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de cloche, Lemery fe fervoit d’un entonnoir de
verre avec un col fort allongé & d’un pouce de
diamèttre; il regardoit cet appareil comme plus
avantageux, en ce qu’il pouvoit defcendre cet entonnoir
prefque jufqu’à renfermer le creufet op
brûloit le foufre, fans être obligé de le rallumer,
l’air fe renouvelant affez par le haut, & en ce que
par ce moyen il recueilloit une quantité àjfe^ raisonnable
d’cfprit. Mais ce Chymille s’eft trompé
lorfqu’il a cru que l’acide ne pouvoit s’élever affez
pour fortir par le bout de l’entonnoir ; il eû certain
qu’il a dans cette opération toute la volatilité de
l ’acide fulfureux ou phlogiftiqué, & qu’ainfi il
doit y avoir une perte, même plus eonfidérable
que celle à laquelle on eft expofé quand on tient
la cloche plus élevée. C ’eff pour cela que l’on a
imaginé de remplacer cet entonnoir par un chapiteau
ordinaire d’alembic de verre, d’un volume
proportionné à la quantité de foufre qu’on veut
briller, & an bec duquel on adapte un récipient ou
fe rendent les vapeurs acides.
La liqueur que l’on obtient par l’uia on par
l’autre de ces procédés n’eft pas Facide vîtrioliquè
abfolument p u rm a is au bout de quelques jours
elle le trouve avoir perdu le principe volatil qui
lui étoit uni, il eft même difficile de la garder 'dans
cet état,quelque précaution que l’on apporte à fermer
exactement les vaiffeaux. Nous examinerons ailleurs
fe nature de ce principe volatil qui fait perdre à.notre,
acide fa fixité ordinaire-
II. Pour retirer l'acide vitriolique par Ta dijfd-
lation du vitriol de mars , ori commence .par faire
defféchér ce fel & lui enlever par la calcination
toute fon eau de cryftallifetion ; ce qui exige déjà
un feu d’autant plus violent, que la matière fe fond
à raifon de l’abondance de fon eau, & que préfen-
tant moins de furface , elle la laiffe. échapper plus
difficilement. On pulvérife enfuite le vitriol calciné
, on le met dans une bonne cornue de grès -,
au fourneau de réverbère, & on adapte- un récipient
bien lutté à la manière ordinaire pour les
diftillations des acides. ( Voye^ D istil la tion \ )
En donnant le feu par degrés, on voit fortir
des vapeurs blanches qui obfcurciffentle récipient;
elles font fumes d’une liqueur qui coule'en formes
de fines.
Si on change de récipient après que cette première
difiillation a ceffé, & que l’on augmente le feu jufqu’à
la dernière violence, on'parvient à faire monter
tout 1 acide du vitriol. Le premier produit efi encore
un peu aqueux , le dernier eft fous forme congelée
épaiffe, qui lui a fait donner le nom d’huile de vitriol
glaciale. M. Macquer avertit que cette dernière,
difiillation exige un fi grand degré de feu & des.
vaifleaux fi parfaits., qu’elle eft prefque impraticable
dans les laboratoires ; les académiciens de Dijon l ’ont
démontrée plufieurs fois dans leurs cours publics, !
& elle a toujours réufii; àla. vérité,ils employoient,, j
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à l’exemple de [M. Héllot, l’appareil des ËaîTons
enfilés, q ui, donnant plus d’efpace aux vapeurs,
les recevant dans une athmofphère moins échauffée-
par le feu du fourneau , prévient la rupture des
vaiffejinx & favorife davantage la condenfatiôn..
Ce qui refie dans la cornue eft là terre férrugi-
neufe prefque entièrement dépouillée d’acide 5 elle
eft rouge & prend le nom de colcotar_ •-
On pourroitde même décompofer à la difiillation
le vitriol de cuivre; on préfère le vitriol de mars,
parce qu’il eft plus commun & moinscher.M Weigel
remarque qu’il a encore l’avantage de laiffer aller-
plus facilement fon eau de cryftallifation, ce qui*
•donne le moyen de lafëparer d’avance, & d’obtenir
enfuite l’acide plus concentrée
Glauber s’efi fervi du vitriol de zinc, c’eft-à-dire
qu’il a d’abord formé ce fel en mettant du zinc en
grenailles dans une diffolmion de vitriol de mars
l’acide ayant laiffè précipiter le fer pour prendre le:
zinc, à 1a faveur de la. iligefticn , il a-filtré la^dii-
folution , il l’a évaporée à ficcité 9. & il' a traité le.-
réiidu falin à la cornue, à la manière < ordinaire..
Il affure que l’acide vitriolique s’élève plus facilement
à diftiliation, qu’il efi plus .pur .& moins, coloré,.
Cn comprend qu’en rappellant cette obferva-
tion mon deffein n’éft pas de confeiller une manipulation
pour le moins inutile , puifqu’on obtient
les mêmes avantages à beaucoup moins de frais.
Meyer & les autres Chymifies allemands font
mention d’un acide vitriolique fumant que l ’on fabrique
à Nordhaufen , ou plutôt Northaufen , en;
Thuringe, que M. Weigel, dansfes ouvrages'latins,,
appelle oleum vitrioü Nordhujîenfe. Nous- verrons
ailleurs d’ou lui vient cette propriété de fumer &
de fe cryftallifer, quoiqu’il ne (bit pas auffi concentré
que Facide vitriolique anglois.. M. Macquer
a foupçonné que cet acide étoit tiré du vitridl martial
par la difiillation., & M.Léonhard;. ajoute, dans
une note fur ce paffage, que c’eft une chofe bien-
connue en Allemagne.
M. Ferber dit avoir appris ( N eue Beytrage, &c. J;
qu’un Suédois, nommé Frank avoit autrefois établi-
en Angleterre une fabrique en grand d’acide v itriolique
parla difiillation du vitriol de mars, dans
laquelle,-au lieu de cornue & de récipient, il
avoit fait conftruire, avec un mélange dé fable &
d’argille, deux petites chambres à- quelque difianee
l’une de l’autre, & communiquant par un tuyau
de même nature, de forte que la difiillation fefaifoit
à-peu-près;comm£ cplle:du mercure à Altnaden & à
Idria., * *
Les vitriols à bafe terreufe donnent auffi à la
difiillation un peu d’acide vitriolique. Neuman en
a retiré de l’alun , & Margraff du gypfe; mais le
premier de ces fels ne fournit qu’un phlegme acidulé
par une très-petite portion d’acide, parce qu’il
ne fe décompofe pas feul par l’àâion de la chaleur
; le fécond retient encore plus fortement la
totalité de fon acide, parce qu’il n’y eft pas par
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excès , & îl faut abfolument le contafl de quelque
matière inflammable pour en dégager une partie
qui paffe alors en état d’acide fulfureux ou phlo-
*gifiiqué. C’eft ce que le «célèbre Margraff a très-
bien obfervé, & il avoit mêlé le gypfe avec la
poufilère de charbon dans la cornue. ,
III. Un des procédés les plus avantageux pour
obtenir en quantité l’acide vitriolique, efi la combustion
du foufre avec le nitre.
Pour cela, o-n a une très-grande bouteille de
verre , placée fur un bain de fable , de manière que
fon goulot foit horizontal; après y avoir mis un
peu d’eau, qu’on entretient à un certain degré de
chaleur, on charge une grande cuiller de terre
cuite d’un mélange de quatre parties de foufre &
d’une partie de (litre pulvérifé, & de quelques brins
dé filaffe interpofés ; on met le feu au foufre &
on introduit auffi-tôt la cuiller par le goulot de la
bouteille jufques dans fa capacité intérieure ; on
preffe enfin le bouchon adapté au manche de la
cuiller pour que la bouteille foit bien fermée.
La bouteille fe remplit auffi-tôt de vapeurs acides
fulfureufes qui, étant faifies par la vapeur de l’eau,
fe condenfent & tombent dans la partie inférieure ;
ce qui dure tant que fubfifte la flamme du foufre
alimentée par l’air qui fe dégage pendant l’explo-
fion fucceffive du nitre avec le charbon de la fi-,
laffe. Quand la flamme a ceffé, que les vapeurs
acides font condenfées, on retire la cuiller pour
en introduire une autre chargée des mêmes matières.
Cent livres de foufre rendent à r peu-près
100 livres d’acide vitriolique reélifié , quoiqu’il y
ait toujours un peu de foufre qui échappe à la
combuftion.
On fait honneur à des artiftes Anglois de l’invention
dé cette méthode , & je fuis très-éloigné
de le leur çontefter.; il n’y a que ceux qui n’ont
jamais mis la main^à l’oeuvre qui ignorent que
c’eft encore une invention que d’approprier à une
fabrique en graiîd des manipulations dont le principe
-exifioit auparavant dans les livres; mais il efi
jufie auffi de faire connoître jufqu’à quel point la
théorie s’en étôit approchée de fes propres forces.
Lemery avoit déjà enfeigné que l’on pouvoit re tirer
l’acide vitriolique du foufre en le mêlant avec
. fe de fon poids de nitre ou de falpêtre , & faifant
détonner ce mélange par le moyen d’un fer chaud
au. milieu d’un grand vaiffeau de grès, au fond
. duquel on auroit mis d’avance^jp peu d’eau ; la
liqueur filtrée & concentrée^ltr l’évaporation
porroit le nom «Thuile de foufre. ’
Depuis l’établifiement de la première fabrique
de ce genre , on y a ajouté bien des perfections ;
; aux ballons de verre on a fubftitué des chambres
revêtues intérieurement de lames de plomb ; un
eharriot a pris la place de la cuiller; au lieu de
brûler le mélange dans le vaiffeau même qui fert
de récipient, on a pratiqué en dehors une efpèce
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de pcele deftlné à cetufage, de forte que lacon-
denfation des vapeurs efi bien plus prompte ; en
difpôfant des ouvertures pour rendre à volonté
de l’air nouveau, on a obtenu avec moins de nitre
une combuftion plus entière. L’eau placée dans le
récipient délayoit trop l’acide , & entretenoit une
chaleur qui s’oppofoit à la condenfation; on a imaginé
d’y porter par un tuyau la vapeur de l’eau
tenue en ébullition dans un fourneau extérieur ,
Si on a eu de l’acide concentré. ( Voye’^ Journalphy-
fq u e , tome. IV , page 333, & tome X , page 139;
Weber Febriken und kun jîe, art, 47 ; Ferber F!eue
Beytrage, &c. page 32$. )
Je paffe rapidement fur ces détails qui inté-
reffent plus le fabriquant que le Chymifte, d’autant
plus “hue l’étiologie de cette opération efi
facile à faifir ; c’eft une combuftion en vaiffeaux
clo s, à la faveur de l’air que le nitre fournit. Je
me réferve d’expliquer ailleurs comment cet air
devient partie continuante de l’acide.
IV. C ’eft avoir atteint le dernier degré de per-
feéiïon dans cette fabrication que d’être parvenu à
retirer le même produit du foufre en le brûlant,
pour ainfi d ire, en vaiffeaux clos , fans addition
. dë^nitre, par le moyen du fourneau à double courent
d'air. J’appelle ainfi un fourneau dans lequel, indépendamment
du courant d’air qui fert à entretenir
le feu dans le foyer , on établit un autre courant
qui, ne eomYnuniquant pas avec le premier,
efi forcé de paffer dans un ballon un creufet
ou autre pièce que l’on peut confidérer comme
le laboratoire du fourneau, & q u i, léchant continuellement
les fubftances qu’on y expofe , e>i
même-temps qu’il fert matériellement à leur donner
une nouvelle forme , les porte par fon mouvement
clans des vaiffe.aux difpofés pour leur fer-
vir de récipient. Tels font les principes que j’ai
communiqués , il y a plufieurs années , à l’académie
de Dijon, pour la confiruélion d’un fourneau
à calciner le zinc i^nouv. mém. premier fèm. 1782 9
page /p). Il efi aifé dè concevoir qu’il ne doit pas
avoir moins de fuccès pour brûler un foufre que
pour calciner un métal, ces opérations n’étant
pas feulement analogues, mais identiques.
On met donc au-deffus du foyer d’un fourneau
à vent ordinaire un vaiffeau que l’on entretient
rouge ; ce vaiffeau, qui a la forme d’un cylindre
renflé dans fon milieu, ou d’un ballon à deux
goulots , préfente une de ces ouvertures hors
des parois extérieures du fourneau v & c’eft par-là
que l’on introduit le fouffe ; l’autre ouverture
communique à une fuite de ballons enfilés , dans
lefquels on entretient de l’eau en vapeurs par des
réchauds placés au-deffous. Le dernier récipient
demeurant ouvert, & l’air étant très-raréfiédans
le creufet, on conçoit qu’à mefure qu’on y jette
du fouffe, l’air du dehors s’y précipite, en détermine
combuftion, paffe dans les récipiens,
•entraîne l’acide en vapeurs, 8c fort après l’avoir