
donne en fe filtrant au travers-, la toile ou même
le drap, qui opère.avec d’autant plus d’énergie,
d’autant plus de rapidité,' que les fubftance s font
plus dmfées , qu’il y aborde plus facilement, que
les points, de contaél font plus multipliés, qu’il
fe renouvelle' plus promptement, & que fon action
eft favorifée par une température plus chaude ;
la matière qu’il s’approprie n’eft pas feulement
réduite en parties fubtiles, fa faveur & fon odeur
font abfolument changées , fes propriétés fenfibles
font détruites, elle en a acquis d’autres par com-
pofition r le fuc gaftrique agit donc à la manière de
tous les diffolvans. Les faits qui concourent à établir
cette conféquence ont été vérifiés plufïeurs
fo is , & dans des crrconftances différentes , par
Mr Spallanzani ( g. 4 3 ,6 9 ,. 87 ,10 1 , 142, &C.}.,
La maftication de l’homme, la rumination du
boeu f, la macération dans le géfier des gallinacés
font utiles à la digeftion pour divifer & détremper
les alimens; mais c’eft toùjours le fuc gaftrique
qui les diffout. Les alimens arrêtés dans l’oe fo
phage des hérons , des corneilles, &c. y éprouvent
à la vérité un commencement de digeftion, mais
les progrès de cette digeftion font bien lents en
comparaifon de celle de l’eftomac; & puifqu’elle
a lieu lors même que ces alimens'font enfermés
dans des tubes qui les défendent de tout broiement,
elle eft encore le produit de- l’a&ion diflblvante des
fucs que fournit l’oefophage de ces animaux ( g . 99).
Ces fucs n’agiffent pas comme ferment, ils ont
au contraire une vertu antifeptique très-puiflante ,
il n’y a pas la moindre apparence de mouvement
înteftin ; en tenouvellant continuellement le fuc
comme dans l’eftomac, les matières s’y diflblvent
avec une rapidité qui exclut toute idée de fermentation
; en un mot il ne s’échappe que quelques
bulles d’air qui adhèrent à la fubftance alimenteufe,
qui la font furnager , & qui font probablement
chaffées par là chaleur & par la diftblution. M.
Spallanzani a fnivi quatorze-fois ces obfervations
fur les fucs gaftriques de divers animaux (§.336.)
Concluons donc avec ce favant, que la digeftion
n’eft produite ni par trituration, ni par fermentation,
ni par ces deux moyens réunis, mais abfb-
lument par une vraie diffolutiorJ ; & puifque fous
ce point de vue elle rentre dans l’ordre des phénomènes
chymiques, examinons la nature de ce nouveau
diftblvant fi.aâif.
Les fucs gaftriques ne font pas les mêmes dans
les différens animaux, mais- ils ont tons des propriétés
communes ; ils diflblvent avec plus- ou
moins de facilité les fubftauces végétales & ani-
males ; il paroît encore qu’ils ont tous une vertu
antifeptique, -
M. Bnignatelli a reconnu que le fuc gaftrique
desodeaux carnivores, comme la chouette, le faucon
,1e milan , &c, étoit très-peu aqueux , qu’il
avoir, une odeur acide réfinpufe , qu’il étoit très-
amer , qu’il étoit compofé d’un acide libre-, d’uné
réfine & d’une madère animale unie à une petite
quantité de fel cortimun. ( DM, de Macqüer , addit
de M. Scop&li. )
Il a de même trouvé le fuc gaftrique acide dans
les geais, les merles, &c. qui font omnivores, &
dans les granivores, tels- que les poules-d’inde , les
poules ordinaires, les canards , les cailles , les
moineaux,. &c.
Suivant le même auteur, le fuc gaftrique des
animaux rumirians, tels que la chèvre, le mouton
, &c. eft au contraire très - aqueux, un peu
trouble , d’une faveur faîée , amère ; il contieqt
de l’alkali volatil, une fubftance extraâive animale,'
& une affez grande quantité de fel commun. M.
Carminati convient également que le fuc gaftrique
de ces animaux eft en parrie ammoniacal j
mais il le regarde comme acide dans le principe,
& penfe que l’àlkali volatil tju’il manifèfte peut
venir de la putréfàéHon des herbes qui féjournent
long-temps dans l’eftomac de ces animaux. ( Ob-
fervations fur Vufage du fuc gaflrique en chirurgie, &c»
par M. Sennebîer. )
J’ai fait digérer plufieurs fois à chaud & à froid,
dans l’eau diftillée, des portions de la tunique interne
de l’eftomac des veaux , j’y ai verfé de l’efi*
prit-de-vrn qui y a occafionné un précipité, & la
liqueur filtrée a toujours altéré fénfîblement le
papier bleu en rouge.
Il n’y a rien de certain , dit M. Scopoli, fur le
fùc gaftrique humain ; on fait qu’il eft quelquefois
acide, & que d’autres fois il ne l’eft pas; ce que
prouvent les renvois acides ou fades qu’on éprouve,
même dans l'état de famé , foit à jeun, foit pendant
le temps de la digeftion.
Quelques-unes des expériences de M. Spallanzani
femblent annoncer que cette qualité acide dépend
beaucoup des alimens. Les oifeaux de proie ne lui
ont jamais donné des fignes d’acidité , en .quoi U
n’eft pas d’accord avec MM. Bnignatelli & Carminati
; il en dit autant des ferpens, dés grenouilles,
des poiffons. Les corneilles lui ont donné une
pâte alimentaire acidulé, mais c’étoit lorfqu’elles
avoient. été nourries de végétaux; il a fait la même
obfervation fur des chiens, fur les herbivores &
fur les gallinacés. Les oifeaux carnivores rendirent
des fragmens de coquilles & de corail, fans qu’ri
partit, la moindre altération ; au contraire, ces
fubftances furent fenfiblement diminuées dans l’ef-
tomac des gallinacés, lors même qu’elles étoient
renfermées dans des tubes, ce qui prouve que ce
n’étoit pas l’effet de l’érofion par l’aélion des muf-
cles. M. Spallanzani a avalé lui-même des fubftan-,
ces calcaires renfermées dans des tubes ,& quand
il s'étoit nourri de légumes & de fruits, elles étoient
quelquefois altérées & un peu diminuées de poids,
comme fi on les eût mis dans du vinaigre affoibli ;
quand il s’étoit nourri de viande, elles étoient in*
taéles ( §,.240,241 ). On peut ajouter ici le témoignage
de M. Gô£Te, qu’il n’a pu foytenir longtemps
l’ufage des'végétaux cruds, parce qu’ils lui
donnoient trop de renvois acides. Enfin M. Monch»
japrès avoir rémarqué que la magnéfie calcinée
«’étoit foluble en aucune manière dans le fuc gaftrique
de différens animaux, allure néanmoins avoir
vu un fuc gaftrique vomi par un hypocondriaque
•.qui étoit acide, qui faifoit forte eftervelcence avec
tes yeux d’écrevifles , & qui prit 2 grains de chaux
de magnéfie. ( Crell, N eue fl. Entdeckung, part, I ,
page 46. ) ■
M. Spallanzani croit que dans fon état naturel le
tue gaftrique n’eft ni acide, ni al'kalin, mais -neutre.
•La raifon qii’il en donne , que l’acide qui fe rnani-
iefte au commencement de la digeftion dans l’efto-
■ mac de quelques animaux difparoît confia minent
fur la fin, eft peu confid érable par elle- nu me.,
parce qu’il ferôit tout fimple que l’acide fût mâf-
qué par la faturation avec les alimens; mais ce
»qui mérite bien plus-d’attention , c’efi que les fucs
;gaftriques verfés dans la diflolution du méphite
'de potaffe n’ont jamais fait effervefcence (§. 244) ;
•ce qui démontre «ou -qu’ils ne tiennent point d a-
«cide libre., ou que cet acide n’efi pas allez puiffant
pour déplacer l’acide méphitique : on fait que les
acides pruffique 8i. lithiafique font dans ce cas.
Si l’on confidëre qu’en effet les alimens ne font
<m des alkalis, ni des terres folubles , que le chyme
ne reffemble en -rien aux produits des combinaisons
fali-nes'fimples , & que fi le Suc gaftrique-agit
réellement comme diffolvant, il n’agit pas comme
■ diffolvant acide , il paroîtra très-probable que c’eft
îiine fubftance d’un autre ordre , dont l’aélion plus
lente , mais plus énergique , dont les affinités presque
égales fur une infinité de matières très-diffé- :
«rentes indiquent un agent bien plus compofé, qui
«e fe choifit pas une feule bafe , qui n’en quitte
pas une pour en prendre une autre, q\ù s’unit .au
«contraire à des corps tr.ès-compofés fans fe .décom-
ïpofer lui-même.
Ces réflexions cependant ne peuvent détruire
Jes faits qui établiffent dans les fucs ^gaftriques un
•acide tantôt manifefte, tantôt à l’état de fel neutre,
il n’eft pas moins important d’en découvrir la
nature. M. Èrugnatelli préfiwne que ce peut être
4’acide phofphorique, parce qu’il a cru le -re.co.n-
aïoître dans cette mafière blanche dont j’ai parlé,
•qui accompagne les excré.mens des oifeaux carnivores
; mais il «’a jugé l’acide que par des précipitations
qui ne font pas décifives, ■ & il reftera
•loujôurs des doutes fur l’identité de cette matière
blanche, ou de fon acide avec le fuc qui .opéré
la première digeftion dans l’eftomac.
M. Scopoli a trituré du fuc gaftrique de cor- :
vieille, avec de la potaffe cauftique & de la chaux
vive, & il a fenti diftinélement une odeur uri- ;
•neufe & fétide, i l a -un peu altéré -en verd le firop •
yièlat. Verfé dans la diflolution nit-reufe d’a r g e n t î
a donné «n précipité qui reffembloit au mnriate
cd argent, ©eux gros évaporés lentement fur le feu'ï
ont laiffé 2 grains.de matière grife qui s’humeaoit
a A-air , qui avoit une odeur >défagréable, & ne fai •
4ült d’oint effçryefcerx.e avec les.acides, Traité à la
dîftillation , îl donna du flegme ayant l’odeur d’em-
pyreume;il s’attacha au ventre de la cornue une
fubftance blanche qui, triturée avec la -chaux , ma-
nifefta ifodeur urineufe ; le réfidu av-oit la cotifif-
tance d’extrait, fon odeur étoit empyreumatique»
•fon goût falin , amer & nauféabond ; il ne fit effer-
yefcence ni avec les acides, ni avec les alkalis.;
jetté -dans la diffoluticn de potaffe, il en dégagea
uné odeur très-pénétrante-d’alkali volatil. ( Expèr.
fu r la digeflien, §. a.44. )
De là , M. Scopoli conclut que le fuc gaftrique
•fain eft compofé d’ea u , d’une fubftance favon-
neufe .& gélatineufe animale, de fel ammoniac
& d’-une terre fcmblable à celle que fourniffent
toutes les liqueurs animales. Comme on ne voit
pas que ce Chÿmifte ait jugé de la nature de l’acide
autrement que par l’apparence du ptécî-
pité falin d’argent, il s’en faut bien q-tie la preuve
foit fuffifante , .p.uifqu’il y a déjà d’autres acides
connus qui précipitent auflî ce métal. Ces doutes
•font d autant plus permis, que l’auteur porte plus
loin les conféquences de ces réfukats : il va jufqu’à
foupçonner que l’acide -muriatique efl produit par
les forces vitale s fans les animaux ; il regarde le fait
comme prouvé , fi le fuc gaftrique des animaux qui
•fe nourriffent de végétaux fournit auflî du fel ammoniac
; & M. .Spallanzani affure qifaprès avpir
nourri pendant quinze jours cinq corneilles uniquement
avec des végétaux , il en a tiré un fuc gaftrique
q.ui lui adonné demême un précipité de lune
cornée..
Je n’ai pas befoin d’avertir que fion exige aujourd’hui
des expériences" plus-fuivies, des preuves
plus multipliées pour établir l’identité d’un acide ,
-à plus forte raifon pour affeoir un fyftême auflî
nouveau ; mais tous ces phénomènes n’ajoutent
pas moins a 1 interet .de la queftion, ils ne font pas
moins utiles pour diriger les recherches qui refteht
à faire, afin de déterminer la nature de l’acide
q u i, dans le fuc gaftrique, met l’alkali volatil en
état de fel neutre ammoniacal.
Les obfervations que. l’on .peut recueillir fur les
propriétés du fuc gafirique font de meme fort loin
d’en completter le fyftême. C ’eft une Angularité
fort remarquable , comme le dit -M. Spallanzani^
que cette liqueur foit à-la-fois un diffolvant & .un
antifeptique; elle .-ne fo corrompt pas, même à une
température chaude ; elle empêche la putréfaâicn,
& même elle rétablit les chairs déjà putrides ^ , g.
M1 » 25^ >. 363 ) • elle agit donc bien différemment
des .fubftances qui ne font antifeptiqnes tjue parce
qu’elles maintiennent la folidité des parties animales*
M. Spallanzani .a été obligé de charger l’eau de
vingt fois au tant-de fol .ammoniacal pour lui .donner
la même vertu.
e,-ne .diiiolvent pas les graineseéréales, ni le
pain , même -mâché ( g. 17^ y- cependant le fuc
gaftrique du faucon .attaque lies cmatièies ooffoufias