
Hermftadt comme un faccharite calcaire avec
excès d’acide.
Pour mettre plus de clarté dans ladifcuflion de
cette queftion, ainfi que pour conserver l’ordre
des dates, je dois fufpendre ici l’analyfe du premier
mémoire de M. Hermftadt , pour faire con-
noître d’abord les expériences qui ont fait découvrir
à M. Schèele ce nouvel acide, & qui lui fervent
à établir fes caractères diftinclifs. J’examinerai
enfuite les preuves que M. Hermftadt a données
de fori opinion particulière, foit dans le mémoire
dont on vient de lire l’extrait, foit dans celui qu’il
a publié depuis pour foutenir cette opinion contre
les expériences de M. Schèele. En rapprochant
ainfi fes objeftions, je leur donnerai toute la force
dont elles font fufceptibles, & j’éviterai des répétitions.
fi. I I I . Expériences par lefquelles M. Schèele établit
Vexiflençc 6* les caraEleres dïflïnblïfs de l ’acide façh-
; la&ique.
A la vue de la matière terreufe pulvérulente
qui étoit reftée fur le filtre lors de la diffolution
du réfidu du fucre de lait traité avec l’acide nitreux
, M. Schèele penfa d’abord comme M.
Hermftadt, que ce pouvoit être du faccharite calcaire
, & que comme le lait tenoit toujours un peu
de cette terre * il étoit poflible qu’elle exiftât aufli
dans le fucre de lait, & formât par conféquent
une de fes parties conftituant.es qui auroit produit
ce fel par fon union avec l’acide faccha«*
tin. a Mais ( dit ce célèbre Çhymifte ) une fécondé
»? expérience me fit voir que je m’étois trompé ;
v car ayant verfé de l’acide faccharin dans une
9» diflolution de fucre de la it, je n’ai apperçu aucune
précipitation ».
Je ne crains pas de dire que cette obfervation
ifolée ne paroît pas mériter toute la confiance que
lui donne M. Schèele , fur-tout fi on fuppofe
avec lui que l’acide faccharin exifte tout formé
dans le fucre de lait ; car il eft évident que l’addition
d’une nouvelle portion du mêmç acide ne pouvant
former une combinaifon differente , ne s’unifiant au
fel que pour y porter excès de fon acide, ne feroit
par-là quefavorifer fa diflolution , au lieu de déçjder'
fa précipitation. Si l’on penfe avec nous que le fucre
de lait ne tient pas plus que le fucre ordinaire
Tacide faccharin tout formé, robfervatipn eft un peu
plus concluante , cependant pas encore décifiye ,
puifqu’il feroit poflible que l’union du calce avec les
autres parties conftituantes du fucre de lait fut telle
eue l’acide faccharin lui-même ne pût la rompre : or,
la poflibilité d'une çaufe différente fuffit pour faire
fufpendre les conséquences de l’effet.
Les preuves ultérieures , raffemblées par M*
Schèele,font d’un tout autre poids. i° .I l a jetté çette
fubftance «terreufe dans un creufet rougi, elle y a
frïûiè comme de l’huile , & a laiffé à peiné après elle
quelques traces de cendres ; ce n’eft pas ainfi que fe
comporte le faccharite calcaire ; j’ai vérifié qu’il
laiffbitiun réfidu de près de moitié de fon poids.
2®. Cette fubftance fe diflout dans 60 parties
d’eau bouillante ; un quart de la ponion diffoute fe
dépofe en cryftaux par le refroidiflement, & il en
refte les | dans l’eau froide , c’eft-à-dire, une partie
de cette terre dans 80 parties d’eau : o r , il eft certain
que le faccharite calcaire eft bien moins folu-
ble ; M. Bergman a obfervé qu’il ne l’étoit pas
davantage par l’intermède du fucre.
30. 240 grains de cette fubftance, purifiée par la
cryftallifation d’une petite portion d’acide faccharin
que les lavages y avoient laiffée , fut redifloute
par M. Schèele dans 14400 grains d’eau diftiilée
bouillante; la diflolution filtrée manifefta Une faveur
acide , rougit l’infufion de tournefol, & fit effer-
vefcence avec la craie : aucune de ces propriétés
n’appartient au faccharite calcaire ; & s’il emporte
accidentellement quelque peu d’acide furabondant,
il s’en dépouille complettement au premier lavage.
40. M. Schèele a diftillé à la cornue 120 grains
de cette fubftance; elle fe fondit très-promptement,
elle devint noire, & s’éleva confidérablement en
écume ; il fe fublima au col de la cornue un fel brun
qui avoit une odeur pareille à celle d’un mélange de
benjoin & de fuccin ; il refta 11 grains de charbon
au fond de la cornue. Le récipient contenoit une liqueur
brune fans aucune apparence huileufe ; elle
avoit le même goût que le fel fublimé ; elle tenoit
en effet de ce fe l, qui s’en fépara par une évaporation
lente. Le fublimé pefoit35 grains; il avoit
un goût acide ; il fut aifément diffous dans l’efprit-
de-vin » mais plus difficilement dans l’eau, & il
brûla fur le feu avec flamme. . . ,
5?. L’acide vitriolique concentré diftillé fur
ce fel , devint noir, fe couvrit de beaucoup d’eçur
mes, & le détruifit entièrement,
6°. Ce fel purifié, jetté peu-ji-peu dans une diflolution
chaude de potafle , jufqu’à ce qu’il n’y teut
plus d’effervefcence, produifit bientôt une quantité
de petits cryftaux. Ces cryftaux étoient parfaitement
neutres ; ils n’exigèrent que huit fois leur
poids d’eau pour leur diflolution ; quand l’eau fut
refroidie , la plus grande partie des cryftaux s’en
fépara de nouveau.
Cette fubftance fe çoippprta de même avec la
fopde ,mais on n’eut befpin qpe de pinq parties d’eau
pour difloudre une portjon dp cp fel*,
7 P. Cptte fubftance , fpturée d’alkali vola til,
donna un fel ammoniacal q u i, après une douce cal-
cinatipn, fe trouva acide. A la diftillation, il mont3
de Talkali volatil qui précipita l’eau de chaux.
8°. La même fubftance foripa avec les terres des
fels ipfolubles; fa diflolution aqueufe décompofa
le muriate barotique, le nitre calcaire, &c. mais
1 non le vitriol calcaire : ces diffolutions furent à lçur
I tour décompofées par le fel réfuftant de l’union de
I cette fubftance avpc l’alkalj,
9°, Enfin
9®. Enfin elle fe comporta avec les chaux métalliques
, comme avec les terres ; elle décompofa
de même plufieurs diffolutions métalliques,mais non
-celles de fer, de cuivre, de zinc & demanganèfe
-dans l’acide vitriolique, ni celles d étain 8c de mer-
,cure dans l’acide muriatique.
Telles font les propriétés par lefquelles M.
Schèele a cru reconnoître un nouvel acide , différent
..des autres acides connus , particuliérement de l’acide
faccharin ; & il faut convenir que cette conféquence
<eft affez bien établie. Ce n’eft pas de l’acide faccharin
; il n’en a ni la faveur, ni la forme , ni la folu-
bilité, ni la puiffance ; ce n’eft point du faccharite
calcaire ; celui-ci eft un fel neutre , fans faveur, ab-
folument infoluble. Seroit-ce réellement un faccharite
calcaire avec excès de fon acide ? mais il devroit
alors fe comporter comme ce fel qui feroit formé
par l’addition d’une portion furabondante d’acide
faccharin ; il devroit, en vertu de cet excès , agir
•comme cet acide, quand il eft libre , décompofer
le vitriol calcaire , les vitriols de cuivre, de fer ,
'de zinc , de manganèfe & le muriate mercuriel;1*
il devroit fur-tout laiffer fa bafe terreufe , lorfqu’il'
eft détruit & réfous en fes élémens aériformes,
foit par le. feu , foit encore mieux par l’acide vitriolique
; il devroit, avec les alkalis, produire deux fels
différens 8c diftinéls par leur folubilité, puifque l’on
fait que les alkalis ne peuvent enlever la chaux à
'cet acide ; & nous venons de voir que rien de tout
•cela n’arrivoit. Dira-t-on que le faccharite calcaire
agit dans ces circonftances comme diffolvant com-
pofé, qu’il forme des trifules , en prenant une autre
- î>afe ? Gette conjeélure n’auroit aucune apparence
de fondement, ou plutôt, elle feroit démentie par
Tim poflibilité de produire ces mêmes tels triples,
•, .en combinant direétèment les trois principes que
Ton y fuppofe,
Sufpendons néanmoins notre jugement jufqu’apr.ès
i ’examen des objections de M. Hermftadt.
§. IV.. Examen du fyfléme de M, Hermftadt,
I. On a vu que M. Hermftadt avoit,comme M.
Schèele , obtenu une fubftance terreufe du fucre de
la it, indépendamment de l’acide facharin en Cryftaux
, en traitant ce fel avec de l’acide nitreux.
1920 grains de fucre de lait donnèrent à ce Chy-
mifte 720 grains de cette fubftance. édulcorée &
jféchée , quantité qui excède de plus cl’un tiers la
proportion du produit de M, Schèele , ce qui
ne peut être attribué qu’à une décompofition
plus entière de ce fel. Il avoit d’abord décrit cette
fubftance , comme fe prèfentant en floccons affez
iendres,à-peu-près comme de très-petits cryftaux de
félénite , ayant un goût acidulé , que l’on ne pouvoit
lui enlever par l’ébullition , & infoluble dans
feàu : il a ajouté dans fon fécond mémoire , que
cei.te matière étoit une terre blanche, légère , rude
Au toucher , un peu fablonneule, comme le tartre
Çhymïe, Tome
■ calcaire; que, mife fur la langue, elle manifeftoit
un goût acidulé , mais plus foible que celui de
l’acidule tartareux ou crème de tartre ; qu’il y avoit
en même-temps lin goût terreux , difficile à déterminer
, approchant de celui du Gypfe crud; qu’elle
ne paroifloit pas fe diffoxidre dans la falive ; en un
mot, qu’elle avoit toute l’apparence du tartre calcaire
, ou du faccharite calcaire.
L’infolubilité dans l'eau étoit un article important
: M. Hermftadt eft revenu fur ce fujet, comme
nous allons le voir enïuivant 8c rapprochant les
expériences rapportées dans fes deux mémoires.
i° . 30 grains de cette 1 terre acide ( c’eft ainft
que je l’appellerai avec lui , jufqu’à ce que nous
ayons déterminé fa nature } furent mis en digef-
tion fur le feu dans 480 grains d’eau diftiilée , &
le mélange agité de temps en temps , il n’y en eut
que fort peu de diffous ; cependant, beau étoit acidulé;
elle avoir auffi le goût terreux , ce qui an-
non çoit qu’elle en avoit pris une certaine quantité
, en effet, le réfidu ne pefoit plus que 25 grains,»
Une autrefois , 960 grains -'d’ . au en ont diffous 12
grains de 30 , & les 18 reftans avoient le même*
goût acide, les mêmes .propriétés qu’auparavant.
Làdiffolution , réduite au par évaporation,.puis
mife au frais, a donné un léger dépôt qui étoit
toujours acide. La liqueur , évaporée à ficcité, a
laiffé un point faim brunâtre , qui avoit encore de
l’acidité , comme l’acidule tartareux , non purifié ,
& qui a formé un précipité lorfqu’on y a verfé de
l’èau de chaux.—
2°. Lors de fon premier travail fur le fucre de
lait, M. Hermftadt avoit fait brûler 240 grains de
cette terre acide dans un creufet qu’il avoit tenu
rcüge , jufqu’à ce qu’il ne s’en élevât plus de vapeurs
,. & il avoit trouvé un réfidu charbonneux
du poids de 80 grains. Ayant fait difloudre ce rè-
fidu dans l’acide nitreux, & filtré la diffolution,
il en avoit obtenu , par l’addition de l’alkali ,
. un précipité de terre calcaire blanche -, du poids
de 20 grains., & il étoit refté fur le filtre une
pouflière noire , qui lui avoit paru de l’acide
b r û l . è . r ■ ' ■ ; j .| * "1 '.
Ayânt mis un peu de'terre acide dans une cap-
fule de verre fur la flamme d’une chandelle , elle
• fe bourfoufla tout de fuite confidérablement ; il s’en
éleva des vapeurs fuffocantes ; elle coula enfuite
tranquillement en une matière brune , qui avoit le
goût du tartre non purifié : cette maffe«, jettée
immédiatement fur les charbons , tandis qu’elle
étoit encore fluide, s’alluma, brûla avec une flamme
bleue & pétillement , 8c laiffa à la. fin un charbon
léger infipide.
30. Pour fe rapprocher davantage de la manière
•d’opérer de M. Schèele , M. Hermftadt a diftillé à
la cornue , fans addition , 240 grains de cette terre
acide ; elle s’eft fondue , & a produit des vapeurs
fubtiles qui ont 1 empli la cornue & le récipient.
Ayant foütenu le feu jufqu’à ce qu’il ne s’élevât plus
rien, & donné fur la fin une chaleur très-forte y il