
714 AIR ment le volume de l’air qu’il doit renfermer, on
met quelques morceaux de charbon bien fec dans
une petite capfule de verre établie fur un fupport
ou fufpendue à la partie fupérieure du récipient ;
on élève l’eau de quelques pouces dans l’intérieur,
en faifant fortir une portion de l’air ; on marque en
dehors le point de cette élévation, & on fait tomber
fur le charbon le foyer d’une lentille : il s’allume
, la chaleur fait bailler l’eau, mais le charbon
s’éteint bientôt ; les rayons du foleil raffemblés par
le verre ardent ne peuvent le rallumer, l’eau remonte
aflez rapidement au point où elle étoit ; elle
continue enfuite de s’élever plus lentement, & au
bout de quelques heures, il y a diminution d’environ
f de l’air renfermé. L’eau du récipient donne également,
avec l’eau de chaux, des lignes de la pré-
fence d’un peu d’acide carbonique.
E x p é r i e n c e X X I X ,
La même expérience répétée avec l’appareil au
mercure laiffe encore mieux appercevoir tout ce qui
«•fe paffe dans cette combuftion. Quand le charbon
a été une fois enflammé & qu’il s’eft éteint fpon-
tanément, la lentille ne peut plus le rallumer ; &
fi l’on laide les vaiffeaux revenir à la température
de l’appartement, le mercure ne paroît pas remonter
fenfiblement au deffus du point où il étoit avant la
combuftion , de forte que l’on feroit tenté de croire
que l’air n’a pas été diminué; mais qu’on introduifc
fous le récipient de l’eau de chaux , de la diffolution de
potaffe, de l’ammoniaque cauftique, ou-, à l’exemple
de M. Lubbock, du gas ammoniacal dont l’effet eft
encore plus fubit, le mercure s’élève dans le récipient,
le charbon peut être de nouveau enflammé
par le foyer de la lentille; & fi l’on continue ces
opérations alternatives jufquà ce que le charbon re-
fufe abfolument de prendre feu, on trouvera, toute
réduéfion faite, que l’air commun eft diminué d’un
peu plus d’un quart.
L ’eau de chaux ou les alkalis fe feront chargés
d’acide carbonique qu’il fera facile de reproduire fous
la forme gafeufe, en le dégageant par un acide plus
puiffant.
La portion d’air reftée dans le récipient ne pourra
plus fervir à la combuftion ; elle donnera à peine
0,04 d’abforption par fon mélange avec partie égale
de gas nitreux.
Remarques. Quoique la combuftion du charbon foit
un des phénomènes dont l’obfervation eft le plus
familière , on voit néanmoins que ce n’eft qu’en
fopérant en vaiffeaux clos & avec les précautions
convenables, qu’on parvient à faifir les circonftances
qui raccompagnent effentiellement.
Le charbon ne s’allume ou ne commence à agir
fur l’air qu’à une température affez élevée : j’ai déjà
dit qu’on pou voit f èftimer à 150 degrés du thermomètre
de Réaumur, parce que j’ai vu plufieurs
fois des charbons s’allumer, fans contaft de ratière
embraféé, dans une athmofphèr'e échauffée à peu
près à ce degré par le voifinage d’un fourneau. Il
en eft de même d’un grand nombre de fubftances
plus ou moins compofées que l’on place commune*
ment dans la claffe des combuftibles, & qui doivent
au moins en partie cette propriété au charbon, telles
que les huiles, les réfines , l’alcohol, &c. Toutes
exigent une première étincelle ; il eft néanmoins très-
poffible que le principe charbonneux foit préfenté à
Pair dans une telle condition que la combinaifon fe faffe
fpontanément à une température très-inférieure : je
crois l’avoir fuffifamment prouvé dans mes remarques
fur les expériences X & XI à l’occafion de l’inflammation
des pyrophores. Les obfervations fuivantes viennent
à l’appui de la condufion que j’en ai tirée, que
cette condition n’eft autre que l’extrême divifion, ou,
pour mieux dire, la défaggrégation des molécules du
principe charbonneux, & quelquefois fa diffolution
dans une portion de gas hydrogène qui favorife le
contaéf de l’air. Le minéral connu fous le nom de
plombagine eft un vrai charbon , puifqu’il peut de
même être converti prefque en totalité en acide carbonique
par des moyens appropriés pour le combiner
avec la bafe de l’air vital ; mais il eft manifef-
tement dans un état de plus forte aggrégation , il
réfifte aufîi bien davantage à l’inflammation. Le charbon
lui-même fe rapproche très-fort de cet état dans
certaines circonftances : il y a quelques années voulant
préparer avec M. Tennant des charbons pour
l’ufage du chalumeau, nous imaginâmes de les tenir
long-temps à un feu violent dans un creufet bien
fermé , pour les priver de l’humidité que nous foup-
çonnions être la caufe de leur décrépitation ; nous
vîmes très - diéfin&ement qu’ils n’entretenoient pas
d’eux-mêmes à l’air libre une chaleur capable de propager
la combuftion ; qu’ils rougifloient fous le dard
du chalumeau prefque fans fe confommer ; fans doute
parce que l’expulfion de l’hydrogène par la violence
du feu avoit occafionné le rapprochement des
parties propres du charbon. J’avois déjà annoncé
quelques obfervations analogues dans les Mémoires
de l’Academie de Dijon ( afin. 1783 , itT. fem. p. 76).
Enfin, s’il eft vrai de dire que la produ&ion d’un
même compoféfuppofeabfolument le concours des mêmes
parties compofantes, il n’eft paspoflible de douter
que la refpiration des animaux ne foit un phénomène
dépendant du carbone ou charbon pur fur l’air, puifqu’il
difparoît également une partie de ce fluide dans
l’opération, & qu’il en réfulte une quantité confi-
dérable de gas acide carbonique ; il faut donc ici que
l’affinité foit rendue efficace par quelque condition qui
fupplée à l’élévation de température ; on trouvera
à Particle acide carbqnique des expériences qui prouvent
que le fang récemment tiré de l’animal & mis
en contaél avec l’air, le diminue de la même manière
& en laiffant les mêmes produits que la refpiration*
( Voye^ ci-devant page 97. )
Pendant la combuftion du charbon y il fe dégage
une quantité de chaleur non-feulement capable de
foutenir la température qu’elle exige,' mais encore
d’atteindre les corps environnarts & d’y laiffer des
traces très-fenfibles de fon a&ion. MM. Lavoifier &
de la Place ont placé des charbons allumés du poids
d’une once, fur un petit vafe de terre dans un cy lindre
-entouré de glace, ils ont entretenu la combuftion
de ces charbons par un foufflet, ils s’y font
confumés en 3 2 minutes, & il s’eft trouvé 6 livres
a onces de glace fondue ( Mém. de VAcad. roy. des
Sciences, ann. iy8o, p. 379 ). 11 ne faut pas perdre
de vue ce que j’aij-déjà obfervé d’après ces illuftres-
Académiciens , que la chaleur néceffairé pour fondre
une livre de glace élève la température d’une livre
d’eau de zéro à 60 degrés de notre échelle ther-
mométrique.
Cette expérience a été répétée par M. Crawford,
dans un appareil où il emploie l’eau au lieu de la
glace pour mefurer la chaleur communiquée, & il
a trouvé que <6 gr. ( anglois) de charbon bien fec
produifoient pendant leur combuftion une chaleur
capable d’élever de 3 ,2 degrés du thermomètre de
Farenheit, la température d’une malle d’eau de 31
livres7 onces, d’où il a tiré par le calcul, en fui—
vant la méthode de Richman, que { dragme ou
36,6 grains ( françois) de charbon fourniffoient en
brûlant 1 7 ,1 degrés de chaleur au thermomètre de
Farenheit, & 7 ,6 à l’échelle de Réaumur (onanimal
Heat, &c. p. 338 & 371). Ce réfultat ne s’accorde
pas entièrement avec celui qui précède, mais
il eft poflible, comme l’obferve M. Crawford, que
cette différence vienne au moins en partie de la
qualité du charbon.
0 Si la quantité du principe charbonneux varie dans
les différens charbons , on concevra encore plus far
cilement cette variété dans les combuftibles plus
compofés que l’on place avec raifon dans cette claffe ,
puifque ce principe, comme je l’ai déjà dit, nfen
fait qu’une partie. Tels font l’huile le iuif, la ciré:
M. Crawford a déterminé pareillement la quantié de
chaleur qu’un.. poids égal de ces matières pouvoit
communiquer dans les mêmes circonftances à la maffe
d’eau de fon appareil ; il l’a trouvée de 24,2 degrés
( de Farenheit ) pour la cire ; de 24 pour le
fuif; & de 22,3 pour la meilleure huile de lampe.
Ces quantités étant toutes plus confidérables que
celle fournie par le même poids de charbon, il en
réfulte néceffairement que ces matières recèlent encore
un autre principe combuftible ; car la fuppo-
fition contraire nous conduiroit à là conféquence ab-
furde qu’une plus petite quantité de matière peut
produire à un plus haut degré l’effet qui lui eft propre.
Mais nous aurons bientôt la preuve de l’exiftence de
cet autre combuftible, dont j’ai annoncé que le charbon
le plus pur n’étoit pas lui-même exempt, & qui
nous fervira aufîi, dans l’explication de la refpiration
des animaux, à retrouver la balance des produits
avec les quantités d’air altéré. Ces quantités étant
rapportées à une mefure commune ( comme de 100
onces mefures ou 160,09 pouces cubes françois),
M. Crawford. conclut de fes. obfervations que les
degrés de chaleur fournis par la cire-, par le charbon
& par la refpiration d’un cochon dinde font
: : 21 : 1 9 ,3 :1 7 ,3 . MM. Lavoifier & de la Place
avoient trouvé que la quantité de 10,38 onces de
glace fondue repréfentoit la chaleur produite par la
refpiration d’un pareil animal durant dix heures, en
réduifant le réfultat de leur expérience par la com-
paraifon de la quantité de gas acide carbonique pro-:
duite lors de la combuftion du charbon même.
L e p o id s a cq u is par la matière qui a fouffert la
combuftion, la d im in u t io n proportionnelle du volume
de l’air dans lequel on l’a opérée, & la n a tu r e d u
p r o d u it font trois points bien importans , fur lefquels
il me paroît néanmoins très-difficile aujourd’hui de
conferver le moindre doute.
Ce n’eft plus ici le combuftible qui augmente de
poids, comme dans la combuftion des métaux, du
foufre , &c. Au contraire il y a déchet, & il eft
d’autant plus confidérable que le charbon eft plus
pur ; c’eft-à-dire, que le produit de la combuftion
ne fe réunit pas à ce qui refte du combuftible, qu’il
ne s’en fixe qu’une très-foible portion dans la cendre
qu’il laiffe ; mais la forme gafeufe de ce produit
ne fait qu’en changer le volume fans en diminuer
le poids abfolu; ce poids fe retrouve donc dans le
gas acide carboniqne, & nous avons vu qu’il étoit
facile de le déterminer en le faifant abforber par
les alkalis ou par la chaux. MM. L a v o i f i e r , de la
P la c e & M e u fn ie r ont fait un grand nombre d’expériences
pour découvrrir la quantité d’air qui eft con-
fommée pendant la combuftion du charbon, & le réfultat
moyen d’un grand nombre d’opérations, par
différens procédés, a été que 28 parties en poids de
[ carbone ou de matière charbonneufe pure , décom-
j pofoient environ 72 parties d’air vital ; ce qui indi-
! quoit en même temps la compofition de l’acide ga-
1 feux qui en étoit le produit & dont le poids cor-
! refpondoit en effet à ces quantités ( A c a d , r o y . d e s
S c i e n c e s ", a n n . 1781 , p a g e 4 4 8 ).
M. L u b b o c k a conclu de fes expériences des proportions
un peu différentes, mais il ne paroît pas
qu’il ait pris, comme les Académiciens de Paris, la
précaution de deffècher le charbon qu’il employoit,
ni même qu’il ait fait la réduction des volumes ap-
parens à une température & une preffion uniformes;
il n’en faut pas davantage pour expliquer cesdifparités
& toutes celles que l’on peut rencontrer dans de
femblables obfervations, dès que l’on a négligé une
feule des conditions effentielles du procédé. Il fout
remarquer que malgré cela, les calculs de M. Lubbock
démontrent encore la formation de l’acide carbonique.
M. P r ie f l le y donne, dans fon dernier volume, un
calcul, fuivant lequel le gas acide carbonique eft
compofé de 0,697 d’air pur & de 0,303 de charbon
qu’il fuppofe n’e tre, à très - peu de chofe près ,
que du phlogiftique. M. Crawfo rd qui paroît avoir
opéré avec beaucoup d’exa&irude, qui aflùre avoir
multiplié les expériences, s’écarte bien davantage de$