de plomb ; le matras étant
fur du fable très-chaud, il s’excita un mouvement
d’ébullition qui leur parut êtré celui d’une effer-
vefcefcce ; -maik, après trois heures de feu , les petits
filets de plomb ne fe trouvèrent ni diminués,
ni corrodés. Ces habiles Chymiftes ayant obfervé
que cependant Veau régale ne faifoit pas le départ
de l’étain allié au plomb, prirent le parti d’introduire
dans le matras 9 grains d’étain pur, qui >
ainfi que les 3 grains de plomb, furerit diflous
dans un inftant ( Recherches fur V étain , page 171 )„
Cette expérience répétée avec le -même fuccés ,
tantôt à froid, tantôt » chaud , tantôt avec de
Veau régale forte , tantôt- avec de Veau régale affoi-
blie, préfente deux faits intéreffans ; l’un eft Pin-
diffolubiiité prefque totale du plomb dans Vacide
régalin, l’autre eft un métal qui, par fon alliage
avec un autre, devient très-foluble dans un menf-
true qui n’avoit fur lui qu’une très-foible aefion*
J’ai déjà donné un exemple du dernier, d’après
l’obfervatïon de M. T ille t , fur la diffolubiiité de
l’alliage de platine & d’argent dans l’acide nitreux.
Il y a ici une circonftarice de plus, & qui eft-
bien favorable à l’hypothèfe que j’ai propofee fur
la force peu eonnue des diflolvans compofés ; c’eft
qu’il n’eft pas befoin que les métaux fbient alliés
d’avance , Veau régale agit fur le plomb dès qu’elle
a commencé à prendre de l’étain.
L’étain fe diflbut dans Veau régale forte ou concentrée
, préparée- de la manière que j’ai précédemment
indiquée, avec rapidité. & chaleur fpon-
tanée confidérable. Suivant MM. Bayen & Char-
lard , de bifmuth allié à l’étain fuffit pour rat'-
lentir l’aâion de l’acide > au point que la quantité