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Cette expérience a été répétée au dernier cours
public de l’académie de Dijon., fur le fain-doux;
& à la fécondé diftillation de l’acide nitreux, il
s’eft formé par refroidiffement dans la cornue une
quantité de cryftaux blancs qui étoient de l'acide
faccharin concret.
Quand l’huile eft vieille & rance , le fyrop
tient un peu de chaux de plomb ; fi elle eft frai-
. che, l’acide vitriolique n’y occafionne aucun précipité
falin métallique. Ce fyrop ne fe eryftallife
pas ; fi on l’expofe à une grande chaleur, la fumée
prend feu & brûle avec flamme ; fa diftillation
exige le même degré de chaleur que l’acide
vitriolique, il s’en élève une partie fans fe dé-
compofer , confervant fa faveur ; il devient enfuite
empireumatique, & il monte à la fin une huile
noire qui a l’odeur d’efprit-de-tartre. Si l’on répète
ces diftillafions, à chaque fois le feu décompofe
une nouvelle partie du principe doux qui peut à
la fin être détruit..
Ce principe fucre, produit en quelque forte par
l’art, ne fermente pas, car ayant été mêlé avec
l’eau, & laiffé pendant quatre mois à une température
convenable, il n’a point rougi l’infufion de
. toürnefol; il fe mêle avec l’alcohol depotaffe,ou
efprit-de-vin tartarifé > ce que ne fait pas le fyrop
de fucre ni le miel; mais il s’empare de l’alkali,
6c fe précipite avec lui» fous forme de magma
épais.
M. Schéele a aufli fait bouillir fur la chaux de
plomb de l’huile d’olive qui avoit été précipitée
du faw n par l’acide vitriolique , & il en eut éga-
lement un peu de principe fucré. Il en retira aufli ,
à la vérité,. en petite quantité de l’huile féparée
de l’emplâtre drachylon par le moyen de l’efprit-
de-vin & de l’acide vitriolique.
M. Veftrumb a aufli cherché Y acide faccharin
dans l’huile, d’après ce que le dodeur Murray avoit
publié de la méthode de M-. Schéele ; il a obtenu
de l’huile d’olive un fel qui fe fublimoir,. & qui
étoit facilement réduit en cryftaux ; il a reconnu
qu’il falloir trente-fix parties d’acide nitreux pour
en décompofer une d’huile d’olive ; & en opérant
fur 2 onces de cette huile (probablement par la
diftillation avec l’acide nitreux ) , il a eu une liqueur
qui reffembloit beaucoup à l’huile animale
de Dippel. Chemifch, annaL-ijè^., part. 3^
§ . V . De la nature & des propriéÿs de- l’acide
faccharin..
I. L’acide faccharin a des propriétés communes
à tous les acides-; il en a qui n’appartiennent qu’à
quelques acides, il en a qui lui font propres &
qui le cara&érifent être de Jon genre ; l’illuftre Bergman
les a décrites avec beaucoup d’eXaditude.
Ses cryftaux ont une‘faveur très - piquante ;H
n’en faut pas plus de7 grains dans une pinte d’eau
pour lui communiquer une acidité, fenfible,. M.
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Hermftadt regarde comme une propriété particcra-
lière à ces cryftaux, de fe difloudre avec bruit'
dans l’eau froide. M. Sage a obfervé pendant cette,
diflblution un refroidiffement de 4 degrés.
Cet acide altère toutes les couleurs bleues végétales,
excepté celle de l’indigo. Un feul grain-
diffous dans 1920 grains d’eau, rougit bientôt le
papier bleu qui couvre les pains de fucre, fur lequel
les acides foibles n’ont point d’aélion ; un
grain fuflit pour donner à 3600 grains- d’eau (ou
6 onces 2 gros) la propriété d’altérer en rouge le
papier coloré en bleu par le tournefel..
L’eau diftillée,au degré de l’ébullition, diffout
une quantité de cryftaux d'acide faccharin égale
à fon poids ; elle n’en diffout que moitié à la température
moyenne de 12 degrés au-deffusde zéro:
la liqueur paroît d’abord un peu trouble , mais par
la fuite elle devient parfaitement lympide ; la pe--
fanteur fpécifique de cette diflblution eft 1,05-93.
Si on évapore là diflblution , d’eau n’en emporte
rien même au degré de l’ébullition.
Cent parties d’efprit-de-vin bouillant diffolvent
cinquànte-fix parties de. cet acide en cryftaux, c’eft-*
àrdire , le double du fuere & plus ; à la chaleur
moyenne il ne s’en diffout que quarante. La diffo-
lution .devient un peu trouble & dép.ofe un fédir
ment muqueux qui va à peine à 3*-de l’acide.
L’acide vitriolique concentré prend avec les cryfe
taux une couleur brune, & détruit ce fel à la longue,
fiir-toutà l’aide de la chaleur. L’acide vitriolique
délayé les diffout facilement, mais il n’altère
que leur cryftallifation ; on peut, les retirer
feus forme dë. petites aiguilles-
L’acide nitreux diffout avidement l’acide du fucre;
le mélange prend une couleur jaune lorfqu’il eft
expofé à l’aftion de la chaleur; on retrouve les
cryftaux après le refroidiffement, mais le plus
fouvent irréguliers. Si l’on réitère ces diffolutions
& digeftions, Y acide faccharin fe détruit à la. fin
entièrement, & on n’apperçoit plus de cryftaux.
Ces cryftaux .fe diffolvent dans l’acide muriatique
6c dans l’acide acéteux., mais ils n’y éprouvent aucune
altération.
Ils- ne fe. diffolvent que diflîcilément dans l’éther.
Ils font folubles dans les huiles effentielles &
dans les huiles graffes ; on peut les retirer par une
évaporation ménagée; l’acides’éleveroit lui-même
à un feu trop violent.
- La manière dont cet acide fé comporte au feu
mérite fur-tout attention, par les conféquences que
l’on en peut tirer pour déterminer fa nature.
« Ses cryftaux ( ditM. Bergman') expofés à une
» chaleur qui êxcède le terme moyen , fe-cou-
: » vrent d’une croûte, deviennent opaques, fé ré-
» folvent enfin tout entiers en pouflière blanche ,
» & perdent environ y^de leur poids; ils le re-
. » couvrent très - promptement quand on les exr
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» pofe à l’air humide. Ces cryflaûx, en vieillif-
t> fant, prennent une forte de duvet prefque fem-
» blable à celui qui paroît fur lés luts pendant les
ï) diftillations, mais qui conferve tous les carac-
» tètes de l’acide.
» Cet acide expofé à un feu doux dans de pe-
» tits vaifleaux diftillatoires, peu élevés & bien
j, fermés, perd d’abord fon eau de cryftallifation,
» qui va à du tout ; à- un feu plus fort, il fe
» liquéfié bientôt, & acquiert une couleur brune
v en bouillant ; il paffe un peu de phlegme dans
» le récipient; le lu t, qui eft à la jointure de la
» cornue fe couvre d’une effervefcence acide ; il
v fe fublime une croûte blanche faline, la violence
n du feu en fait même paffer quelque chofe dans
» le ballon ; mais la plus grande partie fe détruit,
1» laiffant dans la cornue une maffe brune ou
» grife, de la valeur de des cryftaux , qui a
v une odeur empireumatique, qui noircit l’acide
m vitriolique concentré, qui jaunit l’acide nitreux,
» & qui fe diffout- dans l’acide muriatique fans lui
» caufer d’altération. Ce réfidu s’évapore au feu
» dans un vaiffeau ouvert, & n’y laiflè qu’une
» tache blanche.
n L’acide du fucre , qui a été fublimé , fe remet
n facilement en cryftaux ; il paroît qu’il s’eft feu-
» lement purifié en perdant toute la manière graffe
n qu’on peut lui enlever fans le détruire. On
» trouve dans le récipient une liqueur acide qui
v précipite l’eau de chaux qui a tous les caraélères
» de l’acide du fucre , maïs qui ne donne pas faci-
» lement des cryftaux. Il s’élève une grande quan-
j> titéde vapeurs élaftiques qui exhalent une odeur
» piquante & empireumatique q^iand on fépare
» les vaifleaux».
279 grains de cryftaux d’acide faccharin ont
donné à M. Bergman dans cette opération 109
pouces cubiques de gas , dont moitié s’eft trouvée
de l’acide méphitique qu’il a aifément féparé par
l’eau de chaux, & moitié du gas inflammable qui
• a brûlé avec une flamme bleue. M. Fontana a re- i
tiré d’une once du même acide concret 43 2 pouces
cubiques de fluide élaftique, dont le tiers étoit
de l’acide méphitique, & le furplus du gas inflammable
mêlé à un peu d’air commun. ( Journ. phyf
tome XII,page 184). Ces réfultats paroiffentfort
différens pour les quantités ; mais il n’eft pas fur-
prenant que M. Fontana, qui s’étoit propofé de décompofer
Yacide faccharin autant qu’il étoit pofîir
ble par le fe u , ait eu en produit gafeux près du
double de M. Bergman, qui n’a eftlmé que la portion
de gas qui fe féparoit pendant la première
fublimation de l'acide faccharin dans les vaifleaux
diftillatoires.
Lorfqu’on fait fubir à cet acide line fécondé fii-
blimation, il jette une fumée blanche qui, en fe
condenfant dans le récipient, produit une liqueur
acide non colorée , mais non cryftallifable. Il s’attache
aux parois & au col de la cornue un peu
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d'acide fublimé peu altéré; il relie au fond une
matière grife. ï
M. Bergman a voulu fublimer une troifeme fois
cet acide, mais l’abondance des vapeurs élaftiques
fit, éclater le récipient ; il recueillit cependant un
peu de liqueur acide qui laiffa un réfidu par l’évaporation
à ficcité , & la matière reftée dans la cof-
nue étoit blanche.
L'acide faccharin expofé au feu dans des vaife
féaux ouverts eft bien plutôt altéré; il s’en- eleve
une fumée qui afteéle défagréablement le nez 6c
les poumons; le réfidu eft beaucoup plus blanc;
il n’eft pas queftion de matière charbonncufe
comme quand on brûle l’acide tartareux.
L'acide faccharin attaque avec effervefcence les
méphites terreux & alkalins.
Il enlève la terre calcaire à tous les acides.
Il forme avec les bafes terreüfes des fels non
déliquefcens, 6c même très-peu felubles. -
11' enlève quelques chaux métalliques à tous les
autres acides, 6c forme des fels folides pulvéru’
lens avec plufieurs de ces chaux qui ne donnent
avec les acides nitreux 6c muriatique que des com-
binaifons incryftallifables.
Telles font les propriétés-que j’ai cru devoir
rapprocher, comme cara&ériftiques- de l'acide faccharin
, & avant de chercher à expliquer fa formation
, afin que l’on pût apprécier plus facile»
ment ce qui me refte à dire fur ce fujet.
11. L ’acide faccharin exifle -t- il tout forme dans
le fucre ? C’eft l’opinion de M. Bergman; il fe regarde
comme l’acide propre de ce fel effentieL
L’acide nitreux ne fait que de le mettre à n u , en
s’emparant d’une partie de la matière graffe qui
mafquoit fon acidité , & l’acide nitreux n’éprouver
lui-même d’autre changement dans l’opération,, fi
ce n’eft qu’il fe charge de phlogiftique au point de
devenir rouge 6c de s’élever en état de gas nitreux.
M. Cavendish croit également que l’acide
nitreux n’entre aucunement dans la compofition?
de l’acide faccharin , 6c qu’il ne fert réellement
qu’à dépouiller- le fucre d’une-portion de fon phlo*
giftique. Trarif phiiof 1784 , page 1J2.
Ce fyftême ne peut plus fe foutenir aujourd hui,
puifqu’il eft démontré que l’acide nitreux n exifte*
plus tout entier dans le gas nitreux, 6c que dans
toutes les opérations analoguescet acide eft réellement
décompofé , & laine une portion d air v ital
qui, s'engageant dans une autre bafe, produit
un nouveau composé. Le fucre eft donc acidifié
par l’air vital de l’acide nitreux, tout de même
que le font dans les mêmes circonftances le foufre,.
le. phofphore, l’arfenic, &c. ( Voye^ A cide nitr
e u x , A c id e<a r se n ic a l , 6*c.) Je crois dîati-
I tant moins devoir infifter ici fur cette explication,.
| qu’en la renfermant dans ces termes généraux „
| 6c fans fpécifier fi. la bafe acidifiée éprouve, aufli