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végétal qu’il Ÿ avoit au; oui d’hui des moyens, bien
plus sûrs de démontrer la préfence d’un acide aéiuel
dans un grand nombre de plantes.
Quant à la prefure que Ton tire pour cet ufage
du ventricule de l’eftomac des veaux , l’illuftre
Macquer la regardoit encore comme un refie de
matière laiteùfe aigrie, & il ne doutoit pas quelle
ne contînt un acide fuffifant pour coaguler le lait.
Mais il eft préfentement bien vérifié que Cette
fubflance n’eft autre chofe que le fuc gaflrique lui-
même, qu’elle en reçoit du moins toute fa vertu ;
que cette vertu fe communique à la tunique mérite
de ce ventricule, & à un certain point aux parties
qui l’avoifinenf, & qui en font probablement imprégnées.
( Expériences de M. Spallanzani fur la
d ig e ftion^ .* 4 7.)
Je pénfe bien cependant avec M. Spallanzani
que cela ne fuffit pas pour prouver l’acidité du fuc
gaflrique ; indépendamment de ce qu’il affure avoir
vu le lait coagulé par de petits morceaux du foie ,
du coeur, ou du poumon d’un coq-d’inde ( g. 248),
on peut ajouter que le célèbre Schéele avoit déjà
remarqué que la léparation du fromage avoit lieu
dans le lait bouillant lorfqu’on y jettoit des fels
neutres, du fucre, de la gomme, en quantité fuffi-
fante pour s’emparer de la partie aqueufe du lait.
Quoique ce phénomène paroiffe appartenir prin-
cipalement a l’affinité de l’eau, il eft plus fage
fans doute de ne pas décider précipitamment que
le fuc gaflrique agit fur le lait à la manière des
*cides, & de chercher d’ailleurs des preuves de fa
véritable nature.
On a fait dans ces derniers temps un grand nombre
d’expériences fur le fuc gaflrique ; la confiance
& la fagacité de ceux qui les ont entreprifes font
dignes de tous nos éloges ; plufieurs n’ont pas
craint d’opérer fur eux-mêmes , & ce courage,
suffi louable par fon objet qu’étonnant par les
dangers auxquels il les expofoit, leur a acquis des
droits bien légitimes à notre admiration ; mais il
faut en convenir, les.ouvrages qui en contiennent
l’hifloire n’ont pas été rédigés de manière à en
avancer le fruit* ce font des matériaux précieux
cju on n’a pas pris la peine de fortir de la carrière,
où on ne les apperçoit encore qu’à moitié enfeve-
lis dans lés décombres des fouilles qui ont dû précéder
leur découverte: j’efîàierai cependant de rapprocher
les faits principaux, & pour qu’on puiffe
diftinguer ce qui eft connu & cejqui relie à tenter,
^’indiquerai, i p. les procédés pour recueillir le fuc
gaflrique & le foumettre aux expériences, ap. les
phénomènes que'préfente fon aôion fur différentes
fubftances , 3°. ce que l’on peut en conclure par
Rapport à fa nature.
Il y a plufieurs manières de recueillir le fuc gaf-
trique, & de le foumettre aux expériences : la plus
fimplé eft de le tirer des animaux après leur mort;
en les faifant jeûner, on l’obtient en plus grande
^quantité, & exempt du mélange d’alioeens ; après
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un jeûne de deux jours, M. Spallan?api a tiouvé-
37 onces de fuc gaflrique dans lés deux premiers
eftomacs d’un mouton ( g . 14 2 ); fa couleur étoit
verte , ce qui pouvoit venir d’un peu d’he be qui
y reftoit encore. Le même phyficien ayant ouvert
des corneilles qui étoient encore au nid, trouva
dans leur eftomac une demi-cuillerée de fuc gaf-
trique. Les adultes n’en donnent pas une auffi
grande quantité ( g. 69.)
Un fécond moyen eft de faire avaler aux animaux
vivans des tubes de métal trèsininces, percés de
plufieurs trous , dans lefquels on met de petites
éponges sèches &. très - propres. M. Spallanzani
ayant cinq corneilles, a fait prendre à chacune
jufqu’à huit de ces tubes à - la - fo is ; elles les ont
vomis au bout de trois Heures & demie, &par l’ex-
preffion des éponges il a recueilli 481 grains de fuc
gaflrique, de couleur jaune , tranfparent, falé &'
amer, laiffant très-peu de fédiment quand l’oifeau
étoit à jeun, dont il ne s’évapora qu’une fort petite
quantité, quoiqu’expofé à l’air pendant plufieurs
joitrs, & qui éteignoit le feu au lieu de s’enflammer
( g. 81.)
Un troisième procédé confifte à tirer le fucgaf-
trique de l’eftomac par le vomiflement excité le
matin à jeun ; c’eft ce que M. Spallanzani a exécuté
deux fois fur lui-même en irritant fa gorge
avec les deux doigts. Un de ces vomiffemens lui
fournit une once 32 grains de liqueur écumeufe &
vifqueufe, qui devint limpide comme de l’eau
après avoir dépofè un léger fédiment, fans couleur
, d’un goût falé fans amertume , non inflammable,
qui s’évaporoit facilement dans un vailTeau
ouvert placé fur les charbons, mais qui dans un
v.aifleau fermé, fe coriferva pendant un mois d’été
très-chaud, fans chànger ni de goût, ni d’odeur
( g . g. 2 1 5 ,2 1 6 ) . M. Spallanzani éprouva un état
u pénible à la fuite de ces deux expériences , qu’il
ne put fe déterminer à les recommencer. L’irrjta-
tion peut s’opérer avec une plume trempée dans
l’huile; mais, comme le remarque M. Scopoli*
on ne rend de cette manière que la partie la- plus
fluide du fuc gaflrique; la portion épaiffe demeure
attachée au fond de l’eftomac, & ne peut être
déplacée que , par de puiffans émétiques, tels que
le tartre antimonial.
M. Golfe, exercé depuis long temps à avaler de
l’a ir, & ayant plufieurs fois obfervé qu’il étoit
pour lui un émétique sûr, a mis cette habitude à
profit pour faire quelques expériences fur le fuc
gaflrique. Il fufpend fa refpiration , reçoit dans fa
bouche environ un pouce cubique d’air ; la bouche
fermée, il le comprime avec la langue contre fon
palais, & le force à defcendre par l’aélion des
mufcles du pharinx: il parvienr aihfi à vomir à
volonté, ce qu’il attribue à l’augmentation du volume
de l ’air dans fon eftomac; & en «.ffe t, plus
l’air athmofphérique eft condenfé par le froid, moins
il prend de gorgées d’air pour vomir. ( Conjidèra-
ùons9 &c. de M* Sennebïer, n. X V . ) Ce moyen, qui,
a c 1
fuivant le témoignage de l’auteur, ne lui caufe ni .
dégoût, ni fatigue, qui lui donne la facilité de la- I
ver fon eftomac en avalant & rendant plufieurs
fois de l’eau, n’eft pas néanmoins d’une exécution
aüffi facile qu’on pourroit l’imaginer, & il y a toute
apparence que les dangers de ces expériences retarderont
encore long - temps la connoiffance parfaite
du fuc gaflrique humain, _d’autant plus qu’on
ne pourroit pas compter fur la pureté de celui que
l’on obtiendroit par les diffeélions. >
M. Spallanzani a remarqué que les aigles rendaient
fpontanément le matin à jeun une quantité'
cOnfidérable de fuc gaflrique, exempt de toute
hétérogénéité, de couleur cendrée, à-peu-près
fluide comme l’eau , & s’évaporant de même , au
fnrplus, falé', amer, non inflammable & delà même
odeur que les autres fucs gaftriques ( g. 18 5 ) ; il
en recueillit tous les jours près de 6 gros en plaçant
au-devant de l’aigle un grand vailTeau de verre.
Indépendamment de ces procédés pour obtenir
le fuc gaflrique des animaux, on en a imaginé
d’autres pour le : foumettre à diverfes expériences,
même fans le fortir de l’eftomac. Réaumur avoit
déjà donné l’exemple de faire avaler à des moutons
des tubes de laiton remplis d’herbes; M. Spallanzani
a employé la même méthode fur un grand
.nombre d’animaux de différente efpèce ; pour les
moutons, il a été obligé de porter les tubes juf-
qües dans l’eftomac, par le moyen d’une canne
percée, autrement ils ne paffoient pas l ’cefophage ,
& étoient vomis fur-le-champ ( g . 13 7 ) : ces tubes
percés de trous pour donner paffage au fric gaftrique,
étoient remplis d’alimens propres à l’animal
ou d’autres matières ; il examinoit l’état de ces matières
lorfque les tubes étoient rendus par l’anus ,
ou en en provoquant le vomiflement après un
certain temps , ou en ouvrant l’animal. Il a trouvé
que plufieurs oifeaux rejettoient ces tubes fpontanément
au bout de quelques heures, & en les
leur faifant avaler de nouveau, i^ venoit à bout
de terminer fon effai fans facrifier le fujet. Q uelquefois
il fubftituoit aux tubes de fer blanc ou de
laiton, de petites fphèrés creufes de même métal
s ouvrant à v is , de petites bourfes de filet, des
facs de toile ou de drap ; il s’eft fervi dans quelques
occafions de fils de fer, au bout defquels il at-
tachoit des morceaux de chair pour les arrêter dans
1 oefophage, les porter jufques dans l’eftomac &
les retirer à volonté. Lorfque l’animal étoit moins
traitable , il le trompoit en lui faifant avaler un
morceau de chair qui tenoit à une groffe ficelle ;
*é fût ainfi qu’il parvint à retenir la chair dans le
gefier de l’aigle ( g- 1 7 7 .) •
. MM. Spallanzani & Gofle ont fait ces expériences
for eux-mêmes. Le premier, encouragé
par l’exemple des enfans qui avalent des noyaux
de cerife, & qui les rendent non altérés, a avalé
acord de petites bourfes remplies de chair cuite
du crue, de pain mâché on non mâché, &c. en-
nue de petits cylindres de bois de «j lignes de lonâ
c i
gueur, & 3 lignes de diamètre i percés de trous 8c
recouverts de toile ( g . 208). Le fécond, profitant
de la facilité qu’il a acquife de vuider à volonté
fon eftomac par la {impie déglutition de l’air, n’a
pas -eu befoin d’enfermer les 1 ubftances qu’il vou-
loit.effayer dans de petits vaiffeaux pour en attendre
la fortie fpontanée par l’anus; après les
avoir avalées à l’ordinaire, il les a gardées dans
fon eftomac le temps qu’il jugeoit à propos ; il les
en a fait fortir, lorfqu’i i l ’a voulu, pour obferver
& comparer les progrès de la digeftion, & il a eu
la confiance de multiplier affez ces épreuves fur
les matières végétales & animales qui entrent le
plus communément dans nos alimens pour claffer
celles qui lui ont paru indigeftes, celles qu’il a
digérées en partie , celles qu’il a digérées facilement
, celles qui ont hâté la digeftion, celles enfin
qui ont paru la rallentir. ( Confédérations &c.
de M. Sennebier, n. XVIII. )
Enfin M. Brugnatelli a penfé que la matière
blanche qui le trouve ordinairement en aflèz grande
Quantité dans les excrémens des oifeaux carnivores,
& qui en diffère fenfiblement, qui fe diflout dans
l’eau & donne une liqueur de couleur de paille,
étoit une portion de fuc gaftrique, èc pouvoit fer-
vir à quelques effais .(Addit. de M.Scopoli au diElion-
naire de M. MacquCr.)
Tels font les'moyens que l’induftrie, excitée par
un amour ardent de la vérité , a mis en ufage pour
opérer fur les fucs gaftriques : voyons préfente-
ment les fruits qu’elle en a recueillis.
Le fuc gaftrique opère la digeftion , il transforme
les alimens en chyme ou fubflance pultacée, même
hors du corps de l’animal, il agit fenfiblement
fur l’eft jmac de l’animal après fa mort : donc la
digeftion ne dépendras d’une force vitale, ni de
la chaleur animale.
Le. fuc gaftrique opère la digeftion des matières
renfermées dans des tubes de bois ou de métal,
pourvu qu’il puiffe s’y introduire ; donc la digeff
tion n’eft pas l’effet d’une pulvérisation méchani-
que. Cette conféquence a été rigoureufement démontrée
par M. Spallanzani, même pour les animaux
que l’on nomme à efiomac mufculeux, tels
que les poules, les canards, les oies , les pigeons
les perdrix, &c. Quelques-uns de ces animaux*
élevés avec précaution pour qu’ils ne-puffent avaler
des pierres , n’en ont pas moins brifés des tubes
& des fphères de métal, émoufie des lancettes
arrondi des éclats de verre que ce phyficien avoit
introduits dans leur eftomac; mais lorfqu’il a employé
des fphères de métal capables de réfifter
par leur épaiffeur à cette aélion des mufcles &
quil y a enfeime de la chair crue.coupee en petits
morceaux, ou du grain réduit en pâte mâchée
ces matières ont fubi la digeftion (g . 39. ) •* *'
Le fuc gaftrique agit comme un fluide qui #n.
tame les corps parleur furface, qui s’unit aux parties
qu’il enlève, qui ne les dépofe ni ne les aban