
454 . A C I
la mafle jufqu’au milieu de la fonderie, les ouvriers
avec des leviers aident à la diriger, l’on entoure
cette maffe tout autour & fur fes bords de charbon-
naille fur laquelle on jette du charbon hume&é, afin
d'empêcher que la chaleur n’incommode les ouvriers
qui partagent çette maffe, comme il fuit. On
a dit qu’on laiffoit du charbon fur fon milieu, c’eft
afin dê la tenir chaude & qu’elle foit plus facile à
couper. On ôte ces charbons, & deux hommes,
avec chacun une hache, frappent dans le milieu de
cette maffe ; quand ils font parvenus à lui faire une
entaille jufqu’au milieu de Ion épaiffeur, ils y mettent
des coins qu’ils enfoncent avec de gros marteaux
, & enfin ils parviennent à la partager en
deux pièces ; il faut plus d’une heure pour ce trav
a il, qui d’ailleurs eft très-pénible. On coupe ainfi
cette maffe afin de la raffiner avec plus de facilité ;
elle pèfè communément de 13 à 14 quintaux. Les
morceaux de fer détachés pèlent, comme nous l’avons
déjà dit, 6 à 7 quintaux 3 de forte que chaque
fonte donne toujours 20 quintaux, tant acier que
fer. Pendant que deux ouvriers coupent la maffe,
»ois autres font occupés à réparer le fourneau ; ils
jettent du pouflier de charbon dans le fond, & en-
fuite ils y font tomber de la pouflière de charbon
qui s’élève pendant la fonte & qui fe raffemble autour
du gueulard à la bafe de la cheminée qui
furmonte le fourneau. Ils jettent de l’eau pardeffus,
& pour la rendre plus compare & plus unie, ils
battent le tout avec une pelle. Enfuite ils reconf-
truifent le mur, démoli pour fortir la maffe, de la
manière fuivante. L’on commence à placer dans le
milieu de la longueur de l’ouverture une groffe
ièce d’argille bien pétrie & de la forme d’une
rique, de 4 pouces d’épaiffeur, 14 pouces de
longueur & autant de largeur , on la pofe de champ
de manière qu’elle entre de 10 pouces dans l’intérieur
du fourneau ; c’eft dans cette première pièce
que l’on forme la tuyère, on met d’autres briques
à côté de celle du milieu, mais ceües-ci n’ont que
2 à 3 pouces d’épaiffeur & 8 à ro pouces en
quarré, on les place auffi de champ de manière cependant
que les grandes faces foient en dedans &
en dehors du fourneau, on bouche les joints de ces
briques avec de-la même argille bien délayée 3 l’on
forme ainfi toute la grande ouverture ; enfuite l’on
enfonce un bâton pointu dans la brique du milieu
à 12 pouces au deflbus du fourneau ; ce trou fervant
de tuyère a 3 pouces de diamètre fur le derrière,
& feulement 18 lignes en dedans - du fourneau , &
s’élève tant foit peu de ce côté 3 l’on ne fait pas
ufàge d’autres tuyères à Eifen-Ert^ pour les hauts
fourneaux 3 après cette reconftrnétion de mur, l’on
remet les foufflets à leur place, l’on remplit le fourneau
de charbon & pardeffus une tonne ou mefure
de minerai grillé que l’on recouvre de charbon, &
l’ on donne le vent. ^ - *
Il faut 18 heures pour fondre les 13 mefurës
de minerai dont nous avons parlé, pour retirer la
maffç & remettre le fourneau en état 3 de forte que
A c î
la fonte s’opère en 15 heures ou environ , & w
3 heures de plus font employées à fortir la maffe
à la couper & à réparer le fourneau ; il finit quel!
quefois un peu plus ou un peu moins de temps • «a
mais les ouvriers font obligés de faire 7 maffes par
femaine, qui font, à 20 quintaux chacune, 140
quintaux, qui font le réfultat de 91 tonnes de minerai
, du poids de 3 quintaux A, ce qui, pour les
91 » fàh 318 cjuintaux D ’où il réfulte que le minerai
donne à très-peu près 44 pour cent. La con-
fommation du charbon eft pour le moins auffi con-
fidérable dans cette fonte qu’à celle des
L on voit par le détail qui vient d’être donné, que
la manière de foire les maffes eft très-pénible &
couteufe. L ’on penfe que l’on pourroit parvenir à
faire des mafles, auffi par coagulation dans le fourneau
, d une maniéré plus fimple , moins embarraf-
fonte 8c moins difpendieufe, même dans des hauts
fourneaux. Lifez dans cet ouvrage, au mot F e r , la
man.ere de le foire , auffi par coagulation , aux forges
catalanes. Dans l’une 8c l’autre manière de procéder,
la mfion de la. mine donne de fuite du fer malléable,
& même de l’acier 3 ficelle de*Styrie procure
plus de ce dernier, cela peut provenir de plufieurs
caufes ; la nature des minerais qui font tous
très-riches & fpathiques, y contribue certainement
beaucoup, enforte que], quand on ne voudroit y
foire que du fe r , on ne le pourroit pas 3 car dans
lun & l’autre procédé que nous venons de décrire,
Ion a vu 1°. qu’il n’y avoit dës*^/>quê la fonte
gnle qui fut propre à foire du fe r , encore fout-il
que ces floff reçoivent un feu de grillage avant de
paffer aux affinëries. 20. Que la fonte blanche don-
noit tout de fuite l’acier. 30. Qu’il n’y avoit nue
les parties qui étoient arrachées du fourneau avec
des croards & celles qui couloient avec les laitiers
du grand fourneau à foire les maffes, qui fuffent
propres à foire du fer aux affineriès 3 ce fer même
contient encore de l’acier. 40. Enfin, que la groffe
malle coagulée eft prefque toute d’acier, comme on
va le voir en traitant de fo purification par l’affi-
nage. La couche de fraifil, ou poudre de charbon
mife au fond des fourneaux, contribue auffi beau-
à faire l’acier qui fe cémente en prenant du
plilogiftique, fur-tout dans les fourneaux par coagulation
, où la matière féjourne long-temps ; auffi cet
acier eft-il meilleur que celui qui vient des fiolf ou
fontes ; & l’on nous a dit fur les lieux que,ce
dernier ne pouvoit pas fupporter autant de chaudes
mantes que l’acier provenant des maffes, fans, fe
convertir en fer. S i , comme en Styrie, l’on met-
toit dans les fourneaux ^le fonte une couche, de
charbonnaille bien battue, que l’on confommât autant
de charbon & que l’on ne prefsât pas plus
la fonte , l’on obtiendrait auffi de l’acier, particulièrement
avec des minerais fpathiques ; nous n’en
manquons pas dans plufieurs Provinces de France.
Le fourneau ou foyer fervant à l’affinage des
maffes, eft femblable à celui ou l’on affine la font«
blanche pour la convenir en acier.
A C I
Lorfqu’il s’agit de foire cette opération, l’on met |fur le fond de l’affinerie une couche de fraifil que j
l’on humeéfe avec beaucoup d’eau , on la preffe avec
■ «une pelle, on jette deffus un peu des laitiers d’une
précédente fonte & qui ont été éteints dans l’eau,
fon remplit entièrement le foyer de charbon, l’on
porte deffus la moitié d’une des maffes ou loupes
d’acier dont on a parlé, on la recouvre entièrement
de charbons, on y met.le feu &■ l’on fait agir les
foufflets 3 l’on y ajoute du charbon lorfqu’il en eft
befoin, & l’on continue jufqu’à ce que la maffe ou
loupe devienne d’un rouge-blanc 8c pâteufe : pendant
ce temps , il fe raffemble du laitier au fond de
l’affinerie 3 lorfqu’il y en a une certaine quantité,
on le fait couler, par le chiot, dans le baffin de
réception où l’on a mis de l’eau , afin de le refroidir
plus promptement & de le rendre plus friable.
L’on foit/ cette coulée par le trou le plus élevé du
chiot, afin qu'il refte dans l’affinerie une bonne
quantité de- laitier 3 il fé détache de la maffe des
parties de fe r , qui, avec le laitier, prennent le
fond du fourneau 3 ce fe r , en fe raffinant, prend
de la confiftance, on le raffemble dans une loupe
dont on fait d’excellent fer nerveux.
Lorfqu’avec un ringard que l’on plonge à travers
les charbons , l’on reconnoît que la maffe d’acier
eft affez tendre pour fe laiffer piquer dans toutes
fes parties, on ceffe le feu 3 cette opération dure
cinq à fix heures. L’on découvre la maffe, on la
faifit avec une groffe tenaille fufpendue à l’un des
bouts d’un grand levier, qui lui-même l’eft au bras
d’une grue mobile for fon pivot 3 un féul homme
appliqué à l’autre extrémité du levier enlève la maffe,
& en faifont tourner la grue, la place fur l’enclume3
l’on foit agir le marteau afin de l’applatir un peu,
l’on pofe un couperet q u i, recevant les percuffions
du marteau, partage la maffe en deux morceaux,
l’on en porte un fur le même foyer afin qu’il y con-
ferve la chaleur, tandis que l’on partage l’autre
encore en deux pièces, & ces deux pièces en plufieurs
autres, de manière que chacune d’elles pèfe
depuis 25 jufqu’à 40 livres. L’on '•réduit ainfi en
morceaux la pièce que l’on a remife au feu pour
y conferver fa chaleur.
Nous obferverons ici qu’en coupant 8c divifant
la maffe, il s’en détache de petits morceaux 8c grumeaux
qui tombent au pied de l’enclume 3 ces grumeaux,
qui font de fer, femblentne tenir que très-peu
à la maffe d’acier , de la furface de laquelle ils fe
détachent aifément par les feules fecouffes du marteau,
ils font auffi beaucoup plus mous que l’acier,
c’eft ce qui les foit reconnoître à l’ouvrier. Lorfqu’on j
a une certaine quantité de ces grumeaux, on les
paffe à l’affinerie pour en foire du fer.
Ces morceaux de fer qui tiennent à la partie extérieure
de la groffe maffe, prouvent que cette maffe
etoit déjà convertie en acier dans le haut fourneau
, qu’il n’y a eu que ces parties extérieures expo-
fées au vent des foufflets & au contaél de la flamme,
flui ont foit du fer de. nature en perdant leur phlo-
A C I 455
[
glftique 3 tandis qu’il fe trouvoit retenu & concentré
dans le corps de la maffe, q ui,'d ’une part, repofé
1 fur des fraifils qui lui en communiquent inceffam-
ment, 8c, de l’autre , eft environné de laitier quf
en empêche la diffipation : d’ailleurs, cette maffe
d’acier peut auffi perdre dans le fourneau d’affinage
une partie de fon phlogiftique ou principe confti-
tuant de l’acier, & ce font toujours ces parties fii-
perficielles, qui, ici comme dans le haut fourneau ,
y font les plus expofées 3 il n’eft donc pas furpre-
nant qu’il fe trouve du fer autour de la maffe d’acier
, 8c que cette maffe en contienne un peu dans
fon intérieur, ainfi qu’on le verra plus loin.
L’opération que nous venons de décrire eft plutôt
un chauffage qu’un affinage 3 en effet, fon plus
grand objet eft de ramollir la maffe pour en faciliter
le dépecèment.
Tous les morceaux d’acier provenans de la maffe
font chauffés au charbon de bois fur un foyer à
ce deftiné. Lorfqu’ils ont acquis le degré de chaleur
convenable, e’eft-à-dire affez fuante pour fe
fouder, on les porte au marteau, on_ les étire en
barres d?environ 15 lignes en quarré 8c de plufieurs
pieds de longueur 3 en fortant de deflbus le marteau
& encore d’un rouge de cerife, on jette cet acier
dans un courant d’eau de rivière 3 lorfqu’il eft froid,
on le caffe en bouts en en frappant une enclume,
ce qui s’opère d’une grande facilité, fur-tout dans
les morceaux qui ne contiennent point de fer. Cet
acier n’ayant pas toute la perfe&ion dont il eft
fiifeeptible, fe nomme acier brut ; afin de lui donner
plus de fineffe & plus de qualité, on lui foit
fubir' l’opération fuivante.
Il eft livré aux ouvriers inartineurs qui examinent
tous les morceaux l’un après l’autre, ceux qui, à
l’infpeéiion de la caffurè, préfentent quelques veines
ou parties de fe r , font mis féparément de ceux
qui font acier pur 3 celui-ci eft nommé acier dur,
& le premier acier tendre ; ce triage étant fait, l’on
en met plufieurs morceaux à la fois vis-à-vis la tuyère
d’un foufflet, on les y fait chauffer au charbon de
bois, lorfqu’ils font chauds on les porte fucceffive-
ment fur l’enclume d’un martinet, on les y étire en
lames plattes de 20 jufqu’à 24 lignes de largeur,
feulement de 3 à 4 d’épaiffeur, & ils coupent ces
laines d’environ un pied de longueur. Ces inartineurs
recOnnoiffent encore ici les morceaux qui contiennent
du fer , ce qu’ils diftinguent à la réfiftance qu’il
oppofe au martinet, car celui qui contient du fer
étant plus mou , en reçoit de plus grandes vimprefo
fions, il eft rangé dans la çlaffe de l’acier tendre. Ces
lames d’acier ainfi préparées paffent au procédé fui-
vant.
L’on en forme des paquets ou trouffes compofées
de 12 à 15 morceaux pofés les uns fur les autres,
en obfervaiit que le premier & le dernier, c’eft-à-
dire, les 2 pièces fervant de couverture à la trouffe,
foient d’acier mou.
L’on faifit cette trouffe par un de fes bouts avec
une tenaille faite exprès, on la ferre fortement avec