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même temps que la combuftion fut allez avancée pour
dénaturer le combuftible,. & qu’elle ne le fût pas affez,
pour donner au produit de cette affinité la couleur
& la forme qui lui font propres : la féparation d’une
matière noire a la furface du diamant annonceroit
donc que le charbon y eft dans un état de compo-
fition qui mafque fes propriétés habituelles, que le
charbon y exifle faturé d’un autre principe quelconque
, fût-il aufîi fubtil & auffi incoercible que la
lumière. a
J’ai annoncé dans mes notes fur la X V e. differta-
tion de Bergman, qu’après avoir répété les expériences
qui plaçoient infailliblement le diamant au
rang des combuftibles, j’avois entrepris d’en recueillir
la partie fix e,. en le traitant par les procédés que
1 on appelloit alors dephlogiftiquans. Aucun ne me
réuffit que le nitre en fufion, dans lequel je vis
très-clairement qu’il éprouvoit une vraie combuf-
tion , quoiqu’il n’y eût pas de détonnation fenfible ,
puifqu’il difparoiflbit en totalité ; mais la quantité de
terre détachée du creufet par l’aftion du nitre alka-
life ni empecha abfolument de distinguer ce que le i
diamant pouvoit y avoir laiffe ; on y parviendra
probablement en opérant fur quelques karats, avec
du nitre très-pur, mis en fufion dans un creufet d’or :
le platine auroit l’avantage d’être plus infufible j
mais j ’ai fait voir qu’il étoit attaqué par le nitre.
Nous voilà parvenus au terme de l’examen des
divers changemens que Pair éprouve dans les combustions
, fuivant la nature du combuftible. Quelque
longue que foit cette expofition, on ne me repro-
chera pas, je penfe, le temps que j’y ai confacré,
fi l’on fait attention que c’étoit la première bafe à
donner aux principes que je me prcpofe d’établir. Il
s en faut encore beaucoup que j’aie épuife tous les
faits qui doivent venir en preuve de cette doétrine
ou la fortifier en y trouvant la feule explication dont
ils Soient fufceptiblesj mais nous en avons allez pour
affeoir les premières conféquences ; & après les avoir
recueillies , on verra fans doute avec plus d’intérêt
les preuves fynthétiques, on enfaifira bien plus facilement
l’objet, on fera plus en état de les apprécier :
je ne différerai donc de préfenter la conclufion de
cette grande analyfe de l’air , que pour la rendre plus
complète, en déterminant encore le genre d’altération
qu’éprouve le fluide athmofphérique de la part
de quelques fubftances qu’il eft impoffible de claffer
avec les combuftibles.
§• V . Du principe que reçoivent de l'air athmofphé-
rique quelques fubftances non combuftibles.
Il n eft point ici queftion des corps que l’on dit
tourner a 1 ai^re, à l’acide, à la rancidité , lorfqu’ils
reftent expofes a l’air ; on peut déjà juger que ce
font de vraies combuftions qui ne font froides que
parce qu’elles font lentes : ainfi les fulfures métal-
’ P ^ ites» brûlent réellement lorfqu’ils
5 eineuriffent ; ainfi le muqueux végétal & animal
A ï R ne s’acidifie qu’en s’appropriant cette même partie
de 1 air qui fert a la combuftion, comme nous le
dirons en parlant de la fermentation acéteufe ; c’eft
ce qui a lieu, quoique d’une manière encore plus
infenfible, même pour les huiles, puifque l’on eft
maître de hâter leur altération par les procédés qui
facilitent la combinaifon du même principe avec les
vrais combuftibles ( Voye^ acide nitrique, §. 7 ). Ce
n’eft pas non plus le lieu de traiter de la fermentation
putride , ni des changemens que l’air éprouve
par l’a&ion végétative, à l’aide de la lumière ou en
fon abfence; ce font bien les mêmes élémens qui
font en jeu dans ces grands phénomènes ; mais nous
ne fouîmes pas encore affez préparés pour en fuivre
la marche beaucoup plus compliquée : je dois me
borner en ce moment à des obfervations dont les
conféquences foient plus dire&es : l’eau & les fubftances
appellées cauftiques m’en fourniront le fujet.
Le phénomène de l’abforption- de l’air par le char-
bon & Par d autres matières qui le rendent comme
elles l’ont reçu, n’appartient pas à cette feétion.
I. jEn parlant de la diflolution de l’eau par l’air
cle 1 athmofphère ( ci-devant, page 687 ) , nous ne
lavons confidérée que comme une furcompofition
06 ^ern*er 1 Parce qu’on n’a aucune indice qu’il
abandonne quelque portion de fes principes en entrant
dans cette combinaifon. L’expérience fuivante
annonce qu’il en eft autrement de la diffolution de
l’air par l’eau.
E x p é r i e n c e X L IX .
On prend de l’eau nouvellement diftillée**, on en
remplit les trois quarts d’une bouteille, l’autre quart
étant plein d’air commun; on rènverfe cette bouteille
dans une petite cuvette, dans laquelle on a
mis de la meme eau, & on laifie le tout en repos
pendant environ un mois. Après cet intervalle de
temps, on remarque une diminution fenfible dans
le volume de l’air; fa qualité fe trouve altérée au
point de n’indiquer par exemple à l’eudiomètre de
M. Fontana, que 0 ,24 d’air vital, au lieu de 0,28
que le même air donnoit auparavant. Enfin fi on
fait bouillir l’eau dans un vaiffeau appareillé pour recueillir
le fluide aériforme qui fe dégage pendant
l’ébullition , on obtient de l’air dans lequel la chandelle
brûle plus vivement que dans l’air athmofphérique.
r
Remarques. C’eft au (félèbre Scheele que l’on doit
la première obfervation de ce fait ; il allure même
qu en ne laiffant que_la dixième partie de l’air dans
la bouteille , le gas réfidu éteint la chandelle ( Traité
du Feu, §. 94 ). M. Prieftley n’a pas eu une décom-
pofirion auffi complète, mais il convient qu’en employant
moins d’air & plus d’eau, l'air qui refte
s approche davantage de la qualité à! air phlogiftiqué
( Continuation, &c. part. I l , feEl. 3 ). Scheele avoit
auffi cherché à reconnoître quelle feroit l’a&ion de
A I R
l’eau dlftillèe récente fur l’air diminué ou gas azote ,•
& il avoit vu qu’au bout de 15 jours, l eau n en
avoit encore rien abforbè. Mais M. Kirwan a déjà remarqué,
dans fes notes, que, fur ce point, les expériences
de M. PriefUey font contraires : en effet,
ce Phyficien affure avoir fait prendre a 1 eau privée
de fort air par l’ébullition non - feulement de l^air
commun , mais auffi de l’air phlogiftiqué 6c de 1 air
inflammable ( L. cit. fefl. 9 ). Il rapporte ailleurs avoir
retiré de l’air de qualité plus QU moins inférieure de
diverfes eaux de pompe, de fource, de riviere
(part. I I I , feÜ. 17) : cependant il confirme encore
que l’air qu’il a enfuite chaffé de l’eau , après lui avoir
fait abforber de l’air commun , s’eft montre plus pur
à l’épreuve; que dans ces circonftances, lair quil
nomme déphlogiftiqué, a été lui-même amélioré.
Pour ce qui eft de l’air phlogiftiqué, il ne le trouva
nullement corrigé. Un autre fait auquel^ on ne fe
feroit guère attendu , & qui par cela même mérité
de trouver place ici,, c’eft qu’une eau thermale près
de Briftol, portée au degré de l’ébullition, a laiffe
échapper de l’air dont la pureté etoit telle qu il pre-
noit une égale quantité de gas nitreux avant qu il y
eût augmentation de volume : cette obfervation fe
trouve dans une lettre de M. Becket que M. Prieftle
y a inférée à la fuite de la fécondé partie de fa
Continuation. - (
On peut conclure de là que l’eau a réellement la
propriété, finon de décomposer l’air en s appropriant
un de fes principes & refufant de s unir à 1 autre,
comme Scheele l’avoitpenfé, du moins d’attfier plus
volontiers la partie pure de l’a ir , fuivant les ex-
preffions de M. Kirwan. Il faut même que cette affinité
ou attra&ion de choix foit affez puiffante, puif-
qu’elle ne devient efficace qu’autant qu elle 1 emporte
fur l’affinité qui exifte certainement entre les deux
efpèces de fluide aériforme qui conftituent 1 air athmofphérique.
On ne fera plus étonné, après ce qui
a été dit précédemment, que cette attra&ion foit
d’autant plus forte que l’eau eft plus privée dair ,
c’eft la marche ordinaire des combinaifons. Je ne dois
pas négliger de réunir à ces preuves un autre fait
qui fe trouve encore dans l’immenfe colleôion du
D r. Prieftley, qui eft qu’en paffant 8c repaffant du
gas nitreux dans l’eau, il diminue a chaque fois ( Continuation,
&c. part. III ÿ feft. /p) ; ce qui ne peut
venir que de l’air vital qui s’y trouve. A la vérité,
M. Fontana dit avoir obfervé que l’eau bouillie, ou
privée de fon air par la machine pneumatique, diminue
encore plus facilement le gas nitreux que celle
qui a fubi ces opérations préliminaires ( Recherches
fur l’air nitreux ) ; on penfera fans doute que cette
expérience doit etre refaite avec les précautions dont
la pratique perfectionnée de la manipulation des gas
nous a fait connoître la néceffité ; d’autant plus que
ce Phyficien étoit encore „dans l’opinion que les
airs malfaïfans devenoient falubres par leur agitation
dans l’eau. S’il étoit Vérifié que l’eau privée d’air
causât quelque altération au gas nitreux, il n’y auroit
guère d’autre explication probable que celle qui
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fuppoferoit qu'elle le dépouille réellement d’une portion
de fon oxigène, ainfi que cela arrive avec les
fulfures; mais il faut fe garder d’admettre une pareille
conféquence avant un nouvel examen.
Cette propriété de l’eau ne nous intéreffe pas
feulement par fes rapports avec l’état de l’athmof-
phère ; je ne doute pas que l’on n’en tire quelque
parti dans la fuite, quand ce ne feroit que pour
améliorer une quantité d’air, ou bien pour féparer la
portion d’air pur que recèleroit accidentellement le
gas azote que l’on deftineroit à des expériences délicates.
Au refte, je ne puis trop recommander,
dans tous ces effais , de tenir compte de la lumière,
dont l’influence, encore trop peu connue, peut feule
nous donner la clef d’un grand nombre de phénomènes
qui fe refufent jufqu’à préfent à toute explication.
J’ai déjà eu occafion de parler du moyen très-ingénieux
indiqué par Scheele pour manifefterla pré-
fence de l’air vital dans l’eau, 8c qui confifte à en
remplir un petit flacon dans lequel on ajoute un
cryftal de fulfate de fer, qui fe difiout fans troubler
la liqueur s’il n’y a point d’air ; qui dans le cas
contraire dépofe un oxide jaune. Voye^ r é a c t if s .
II. La chaux, la magnéfie, la baryte, dans la
claffe des terres , les alkalis 8c les oxides métalliques
ont une propriété commune qui les a fait appeller cauftiques.
Il n’eft rien de plus facile que de démontrer que
l’état de ces fubftances change par leur expofition à
l’a ir; elles en reçoivent donc quelque principe, c’eft
ce que nous allons examiner.
E x p é r i e n c e L.
On laiffe à l’air libre un morceau de chaux ou
de pierre calcaire récemment calcinée, dont on a pris
exaélement le poids’; au bout de quelques jours,
cètte chaux fe trouvera avoir acquis environ 0 ,18
de fon poids, elle aura recouvré la propriété de
faire effervefcence avec les acides, que la calcination
lui avoit enlevée; traitée de nouveau au feu dans
un appareil propre à recueillir ce qui s’en dégage,
elle fournira , comme auparavant, o , 11 de fon poids
d’eau infipide & 0 ,3 4 de gas acide carbonique. La
quantité de ce dernier fe détermine encore plus
exa&ement en diffolvant, à la manière de Bergman ,
la chaux ainfi éteinte à l’air dans un acide très-dé-
la y é , afin que le gas feul s’échappe du flacon, &
que la perte de poids en donne la mefure ( Voyeç ci-
devant page 81).
L’eau dans laquelle on a fait diffoudre un peu de
chaux, 8c que l’on a enfuite filtrée pour en féparer
ce qui n’eft pas véritablement diffous, met encore
plus en évidence cette recompofition de la chaux
avec le gas acide carbonique; abandonnée à l’air, il
s’y forme bientôt une pellicule faline qu’on a nommée
crème de chaux, qui eft du vrai carbonate de chaux
ou pierre calcaire régénérée.
Il en eft de même de la magnéfie & de la bary te»